Contenu du sommaire : Les conventionnels

Revue Annales historiques de la Révolution française Mir@bel
Numéro no 381, juillet-septembre 2015
Titre du numéro Les conventionnels
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • ‪ACTAPOL : un chantier de recherche sur les conventionnels‪ - Michel Biard, Philippe Bourdin, Hervé Leuwers p. 3-9 accès libre
  • Articles

    • ‪La Convention nationale au miroir des Archives Parlementaires‪ - Corinne Gomez-Le Chevanton, Françoise Brunel p. 11-29 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les auteures, éditrices des Archives Parlementaires (Première série), présentent l'histoire mouvementée de cette collection fondée il y a 150 ans. À l'heure de la numérisation des grands corpus documentaires, elles soulignent les « moments » très diversifiés de cette source construite par des éditeurs, d'abord bibliothécaires ou fonctionnaires de la Chambre des députés, puis historiens de la Révolution française, soucieux de dénombrement et de cohérence sérielle. Il s'agit aussi de montrer comment la « colonne vertébrale » de cette construction, le procès-verbal, est d'une fiabilité douteuse à partir du début de thermidor an II. L'analyse de la construction post-thermidorienne jusqu'au tournant de brumaire-frimaire an III, marqué par l'exceptionnalité de fait du procès du représentant Carrier, pose alors un vrai problème épistémologique, dans des constructions politiques orientées.
      ‪The authors, the editors of the Archives Parlementaires (Première série), describe the eventful history of this collection founded a hundred and fifty years ago. At a time of the digitalization of large documentary collections, the authors underscore the highly diversified « periods » of this source compiled by its editors, first by librarians and civil servants of the Chamber of Deputies, then by historians of the French Revolution, concerned as these were, by the uniformity of the series. ‪The authors show how the « colonne vertébrale » of this construction, the report, is of doubtful reliability beginning in Thermidor an II. ‪The analysis of this post-thermidorian construction until the turning point of the months of Brumaire and Frimaire an III marked by its exceptional nature because of the trial of the deputy Carrier, posed an essential epistemological problem in the political construction – unmistakenly partisan. ‪
    • ‪La naissance de la Montagne dans l'espace public : un mot au service des conventionnels du côté gauche ou de la République ? Octobre 1792-janvier 1793‪ - Alexandre Guermazi p. 31-53 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Pour ceux qui s'en réclament, l'utilisation grandissante du mot « montagne » à partir du mois d'octobre 1792 révèle un projet d'organisation de l'espace public fondé sur la publicité des débats, la mise en réseau des députés et des citoyens, et la défense des principes liés à la résistance à l'oppression. Il est d'abord mobilisé par quelques conventionnels du côté gauche qui fréquentent le club des Jacobins afin de se démarquer de la ligne politique « brissotine », en particulier de l'opposition faite entre Paris et les départements. Introduisant le mot à la Convention pendant le procès du roi, ces mêmes conventionnels sont accusés de l'utiliser pour constituer une faction. Ils y répondent en multipliant les références sur leur hauteur de vue et sur la défense du peuple. Un transfert a lieu à partir du mois de novembre. Lorsque les sections parisiennes fraternisent avec les fédérés des départements présents dans la capitale, ils ne prononcent pas systématiquement le mot. Cependant, ils développent pleinement ses usages unificateurs qui s'incarnent dans les fêtes patriotiques successives du mois de janvier 1793. Ils affirment ensemble faire République, et rallient alors les conventionnels, toutes tendances confondues.

      ‪The increasing use of the word « mountain » or « montagne », beginning in October 1792, reveals a plan for the organization of public space based on the publicity of debates, the creation of networks among deputies and citizens, and the defense of principles linked to the resistance to oppression. ‪Such usage was first employed by some deputies on the Left who frequented the Jacobin club to differentiate the political line of the Brissotins, particularly the opposition between Paris and the departments. Introducing this term in the Convention during the trial of the King, these same deputies were accused of using it to constitute a faction. They responded by multiplying the references of their lofty point of view, and about their defense of the « People». A transfer took place from November onwards, when the Parisian sections fraternized with the fédérés from the departments then in the capital. Without pronouncing the word, systematically, they nonetheless clung to the practice by developing fully the unifying usages that emerged in the successive patriotic festivals on January 1793. Together, they affirmed the establishment of the Republic, and thus rallied the deputies of diverse political tendencies.
    • ‪Y a-t-il des mots des montagnards ? Le lexique et les choix politiques montagnards‪ - Marco Marin p. 55-76 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans notre article, nous analysons le rapport entre les choix et actions politiques et le discours, en considérant le discours lui-même comme une action. Nous focalisons d'abord notre attention sur l'histoire des désignants politiques « Montagne », « Gironde » et « sans-culottes », qui nous paraissent relever d'un système complexe d'hétéro-désignation et d'auto-désignation. Une fois acceptés, ces mots sont employés par tous les acteurs politiques. Il en va de même, d'ailleurs, de certaines notions comme l'apologie de la « pauvreté » et de la « médiocrité », qui ne sont pas exclusivement le fait de la Montagne. Pour autant, cette dernière se distingue par l'usage de certaines expressions, comme le démontre son invitation à « républicaniser le commerce ».
      ‪In this article, I analyze the relationship between choice and political action, as well as discourse by considering discourse itself as a form of action. I will focus on the history of the political labels, « montagne », « gironde » and « sans culottes » that appear to belong to a complex system of labeling used by these groups, themselves, as well as by others. Once accepted, these words were used by all the political actors. It goes without saying, moreover, that certain notions such as the apology for « poverty», and that of « mediocrity» are not exclusively Montagnard. Yet, the Mountain did distinguish itself by certain expressions, as the invitation to «républicaniser le commerce », demonstrates.‪
    • ‪« Elle n'a pas même épargné ses membres ! » Les épurations de la Convention nationale entre 1793 et 1795‪ - Mette Harder p. 77-105 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Entre 1793 et 1794, la Convention nationale expulse un grand nombre de représentants du peuple de son sein. Accusés de crimes politiques, des députés girondins, dantonistes et, finalement, robespierristes, sont arrêtés, mis en prison et souvent traduits au Tribunal révolutionnaire et condamnés à mort : « La Révolution dévore [non seulement] ses enfants », mais détruit aussi ses dirigeants principaux et une partie importante de la nouvelle élite politique républicaine. François Furet regardait ces épurations des hommes politiques comme les conséquences immédiates d'une idéologie jacobine et terroriste qui voyait des complots partout et insistait sur la nécessité de « régénérer » le corps politique jusqu'à la personne même du représentant du peuple. Cette théorie n'explique pourtant pas la continuation d'une politique épuratoire à la Convention après la chute des robespierristes. Pourquoi plus de cent conventionnels deviennent-ils les victimes d'une nouvelle vague d'arrestations après la fin de la Terreur ? Le but de cet article sera d'identifier des continuités entre les épurations successives des conventionnels sous la Terreur et la réaction, et, d'autre part, entre les politiques épuratoires de ces deux périodes.
      ‪Between 1793 and 1794, the National Convention purged a considerable number of representatives from its midst. ‪Accused of political crimes, Girondin, Dantonist, and, finally, Robespierrist deputies were arrested, imprisoned, and frequently sent before the Revolutionary Tribunal and sentenced to death : « The Revolution devoured (not only) its children », but destroyed also its principal leaders and an important part the republic's new political élite. François Furet regarded these purges of politicians as the direct consequences of a Jacobin and terrorist ideology that perceived plots everywhere and insisted on the necessity to « regenerate » the body politic even amongst the representatives of the people. This theory, however, does not explain the continuation of the politics of purging at the Convention long after the Robespierrists' fall. Why did more than 100 Conventionnels become the victims of a new arrest wave after the Terror ? The aim of this article is to identify continuities between the successive purges of Conventionnels during the Terror and the Reaction, and as such, between the politics of purging of those two periods.
    • ‪Femme de conventionnel : un enjeu politique dans la république ?‪ - Anne Jollet p. 107-127 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article veut interroger les fonctions des « femmes de » dans le contexte de la Révolution française et, ici, plus spécifiquement de la Convention nationale. En étudiant la place que les épouses de député occupent dans la vie politique particulièrement passionnée et conflictuelle de l'époque de la Convention, il ne s'agit pas seulement d'aborder la question des entourages des élus, mais aussi de problématiser la question de l'espace que ces épouses peuvent occuper par elles-mêmes. Il s'agit de ne pas les installer d'emblée dans la dépendance, mais d'étudier comment certaines d'entre elles peuvent se saisir de l'égalité revendiquée et en cours d'acquisition de la femme mariée pour développer leur initiative politique propre. Ces actions politiques dans l'espace public de la « femme de », que nous aborderons ici à partir de l'exemple d'Adélaïde Guéritault, épouse du conventionnel de la Vienne, François Piorry, permettent de comprendre la façon dont la lecture sociale individualiste des révolutionnaires se combine avec le poids de longue durée d'un familialisme, porteur d'interdépendance et de co-responsabilité sociale qui, pour longtemps, bridera la possible expression politique des « épouses de ».
      ‪The article examines the role of the wives in the context of the French Revolution, specifically during the National Convention. ‪By studying the place that deputy's wives held during the particularly passionate and conflictual politics of the period of the Convention, it not only broaches the question of the entourage of those elected to public office, but it also conceptualizes the question of the « space » that the wives might occupy by themselves. It is important not to place them automatically in the role of dependency, but rather to study how certain among them might obtain a much-demanded equality, and in the course of this acquisition by a married women, develop their own political initiative. These political actions in the public space afforded by « the wife of » that I am examining here by the example of Adélaïde Guéritault, the wife of the deputy from the department of the Vienne, Francois Piorry, permits an understanding of the way that a social reading of the revolutionaries combines with prolonged familiarity as the agent of interdependency and co-responsibility, which for a longtime, restricted possible political expression of the « wives of ».
    • ‪Présider les séances de la Convention nationale‪ - Vincent Cuvilliers, Matthieu Fontaine, Philippe Moulis p. 129-153 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Lors de la séance du 21 septembre 1792, Collot d'Herbois propose l'abolition de la royauté ; après quelques débats, elle est acceptée à l'unanimité, malgré les réserves d'un Quinette suscitant des murmures d'improbations. L'entrée en république, cependant, crée un vide, et pas seulement parce que l'exécutif est à rebâtir. Dans les circonstances nouvelles, le président de la Convention conserve-t-il le même rôle, les mêmes pouvoirs et la même image que ses prédécesseurs ? Étudier les quatre-vingt onze députés qui ont assuré, un moment ou un autre, la présidence de cette Assemblée révolutionnaire, c'est s'interroger sur l'origine de ces hommes, sur leurs convictions et leurs pouvoirs, mais aussi sur les moyens dont ils disposaient pour assurer des débats ordonnés et sereins.‪
      In the session of September 21, 1792, Collot d'Herbois proposed the abolition of the monarchy. ‪After some debate, the proposal was unanimously accepted, the reservations of Quinette having aroused disapproving murmurs. The transition to the Republic, however, created a vacuum, and not only because the executive power had to be reconstructed. In these new circumstances, would the president of the Convention retain his same role, the same powers, and the same image of his predecessors ? To study the ninety-one deputies that at one time or another occupied the presidency of this revolutionary assembly involves not only examining their social origins, their convictions, their powers, but also considering the means these men possessed to ensure that debates remained orderly and calm.
    • ‪Démocratie tronquée, Convention transparente. Les Deux Tiers au crible des déclarations individuelles d'état-civil et de patrimoine‪ - Philippe Bourdin p. 155-187 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À l'heure de se séparer et d'appliquer le décret des deux-tiers, les conventionnels doivent se compter, ce qui les incite à déclarer leur état civil, leur raison familiale et sociale. Devant les attaques des milieux royalistes, ils doivent aussi prouver leur vertu, et décident en vendémiaire an IV de rendre publics leurs revenus et leur patrimoine. Les listes établies, surtout les secondes, sont incomplètes – des ténors des tribunes se font des plus discrets. Elles en disent pourtant long sur les conséquences des purges politiques, qui ont remis progressivement en cause le vote de 1792 et déséquilibré les représentations départementales. Elles permettent de dessiner une sociologie de la Convention, une hiérarchie et une structure des fortunes. Celles-ci ne reposent pas uniquement sur la terre, mais aussi sur des investissements financiers, et sur une grande habitude des échanges et des transferts de capitaux, avant même les opportunités offertes par la vente des biens nationaux. Enfin, les tableaux familiaux qui en ressortent en disent long sur la pyramide des âges, sur le poids du célibat, sur la partition sexuée des fonctions ou le partage de la misère politique et pécuniaire quand l'inflation de l'an III rend très difficile la vie à Paris.
      ‪At the time that the Convention was drawing to a close, and the decree of the Two-Thirds applied, the deputies had to be counted, which led them to record their etat-civil, their family and their social status. ‪Confronted by attacks from royalist circles, they also felt obliged to prove their « vertu », and they decided in vendémiaire an IV to make public the details of their revenue and the value of their estates. These lists, especially the second category, are incomplete – the leading orators of the tribunes showed themselves to be exceptionally discreet in this respect. This says a great deal about the consequences of political purges that gradually called into question the vote of 1792, and destabilized the departmental deputations. With these lists, it is possible to establish a sociology of the Convention, including a hierarchy and structure of wealth. Such information is not based exclusively on land, but also on financial investments, and on the long-standing practice of financial exchanges and transfers of capital, even before the opportunities afforded by the sale of national properties. The collective family portraits that emerged from these lists are highly informative about the ages, the burdens of celibacy, the sexual divisions and roles, the shared political and monetary misery when the inflation of the Year Three made life in Paris extremely difficult.
    • ‪La Convention interminable : les régicides au tribunal du passé (1815-1830)‪ - Côme Simien p. 189-211 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La loi d'amnistie du 12 janvier 1816, qui exclut à perpétuité du territoire national les conventionnels régicides qui se sont ralliés aux Cent-Jours, engage les autorités de la Restauration, en quelques semaines, dans un important travail d'investigation historique et mémorielle sur le passé révolutionnaire des anciens députés de la Convention. Ceux-ci, par ailleurs soumis, désormais, à une surveillance permanente, se retrouvent non seulement prisonniers du passé, mais encore prisonniers de la politique (toutes leurs actions, tous leurs déplacements, toutes leurs fréquentations sont analysés au prisme du complot politique). Les implications de cette « pathologie mémorielle » de la Restauration, qui affecte aussi bien les députés condamnés à l'exil que ceux qui bénéficient a priori du pardon royal, sont loin de n'être que théoriques. Le présent article se propose donc d'interroger les formes, les sens et les conséquences de cette impossible mémoire apaisée de la Convention, en analysant plus particulièrement les trajectoires des anciens députés de l'Ariège, de l'Aude et des Pyrénées-Orientales de 1815 à 1830.
      ‪The Amnesty Law of 12 January 1816, which perpetually excluded from France regicide deputies who rallied to Napoleon during the Hundred days, compelled the authorities of the Restoration to undertake within a few weeks a major work of historical investigation and memory about the Revolutionary pasts of former deputies of the National Convention. ‪These members, from now on subject to permanent surveillance, found themselves not only prisoners of their pasts, but also prisoners of politics (all their actions, all their movements, all their associations were analyzed through the prism of a political plot). The implications of this « pathological memory » of the Restoration, that affected those deputies condemned to exile, as well as those who benefited a priori from a royal pardon, are far from being purely theoretical. This article examines the nature, the meaning, and the consequences of this unappeased memory of the Convention by analyzing specifically the careers of former deputies from the Ariège, the Aude, and the Pyrénées-Orientales from 1815 to 1830
    • ‪Des lettres de conventionnels à leurs concitoyens : une interface dans un processus de politisation réciproque‪ - Anne de Mathan p. 213-239 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les 128 lettres adressées par les conventionnels du Finistère – Claude Blad, Jacques Guermeur et parfois même l'ensemble de la députation – à leurs concitoyens, du début de la session jusqu'à la fin de l'an II, constituent une interface de politisation interagissant sur chacune des parties ainsi mises en relation, par-delà la distance géographique. Cette correspondance en cours de publication permet en effet d'observer les relations entre Paris et province, la constitution des identités politiques à l'Assemblée ainsi que les stratégies parlementaires, les sociabilités et la vie quotidienne des députés, ou encore les vecteurs de diffusion de l'information ou le rôle des émotions en politique, mais elle éclaire surtout les processus de politisation des électeurs et des élus. Elle révise la vision simpliste selon laquelle le fil conducteur de l'initiative politique descendrait de Paris vers la province, des députés supposés plus politisés, vers une opinion publique que son ignorance et sa crédulité rendraient malléable à toutes les préconisations de ses élus.
      ‪The 128 letters from the deputies of the department of the Finistère – Claude Blad, Jacques Guermeur and at times even the entire deputation – to their fellow citizens from the beginning of the Convention until the end of the Year Two form an interface showing the relationship between each of these persons who were widely separated geographically. ‪This correspondence currently being published illuminates the relationship between Paris and the provinces, the make-up of political identities in the Assembly, as well as parlementary strategies, sociabilities, and the daily life of the deputies. It shows the means by which information was transmitted, and the role of emotions in politics. And it clarifies, above all, the process of politization of the voters and those elected to public office. The correspondence revises the simplistic view that political initiative emanated from Paris towards the provinces, the deputies allegedly more politicized than their electorate, who by its ignorance and credulity were easily open to manipulation by those in public office.
  • Comptes rendus