Contenu du sommaire

Revue Revue française d'économie Mir@bel
Numéro Vol. XXX, no 2, octobre 2015
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Macro-expérimentation autour des fonctions des banques centrales - Camille Cornand, Frank Heinemann p. 3-47 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'expérimentation en macroéconomie est un domaine en pleine expansion. Cet article défend le point de vue selon lequel les expériences de laboratoire peuvent représenter un outil à la disposition des banquiers centraux et passe en revue la littérature expérimentale consacrée à l'analyse des fonctions des banques centrales. Sont ainsi abordées successivement les études relatives aux canaux par lesquels la politique monétaire affecte les comportements, aux processus de décision et à la mise en œuvre de la politique des banques centrales. L'article conclut sur les limites et perspectives de cette approche.
    Macro-Experiments in Central Banking. Experimental macroeconomics is a fast growing field. This paper argues that laboratory experiments can represent a tool for central bankers and reviews the experimental literature on central banking issues. We successively focus on studies related to the monetary policy channels, the decision making process inside central banks, and the implementation of central banks' policy. We conclude the paper by mentioning open issues and raising new avenues for future research.
  • Les mystères de la liquidité. Plaidoyer pour la « bonne » transformation bancaire - Olivier Davanne p. 49-91 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Comment le système financier peut-il assurer un financement stable des investissements physiques, tout en satisfaisant l'exigence de liquidité des investisseurs financiers qui souhaitent généralement pouvoir récupérer leurs fonds en cas de besoin ? Cet article examine le rôle des différents intervenants dans ce qui ressemble à une mystérieuse quadrature du cercle. Les marchés secondaires de titres, les fonds collectifs d'investissement et les banques fournissent de façon complémentaire ou en compétition les uns avec les autres ces services de liquidité. Pour ces dernières, nous distinguons la « bonne » de la « mauvaise » transformation bancaire. La première est celle que les banques réalisent en portant des prêts dans leur bilan et en émettant en contrepartie des titres longs (actions, obligations) assez facilement négociables sur les marchés secondaires. A partir de prêts peu négociables aux ménages ou aux entreprises, les banques « fabriquent » ainsi des titres à moyen terme de risques variables (actions, obligations senior ou subordonnées, covered bonds) et à la liquidité considérablement améliorée. Mais les banques ne s'arrêtent généralement pas à cette première étape de transformation : elles procèdent aussi à des titrisations et surtout à de la transformation de maturité, en finançant à court terme les prêts à long terme. Nous insistons ici sur le rapport coût/bénéfice négatif de cette dernière « couche » de transformation : elle encourage le « court-termisme » des investisseurs, rend les banques vulnérables aux « runs » et nourrit le risque systémique. Nous soulignons aussi la responsabilité des pouvoirs publics dans les graves dysfonctionnements observés sur le marché de la liquidité. La fiscalité et le relatif laxisme observé dans la régulation des fonds d'investissement pénalisent la « bonne transformation » bancaire en encourageant la désintermédiation (i.e. les fonds collectifs d'investissement et les marchés secondaires au détriment des banques). Ces distorsions néfastes devraient être corrigées. En parallèle, de généreux prêteurs en dernier ressort subventionnent et encouragent la transformation de maturité en assurant les banques contre les risques de « run ». Ils sèment ainsi les germes de la crise suivante. Un autre mode de gestion des crises de liquidité semble cependant possible.
    The Liquidity Mysteries. Pleading for the « Right » Banking Transformation. How does the financial system ensure a stable funding of physical investments, while meeting the liquidity requirement of financial investors, who generally want to be able to get back their funds if needed ? This article examines the role of different market participants in what looks like mysterious efforts to square the circle. The secondary securities markets, collective investment funds and banks provide complementary or in competition with each other these liquidity services. For the latter, we distinguish the « right » from the « bad » banking transformation. The first is what banks realize when they keep loans on their balance sheets and issue in exchange some long securities (stocks, bonds) quite easily marketable in secondary markets. From hard to negotiate loans to households and companies, banks are able to « manufacture » medium-term securities of varying risks (equities, senior or subordinated bonds, covered bonds) and with a much improved liquidity. But banks do not usually stop at this first stage of transformation : they also carry out securitisations and more importantly proceed to maturity transformation, i.e. short-term financing of long-term loans. We insist here on the negative cost-benefit ratio of this last « layer » of transformation : it encourages the « short-termism » of investors, makes banks vulnerable to « runs » and nourishes systemic risk. We also emphasize the responsibility of the authorities in the severe dysfunctions observed in the liquidity market. The tax system and the loopholes observed in the regulation of investment funds penalize the « right” banking transformation and encourage the disintermediation process (i.e. collective investment funds and secondary markets at the expense of banks). These harmful distortions should be corrected. In parallel, the generous lenders of last resort subsidize and encourage the transformation of maturity by protecting banks against the risk of « run ». They are thus sowing the seeds of the next crisis. Yet, other better ways to manage liquidity crisis seem possible.
  • Le ciblage d'inflation dans les économies émergentes - Yannick Lucotte p. 93-128 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Depuis son adoption par la Nouvelle-Zélande en 1990, le ciblage d'inflation a connu un succès grandissant auprès des banques centrales, particulièrement au sein des économies émergentes. On dénombre aujourd'hui 26 pays cibleurs d'inflation, dont près des trois quarts sont des émergents. Malgré des résultats encourageants, son adoption par cette catégorie de pays pose toujours un certain nombre de questions étudiées de près dans la littérature académique. L'objectif de cet article est de passer en revue les débats qui entourent l'adoption et la conduite d'une politique de ciblage d'inflation par les pays émergents. Une place toute particulière est accordée à la question du cadre institutionnel, en analysant dans quelle mesure ce dernier a pu jouer sur la crédibilité et les performances de cette stratégie de politique monétaire au sein des économies émergentes.
    Inflation Targeting in Emerging Economies. Since its adoption by New-Zealand in 1990, inflation targeting is becoming increasingly popular among central banks, especially in emerging economies. Today 26 countries use inflation targeting, and about three quarters of them are emerging countries. Despite promising results, the adoption of this monetary policy framework by this category of countries still raises a number of issues and is the subject of an active academic debate. The aim of this article is to examine the experience of non-industrial inflation targeting countries and to provide an overview of discussions surrounding the conduct of inflation targeting by these economies. In particular, this paper discusses the institutional requirements for monetary policy credibility and successful inflation targeting.
  • L'épargnant propriétaire face à ses vieux jours - André Masson p. 129-177 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Près des trois quarts des épargnants seniors français sont propriétaires de leur logement. Tout en restant chez eux jusqu'à leur décès, ils pourraient rendre liquide ou mobiliser leur patrimoine immobilier pour financer les besoins d'une durée de retraite de plus en plus longue. Les produits viagers gagés ainsi sur le logement sont cependant peu diffusés. Le viager traditionnel sur les marchés de gré à gré, où le vendeur et l'acheteur sont tous deux des particuliers, souffre d'une image désuète et d'une réputation peu flatteuse. Le prêt viager actuel présente des inconvénients majeurs tant du côté de la demande, parce qu'il met sous tension les relations familiales, que du côté de l'offre, parce que, contracté trop tôt, il porte sur des espérances de vie trop longues. Notre analyse montre tout d'abord comment la rationalité pratique de l'épargnant contribue à expliquer, pour des raisons différentes, la faible demande de la rente viagère et des produits viagers gagés sur le logement. Elle propose ensuite deux nouveaux produits, mieux adaptés à cette rationalité : le viager mutualisé, que nous appellerons « viage », est censé remédier à nombre d'inconvénients du viager traditionnel grâce à une offre d'achat institutionnelle bien régulée ; le prêt viager-dépendance réversible, accordé seulement en cas de dépendance dûment constatée, constituerait une alternative crédible à l'assurance dépendance. Dans les deux cas, on précise les conditions, juridiques, fiscales et institutionnelles, qui permettraient la diffusion du produit à une échelle significative.
    The Home-Owner Saver Facing the Needs of his Old Age. Nearly three quarter of French older households own their home. While still remaining at home until death, they could get cash or life annuity from their real estate assets in order to finance their needs over an increasingly long retirement period. The “life products” backed on housing are not very widespread, however. The traditional “viager”, where the buyer and seller are both private individuals, suffers from an outdated image and an unflattering reputation. The reverse mortgage has major disadvantages both on the demand side, because it puts pressure on family relationships, and on the supply side, because, contracted too early, it relates to too long life expectancies. Our study first shows that saver's practical rationality helps explain, for different reasons, the weak demand for life annuity and life products backed on housing. It then proposes two new products, better suited to this rationality : the “pooled viager”, which I call viage, is supposed to overcome many disadvantages of the traditional viager through a well-regulated institutional supply ; a specific reverse mortgage product, granted only in case of duly established dependency and reversible, constitutes a credible alternative to long-term care insurance. In both cases, I indicate the legal, fiscal and institutional conditions required to significantly increase the distribution of the product.
  • Une analyse économique du phénomène de la longue traîne dans les industries culturelles - Marc Bourreau, Sisley Maillard, François Moreau p. 179-216 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Depuis la fin des années 1990, les technologies numériques ont transformé la chaîne de valeur des industries culturelles en introduisant de nouveaux modes de création, de distribution et de promotion des biens. Le concept de la longue traîne (Anderson [2004]) pose que la numérisation de ces industries va aussi modifier la distribution du succès entre les productions culturelles : le développement d'Internet et du commerce électronique conduirait à un accroissement de la part de marché des produits les moins populaires, les biens de niche, dont l'exploitation générerait à terme des profits au moins comparables à ceux des best-sellers. Cet article propose une analyse économique de la longue traîne. Après avoir présenté les résultats empiriques mitigés de la littérature sur l'importance du phénomène de longue traîne dans les industries culturelles, nous analysons les mécanismes économiques qui peuvent contribuer à son développement. Nous discutons aussi les implications stratégiques de la longue traîne pour les entreprises des industries culturelles.
    An Economic Analysis of the Long Tail Phenomenon in Cultural Markets. Since the 1990s, digital technologies have transformed the value chain in cultural industries by introducing new ways of creating, distributing and promoting information goods. The concept of the Long Tail (Anderson [2004]) states that the development of Internet and e-commerce should lead to an increase in market share of less popular products (i.e., niche products), whose sales are expected to generate profits at least comparable to that of bestsellers. In this paper, we propose an economic analysis of the Long Tail. We first present the mixed empirical results of the literature on the magnitude of the Long Tail phenomenon in cultural markets, and then analyze the economic mechanisms that can contribute to its development. We also discuss the implications of the Long Tail for firms' strategies in cultural industries.
  • L'impact économique du droit de préemption dans une procédure de vente - Karine Brisset, François Cochard, François Maréchal p. 217-255 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le droit de préemption ou de premier refus consiste à accorder la priorité d'achat d'un bien à une personne physique ou morale au meilleur prix proposé par un tiers. Il constitue une clause spécifique dans de nombreux contrats privés. Cet article analyse les incitations des parties qui contractent à inclure une telle clause a priori. Il examine ensuite les incitations d'un vendeur à accorder ce droit lorsqu'il n'est pas engagé contractuellement. Les conséquences externes de ce droit sont également étudiées. Enfin, une forme différente, le droit de première offre, fait l'objet d'une analyse spécifique.
    The Economic Impact of a Right of First Refusal Clause in a Sale. The right of first refusal clause entitles its holder to purchase an asset on the same terms as those accepted by a third party. This paper first analyses parties' incentives to include this clause in a private contract. It then examines the seller's incentives to grant this right when he is not committed a priori. The external consequences of this right are also studied. Finally, the paper focuses on the right of first offer, which requires the seller to first offer the right-holder to buy the asset, and prohibits him from subsequently selling it to another buyer on better conditions.