Contenu du sommaire : Ma cité s'organise

Revue Mouvements Mir@bel
Numéro no 85, mars 2016
Titre du numéro Ma cité s'organise
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier : Ma cité s'organise. Community organizing et mobilisations dans les quartiers populaires

    • Éditorial - Hélène Balazard, Marion Carrel, Simon Cottin-Marx, Yves Jouffe, Julien Talpin p. 7-10 accès libre
    • Community organizing : généalogie, modèles et circulation d'une pratique émancipatrice - Julien Talpin, Hélène Balazard p. 11-25 accès libre avec résumé
      Le community organizing cherche à mobiliser un public large et diversifié pour obtenir des changements sur des enjeux tels le logement, les salaires, l'emploi, la sécurité ou l'exclusion politique. En France, comme dans de nombreux pays, on observe un intérêt grandissant pour cette forme d'organisation de la société civile. Cet attrait se traduit notamment par une grande diversité de démarches se référant plus ou moins directement au community organizing. Cet article propose un panorama et une grille de lecture de ces différentes pratiques. Il revient sur la généalogie, les différents modèles et les enjeux de la diffusion de cette approche visant l'émancipation des classes populaires.
    • Expériences de community organizing en France - Marion Carrel, Adeline de Lépinay p. 26-30 accès libre avec résumé
      Le community organizing est une source d'inspiration pour certain.es militant.es. En amont de la table ronde de ce numéro, et à partir de courts entretiens réalisés avec ses participant.es, nous esquissons ici le portrait de trois organisations françaises qui s'inspirent de cette tradition : l'Alliance Citoyenne de Grenoble, Zonzon 93 et Studio Praxis.
    • Le community organizing en France : quel projet politique ? : Table ronde avec Laëtitia Nonone, Adrien Roux et L. Real - Marion Carrel, Adeline de Lépinay p. 31-51 accès libre avec résumé
      Alors que des campagnes inspirées du community organizing commencent à se développer en France, la curiosité et les attentes sont grandes. En quoi ces expériences constituent-elles des démarches de politisation, d'éducation populaire dans les quartiers populaires ? La question démocratique dans le mouvement social est-elle renouvelée ? Au-delà du pragmatisme clairement revendiqué, quel est le projet politique ? Quel est le levier utilisé pour mobiliser : injustices sociales, discriminations ? Nous avons souhaité donner la parole à trois pionniers du community organizing en France : Laëtitia Nonone, présidente de l'association Zonzon 93 à Villepinte, L. Real, consultant à Studio Praxis et l'un des organisateurs de la campagne nationale Stop le contrôle au faciès, et Adrien Roux, co-fondateur et organisateur au sein de l'Alliance citoyenne de l'agglomération grenobloise et du Réseau pour l'action collective transnationale (ReACT).
    • Community organizing : une méthode « résolument américaine » ? : Saul D. Alinsky et le mariage fécond de la sociologie urbaine et des tactiques syndicales - Adrien Roux p. 53-64 accès libre avec résumé
      Le community organizing est une méthode étiquetée anglo-saxonne. Pour la définir indépendamment du contexte social et culturel dans lequel elle s'est appliquée, l'auteur propose d'en faire la généalogie et de montrer qu'elle est le fruit d'un mariage improbable entre la sociologie urbaine et le syndicalisme : la compréhension fine des relations sociales d'une part et l'utilisation de tactiques de pression du type de celles des syndicats face à l'employeur pour obtenir des compromis d'autre part. Une fois cette double dimension comprise et intégrée, les réflexions sur l'importation de ces méthodes pour irriguer le mouvement social européen prennent une nouvelle perspective.
    • L'organisation communautaire : une nouvelle approche du travail social ? : Entretien avec Claire et Samia, organisatrices salariées de Si on s'alliait ? - Yves Jouffe p. 65-70 accès libre avec résumé
      Une expérience d'organisation communautaire a vu le jour en janvier 2014 dans les quartiers rennais : Si on s'alliait ? (SOSA). Cinq organisatrices et organisateurs s'y inspirent de la démarche de l'Alliance citoyenne de Grenoble. Deux d'entre elles décrivent ici quelques ficelles du métier d'organisateur. Des affinités mais aussi des tensions existent entre community organizing, éducation populaire et un travail social jugé trop paternaliste. Les formes de mobilisation expérimentées à Rennes par SOSA, aussi éprouvantes soient-elles, apparaissent comme de réels vecteurs de transformation sociale.
    • Experts en mobilisation des pauvres ? : La professionnalisation du community organizing à Chicago - Clément Petitjean p. 71-79 accès libre avec résumé
      Si les pratiques militantes du community organizing font l'objet de plus en plus d'analyses empiriques, la question de la professionnalisation de cette forme de militantisme est souvent peu abordée. On se focalise sur la cause, laissant ainsi dans l'ombre les entrepreneurs de cause. Or l'appréhension des dynamiques de professionnalisation du community organizing et de la constitution d'un groupe de professionnels de la mobilisation des classes populaires apparaît nécessaire pour penser les modalités d'action collective des dominés et la lutte contre la dépossession politique.
    • Faire « avec » les habitants. « Pouvoir d'agir » et renouvellement des pratiques des centres sociaux - Guillaume Coti p. 80-86 accès libre avec résumé
      Faire « pour » ou « avec » les habitants ? Cette question interroge certains militants et salariés des centres sociaux qui ne se contentent plus de la position de prestataire des politiques sociales à laquelle ils sont cantonnés. Guillaume Coti, ancien directeur d'un centre social parisien, nous livre ici un panorama des tensions dans lesquelles sont prises ces structures. À travers plusieurs exemples et son expérience il nous montre aussi comment les notions de « pouvoir d'agir », de « community organizing » viennent inspirer et renouveler les pratiques.
    • Joseph Wresinski : pionnier de l'empowerment radical made in France - Alex Roy p. 87-94 accès libre avec résumé
      L'engouement actuel pour les pratiques d'empowerment et de community organizing pose la question de la filiation américaine des stratégies d'émancipation radicale. Pourtant, n'existe-t-il pas des initiatives d'empowerment radical made in France ? La mise en parallèle du projet de société et des principes d'action développés par Joseph Wresinski avec ceux de Saul Alinsky et de Paulo Freire permet de répondre positivement à cette question. Le fondateur d'ATD Quart Monde (Aide à Toute Détresse, devenu Agir Tous pour la Dignité Quart Monde) défend en effet une révolution culturelle et démocratique à partir de l'émancipation politique des plus pauvres. À l'heure où beaucoup s'interrogent sur la transposition à large échelle des pratiques de community organizing en France, l'expérience des pionniers français de l'empowerment radical mériterait ainsi plus d'attention.
    • Reconquérir la jeunesse des cités ? : Enjeux et contradictions d'un Conseil Local des Jeunes dans une municipalité communiste - Samir Hadj Belgacem p. 95-103 accès libre avec résumé
      Les démarches participatives à destination des jeunes comme les conseils de jeunes offrent des outils pour la socialisation civique autour de l'accès aux droits et d'une sensibilisation au fonctionnement des assemblées municipales. Cependant, ces dispositifs marqués du sceau de l'éducation populaire répondent aussi à des objectifs politiques et partisans et soumettent leurs participant.es à de vives tensions. L'étude de la mise en place du CLJ au Blanc-Mesnil révèle les difficultés des élu.es de la majorité municipale communiste à accepter les velléités d'autonomie et le discours critique de jeunes de cités. Cette expérience conflictuelle contribue in fine à renforcer ses participant.es dans leur défiance vis-à-vis des institutions politiques et des élu.es.
    • Community organizing, pansement aux politiques néolibérales ou révolution lente ? - Hélène Balazard, Robert Fisher p. 105-113 accès libre avec résumé
      Au Royaume-Uni, le programme conservateur de la Big Society mis en place par le précédent gouvernement Cameron (2010-2015) et Citizens UK, une community organization suivant le modèle initié par Alinsky, ont en commun une rhétorique de responsabilisation des « communautés » (communities). Les citoyens doivent être capables de s'« organiser » pour résoudre les problèmes rencontrés. Cette rhétorique est ambivalente et ces deux démarches peuvent tout autant être interprétées comme un pansement accompagnant les politiques néolibérales que comme un pas vers l'émancipation des classes populaires.
    • Les luttes émancipatrices à l'heure de l'État néo-managérial : l'exemple de VANDU - Anaïk Purenne p. 114-121 accès libre avec résumé
      À travers l'exemple des mobilisations d'usagers de drogues à Vancouver, cette analyse montre comment le répertoire du community organizing peut accroître la capacité d'action collective des personnes les plus marginalisées et les aider à promouvoir des visées d'émancipation et de démocratisation. Les luttes en question ont contribué au développement d'un « mouvement de libération des utilisateurs de drogues » qui, par ses campagnes en faveur de l'ouverture du premier site légal d'injection supervisé en Amérique du Nord, deviendra en quelques années l'un des plus importants mouvements d'usagers de drogues. Mais cet exemple témoigne aussi de la difficulté de garder le cap sur ces visées quand la valorisation de l'autonomie et de la responsabilité individuelle s'impose comme un nouvel air du temps. À l'heure de l'action publique néo-managériale, une voie possible peut alors consister à prendre l'État au mot en retournant contre lui ses propres arguments.
    • Le rapport au politique des organisations communautaires américaines : entre clientélisme et mobilisations : Entretien avec Nicole Marwell - Julien Talpin p. 122-128 accès libre avec résumé
      Les organisations communautaires constituent un chaînon essentiel de la vie civique américaine. Nicole Marwell revient sur l'hétérogénéité de leurs pratiques, certaines étant prises dans des relations clientélistes avec les élu.es quand d'autres, au projet politique plus critique, adoptent une posture d'interpellation des pouvoirs publics. Elle souligne également, à partir d'une étude à New York, combien le rapport de force est aujourd'hui défavorable aux mouvements radicaux.
    • Améliorer le quartier ou changer la société ? : À propos de deux expériences contrastées de community organizing à l'échelle californienne - Julien Talpin p. 129-137 accès libre avec résumé
      L'histoire du community organizing est pleine de récits héroïques et de victoires improbables. Pourtant, plus de soixante-dix ans après son émergence, les inégalités sont plus fortes que jamais aux États-Unis et la pauvreté n'a jamais été aussi importante. En se concentrant sur des campagnes gagnables, les organisations communautaires ne laissent-elles pas de côté les questions plus structurelles, à l'origine de la marginalisation sociale des habitants des quartiers populaires ? Ne sont-elles pas d'énièmes agents de la paix sociale, améliorant à la marge le sort des plus déshérités sans le transformer en profondeur ? Ces interrogations conduisent surtout à mettre en cause le localisme qui a parfois caractérisé le community organizing. Les deux campagnes présentées dans cet article indiquent de quelle façon de vastes coalitions se structurent au-delà de l'échelle locale pour s'attaquer à certains enjeux structurants. Un dilemme semble pourtant apparaître : la prise de distance avec le localisme s'accompagne également d'une plus faible prise des participants sur le devenir des revendications. Faudrait-il faire l'économie de la démocratie pour exercer un réel pouvoir ?
    • L'importation des notions d'empowermentet de community organizing en France : Entretien avec Marie-Hélène Bacqué - Simon Cottin-Marx, Patricia Osganian p. 138-145 accès libre avec résumé
      Dans cet entretien, Marie-Hélène Bacqué revient sur les notions d'empowerment et de community organizing. Elle explique leurs ambiguïtés et les tensions qui les traversent, mais aussi leur potentiel et leur réception en France, comment elles sont mobilisées à la fois par les travailleurs sociaux et les militants des quartiers populaires.
  • Itinéraire

    • Construire le contre-pouvoir : Itinéraire avec Wade Rathke - Hélène Balazard, Vincent Bourdeau, Yves Jouffe p. 147-163 accès libre avec résumé
      De 1970 jusqu'à la fin des années 2000, Wade Rathke a dirigé ACORN (Association of Community Organizations for Reform Now), la plus importante fédération de community organizing des États-Unis. Cette organisation comptait près de 500 000 membres issus de plus d'un millier de quartiers déshérités. Elle a été un important vecteur de changement social dans les domaines du logement social, de la régulation des activités bancaires ou de l'augmentation du salaire minimum. Wade Rathke a développé un modèle original de contre-pouvoir, en organisant les habitant.es des quartiers pauvres et non pas leurs organisations existantes comme le faisait Saul Alinsky. ACORN a su s'étendre en une fédération états-unienne qui mettait au service de chaque groupe local des organisateur.rices professionnel.les. Si celle-ci s'est fragmentée en 2010, ACORN International rassemble maintenant autant d'adhérent.es dans une trentaine de pays.
  • Livre