Contenu du sommaire : 1983, le tournant médiatique
Revue | Hommes et migrations |
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Numéro | no 1313, janvier-février-mars 2016 |
Titre du numéro | 1983, le tournant médiatique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Des écrans blancs aux stigmates racistes - Marie Poinsot p. 1
Dossier
- 1983, tournant médiatique de l'immigration en France - Yvan Gastaut p. 6
- L'appel des Minguettes : Vénissieux, ses habitants et le président - Ludivine Bantigny p. 11-17 Vénissieux, été 1983. Le climat délétère qui règne sur le quartier des Minguettes pousse les habitants à profiter de la visibilité médiatique qui leur est offerte pour dénoncer les conditions de vie, les discriminations et les violences arbitraires qu'ils subissent. À l'heure où la question migratoire s'inscrit en tête de l'agenda politique, alimentant la montée du Front national, la visite de François Mitterrand à Vénissieux signe un virage idéologique : le traitement par la gauche de l'immigration comme un problème.
- La marche pour l'égalité des droits et contre le racisme : Une tentative de dé-monstration ? - Piero-D. Galloro p. 19-26 Durant l'automne 1983, en allant à pied de Marseille à Paris, les acteurs de cette marche historique ont tenté de redonner des couleurs au visage d'une France blafarde, en pleine crise économique, gagnée par les démons du racisme, enflammée par une vague d'émeutes. Démarche pacifiste, cette action visait autant à exiger la reconnaissance de la place des enfants d'immigrés au sein de la société française qu'à dénoncer les clivages et la violence qui la traversent. Marcher le long des routes de France et donner la chasse à ses monstres.
- La percée du Front National - Alec G. Hargreaves p. 29-35 En 1981, le FN n'avait même pas recueilli les 500 signatures nécessaires pour présenter un candidat à l'élection présidentielle. Deux ans plus tard, il fait une percée sans précédent aux élections municipales. Face à l'échec de la gauche devant la montée du chômage, Jean-Marie Le Pen s'est employé à polariser le débat public sur son thème de prédilection : l'immigration, présentée comme la cause de tous les maux qui touchent le pays. Ses amalgames ont peu à peu fait mouche dans des médias friands de polémiques. Voici comment ses idées sont devenues audibles.
- 1983, le tournant pas très cathodique - Édouard Mills-Affif p. 37-43 Les médias n'ont pas attendu l'été chaud de 1983 pour aborder la complexité de la question migratoire dans leurs colonnes et sur leurs antennes. Le traitement médiatique de l'immigration est monté en puissance depuis les premières émeutes à Vénissieux en 1981. En faisant leur apparition sur les plateaux télé, les jeunes de la deuxième génération bénéficient enfin d'une parole publique. Leurs mots à vif et leur sincérité constituent des armes dans la lutte pour la reconnaissance de leur place au sein de la société française.
- Les O. S. immigrés à l'écran : Les luttes de la « première génération » lors des conflits de l'automobile (1981-1984) - Stéphane Kronenberger p. 45-53 Des grèves éclatent dans l'industrie automobile dès l'automne 1981, mais l'année 1983 constitue un tournant marqué par des conflits à Renault Flins, Citroën Aulnay et surtout Talbot Poissy. L'analyse des images de la couverture télévisuelle de l'événement met en exergue la volonté de la « première génération » des O. S. immigrés de revendiquer son droit à la dignité et à l'égalité. Mais l'adoption d'une politique économique de rigueur et l'attitude ambiguë de certaines centrales syndicales font voler en éclats ces aspirations légitimes à l'intégration dans la société française.
- Les harkis en 1983 : Discours médiatiques et représentations sociales - Abderahmen Moumen p. 55-61 Groupe social formé en France en 1962, les harkis occupent une position paradoxale au sein des immigrations postcoloniales. La complexité de leur « engagement » ou « enrôlement » durant la guerre d'Algérie, leur relégation sur le territoire français, la confusion des termes employés pour les désigner conditionnent le flou qui les entoure. 1983 constitue une année décisive dans l'apparition d'une nouvelle figure dans les médias : le « fils de harki » qui, comme l'ensemble de la « deuxième génération », est mis sur le devant de la scène médiatique en ce début des années 1980.
- Un fait divers dans la « chaleur et le bruit » : Le meurtre de Toufik Ouannes à la télévision (9 juillet 1983) - Claire Sécail p. 63-71 Au mois de juillet 1983, un fait divers tragique endeuille une cité de La Courneuve et fait la Une des médias. Si l'émotion suscitée par le meurtre de Toufik Ouannes, 10 ans, est grande, les explications du geste du tireur, un habitant de la cité qu'indisposait le bruit ce soir-là, sont loin d'être unanimes. Plusieurs récits cohabitent dans le traitement médiatique de ce crime. Si son caractère raciste ne sera pas avéré, il témoigne des tensions sociales récurrentes dans les quartiers populaires face auxquelles se mobilise le pouvoir politique.
- Le meurtre du Bordeaux-Vintimille - Céline Regnard p. 73-79 Le meurtre du train de nuit Bordeaux-Vintimille en novembre 1983 a défrayé la chronique médiatique. Les motivations racistes de ce crime perpétré par trois jeunes candidats à la Légion étrangère sont rapidement mises en avant. En pleine Marche des Beurs, ce fait divers qui bouleverse l'opinion publique jette une lumière crue sur le racisme ordinaire à l'encontre des immigrés dans la société française. Il fonde en retour la croisade politique antiraciste dans laquelle s'engage la gauche, gouvernement en tête.
- Tchao Pantin : Immigration, bas-fonds et trahison - Julien GAERTNER p. 81-87 Tchao Pantin, de Claude Berri, qui a rencontré le succès dès sa sortie en décembre 1983, est un miroir tendu à la France du début des années 1980. En pleine cristallisation des tensions sociales et raciales autour de l'immigration, la virée meurtrière de Lambert, alias Coluche dans les bas-fonds de Paris renvoie l'image d'une société française qui se clive. Face au pompiste chasseur, les immigrés deviennent menaces et prennent le visage de l'« Arabe ».
- Deux « Arabes » en vedette à la télévision : Karim Kacel et Smaïn - Yvan Gastaut p. 89-94 Au début des années 1980, alors que le débat sur l'immigration mobilise l'opinion publique, la télévision française n'hésite pas à mettre en lumière quelques jeunes issus de l'immigration. Ainsi, de nouvelles figures apparaissent dans nos petites lucarnes peu habituées à mettre en scène des vedettes immigrées. Parmi elles, Karim Kacel et Smaïn sont la preuve d'une réelle mutation du regard et des attentes des téléspectateurs qui apprécient ces nouveaux talents programmés à des heures de grande écoute.
- Les enfants de l'immigration au Centre Pompidou : Espoirs et malentendus de la mise en scène des cultures immigrées dans la France des années 1980 - Adèle Momméja p. 97-102 L'exposition Les enfants de l'immigration qui s'est tenue au Centre George Pompidou entre janvier et avril 1984 avait comme objectif d'ouvrir une scène nationale aux créations artistiques d'un groupe social marginalisé. Cette exposition a offert une visibilité importante à des artistes qui interrogent, dans leurs œuvres, leur rapport à l'immigration. Les non-dits et les ambiguïtés du processus de sélection des exposants instillent néanmoins un doute sur les véritables raisons de la présence de ces artistes « d'origine immigrée » dans ce haut lieu de l'art contemporain.
- La victoire de Yannick Noah à Roland-Garros : Ou le rêve déçu d'une icône antiraciste - Stéphane Mourlane, Philippe Tétart p. 105-112 Le 5 juin 1983, la victoire de Yannick Noah en finale du tournoi de tennis de Roland Garros fait la joie de la France entière. En pleine crise économique et sociale, confronté à la fois à la récession et à la montée du racisme que dénoncent les enfants d'immigrés, le pays s'est trouvé une icône. Si l'embrasement médiatique fait de Noah le nouveau visage d'une société réconciliée avec elle-même, le joueur lui-même paraît réticent à endosser le symbole. Une manière d'échapper aux assignations identitaires qui surdéterminent son exploit sportif.
- Les mémoires de la Marche pour l'égalité et contre le racisme : Dans les archives du Web - Sophie Gebeil p. 115-122 Sur Internet, la mémoire de la Marche pour l'égalité et contre le racisme de 1983 est loin d'être univoque. Trente ans après cet événement à la fois clé et quelque peu oublié de l'histoire sociale et politique française, les acteurs de la Marche continuent de porter le flambeau. Cette mémoire plurielle à l'échelle nationale et locale sert de référence à nombre d'engagements militants contemporains. De repoussoir également pour ceux qui dénoncent la récupération politique dont la Marche a fait l'objet.
Chroniques
- Une mémoire transfrontalière : Les escartons du Briançonnais - Anne-Marie Granet-Abisset p. 126-130
- Les sociétés : reflet de leurs frontières - Julie Voldoire p. 131-134
- Brève histoire du racisme en images - Magdalena Ruiz-Marmolejo p. 136-139
- « Alors, tchao l'immigration ! ? » - Mogniss H. Abdallah p. 140-145
- Une histoire des racismes et antiracismes : Entretien avec Emmanuel Debono, historien, Institut français de l'éducation, ENS Lyon - Marie Poinsot p. 146-148
- Sensibiliser au racisme : des maux en mots : Entretien avec Annick Metefia, intervenante pédagogique - Marie Poinsot p. 150-153
- L'engagement des artistes contre le racisme en France : Entretien avec Jean Hurstel, ancien président du réseau Banlieue d'Europe - Marie Poinsot p. 154-155
- « Mal nommer les choses… » - Mustapha Harzoune p. 156-157
- Les 40 ans du Centre Mandapa - François Bensignor p. 160-164
- Eurovillage : Documentaire français (2015) de François Pirot - Pierre Duculot p. 165
- Brooklyn : Film irlandais, britannique et canadien de John Crowley - Anaïk Vincent p. 166-167
- La Marcheuse : Film français de Naël Marandin - Anaïk Vincent p. 167-168
- Hassan Ben Mohamed, La Gâchette facile : En collaboration avec Majid el Jarroudi, avant-propos de Toumi Djaïdja, Paris, Max Milo, 2015, 292 p., 18,90 € - Mogniss H. Abdallah p. 169-170
- Arezki Métref, La Traversée du somnambule. Chroniques du mentir-vrai : Préface de Boualem Sansal, Alger, éd. Koukou, 2015, 196 p. - Mustapha Harzoune p. 170-171
- Brigitte Giraud, Nous serons des héros : Paris, Stock, 2015, 197 p., 17,50 € - Mustapha Harzoune p. 172-173
- Collectif, Dépasser la frontière : Ker Editions, 2015, 155 p., 10 € - Mustapha Harzoune p. 173-174