Contenu du sommaire : Les relations finance/industrie

Revue Revue d'économie industrielle Mir@bel
Numéro no 154, 2ème trimestre 2016
Titre du numéro Les relations finance/industrie
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • ‪Introduction. Industrie, finance, innovation et gouvernance dans la crise : vers un changement structurel ?‪ - Véronique Dutraive p. 13-32 accès libre
  • ‪Industrial Economics and Policy: Recent History and Theoretical Foundations‪ - Richard Arena, Véronique Dutraive p. 33-61 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    ‪Ce texte propose une clarification de la réalité complexe et polysémique associée au terme de « politique industrielle », dans une perspective analytique et historique des années 1980 à nos jours. Nous distinguons trois périodes correspondant à trois politiques industrielles idéales-typiques : la politique de la concurrence, la politique de promotion de l'innovation et de la compétitivité et la politique visant le changement structurel. Notre contribution envisage aussi les différentes théories économiques qui fournissent les fondements analytiques des différentes politiques industrielles de ces dernières dé‪cennies.

    ‪The purpose of our paper is the clarification of the complex reality and polysemous concept of industrial policy, focusing on its nature and evolution from the 1980s to the present day. Three periods are distinguished in order to characterize “ideal-typical” industrial policies: a competition policy; an innovation and competitiveness-based policy and a structural change-oriented policy. Our contribution also investigates the various existing economic theories which provided analytical foundations to the different industrial policies which prevailed in these recent decades.‪
  • ‪Financial regimes, financialization patterns and industrial performances: preliminary remarks‪ - Giovanni Dosi, Valérie Revest, Alessandro Sapio p. 63-96 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Selon la taxonomie évolutionniste des systèmes financiers proposée par Dosi (1990), les systèmes fondés sur les marchés seraient comparativement plus enclins à l'exploration de nouveaux paradigmes technologiques, résultant de la sélection par le marché, alors que les systèmes fondés sur le crédit apporteraient un avantage en termes d'apprentissage cumulatif. Cet article offre une réflexion préliminaire sur ces conjonctures à la lumière des changements institutionnels incarnés par la financiarisation et le principe de la « Maximisation de la Valeur Actionnariale ». L'empirie suggère que la financialisation a désolidarisé les performances des entreprises sur les marchés financiers des déterminants de l'innovation et de la croissance. La sélection parmi les entreprises se produit davantage sur les marchés financiers selon des critères de rendements de court terme. Ainsi, la financialisation a contribué à altérer et dégrader les propriétés spécifiques du nexus finance-innovation dans les deux archétypes de systèmes financiers, détériorant en même temps l'efficience statique et évolutionniste.

    ‪The evolutionary taxonomy of financial systems, outlined by Dosi (1990), argued that market-based systems are comparatively more engaged in exploring new technological paradigms, due to selective market pressure, whereas in credit-based systems their more institutionalized financial allocation provides an advantage for cumulative learning. ‪This article offers a preliminary assessment of those conjectures in light of the institutional change associated with the financialization process and the “maximizing shareholders value” principle. The available evidence suggests that financialization has disconnected the performance of firms on the financial markets from the determinants of firm-level growth and innovation. Selection among companies increasingly occurs on financial markets according to criteria based on short-term returns. As such, financialization has contributed towards compressing and somewhat degrading the specific properties of the finance-innovation nexus of both financial system archetypes, simultaneously deteriorating static and Schumpeterian efficiency.
  • ‪Les comportements de détention de liquidités dans les sociétés non financières du G7 ont-ils évolué depuis la crise ?‪ - Sylvain Broyer, Emmanuel Schneider, Cyril Verluise p. 97-123 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Les entreprises ont accumulé des niveaux de cash sans précédent depuis la crise financière. Une idée couramment répandue est que le motif de précaution en serait le principal facteur : l'accumulation de cash résulterait des difficultés d'accès au financement bancaire que les entreprises ont subies lors de la crise financière. Nous observons ici l'évolution de la détention de liquidités par les entreprises du G7 et réalisons un test économétrique afin d'identifier si la crise financière a amené un changement de régime dans la détention de liquidités. Nos résultats indiquent que la hausse des liquidités ne s'explique par le motif de précaution que dans les pays du G7 où la désintermédiation des financements externes a progressé depuis la crise (États-Unis, Grande-Bretagne, Japon). En Europe continentale, nos tests infirment l'hypothèse d'un changement de régime de détention du cash.

    ‪Cash holdings of G7 corporates have hit new historical highs since the financial crisis. A common idea is that the precautionary motive would be the main factor: the accumulation of cash would result from lack of access to bank financing that corporates underwent during the financial crisis. We take an in-depth look at the development in cash holdings by corporates in the G7 and carry out an econometric test to identify whether the financial crisis has brought a regime switch. Our results indicate that cash holdings due to caution have increased only in those G7 countries where the disintermediation of external funding has also increased (USA, UK, Japan). In continental Europe, our tests invalidate the hypothesis of a regime switch in cash holdings.‪
  • ‪Clusters et efficacité du capital-risque : une analyse des stratégies différenciées des fonds indépendants et des fonds industriels‪ - Dominique Dufour, Eric Nasica, Dominique Torre p. 125-150 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    ‪Les investisseurs en capital risque indépendants (IVC) se distinguent des organismes captifs, ces derniers étant des filiales de banques, de sociétés industrielles ou d'organismes publics. On attribue généralement aux premiers une meilleure rentabilité etune meilleure sélectivité des projets et aux seconds de moindres performances. L'objectif de notre papier est d'établir les limites de ces conclusions dans le cas des capital-risqueurs filiales de sociétés-mères industrielles, les capital-risqueurs industriels ou Corporate Venture Capitalists (CVC). A l'aide d'un modèle théorique prenant appui sur des faits stylisés, nous retrouvons tout d'abord les résultats traditionnels allant dans le sens d'une meilleure efficacité des IVC, en mettant en évidence à la fois le rôle des ressources spécifiques et des comportements stratégiques des deux types de capital-risqueurs. Nous observons aussi qu'à défaut d'améliorer la rentabilité moyenne des projets financés, les CVC en accroissent dans tous les cas le nombre. Puis, nous introduisons la prise en compte de synergies entre projets, notamment au sein de clusters. Quand de telles interactions sont introduites, nous montrons que les CVC peuvent non seulement contribuer à financer davantage de projets mais aussi accroître la sélectivité globale du secteur. Nous illustrons ces résultats par des simulations numériques et les commentons en conclusion.‪

    ‪Independent Venture Capital (IVC) investors are distinguished from captive ones, which are affiliated to banks, corporates or public entities. IVC investors are generally considered as having higher return, selectivity and performance than other Venture Capitalists. The topic of this article is to evaluate the limits of these conclusions in the case of Corporate Venture Capital (CVC) investors, which are considered as subsidiaries of industrial companies. The paper is based on an original theoretical model founded on stylized facts which yields, in the benchmark case, the usual results of the literature. Without considering any interactions among projects, IVC specific resources and strategies make them more efficient than CVC. We then introduce synergies and interactions among projects, able to increase the return of projects in the event of success. We show that these interactions not only help CVC to fund more projects but also to increase the general selectivity of funded projects, at a level that may make them more selective than IVC. We illustrate these results by numerical simulations that we discuss in the conclusion.‪
  • ‪Actionnariat salarié, gouvernance et performance de la firme : une étude de cas économétrique portant sur un groupe français coté‪ - Nicolas Aubert, Virgile Chassagnon, Xavier Hollandts p. 151-176 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans nos économies de marché fondées sur la connaissance, le capital humain et les employés qui le recèlent sont au cœur de la création des avantages compétitifs des firmes. Forts de ce constat, d'aucuns évoquent de plus en plus le rôle bénéfique que peuvent jouer les salariés dans la gouvernance de l'entreprise moderne à travers leur participation potentielle au capital des firmes. Pour autant, la relation entre l'actionnariat salarié et la performance n'est pas clairement établie par la littérature académique. Cette contribution se situe dans ce débat ambiant en testant l'impact de l'actionnariat salarié sur la performance économique des entreprises. Pour ce faire, notre attention portera tout particulièrement sur l'actionnariat salarié comme instrument institutionnel de gouvernance d'entreprise. Nous étudions plus précisément la relation entre l'actionnariat salarié et la performance économique sur 900 filiales d'un groupe coté français (appartenant au CAC 40) sur une période de cinq ans. Notre étude montre que l'actionnariat salarié influe positivement sur la performance économique des entreprises.

    ‪In market economies based on knowledge, human capital and employees are the main drivers of firms' competitive advantage. Some scholars underline the positive role that employees can play in the governance of the modern firm through their potential participation in the firm's shareholding. However, the relationship between employee ownership and performance is not clearly supported in the academic literature. This paper contributes to this academic debate by testing the impact of employee ownership on corporate performance. We focus the study on employee ownership as an institutional instrument of corporate governance and examine more precisely the relationship between employee ownership and corporate performance in 900 subsidiaries of a French listed group (belonging to the CAC 40) over a period of five years. The study shows that employee ownership positively affects corporate performance.‪
  • ‪French connection: interlocking directorates and ownership network in an insider governance system‪ - Tristan Auvray, Olivier Brossard p. 177-206 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Nous montrons que les liens de propriété entre les grandes sociétés françaises expliquent largement la présence d'administrateurs en commun, unique ou multiples, entre elles. Tant les grandes participations que les petites, de 1 % à 20 % du capital ou des droits de vote, ont un fort pouvoir explicatif. Nous montrons également qu'il existe une relation croissante entre la taille de la participation et la force de la corrélation entre les liens de propriété et l'existence d'administrateurs communs entre les sociétés. Finalement, nous montrons que la causalité va des liens de propriété aux réseaux d'administrateurs, tant pour les participations unilatérales que pour les participations croisées.

    ‪We show that single and multiple overlapping directorships of large French listed corporations are highly explained by their ownership connections. Both large and small stakes, from 1% to 20% of cash-flow rights or voting rights, have high explanatory power. We provide evidence also of the existence of a positive relationship between the size of a shareholding and the strength of the correlation between ownership ties and overlapping directorates. Finally, we demonstrate that causality goes from ownership to interlocking directorates, for both unilateral stakes and cross-shareholdings.‪
  • ‪Industrial change, financial system and coherent industrial policy‪ - Patrizio Bianchi, Sandrine Labory p. 207-226 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le débat sur les relations entre les secteurs financiers et non financiers de l'économie est un vieux débat. Schumpeter (1911) soutint qu'un système financier efficient et efficace a un impact positif sur la croissance économique. Récemment, ce débat a été ravivé par la crise financière, qui a révélé la croissance extraordinaire du secteur financier dans les dernières décennies, l'écart croissant entre les sphères financière et réelle de l'économie, et la financiarisation des entreprises. En fait, le secteur financier est devenu si important et réalise des profits si élevés qu'il est légitime de se demander si cette tendance n'a pas limité les changements structurels des secteurs industriels, en limitant ses ressources non seulement financières mais aussi humaines, étant donné que l'évidence est que beaucoup d'ingénieurs ont préféré travailler dans le secteur financier pour obtenir des salaires plus élevés que dans l'industrie. Pendant ce temps, les industries ont connu des changements structurels importants, impliquant la nécessité d'importants investissements à tel point qu'elles ont appelé les gouvernements à réaliser des politiques industrielles pour soutenir ces changements, conduisant à un « retour » des politiques industrielles. L'objectif de cet article est d'analyser les effets de cette financiarisation sur les secteurs industriels et les implications en termes de politiques industrielles. Ces dernières devraient comprendre des mesures qui induisent le secteur financier à se refocaliser sur l'approvisionnement des industries en ressources financières. Les politiques financières et macroéconomiques doivent être cohérentes avec les politiques industrielles de sorte que toutes les parties du système économique puissent se combiner pour s'engager sur un sentier de développement soutenable.

    ‪The debate on the relationship between the financial and the non-financial sectors of the economy is an old one. Schumpeter (1911) argued that an efficient and effective financial system has a positive impact on economic growth. Recently this debate has experienced renewed interest after the financial crisis, which revealed the extraordinary growth of the financial sector over recent decades, the increasing gap between the financial and the real sectors of the economy, and the so-called financialization of enterprises. In fact, the financial sector grew so big and has made such high profits that it is legitimate to ask whether it impeded non-financial structural change as a result, by drawing away not only money, but also human capital from the real sector, since many engineers preferred working in the financial sector to get higher wages than in industry. Meanwhile industries have experienced substantial structural changes that have induced new calls for industrial policies at the beginning of the 2000s, and led to a “return” of industrial policy. The aim of this paper is to discuss both the effects of financialization on the industrial sector and the implications for the design of sustainable industrial policies. The conclusions are that industrial policy should include actions aimed at inducing the financial sector to focus on providing resources to investments in productive sectors and reduce speculative activities. Financial and macroeconomic policies must indeed be coherent with industrial policy so that all parts of the economic system combine to contribute to a move toward sustainable development paths.‪