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Revue | Annales de géographie |
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Numéro | no 715, 2017/3 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Articles
- Déconstruire ? L'exemple des barrages de la Sélune (Manche) - Yves-François Le Lay, Marie-Anne Germaine p. 259-286 Deux barrages hydroélectriques installés sur la Sélune (Manche) sont visés par un projet de démantèlement qui ne fait pas consensus. Les dimensions du débat public sont explorées au moyen de l'analyse textométrique d'un corpus de 515 articles publiés de 2001 à 2015 dans deux titres de la presse régionale, Ouest-France et La Gazette de la Manche. Les résultats permettent de reconstruire la trajectoire géo-historique du conflit, de restituer les argumentaires et les régimes d'action choisis par les acteurs de la polémique et d'envisager l'évaluation controversée des conséquences que la déconstruction des infrastructures hydrauliques aurait sur le territoire. Les atermoiements des décideurs ont contribué à installer le conflit dans la durée. Émue par les éventuelles modifications de son cadre de vie, une partie de la population locale ressent vivement un sentiment de dépossession qui accompagne souvent les projets susceptibles de se lire à différentes échelles. Les positions tenues par les parties prenantes révèlent autant de régimes d'être au monde qui se focalisent sur des valeurs contrastées.Two hydroelectric dams in France installed on the River Sélune (Manche) are the object of a controversial dismantling project. A set of 515 articles published from 2001 to 2015 in two regional newspapers is explored using text analysis programs. The objective is to stress three dimensions of the public debate by reconstructing the geo-historical trajectory of the conflict. This involves identifying the arguments and action plans chosen by the stakeholders, assessment of the local consequences that the removal of both installations would have on the riverine communities. The results emphasize in particular that procrastination by decision-makers contributed to durable prolongation of the conflict. Negatively affected by any changes in their environment, some people feel a strong sense of dispossession typical for projects that could be interpreted at different scales. Attitudes held by stakeholders towards the project reveal the many different strategies of being in the world that exist and which focus on contrasting values.
- Comment analyser la vulnérabilité aux inondations ? Approches quantitatives, qualitatives, francophones et anglophones - Samuel Rufat p. 287-312 Depuis les années 1990, les outils cartographiques et de diagnostic de vulnérabilité face aux différents aléas se sont multipliés. Pour répondre aux exigences de l'administration en matière de prévention et de gestion des risques, ce sont surtout des méthodes quantitatives, définissant des scores de vulnérabilité, des dommages potentiels ou s'inscrivant dans des démarches coûts/avantages. Ces instruments sont construits comme des outils de diagnostic a priori, avant les crises ou les catastrophes. Mais ils ne sont ensuite pas confrontés à l'épreuve des faits, a posteriori, aux retours d'expérience. À l'inverse, des méthodes qualitatives et empiriques sont utilisées après les crises et les catastrophes pour en analyser les processus, les modalités de diffusion et dégager les spécificités locales, mais sans parvenir à faire monter le bilan en généralité pour le rendre transposable à d'autres territoires. Il existe donc un important décalage entre ces deux approches dans le choix des données, des critères, des facteurs de vulnérabilité à prendre en compte. Ce décalage est un obstacle majeur à la consolidation des outils d'analyse de la vulnérabilité des territoires. Les outils cartographiques et de diagnostic tendent à mobiliser un même faisceau d'indicateurs ou de critères, en le transposant d'un territoire à un autre sans tenir compte de la diversité des territoires ni des effets d'échelle. De même, ils ont tendance à se focaliser sur un instantané, sans considérer que dans le déroulement de la crise, les individus, groupes sociaux et territoires les plus vulnérables ne sont pas toujours les mêmes. Ces problèmes sont discutés dans le cas de la vulnérabilité aux inondations en confrontant les approches qualitatives, quantitatives, anglophones et francophones dans la perspective d'assurer la robustesse des outils.Since the 90's, vulnerability indices have emerged as a leading tool to quantify and map the dimensions of hazards vulnerability. However, this quantitative approach is criticized for giving only a rather general overview of the situation, without rendering the complexity of the phenomena involved or the local context, because they are not always adapted to the changes in scale and seem dependent on the initial choice of variables. Moreover, the typical rationale for decisions regarding variable selection, analysis scale or method is based on simplicity or choices made in previous studies, and in many cases, no justification is provided at all. Furthermore, these quantitative approaches are almost never confronted to feedback and historical data for validation. On the other hand, empirical and qualitative approaches are useful for conducting ex post analyses, but it is not easy to make them operational: they seem to condemn us to wait for disasters to happen in order to advance the science. Hence, the literature presents a bifurcation between qualitative and quantitative approaches to vulnerability. This apparent disconnection between the two pictures given ex ante by quantitative approaches and ex post by qualitative approaches is a major scientific challenge. It is a problem when it comes to the definition of target populations and places for the different programs and to guide international action. Mapping and diagnostic tools tend to mobilize the same indicators or criteria beam, by transposing it from one territory to another regardless of the diversity of territories or scale effects. Also, they tend to focus on a likely snapshot, without considering that the most vulnerable individuals, social groups and place are not always the same during the unfolding of the crisis. These issues are discussed in the case of the vulnerability to floods, confronting qualitative, quantitative, French and Anglo approaches in order to enhance the robustness of methods.
- Notre-Dame-de-Lourdes (Manitoba, Canada), le positionnement stratégique francophone d'un centre de services en milieu rural - Franck Chignier-Riboulon p. 313-332 La population francophone, à vrai dire bilingue, ne représente qu'une faible minorité du Manitoba. Elle lutte pour sa survie linguistique depuis plus d'un siècle. Dans ce contexte, chaque communauté, chaque village connaît des évolutions différenciées, pour résister, et développer l'économie locale. Notre-Dame-de-Lourdes est un village comptant environ 600 habitants, situé dans le sud-ouest du Manitoba. Malgré sa taille, il fournit un grand nombre de services à un territoire large mais sous-peuplé. Sa chance est d'être éloigné de Winnipeg, la capitale provinciale. Son dynamisme peut s'expliquer par la capacité d'initiative et de demande sociale, traditionnelle, de ses habitants, mais aussi par la force de leur histoire et de leurs représentations collectives. Ces dernières sont basées, aujourd'hui encore, sur leur culture francophone, leur fournissant une conscience particulière et les mobilisant pour continuer à exister dans l'avenir. Pour autant, malgré les succès institutionnels des vingt dernières années, l'ensemble reste fragile.The French-speaking population (bilingual, in fact) in the province of Manitoba is a small minority, trying to continue to survive against the process of English language assimilation for more than a century. In this historical and geographical context, each community makes specific changes and developments in order to resist and also develop its economy. Notre-Dame-de-Lourdes is a medium-size village (about 600 inhabitants) located in south-west Manitoba. Despite its size it provides a lot of services in an extensive low-density area, far from Winnipeg, the provincial capital. The local dynamism can be explained by traditionally vigorous activity and residents' demand for progress, linked to their history and collective territorialized representations, which are strong up to now. These are founded within a Francophone culture, providing consciousness and strategy to stay alive culturally. The situation nevertheless remains fragile.
- Navettes domicile-travail : naissance et développement d'un objet statistique structurant - Hadrien Commenges, Julie Fen-Chong p. 333-355 Ce travail s'applique à retracer l'histoire des « navettes » ou « migrations alternantes » en tant qu'objet statistique. Nous partons du constat que l'objet navette, depuis sa naissance dans les années 1930, a pris une importance grandissante dans les études de géographie urbaine et de mobilité quotidienne. Alors que cet objet a très peu évolué dans son mode de production, son domaine de validité s'est considérablement étendu. Sur la base de ce constat, nous cherchons à comprendre les raisons de la montée en importance de cet objet statistique et nous analysons les constructions empiriques et théoriques sur lesquelles s'appuie l'extension de son domaine de validité. Nous faisons l'hypothèse que ces constructions ont façonné une certaine vision du territoire et de mobilité que nous qualifions de « salariale ». La navette est devenue au cours du XXe siècle l'objet qui traduit la structuration de l'espace, qui participe à la définition de son urbanité, qui résume les pratiques de mobilité et dessine les espaces de vie. A sa création, elle n'était pourtant destinée à aucune de ces tâches. Comment l'objet navette, dont le pouvoir descriptif et explicatif de la structuration de l'espace et de la mobilité quotidienne est apparemment limité, en est arrivé à occuper une situation de quasi-monopole en cette matière ?This article traces back the history of "commuting" as a statistical object. The commuting category appeared in the 1930s and therefore experienced a growing importance in urban and transportation studies. This statistical category has existed for nearly one century with no change in its mode of production, but its uses and scope have considerably extended. This paper explains the reasons for this success and the Authors analyse the empirical and theoretical constructions that made it possible. During the 20th Century the commuting flows became the bases for metropolitan area definition and for transportation studies. How has the commuting category come to play such a dominant role in this field while it was never intended for this purpose ?
- Déconstruire ? L'exemple des barrages de la Sélune (Manche) - Yves-François Le Lay, Marie-Anne Germaine p. 259-286
Une rencontre avec…
- Sylvy Jaglin et Alain Dubresson, Eskom. Électricité et pouvoir en Afrique du Sud - p. 356-370
- Comptes rendus - p. 371-124