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Revue | Travail et emploi |
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Numéro | no 150, avril-juin 2017 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Genre et travail indépendant : Divisions sexuées et places des femmes dans le non-salariat - Sarah Abdelnour, Sophie Bernard, Julien Gros p. 5-23
- Des artisans d'art aux artisanes d'art : Ce que le genre fait aux métiers d'art indépendants - Anne Jourdain p. 25-52 De plus en plus de femmes s'installent à leur compte en tant que bijoutières, céramistes, maroquinières, etc. Cette féminisation de l'artisanat d'art met à mal les modèles traditionnels de transmission du métier de père en fils ou d'ascension sociale ouvrière par l'indépendance. De fait, la majorité des artisanes d'art sont des reconverties qui ont abandonné un emploi de cadre salariée pour devenir indépendantes. Consécutivement, elles n'investissent pas leur métier et leur entreprise de la même manière que les hommes : elles valorisent souvent davantage l'aspect créatif de leur activité que la composante technique. S'appuyant sur une double enquête quantitative et qualitative, l'article met en évidence les rapports profondément différenciés des femmes et des hommes à l'indépendance au sein d'un même univers professionnel. Sont finalement interrogés, en termes d'artification et de dépréciation, les effets sociaux et institutionnels de la féminisation de l'artisanat d'art.More and more women set up their own business in jewelry, ceramics, leather production, etc. This feminization of French crafts jeopardizes the traditional models which are based on business transmission from father to son or on workers' upward mobility through self-employment. Actually, most artist-craftswomen practiced a salaried executive job before becoming self-employed workers. Consequently, they do not engage in their craft and their business in the same way as men: they often consider their activity as an art form. The article, which is based on both quantitative and qualitative data, highlights the very different relations men and women have with self-employment within a specific professional universe. It finally analyses the social and institutional effects of the feminization of French crafts in terms of artification and depreciation.
- Le prix du « retour » chez les agriculteurs « néo-ruraux » : Travail en couple et travail invisible des femmes - Madlyne Samak p. 53-78 L'article interroge les logiques sociales qui conduisent des agricultrices « néo-rurales », à savoir non issues de familles d'agriculteurs, à devenir maraîchères aux côtés de leur conjoint et à travailler dans l'ombre de celui-ci, sans statut professionnel. Il montre d'abord en quoi l'entrée en indépendance de ces femmes obéit parfois à des logiques familiales plus que professionnelles. Il expose ensuite les ressorts de leur invisibilité statutaire : au-delà des faibles ressources économiques qui contraignent ces petit.e.s exploitant·e·s et limitent leur capacité à payer les cotisations sociales, on note une méconnaissance des dispositifs et des risques encourus, mais aussi une certaine défiance à l'égard des formes instituées de protection sociale qui les conduit à privilégier la solidarité de couple et à élaborer des stratégies individuelles compensatoires.The article deals with social mechanisms that lead “neo-rural” women to become farmers alongside their spouse and to work in the shadow, without a professional status. Firstly, it shows to what extent these occupational decisions are determined by family rather than professional logics. Secondly, it exposes the causes of the statutory invisibility of these women : beyond the weak economic resources that constrain these small farmers and limit their ability to pay social security contributions, there is a lack of knowledge of the statutes and risks involved, as well as a certain lack of confidence concerning the established forms of social protection, which leads them to favour couple solidarity and to develop individual compensatory strategies.
- Les Mompreneurs : Entre entreprise économique, identitaire et parentale - Julie Landour p. 79-100 Apparues en France à la fin des années 2000, les Mompreneurs se définissent comme des femmes qui créent leur entreprise à l'arrivée d'un enfant, quittant le salariat pour une indépendance qui favoriserait la « conciliation » entre travail et vie de famille. Ce mouvement peut sembler réduit s'il est circonscrit aux seules membres des réseaux « estampillés », mais s'inscrit à la fois dans des processus profonds et transversaux d'individuation, de valorisation publique accrue ces dernières années de l'initiative économique individuelle, et d'accentuation du travail parental, en particulier au sein des classes moyennes et supérieures. S'appuyant sur une enquête de trois ans conduite au sein de l'un des collectifs français de Mompreneurs, cet article propose de restituer les discours de ces femmes en s'intéressant au sens qu'elles donnent à leur entrée dans le non-salariat et en le confrontant aux conditions objectives dans lesquelles elles poursuivent une activité professionnelle indépendante. Après avoir présenté les contours identitaires d'une aventure entrepreneuriale qui se pare des habits de la mère accomplie, on verra comment le cadre familial, et ses éventuelles fluctuations, peut agir sur le parcours de ces femmes initialement bien dotées, révélant la part de fragilité qui se cache sous l'exaltation promise par cette entreprise globale de soi.Emerging at the end of the noughties, the Mompreneurs define themselves as women who build up a company as they give birth to a child, therefore leaving employment status for a specific self-entreneurship, which would favour “work-life balance”. This phenomenon might seem minor if just reduced to its labeled networks; yet it falls within deep and transversal processes of individuation, a public boosting focused on individual economic initiative, and an accentuation of parental work, particularly within upper and middle classes. Based on a three years ethnographic research within one of the French Mompreneurs' collectives, this article aims at establishing these women's points of view, showing an interest in the meaning they give to their experience in the non-waged system ; it aims at the same time at confronting them with the objective conditions in which they pursue their non-waged activity. After presenting the identity outlines of an entrepreneurial adventure that wears the clothing of the accomplished mother, we will then see how the family environment, and its possible variations, can act upon those women's paths. Even if they initially benefited from a comfortable position, they still can be weakened by this global entrepreneurship and the self-fulfilment it promises.
- Femmes salariées et non salariées : quelles différences de temps de travail ? - Amandine Barrois, François-Xavier Devetter p. 101-130 L'objectif de cet article est de mieux comprendre, à partir d'une analyse de l'enquête Conditions de travail 2013, les particularités des temps de travail des femmes non salariées. Bien que cette catégorie regroupe des situations très diverses, comparée à celle des salariées, elle se révèle en moyenne marquée par des durées quotidiennes et hebdomadaires longues, des horaires atypiques et imprévisibles. La disponibilité temporelle au travail des femmes non salariées est donc forte. Cette réalité apparaît paradoxale face aux discours mettant en exergue la souplesse et les possibilités de conciliation des temps personnels et professionnels que ce statut est censé permettre. Trois groupes sont distingués en fonction du niveau du diplôme le plus élevé obtenu. Si les contraintes temporelles sont importantes pour l'ensemble des non-salariées, les résultats soulignent également la position particulière des moins qualifiées. Elles cumulent horaires importants et faibles rémunérations, posant ainsi la question des frontières entre travail domestique et travail non salarié.This article aims at improving the analysis of the particularities of self-employed women's working time using the 2013 Working Conditions survey (Enquête Conditions de travail). Although this category covers a wide range of situations, compared to the situation of employees, the standard profile is characterized by long daily and weekly durations on the one hand and atypical and unpredictable schedules on the other hand. The temporal availability at work of self-employed women is therefore high. This reality appears at odds with the rhetoric about how self-employment is supposed to promote flexibility and solve work and domestic life balance issues. Three groups are told apart according to the level of the highest diploma obtained. If time constraints are important for all self-employed women, the results also highlight the specific position of the less skilled. They combine long working time and low remunerations, raising the issue of the boundaries between domestic and professional life.
- Michel Husson, Créer des emplois en baissant les salaires ? Une histoire de chiffres : Bellecombe-en-Bauges, Éditions du Croquant, coll. « Détox », 2015 - Éric Heyer p. 131-137
- Julian Mischi, Le Bourg et l'Atelier. Sociologie du combat syndical : Marseille, Agone, coll. « L'ordre des choses », 2016 - Alexandre Hobeika p. 138-141