Contenu du sommaire : 1968-2018

Revue Socio Mir@bel
Numéro no 10, 2018
Titre du numéro 1968-2018
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial

  • Dossier

    • Mai 1968 et les sciences humaines et sociales - Michel Wieviorka p. 7-17 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Remémoration, commémoration ? Cinquante ans après Mai 68, il est difficile de faire la part des choses, entre histoire et mémoire, mais un point est clair : le mouvement de mai marque à l'échelle de la planète une rupture, la fin d'une époque, industrielle, l'entrée dans une autre, où la culture est décisive. L'article montre comment les acteurs ont pourtant souvent préféré penser leur action dans les catégories du monde dont il s‘agissait de sortir. Cela n'a pas empêché les sciences humaines et sociales, dominées elles aussi par des catégories relevant de ce monde finissant, de tenter ici et là de s'en affranchir, parfois sur un mode conservateur, voire réactionnaire : cet article examine les enjeux théoriques qui se sont dessinés ou précisés avec Mai 68 pour ces disciplines, il dessine l'espace des approches ou des orientations qui se sont alors affrontées, et en tire des leçons pour les débats contemporains où la subjectivité des acteurs et les processus de subjectivation et de dé-subjectivation occupent une place considérable.
      Memorialising or commemoration? Fifty years after May ‘68 it is difficult to distinguish between history and memory but one thing is clear: the movement of May '68 signals a clean break at global level, the end of the industrial era, and the entry into another age, in which culture is a decisive factor. The article shows how the actors have nevertheless frequently preferred to consider their action in the categories of the world to be left behind. This has not prevented the humanities and social sciences, dominated as they also were by categories which belong to the world on the wane, to endeavour here and there to break free of these, sometimes in a conservative, if not reactionary, manner. This article examines the theoretical issues which took shape or form influenced by May '68 in these disciplines; it outlines the spaces and approaches which confronted one another at the time and identifies lessons for present-day discussions in which the subjectivity of the actors and the processes of subjectivation and de-subjectivation have a significant impact.
    • Le mouvement dévoré par des idéologies militantes - Daniel Cohn-Bendit, Alain Geismar, Michel Wieviorka p. 19-39 accès libre
    • Du social au culturel - Alain Touraine, Michel Wieviorka p. 41-53 accès libre
    • La réalisation d'un événement impossible - Edgar Morin, Michel Wieviorka p. 55-67 accès libre
    • Les portes de tous mes désirs - Élisabeth Roudinesco, Michel Wieviorka p. 69-85 accès libre
    • Religion et politique autour de Mai 68 - Denis Pelletier p. 87-100 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La place des catholiques dans la crise des années 68 constitue un angle mort de l'historiographie. Toutefois, le retour récent de la question religieuse dans le débat public, allié aux controverses sur ce que l'état présent du débat politique doit à l'héritage de 68, invite à reprendre la question. L'article décrit donc le dispositif, à la fois politique, générationnel et idéologique, à travers lequel le catholicisme français a été à la fois acteur du moment 68 et, en quelque sorte, « agi » par lui. Il en tire quelques enseignements susceptibles d'éclairer la réorganisation en cours de l'espace politique, dans un cadre marqué à la fois par le déclin de l'emprise du catholicisme sur la vie quotidienne et par le maintien de son efficacité comme répertoire de sens.
      The place of Catholics in the crisis of the 1968 years is something of a blind spot in historiography. Nevertheless the recent comeback of the religious question in public discussion, along with the controversies on what the present state of political discussion owes to the 1968 heritage, invites us to return to this issue. The article therefore intends to set out the political, generational and ideological arrangements through which French Catholicism was at one and the same time, an actor in May ‘68 and was also ‘acted on' by it. A number of lessons can be drawn which are likely to shed light on the ongoing re-organisation of political space, in a context characterised both by the decline of the hold of Catholicism on everyday life and by the maintenance of its efficiency in the repertory of meaning.
    • 1968 derrière le Rideau de fer - Karol Modzelewski p. 101-106 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En 1968, les révoltes étudiantes à l'Est et à l'Ouest éclatent dans des conditions fort différentes et formulent des revendications diverses. Mais leur simultanéité révèle quelque chose en commun. Ces révoltes plongent en effet leurs racines dans la crise des hégémonies américaine et soviétique et soulignent des changements profonds dans la hiérarchie des valeurs. Entre le Mars 68 polonais et le Mai 68 français, l'auteur cherche le dénominateur culturel commun.
      In 1968, the student revolts in the East and the West broke out in very different conditions and made different demands. But their simultaneity did reveal something in common. These revolts had their roots deep in the crisis of the American and Soviet hegemonies and highlighted profound changes in the hierarchy of values. The author here seeks the cultural common denominator between March 68 in Poland and May 68 in France.
    • 1968 : Les démocrates primitifs - Sergio Zermeño p. 107-119 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Avec un demi-siècle de recul, se remémorer les images du mouvement étudiant mexicain nous pousse à protester contre l'indigence du temps présent. Nous le vivons comme un camouflet nécessaire qui nous oblige à évoquer la fête joyeuse et libertaire qui marque cette explosion démocratique noyée dans le sang. Cinquante ans plus tard, il nous faut également réfléchir froidement et constater que, au-delà du fait que nous avons alors été libres, nous aspirions à une société plus juste avec la véhémence de la jeunesse. Cette utopie s'est envolée tandis que nous nous enfonçons dans la corruption, la pauvreté et la violence, pas seulement la violence du pouvoir contre les personnes, mais aussi celle des personnes les unes contre les autres.
      With fifty years of hindsight, reviewing the images of the Mexican student movement leads us to protest at the poverty of the present day and age. We experience it as a slap in the face which forces us to evoke the joyous and libertarian fete which characterised this democratic explosion drowned in blood. Fifty years later we must also think unemotionally and realise that, over and above the fact that we were free then, we did aspire to a more just society with the vehemence of youth. This utopia has disappeared while we are engulfed in corruption, poverty and violence, not only the violence of the state against individuals, but also that of individuals one against another.
    • Mai 1968 au Sénégal - Omar Gueye p. 121-136 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À l'instar de la plupart des pays du monde, le Sénégal a connu une vague de contestations estudiantines et syndicales en mai 1968. Parti d'une révolte des étudiants de l'université de Dakar, la « 18e université française », le mouvement, qui s'étendit aux élèves des lycées et aux syndicats de travailleurs, bénéficia du soutien de franges importantes de la population tandis que l'État pouvait compter sur la loyauté de l'armée, le soutien des marabouts et de certaines populations rurales. Le mouvement de mai 1968 au Sénégal résulte d'abord de facteurs locaux, même si le contexte international de contestation juvénile et de guerre froide pouvait faire penser à des connexions extérieures. Entre une grève d'étudiants qui a dégénéré, un mouvement étudiant infiltré par une opposition politique de gauche ou commandité de l'extérieur, et une révolte contre le capitalisme et le néocolonialisme, le mouvement présentait les contours d'une contestation du pouvoir personnel du président Senghor et de la plus grave menace que la jeune république du Sénégal ait connue jusque-là.
      Like most countries of the world, Senegal experienced a student and trade-union protest in May 1968. From a student revolt at the University of Dakar, the 18th French university, the movement, which extended to high school students and workers' unions, profited from the support of significant sections of the population while the State could count on the loyalty of the Army, the support of the marabouts and certain rural populations. May 1968 in Senegal is primarily the result of local factors, even if the context could suggest external connections because of the worldwide youth protest, the Cold War and its ideological stakes. Between a students' strike that degenerated, infiltrated by a leftist political opposition or externally sponsored, a revolt against capitalism and neocolonialism, the movement presented the design of a protest against the personal power of President Senghor and the most serious threat that the young republic had known till then.
    • 1968 : Repères chronologiques - p. 137 accès libre
  • Varia

    • Kibboutz : les risques de la survie - Eliezer Ben-Rafael p. 139-167 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article analyse les changements effectués par les kibboutzim novateurs par rapport aux principes fondateurs du kibboutz afin de surmonter les dangers de disparition. Les avantages découlant de ces mesures radicales sont devenus rapidement tangibles et ont encouragé leur propagation de kibboutz en kibboutz où elles se sont concrétisées à chaque fois dans des configurations particulières. La question est de savoir si cette évolution pourra déboucher sur un horizon kibboutzique nouveau ou sur la fin de ce que l'on pourrait encore appeler kibboutz. Une révolution destinée à faire tabula rasa du passé ou, au contraire, qui pourrait, sous de nouvelles formes, rester fidèle à certains de ses codes fondateurs ?
      This article analyses the changes made by the innovative kibbutzim to the founding principles of the kibbutz in order to overcome the dangers of their disappearance. The advantages resulting from these radical measures have rapidly become tangible and have encouraged their spread from kibbutz to kibbutz where on each occasion they have taken specific material configurations. The question is to know whether this development will lead to new horizons for the kibbutz movement or whether they can still be referred to as kibbutzim. Is this a revolution which aims to make tabula rasa of the past or, on the contrary, which might, in new forms, remain faithful to some of its founding codes?