Contenu du sommaire
Revue | géographie, économie, société |
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Numéro | Vol. 16, 2014/4 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Précarité urbaine et fragmentation socio-spatiale au sein des métropoles brésiliennes : le cas de Recife - Jean-Paul Carrière, Luis de la Mora p. 373-397 La concomitance d'une segmentation forte de l'espace urbain et d'inégalités sociales persistantes justifie que l'on utilise le concept de fragmentation socio-spatiale comme clé de lecture des métropoles brésiliennes. Il s'agit ainsi de se dégager des visions dichotomiques traditionnelles opposant centre et périphérie, et de rendre de compte des processus de segmentation qui transforment les grandes villes du Brésil en mosaïques, aux morphologies contrastées, composées par des « morceaux de ville », occupés alternativement par des populations aisées ou très aisées ou au contraire en grande précarité.Si l'objectif principal de cet article est de mettre en évidence la géographie particulière des inégalités sociales qui marque les grandes villes brésiliennes, en particulier à travers le phénomène des favelas, il entend également proposer des éléments de réflexion sur la portée et les effets de l'action publique en direction des zones d'habitat précaire. Depuis de nombreuses années, les politiques publiques oscillent entre tentatives d'éradication des espaces de pauvreté, impliquant la délocalisation de leurs habitants, et volonté de requalification avec comme objectif le « droit à la ville » et le maintien sur place des populations concernées. Cette question est d'autant plus prégnante que les stratégies de marketing urbain imposées par la globalisation d'une part, et de lutte contre la fragmentation urbaine d'autre part, restent difficilement conciliables.Toutefois, ne pouvant rendre compte de la question de la fragmentation socio-spatiale dans l'ensemble des grandes villes brésiliennes, nous privilégions dans cet article le cas de Recife, à bien des égards paradigmatique de la façon dont se pose la question du « droit à la ville » au Brésil, sans nous interdire d'évoquer d'autres exemples. C'est en particulier à Recife que, déjà sous la dictature, les habitants des favelas, relayés par des ONG et des universitaires, ont au nom du « droit à la ville » revendiqué des mesures de régularisation de leurs quartiers, qui devaient se concrétiser par la suite sous des formes législatives et réglementaires. Dans l'impossibilité également de traiter de toutes les formes d'action publique menée en réponse aux effets de la fragmentation, nous cherchons à évaluer plus particulièrement la portée et les limites du Plan de régularisation des zones spéciales d'intérêt social (PREZEIS) initié à Recife en 1987, et conçu suite aux demandes des habitants pour consolider et régulariser les favelas et les zones de grande précarité urbaine. Ainsi, après une première partie consacrée aux conséquences de la métropolisation en termes de fragmentation urbaine telles que le cas de la capitale du Nordeste nous les donne à voir, la seconde cherche à analyser les modalités et les effets du PREZEIS, au regard des objectifs de requalification des quartiers précaires et de lutte contre la fragmentation urbaine.Urban precariousness and socio-spatial fragmentation in the Brazilian metropolises : the Recife case
The simultaneity of a strong spatial segmentation and of persistent social imbalances justifies the use of the concept of socio-spatial fragmentation, as a key to analysing the Brazilian metropolises. This is the way to renounce traditional dichotomised visions which oppose centre and periphery, and to explain the processes of segmentation, which transform the big Brazilian cities into kinds of patchworks, with contrasting morphologies and made up of “pieces of town” occupied alternately by high-income people, or on the contrary by people in great precariousness.Nevertheless, even though the main aim of this paper is to display the particular geography of social inequalities in the big Brazilian cities, specifically focusing on the phenomenon of the favelas, it aims to propose thinking about the outcomes and effects of public action concerning the precarious residential areas. For many years, public policies have wavered between attempts to eradicate the spaces of poverty, which implies the removal of the inhabitants, and the desire to requalify in order to ensure the “right to the city” and the right to tenancy for the populations concerned. This issue is all the more important, as the strategies of metropolitan marketing imposed by globalisation on the one hand, and the fight against urban fragmentation on the other, are difficult to reconcile.However, as we are not able to deal with the socio-spatial fragmentation in all big sized Brazilian cities, we focus in this paper on the case of Recife, which is, in many respects, paradigmatic of the issue of “the right to city” in Brazil, evoking when necessary other examples. It is in particular in Recife that the inhabitants of the favelas, aided by NGOs and academics, already during the dictatorship, claimed measures of regularisation for their neighbourhoods, in the name of the “right to the city”, which later became laws and juridical rules. Morever, not being able to deal with all the types of public action conceived to reduce urban fragmentation, we attempt to analyse the impacts and limits of the “Regularization Plan of the special areas of social interest” (so-called PREZEIS), which was implemented in Recife in 1987, in order to consolidate and regularise the favelas and the areas of great urban precariousness, as the inhabitants had demanded.Thus the first part of the paper is dedicated to the consequences of metropolisation in terms of urban fragmentation, as we can observe in Recife, whereas the second part analyses the procedures and the effects of the PREZEIS regarding the requalification of precarious neighbourhoods and the fight against urban fragmentation. - La coordination inter-organisationnelle, levier de la gouvernance territoriale : quelles leçons tirer de la gestion de l'eau interbassin ? - Mathieu Dionnet, Laetitia Guérin-Schneider p. 399-420 La gouvernance territoriale met habituellement l'accent sur l'implication des citoyens ou des représentants d'usagers dans la construction de l'action publique. Dans certaines configurations plus complexes, lorsque le problème à résoudre dépasse le territoire ou le domaine de compétence stricte d'un seul acteur public, la gouvernance territoriale passe avant tout par la coordination des différentes organisations ayant une part de responsabilité dans la résolution du problème ou étant impactées par celui-ci. Résultant d'un projet de recherche-intervention sur la gouvernance de l'eau, cet article analyse le cas d'une coordination inter-organisationnelle entre les gestionnaires de deux bassins-versants du Sud de la France partageant les mêmes ressources. En mobilisant une grille d'analyse pluridimensionnelle, nous mettons en lumière les limites de l'action publique territoriale qui entravent aujourd'hui ce type de coordination. Ce travail, renforcé par nos expériences antérieures de conseil auprès des acteurs publics, nous amène à proposer une méthodologie participative qui appuie la coordination inter-organisationnelle. Nous dressons ainsi les contours d'une ingénierie de la gouvernance territoriale dont les modalités restent en grande partie à développer.Improving territorial governance through inter-organizational coordination : drawing lessons from inter-basin water managementThe notion of “territorial governance” usually focuses on how to involve the public or the stakeholders in decision-making processes related to public issues. In more complex situations, when the problem to be solved goes beyond the area of responsibilities of a single public actor, “territorial governance” relies on the coordination of the different organizations involved in the problem resolution, or impacted by that problem. This study was carried out in an intervention-research project about water governance. Our paper analyses the case of an inter-organizational coordination between the water managers of two river basins from South of France, which share the same resources. By using a multi-dimensional analytical framework, we identify constraints related to local public actions which hamper such coordination. This study, confirmed by previous experiences of consulting services in the public sector, allows us to propose a participatory methodology that promotes inter-organizational coordination. Thus, we intent to outline an engineering of “territorial governance” for which procedures largely remain to be developed.
- La convergence du développement économique et humain au sein de l'Union européenne élargie - Rabih Zotti p. 421-454 L'harmonisation des niveaux de développement constitue l'un des principaux objectifs de l'Union européenne depuis sa création. Pour y parvenir, la Commission européenne mobilise deux types de politiques, les politiques régionales et les politiques de pré-adhésion à l'Union visant à renforcer la « cohésion européenne ». Mesurée par le niveau de convergence du développement économique, la cohésion européenne semble bien être en place à l'échelle des pays européens mais reste plus contrastée au niveau régional. Le niveau de développement économique (représenté par le PIB par habitant) sert non seulement de repère à l'attribution des fonds de cohésion aux régions « pauvres », mais aussi à l'évaluation de ces politiques par la Commission. Or, le développement harmonieux ne se résout pas à la seule dimension économique. Dans cet article, nous cherchons à tracer les évolutions des pays et régions de l'UE-27 selon deux conceptions différentes du développement, le développement économique et le développement humain, basées sur deux indicateurs : i) le PIB par tête et ii) l'IDH. Les analyses de convergence effectuées mettent en évidence des tendances relativement discordantes au sein de l'UE pendant les deux dernières décennies.Economic and human development convergence in an enlarging European Union
One of the main objectives of the European Union since its foundation has been the harmonization of the development levels of its country members. In order to achieve this, The European Commission adopts two types of policies, regional policies and pre-membership policies, with the aim of strengthening the "European cohesion". Measured by the level of economic convergence, this cohesion seems to be well established at the countries level but remains mixed at the regional levels. The level of economic development, represented by the GDP per capita, is not only an indicator for poor regions' eligibility for European cohesion funds ; it is also a tool for the Commission to evaluate these policies. Nevertheless, “harmonious development” cannot be reduced to a single economic dimension. In this article, we study the development of the countries and regions of the EU-27 according to two different concepts of development : economic and human, based on two different indicators : i) the GDP per capita and ii) the HDI. The convergence analyses which were carried out highlight some relatively conflicting trends in the European Union over the last two decades. - Les circuits de proximité, cadre d'analyse de la relocalisation des circuits alimentaires - Cécile Praly, Carole Chazoule, Claire Delfosse, Patrick Mundler p. 455-478 Le phénomène de relocalisation des circuits alimentaires recouvre une diversité de réalités, anciennes et plus innovantes, nommées de diverses façons : circuits courts, de proximité, filières courtes, etc. L'objet de cet article est de proposer un cadre théorique applicable à l'ensemble des circuits relevant de la relocalisation. L'état de l'art concernant les notions existantes ainsi que l'économie de proximité appliquée aux circuits alimentaires (re)localisés permettent de construire le concept de « circuits de proximité » (I). Celui-ci est ensuite mis à l'épreuve de trois études de cas, représentant une diversité de circuits et de produits qui y sont commercialisés (II). Les principaux enseignements des études de cas montrent l'intérêt du concept de « circuits de proximité » : d'une part, il englobe les objets qui dépassent la définition des circuits courts mais qui s'imposent aujourd'hui comme une nouvelle modalité pour relocaliser les filières alimentaires, d'autre part, il saisit le rôle des intermédiaires dans le développement des filières localisées.Proximity supply chains, an analytical framework for the localization of food supply chains
The localization of food supply chains represents various realities, old and most innovative, named in several ways : short food supply chains, local food, etc. The purpose of this paper is to propose a theoretical framework enabled to all marketing channels relative to the localization phenomenon. From a literature review of the existing concepts and the economy of proximity applied to local food supply chains, we build the concept of « proximity supply chains » (I). It is then tested in three case studies representing a variety of marketing channels and products (II). The main findings of case studies demonstrate the value of the concept of « proximity supply chains » : on the one hand, it includes marketing channels that exceed the definition of short supply chains but which are a way to localize the food supply chains, and on the other hand, it highlights the role of intermediaries in this localization. - Comptes Rendus - p. 479-483