Contenu du sommaire : Le foncier agricole au Sud : tensions et régulations dans l'accès à la terre
Revue | géographie, économie, société |
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Numéro | Vol. 19, 2017/3 |
Titre du numéro | Le foncier agricole au Sud : tensions et régulations dans l'accès à la terre |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Entre marchés, État et communautés : renouvellement des formes et des enjeux de l'accès à la terre agricole au Sud - Emmanuelle Bouquet, Jeanne Dachary-Bernard p. 299-305
- Le marché du faire-valoir indirect vecteur de nouvelles formes d'exploitation dans la néo-agriculture saharienne (Algérie) - Ali Daoudi, Jean-Philippe Colin, Alaeddine Derderi, Mohamed Lamine Ouendeno p. 307-330 Cet article propose une analyse du marché du faire-valoir indirect (FVI) dans des régions arides et semi-arides en Algérie. Ces trois dernières décennies, certaines de ces régions ont connu un processus rapide d'intensification agricole, marqué par le développement des cultures irriguées. Un véritable front pionnier agricole émerge ainsi sur des terres relevant formellement du domaine privé de l'Etat, jusqu'alors non cultivées ou consacrées à l'élevage pastoral et à la céréaliculture extensive. Ces nouveaux territoires agricoles attirent de nombreux agriculteurs venant du nord du pays, porteurs de savoir-faire et intégrés dans des réseaux commerciaux. Leur installation dans ces régions est facilitée par l'émergence d'un marché du FVI, qui rend la terre et l'eau accessibles. Ce type de situation offre ainsi l'opportunité de documenter les relations entre dynamiques productives, dynamiques foncières et dynamiques des structures de production. L'analyse privilégie le rôle des entrepreneurs maraîchers locataires. Elle repose sur des travaux de terrain conduits en 2012/2013 dans deux régions, l'une saharienne, l'autre située dans les hauts plateaux steppiques. Ces deux sites ont été choisis au regard de l'importance des dynamiques foncières marchandes et de la production maraîchère.This article offers an analysis of the rental market in arid and semi-arid Algeria. In the last three decades, some of these regions experienced a rapid process of agricultural intensification, marked by the development of irrigated crops. An agricultural frontier emerged on State lands hitherto uncultivated or dedicated to pastoralism and extensive cereal production. These new agricultural areas attract many farmers from the north of the country, experienced and well-connected to inputs and product markets through their networks. Their installation in these areas is facilitated by the emergence of the rental market for land and water. This type of situation offers the opportunity to document the relationship between the evolution of agricultural production, the dynamics of agrarian structures and land markets. Our analysis focuses on the role of small entrepreneurial vegetable-grower tenants. It relies on field work conducted in 2012/2013 in two areas, one Saharan, the other located in the high steppe plateaus. These two sites were chosen in view of the dynamism of both the rental market and vegetable production.
- Les élites urbaines comme nouveaux acteurs du marché foncier en Côte d'Ivoire - Jean-Philippe Colin, Gabin Tarrouth p. 331-355 Depuis quelques années, la question foncière dans les pays du Sud et en transition est abordée avec pour thème privilégié les « grandes acquisitions » de terres agricoles par des opérateurs internationaux. La place des élites nationales dans la reconfiguration des structures agraires reste souvent ignorée. Cet article offre un éclairage sur les acquisitions de terre par les élites urbaines en Côte d'Ivoire, une dynamique forte depuis les années 2000, essentiellement pour la réalisation de plantations d'hévéa. Après avoir discuté les acquisitions foncières par les élites nationales comme objet de recherche, il propose une caractérisation de ces acteurs et des transactions, évoque les tensions et conflits induits par ces transferts fonciers ainsi que les dispositifs de sécurisation mis en œuvre par les acquéreurs, et traite de l'usage productif des terres ainsi acquises. L'analyse repose sur des données collectées en 2013-2014 auprès de 100 acquéreurs et de 53 cédants.In recent years, the land issue in developing and transition countries tended to focus on the “land grab” of farmland by international operators. The role of national elites in the reconfiguration of agrarian structures remains often underestimated. This article sheds light on land acquisitions by the urban elites (“cadres”) in Côte d'Ivoire, a very dynamic trend since the 2000s, mainly for creating rubber plantations. After discussing land acquisitions by national elites as a research topic, the paper characterizes the actors and the transactions, pinpoints the tensions and conflicts induced by these land transfers and the securing strategies implemented by the cadres, and discusses the productive use of land so acquired. The analysis relies on data collected from 100 buyers and 53 sellers in 2013-2014.
- Réforme foncière et accueil des investisseurs à Madagascar : l'ambivalence de la politique foncière - Perrine Burnod, Beby Seheno Andriamanalina p. 357-376 Depuis 2005, Madagascar est le théâtre d'une vague d'annonces d'investissements agricoles et d'une réforme dans le domaine foncier jugée comme l'une des plus innovantes d'Afrique, basée sur la décentralisation de la gestion foncière et la reconnaissance légale des droits coutumiers. Sur cette période de 10 ans, il s'agit de savoir si la réforme foncière a freiné ou facilité les projets d'appropriations foncières à grande échelle des investisseurs et, en retour, si la présence de ces investisseurs a influé sur la gestion foncière de l'État. L'article démontre que les lois, les institutions et les outils instaurés par la réforme n'ont pas eu d'effet notable sur l'accès à la terre des investisseurs du fait d'interventions portant sur des territoires différents et impliquant des réseaux d'acteurs disjoints. Il souligne qu'au contraire, les sollicitations des investisseurs ont incité l'administration foncière à aller à contre-courant de la réforme en revendiquant les terres comme appartenant à l'État et en renforçant la centralisation de leur gestion. Le cas malgache montre ainsi que l'enjeu clé dans la régulation des investissements n'est pas la seule formalisation des droits mais le niveau effectif de décentralisation et d'inclusivité de la gestion foncière.Since 2005, lots of agricultural land based investments have been announced in Madagascar. Since the same date, a new land reform has been implemented. This reform organizes the decentralisation of land management and legally recognizes the local customary rights. In 2015, ten years later, the question is to know if this land reform has hindered or eased the land investments and, backward, if the investors' land demand has impacted on the State land management. The article demonstrates that the land reform, through its laws, institutions and tools, has not impacted on investors' land access because the land reform and the investors have targeted different territories and involved different networks of actors. The article underlines that, to the contrary, the investors' land demand has create incentives for the land administration to not promote the land reform but to move backward by claiming all the land as State owned land and by strengthening the centralization of land management. The Malagasy case shows that the key issue to regulate land investment is not only the formalisation of land rights but also the actual level of decentralisation and inclusivity of land management.
- Accès au foncier et relations de pouvoir : l'enchâssement des acquisitions foncières à grande échelle au Mozambique - Mathieu Boche, Ward Anseeuw p. 377-401 Malgré une littérature abondante, les acquisitions foncières à grande échelle sont généralement considérées comme des éléments exogènes aux territoires dans lesquelles elles sont réalisées. La plupart des analyses ne s'intéresse, en effet, qu'aux processus de consultation et à la reconnaissance légale des droits fonciers des populations locales. Cette approche ne permet pas de cerner la complexité du phénomène, et en particulier l'enchâssement social de ces acquisitions foncières. En s'appuyant sur l'étude empirique d'un échantillon d'acquisitions foncières à grande échelle au Mozambique, cet article analyse les modalités d'accès au foncier utilisées par les investisseurs et illustre les principes de l'influence réciproque entre ces projets et la gouvernance foncière. Les représentants de l'État aux différentes échelles et les élites nationales sont généralement en compétition pour bénéficier de ces opportunités d'investissement. Conscient de ces « faisceaux de pouvoir », les investisseurs les utilisent, selon différentes modalités, pour faciliter leur accès au foncier. Cette situation est utilisée par l'État central pour réaffirmer son autorité sur l'attribution des terres et se fait généralement au détriment de la protection des droits fonciers des communautés locales et en faveur du développement des projets d'investissements fonciers à grande échelle.In spite of an abundant literature, large-scale land acquisitions are generally considered as exogenous elements to the territories in which they occur. Most of the analyses focus, indeed, on the consultation process and on the legal recognition of local populations' land rights. This approach does not allow for a complete understanding the complexity of the phenomenon, particularly the social embeddedness of these acquisitions. Based on an empirical study of large-scale land acquisitions in Mozambique, this article analyses the modalities of land acquisition by investors and illustrates the principles of reciprocal influence between these investment projects and land governance. State representatives at different levels and national elites are generally in competition to benefit from these investment opportunities. Aware of these “bundle of powers”, the investors use them in different ways to facilitate their access to land. It is also used by the State to reaffirm its authority over land allocation. This process is generally in detriment of the protection of land rights of local communities, favouring the development of large-scale land investment projects.
- Regards sur les questions d'actualité. Une interview de Vincent Renard - Leïla Kebir p. 403-411
- Comptes Rendus - p. 413-429