Contenu du sommaire : Prisonniers de la Grande Guerre : victimes ou instruments au service des États belligérants – II

Revue Guerres mondiales et conflits contemporains Mir@bel
Numéro no 254, 2014/2
Titre du numéro Prisonniers de la Grande Guerre : victimes ou instruments au service des États belligérants – II
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier  : Prisonniers de la Grande Guerre  : victimes ou instruments au service des États belligérants – II

    • Introduction - Chantal Metzger p. 3 accès libre
    • L'internement des femmes étrangères dans l'Empire ottoman pendant la Grande Guerre. L'exemple de Mère Marie Constantina, religieuse de Sion (1915) - Jean-Noël Grandhomme, Nicolas Bermeo p. 5-26 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Au cours de la Première Guerre mondiale des dizaines de milliers de civils ressortissants des « nations ennemies » ou simplement « suspects » ont été internés par les différents belligérants. Parmi eux, de nombreuses femmes. Une fois entré en guerre, en octobre 1914, l'Empire ottoman pratique un internement partiel des étrangers et des suspects. C'est ainsi qu'une religieuse de Notre-Dame de Sion, Mère Marie Constantina (Fanny Manrique), est arrêtée en mai 1915 et détenue pendant soixante-treize jours. Condamnée pour intelligence avec l'ennemi, cette Alsacienne de nationalité allemande, mais ouvertement francophile, se trouve dans une position délicate : agent de l'ennemi pour les Ottomans, traître à la patrie pour l'ambassade d'Allemagne. Dans un contexte dramatique pour les chrétiens de l'Empire, alors qu'a commencé l'extermination des Arméniens sur fond d'invasion russe dans le nord-est de l'Anatolie et d'intervention alliée aux Dardanelles, elle ne doit son salut qu'à l'intervention du diplomate américain Henry Morgenthau. Son récit de captivité, publié et commenté ici pour la première fois, est riche d'enseignements.
      In the course of the First World War, tens of thousands of civilians who were nationals of the “enemy nations” or simply “suspects” were interned by the various belligerent parties. Among them were numerous women. Once it had entered the war, in October 1914, the Ottoman Empire carried out a partial internment of foreigners and suspects. It was in this way that a nun from the order of Notre-Dame of Zion, Mother Marie Constantina (Fanny Manrique) was arrested in May 1915 and held for seventy-three days. Found guilty of intelligence with the enemy, this Alsatian of German nationality but openly francophile found herself in an awkward position : to the Ottomans she was an enemy agent, and to the German Embassy, a traitor to the homeland. Set in a context that was dramatic for Christians living within the Empire, when the extermination of the Armenians was being carried out in the background of the Russian invasion of northeastern Anatolia and the Allied intervention in the Dardanelles, Mother Marie owed her life to the intervention of the American diplomat Henry Morgenthau. The account of her captivity, published and reviewed here for the first time, is rich in information.
    • Les prisonniers italiens de la Première Guerre mondiale - Michel Ostenc p. 27-41 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les prisonniers de guerre italiens de la Première Guerre mondiale subirent des conditions inhumaines de détention. Le gouvernement italien leur refusa le traitement prévu par les accords internationaux en les considérant comme les « traîtres » de Caporetto alors que la responsabilité de cette défaite incombait davantage au commandement militaire. Les prisonniers rentrèrent en Italie en reprochant aux classes dirigeantes de les avoir précipités dans la guerre sans préparation et au socialisme de les avoir abandonnés à leur sort. Cet esprit subversif ne fut pas étranger à l'avènement du fascisme.
      Italian prisoners in the First World War suffered inhumane conditions. The Italian Government refused to allow them the assistance to which they were entitled under international agreements, arguing that Caporetto revealed them as traitors, when in reality the responsibility for the defeat rested mainly on the military command. The prisoners returned to Italy full of reproach for the ruling classes that had sent the nation to war without due preparation, and reproach too for the socialism that had abandoned them to their fate. This mentality was subversive, and it played its part in the advent of Fascism.
    • Les prisonniers de guerre témoins et acteurs de l'histoire du communisme en Europe centrale et en Europe de l'Est dans les années de la Révolution (1917-1920) - Hannes Leidinger, Marianne Walle p. 43-54 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      On compte environ cinq millions de prisonniers de guerre sur le front Est pendant la Première Guerre mondiale. Cette contribution tente d'une part d'élucider les expériences de ces prisonniers en particulier sur fond de Révolution russe, de l'autre de ne pas présenter seulement les prisonniers comme des « victimes » qui subissent leur « destin ». Il s'agit de tenter de comprendre comment ils ont réagi en tant qu'individus et en tant que groupes politiques face à l'effondrement des monarchies d'Europe centrale, d'Europe de l'Est et à la formation de l'Union Soviétique, transformés en « acteurs de la révolution », en « avant-garde » du « mouvement communiste universel » en train de naître.
      About five million men were captured on the Eastern front in the course of the First World War. This article sets out, on the one hand, to elucidate the experiences of the men concerned, in particular against the backdrop of the Russian revolution. On the other hand, it seeks to show these prisoners not as mere victims of their fate but as actors, reacting both individually and in groups to the collapse of the monarchies of Central and Eastern Europe and to the formation of Communist Russia. In this transformation, these prisoners might well belong to the avant-garde of the nascent world-wide Communist movement.
    • Les prisonniers de guerre français en Bulgarie (1915-1918) - Gueorgui Peev p. 55-70 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le nombre total de prisonniers de guerre de l'Entente en Bulgarie (1915-1918) est assez élevé : quelque 40 000 hommes parmi lesquels 2 000 Français. Cependant le problème intéresse peu les historiens bulgares. Dans les documents officiels, les Français sont toujours réunis avec les Anglais sous le sigle « les Anglo-Français ». La Légation des Pays-Bas, chargée des intérêts de la France, ainsi que les représentations diplomatiques d'Espagne et de Suisse à Sofia, veille à l'observation des conventions de La Haye, surtout concernant les prisonniers français (les Britanniques sont à la charge des États-Unis). Les conditions de vie des prisonniers occidentaux (rejoints plus tard par les Italiens) sont bien meilleures que celles des Russes, des Roumains et surtout des Serbes dont la situation dans les camps est très mauvaise : c'est ce qu'ont constaté les représentants de la Croix-Rouge qui ont inspecté les camps et soulignent que les Français sont parmi les mieux traités.
      The issue of prisoners of war of the « Entente » in Bulgaria (1915-1918) remains far removed from the interest of Bulgarian historians. Their total number is high : some 40,000 men, including 2,000 French. In official documents the French and British prisoners have always been considered as a group, and the term most often used is “Anglo-French”. The living conditions of prisoners from Western European countries (the Italians later became part of this group) were far better than those of Russian, Romanian and especially Serbian captives. The Netherlands Legation, which represented the interests in Bulgaria of France, Spain and Switzerland, ensured that the text of the Hague Conventions was applied, especially for the French prisoners. The reports of the representatives of the Red Cross who inspected the camps also noted differences in the treatment, which varied widely according to the nationality of the prisoner. The French were among the best treated.
    • Le sort des prisonniers de guerre, notamment des prisonniers français, dans la monarchie austro-hongroise (1914-1918) - Verena Moritz, Julia Walleczek, Marianne Walle p. 71-86 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cette contribution donne une vue d'ensemble des principaux champs de recherche sur la situation des prisonniers de guerre : les conditions de vie dans les camps, les campagnes de propagande, le travail obligatoire, le rapatriement. Il s'agit de montrer la contradiction entre la politique officielle de la monarchie concernant les prisonniers de guerre et la terrible réalité. Tous durent suppléer au manque de main-d'œuvre à partir de 1916. Des milliers d'entre eux sont morts : épidémies, épuisement, sous-alimentation. Peu après leur capture, les prisonniers furent confrontés à une nouvelle dimension de leur situation : le travail obligatoire. La majorité fut envoyée dans l'arrière-pays pour des travaux divers, mais aussi derrière les lignes de front ou dans les zones de combat. L'article montre également l'influence de la Révolution russe de 1917 sur le destin des prisonniers. Une parenthèse s'ouvre sur la situation des prisonniers français détenus par la monarchie habsbourgeoise en 1914-1918.
      This article offers an overview of the central fields of research concerning prisoners of war (POWs) in the Habsburg Empire during the First World War, including conditions in the camps, propaganda campaigns, forced labour, and repatriation. It also shows the discrepancy between the principles of the Austro-Hungarian authorities relating to POW politics and an often harsh reality. All POWs were affected by the supply shortages which began in 1916. Thousands of POWs died from disease, exhaustion and undernourishment. In addition, soon after their capture, POWs faced a novel dimension in the realm of captivity : forced labour. Most prisoners were employed in various work projects, some in the hinterland, others behind the frontlines, and some even in combat zones. The article also illustrates how the Russian revolution of 1917 had its effect on the fate of POWs in the Habsburg Monarchy. It ends with a short excursus into the situation specific to the French who were held captive by the Habsburg monarchy in this period.
  • Varia

    • Benedetto Croce : la Grande Guerre vue à travers les écrits pour les soldats morts au front - Rosina Scalise Springer p. 87-93 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Pendant les années 1914-1918 l'historien et philosophe italien Benedetto Croce est confronté à la dureté de la Première Guerre mondiale. Même en n'étant pas mobilisé, Croce connaît pendant cette période les bombardements, la lutte continuelle pour l'existence, l'incertitude du lendemain, la douleur face aux pertes humaines. Ces événements bouleversent l'âme de l'historien, et se reflètent dans ses écrits. Ses pensées vont particulièrement aux jeunes vies que la Guerre fauche. Dans ses Pages sur la Guerre, plusieurs écrits sont destinés à honorer des soldats morts au front. Il s'agit de jeunes qu'il a connu directement ou indirectement et dont le décès le plonge dans un état de profonde consternation.
      In the years 1914-1918, the Italian historian and philosopher Benedetto Croce is confronted with the harsh realities of the First World War. Even if he is not called up for military service, Croce in this period experiences the bombing, the constant struggle for life, the uncertainty of tomorrow, the grief over human losses. These events overwhelm his spirit and are reflected in his writings. His thoughts go out especially to the young lives mown down by war. In his Pagine sulla guerra, many passages are consecrated to the honour of soldiers who died in battle. He is writing about young men whom he knew directly or indirectly, and their death plunges him into a state of profound dismay.
    • Les places de Dunkerque, Lille et Maubeuge, et l'invasion de 1914 : impréparations, improvisations et conséquences - Philippe Diest p. 95-108 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En août 1914, l'hypothèse d'une offensive allemande par la Belgique n'est pas prise au sérieux par les Français. Pourtant, le plan Schlieffen met en première ligne la frontière du Nord dont les infrastructures ont subi la concurrence de celles de l'Est. Ce sont donc trois places de guerre qui doivent, malgré des moyens matériels et humains faibles et des pressions politiques, tenter de stopper les Allemands. Le département est jusqu'en novembre 1914 traversé par les belligérants qui ne semblent s'intéresser que ponctuellement aux trois plus grands centres militaires au nord de la Somme. Comment expliquer le destin de ces trois villes durant le premier trimestre de la Grande Guerre et quelles en sont les conséquences pour leurs rôles militaires ?
      In August 1914, the possibility of a German attack through Belgium was not taken seriously by the French people. However, the northern frontier ended up as the front line, notwithstanding the obsolescence of its military installations. Despite the weakness of the defences, the lack of troops and the political pressures, three fortified cities had to stop the German advance. Up to November 1914, the Nord Département was traversed by troops that were little interested in these three great centres. How does one explain the fate of these three cities in the first three months of the Great War, and what were the consequences for their military roles ?
    • La guerre du magazine Match (1939-1940) - Hugues Marquis p. 109-125 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La création par le patron de presse Jean Prouvost, à la fin des années 1930, d'un hebdomadaire illustré à succès, Match, marque une étape importante dans l'histoire de la presse d'information. À la fois vecteur et élément constitutif de la culture de guerre, le magazine Match nous donne, dans ses numéros de septembre 1939 à juin 1940, une certaine image de la Seconde Guerre mondiale. Cet article relève et analyse dans Match les procédés utilisés pour montrer la guerre et dénigrer l'ennemi, ainsi que la participation de sa rédaction à l'effort de guerre dans le contexte d'un conflit dont on perçoit déjà la dimension totale.
      In the late 1930s, the creation of Match, a successful photo-news magazine, by the media owner Jean Prouvost was an important step in the history of the press. As a vector and component of “war culture”, Match gave us, from September 1939 to June 1940, a peculiar vision of the Second World War. This article identifies and analyses the different methods used in the magazine to present the war and to denigrate the enemy, as well as the participation of its editorial staff in the war effort, in the context of a conflict which would soon become global
    • Vichy au village : Le groupement des Chantiers de la jeunesse de Villard-de-Lans - Christophe Pécout p. 127-144 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le groupement 11 des Chantiers de la Jeunesse, basé à Villard-de-Lans dans le Vercors, est chargé d'intervenir sur la jeunesse locale en lui inculquant le discours pétainiste tout en la faisant réaliser des travaux d'intérêt général dans les forêts. Le groupement 11 devient un relai important entre le pouvoir vichyste et le monde rural et montagnard. Or, il s'avère que les jeunes locaux incorporés rejettent cette vie dans le groupement et que le reste de la population locale prend cause et parti pour les maquis qui prolifèrent au sein du Vercors.
      Group 11 of the Chantiers de la Jeunesse, based in Villard-de-Lans in Vercors, is put in charge of inculcating the message of Pétain into the local youth while at the same time employing the youth in communal work in the forest. Group 11 becomes an important contact between the Vichy government and the rural and mountain communities. The young units that are incorporated reject this initiative, while the rest of the local population takes the side of the resistance movements that proliferate throughout Vercors.
  • Comptes rendus