Contenu du sommaire : Revue de l'OFCE n°73
Revue | Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques) |
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Numéro | no 73, avril 2000 |
Titre du numéro | Revue de l'OFCE n°73 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier : Perspectives pour 2000-2001
- Tous ensemble ? Au début du printemps 2000, les perspectives de croissance mondiale sont très favorables : 4,2 % en 2000 et 3,9 en 2001, après 3,2 en 1999. Cette vigueur résulte de la poursuite d'une forte expansion aux États-Unis, d'une nette reprise dans la zone euro et au Royaume-Uni, du dynamisme retrouvé des pays émergents d'Asie et des économies en transition, enfin d'un rebond en Russie et en Amérique latine. La plus notable exception reste le Japon. La croissance est impulsée par le dynamisme de l'industrie et de l'investissement productif. Le décalage conjoncturel de la zone euro vis-à-vis des États-Unis n'explique pas l'ampleur de la dépréciation de l'euro en 1999, aussi bien vis-à-vis du dollar que du yen. La baisse de l'euro pourrait reposer sur des facteurs plus fondamentaux comme l'internationalisation intense des entreprises européennes. La convergence des taux longs, vers des niveaux de 6 % au début de 2001, marquerait un mouvement d'appréciation de l'euro face au dollar. Les Bourses, en particulier américaines, restent la principale épée de Damoclès de l'économie mondiale : elles ont atteint des niveaux sans précédent, qui aboutissent à des ratios profit/cours boursiers extrêmement bas, surtout pour les valeurs liées aux nouvelles technologies. Le krach semble inévitable, même si sa date est difficilement prévisible. On pourrait craindre que la croissance mondiale soit étouffée par des tensions inflationnistes causées par sa vigueur et sa généralité. Mais les tensions sur les prix du pétrole semblent s'atténuer. Le cours du Brent avoisinerait 23 dollars au deuxième trimestre et 20 dollars en 2001. Au Japon, la reprise de l'investissement public, cumulée une contribution extérieure positive, à la réalisation des commandes de biens d'équipement et au sursaut des salaires permettrait un rebond vigoureux du PIB au premier semestre et une croissance proche de 2% en 2000. À l'horizon 2001, la permanence de surcapacités privées et un ajustement de la politique budgétaire feraient retomber la croissance à 1,3%. Les pays émergents d'Asie ont repris le chemin de la croissance en 1999. Pour autant, les restructurations bancaires continuent de peser sur les finances publiques et sur le financement de l'économie. Les perspectives de croissance sont néanmoins globalement très favorables : 6,4% en 2000 et 6,6 en 2001. L'Amérique latine reste marquée par la crise financière et confrontée à un surendettement chronique. Une reprise est malgré tout visible dans les principaux pays au second semestre 1999. La croissance de la zone serait de 3,8% en 2000 et 4,3 en 2001. Les performances économiques de la Russie en 1999 ont été meilleures qu'escomptées grâce aux gains de compétitivité induits par la chute du rouble en 1998 et à la hausse du prix du pétrole. La croissance est repartie dans les pays d'Europe centrale et orientale après une période difficile en raison de la répercussion de la crise russe et, pour les pays des Balkans, de la guerre du Kosovo Dans la zone euro, l'activité bénéficie de taux d'intérêt relativement bas, de politiques budgétaires légèrement expansionnistes, d'une bonne situation financière des entreprises et du niveau de l'euro. Les croissances allemande et italienne accéléreraient enfin. La croissance de la zone serait de 3,6% en 2000 et 3,4 en 2001.All together ? Forecast for the world economy in 2000 and 2001 Division economie internationale Activity is expected to expand rapidly in many parts of the world economy (4,2 % in 2000 and 3,9 % in 2001), except in Japan where an excess of capacity still impediments growth. Asian emerging economies are growing rapidly again, even if structural problems remain. Activity is expanding in Latin America and in Central and Eastern Europe. Growth is expected to remain buoyant in the US in 2000 before softly decelerating. In the Euro Area output is sustained by low interest rates, slightly expansionary fiscal policies, a weakened Euro and improved corporate profitability. Monetary policies will be tightened to moderate US and European output growth. Oil priees are expected to decline from $30 a barrel in early 2000 to $20 in 2001. This will ease world inflationary pressures. The major threat to world growth remains a collapse of stocks markets. JEL code : F 01
- Croissance. net La prévision de croissance de l'OFCE est de 4,2 % pour l'année 2000 et 3,8 % pour l'année 2001. L'ensemble des composantes de la demande finale connaît une progression remarquable. La consommation des ménages s'accroît à un rythme élevé. Les achats des ménages sont dopés par les fortes créations d'emplois, par les baisses d'impôts effectives et annoncées, et par un accès aisé au crédit. Le commerce extérieur apporte un dynamisme supplémentaire dans un contexte de reprise de la demande mondiale et de compétitivité restaurée par l'appréciation du dollar. L'investissement des entreprises poursuit son mouvement de rattrapage amorcé après la « croissance molle » des années 1990. Le taux d'investissement atteint ainsi 18,1 % à la fin de l'année 2001. Les tensions inflationnistes ne se manifestent pas, grâce peut-être aux nouvelles technologies. La hausse de l'investissement permet une remontée des marges de capacité productive en 2001. Les tensions sur le marché du travail restent localisées à quelques secteurs et ne se traduisent pas par une reprise de l'inflation salariale. La politique de l'emploi continue à apporter un supplément important de créations d'emplois, essentiellement par l'intermédiaire de la réduction du temps de travail et des emplois-jeunes. Le chômage se réduit ainsi fortement et atteint 7,9 % de la population active à la fin de l'année 2001.Net. growth Forecast for the French economy in 2000 and 2001 Division economie francaise The GDP growth is expected to reach 4,2 % and 3,8 % in 2000 and 2001 respectively. Private consumption growth will stay high, being sustained by ample job creations, by present and advertised tax reductions and by an easy access to credit. Net exports are also expected to be dynamic, thanks to the recovery of world demand and because of an additional competitiveness due to a stronger dollar. Business investment will clearly strengthen, allowing French firms to rebuild their productive capacity. There is no sign of inflation tensions. Tensions on the labour market are restricted to a few sectors and still have no impact on wage inflation. Employment policy keeps on bringing an important amount of job creation especially trough the reduction working time and the jobs for young program. The unemployment rate is expected to decrease to 79 at the end of 2001. JEL code : F 0l
- Débat sur les perspectives Les prévisions occupent une place particulière dans le débat public en économie. Elles sont généralement considérées comme des prédictions, qualifiées fréquemment d'optimistes ou de pessimistes, comme si elles dépendaient de l'humeur des équipes qui les réalisent. Certes, en un sens, la prévision est un art tant elle dépend des signes précurseurs que nous livre le présent, de l'interprétation des évolutions en cours, de la capacité des économistes de sélectionner les informations pertinentes parmi celles, multiples, dont l'intérêt n'est qu'anecdo-tique. Mais elle est surtout une science puisqu'elle consiste à déduire des informations dont on dispose sur le présent une vision de l'avenir. Elle ne peut être formulée en dehors d'un cadre général d'interprétation, c'est-à-dire d'une théorie qui met en relation les informations que l'on privilégie et les variables que l'on cherche à prévoir. Parmi ces informations, certaines, cruciales, ne sont pas vraiment disponibles car, pour l'essentiel, elles dépendent de décisions à venir et qu'il n'existe pas vraiment de théorie permettant de déduire des données existantes ce que seront ces décisions. Il faut donc formuler des hypothèses alternatives et retenir celles qui nous paraissent les plus vraisemblables. Dès lors, les erreurs de prévision peuvent avoir au moins trois origines : une insuffisance d'information sur le présent, une mauvaise spécification théorique, la non réalisation de certaines hypothèses. De surcroît, il existe une incertitude irréductible au sens ou certains événements sont imprévisibles, alors même que leur conséquence sur l'activité économique est déterminante. Voilà pourquoi les chiffres associés à une prévision sont éminemment fragiles, qu'ils doivent être considérés comme conditionnels aux hypothèses que l'on formule, aux données dont on dispose et au cadre théorique dans lequel on raisonne. Il m'a donc semblé nécessaire que les prévisions réalisées par l'OFCE soient publiées en même temps qu'un débat autour de ces prévisions. Cela offre le double avantage de rendre explicite le doute inhérent à tout exercice de prévision pour les raisons déjà exposées, et de participer au pluralisme nécessaire à l'indépendance et au sérieux des études économiques. Une prévision, pour rigoureuse qu'elle soit, n'est pas un exercice mécanique au terme duquel la vérité serait révélée, mais une « histoire » raisonnée du futur délivrant des résultats incertains. Il est utile d'en comprendre d'emblée les limites, pour ne point s'en servir comme d'un argument d'autorité, à l'instar de ce qui est trop fréquemment le cas.
- Tous ensemble ?
- Croissance régionale, appartenance nationale et fonds structurels européens - Un bilan d'étape - Jacky Fayolle, Anne Lecuyer Cet article apporte sa contribution au débat sur le mouvement de la géographie économique européenne au travers de la mesure des performances comparées de croissance entre les régions de l'Union sur la période 1986-1996. Il examine la dépendance de ces performances à l'égard de l'appartenance nationale des régions et de leur accès aux fonds structurels européens. Il montre ainsi que la capacité d'une région retardataire à résorber ce retard de développement est certes positivement influencée par l'accès aux fonds structurels mais qu'elle est fortement conditionnée par l'appartenance nationale. Non seulement les performances d'un pays retentissent sur le sort de ses régions, mais le caractère équilibré ou inégal du développement régional est très variable d'un pays à l'autre de l'Union. L'échelon national corrige difficilement l'inégalité du développement régional, qui relève de la confrontation entre la logique nationale de ce dernier et la dynamique plus globale de la géographie européenne. Ce constat plaide pour des politiques territoriales européennes qui marient plus audacieusement intégration et décentralisation.Regional growth, national membership and European structural funds : an empirical appraisal Jacky Fayolle and Anne Lecuyer This article contributes to the debate on the evolution of the European economie geography. It compares the growth performances of the EU regions between the years 1986 and 1996. It studies the dependence of these performances on the regions' national membership and on the access to the structural funds. The ability of a backward region to catching up is positively influenced by that access, but it is also strongly conditioned by national membership. Not only the national performances influence the regional ones, but also the balanced or unequal character of the regional development is very variable from one country to the other. The national level corrects the inequality of regional development with difficulties, as this development results from interaction between national logic and global European dynamics. This fact pleads for territorial European policies at once better integrated and decentralised. JEL codes : O 11, R 11
- Plus-values, consommation et épargne - Une estimation de l'effet richesse aux Etats-Unis et au Royaume-Uni - Corinne Houizot, Hélène Baudchon, Catherine Mathieu La forte hausse des cours boursiers, observée dans la seconde moitié des années 1990, est fréquemment évoquée pour expliquer le dynamisme, au cours de cette période, de la consommation des ménages américains et britanniques, et son corollaire, la baisse du taux d'épargne. Cet article analyse les déterminants de la consommation des ménages dans ces deux pays, et en particulier l'importance de l'effet richesse. Il comporte trois parties : un survol des évolutions de la consommation, de l'épargne et de la richesse des ménages au cours des quarante dernières années ; un rappel de la théorie et des modèles à tester ; enfin la présentation des résultats économétriques. Aux États-Unis, d'après nos estimations, une augmentation d'un dollar de la richesse des ménages conduit à un accroissement de la consommation de l'ordre de 5,5 cents, soit des résultats proches de ceux publiés depuis Ando et Modigliani (1963). La forte baisse du taux d'épargne dans la période récente proviendrait essentiellement de la hausse de la Bourse. Au Royaume- Uni, une livre de richesse financière ou immobilière supplémentaire serait consommée à hauteur de 5 pence environ. Les fluctuations de la richesse immobilière résultant de la bulle immobilière de la fin des années 1980 et de son éclatement auraient fortement influencé le taux d'épargne. L'augmentation de la richesse financière aurait contribué positivement à la baisse du taux d'épargne au cours des dernières années.Wealth effects and consumer spending in the US and the UK Corinne Houizot, Helene Baudchon, Catherine Mathieu and Francisco Serranito The sharp rise in stock market priees over the second half of the 90's is said to have boosted household consumption in the US. Changes in housing and net financial wealth are also said to have had an impact on household consumption in the UK. This paper examines the impact of wealth effects on consumer spending in these countries. Several definitions of wealth are considered. Our empirical results show that a dollar's increase in net financial wealth generates a 5 cents' increase in consumption. The marginal propensity to consume out of net wealth is found to be similar the UK. Wealth effects explain the fall the household saving rate over the second half of the 90's.They have also played significant role in the UK. JEL codes : E 21, E 27
- Chronique de sociologie : comparaisons européennes
- Démocratisation de l'enseignement - Une comparaison européenne - Marie Duru-Bellat, Annick Kieffer L'évolution des inégalités sociales face à l'école, en France, tout au long du XXe siècle, peut être évaluée en construisant des modèles statistiques, qui permettent la comparaison avec les résultats disponibles dans les pays voisins. Si l'on observe des inégalités sociales dans tous les pays, leur configuration et leur évolution diffère. Le schéma le plus répandu reste néanmoins celui d'un déplacement des inégalités, sans que l'on puisse d'emblée parler de démocratisation. Les comparaisons permettent d'explorer certains pistes explicatives des différences entre pays (rôle de l'organisation du système éducatif notamment, mais aussi modalités des relations entre formations et emplois), d'où leur valeur heuristique.Democratization of teaching : an European comparison Marie Duru-Bellat and Annick Kieffer Evolution of social inequalities at school, in France, throughout XXst century, can be evaluated by statistical models, which allow the comparison with the results available in other countries. Configuration and evolution of social inequalities in the different countries differ. The main resuit is a displacement of inequalities. JEL code : I 28
- Relations et dépendances familiales. Regards croisés sur les étudiants français et italiens - Marco Oberti Les différences structurelles liées au type d'État-providence se retrouvent clairement dans la façon dont les étudiants se rattachent à la famille. Celle-ci est plus directement sollicitée en Italie, et les jeunes italiens engagés dans des études supérieures en dépendent très largement sur le plan matériel. La famille est également présente en France, mais intervient moins directement. Les jeunes français n'en sont pas cependant moins proches en termes de valeurs. Ainsi, le soi-disant familialisme italien vaudrait surtout en référence à la plus forte participation de la famille en tant que cellule de base au coût direct de la socialisation et de l'éducation des enfants et des jeunes adultes, et non pas tant en référence à l'idée d'une profonde identification des jeunes au système de valeurs de leurs parents.Family relations and dependence : glances on the French and Italian students Marco Oberti The structural differences related to the type of Welfare state are clearly remarkable in the way the students are attached to the family. The family is more directly requested in Italy, and young Italians engaged in higher studies depend on it very largely on the material level. The family is also present in France, but is less directly requested. Young French students are not however less closed in terms of values. JEL code : J 13
- La lente évolution de la sociabilité - Maxime Parodi La disparition de la communauté traditionnelle a suscité de nombreuses craintes sur les liens sociaux. Les innovations les plus diverses, qu'elles soient sociales ou technologiques, ont ainsi été soupçonnées de mettre fin aux liens sociaux. A cet égard, Internet ne fait pas exception : si cette technologie suscite chez certains les espoirs les plus fous, elle est accusée par d'autres d'enfermer l'internaute dans un monde virtuel, sans chaleur. Ces deux positions sont excessives : les nouvelles technologies viennent simplement s'inscrire dans une tendance repérable depuis plusieurs siècles. Ainsi que le disait Simmel au début du siècle dernier, loin de s'étioler, nos liens se forment différemment, davantage en fonction d'intérêts partagés et moins en fonction d'anciennes prescriptions ou d'anciennes contraintes.312 Summaries in English Slow evolution of sociability Maxime Parodi The disappearance of traditional community caused many fears on social relations. The most various innovations, social or technological, were thus suspected of putting an end to the social relations. In this respect, Internet does not make exception. As Simmel said, at the beginning of last century, our relations are formed differently, more according to shared interests and less according to old regulations or old constraints. JEL code : O 39
- Critique de rapports sur les retraites - Henri Sterdyniak