Contenu du sommaire : École et migration

Revue Revue Européenne des Migrations Internationales Mir@bel
Numéro vol. 34, no 4, 2018
Titre du numéro École et migration
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial : Expériences scolaires des mineurs migrants - Maïtena Armagnague, Isabelle Rigoni p. 7-11 accès libre
  • Les enfants migrants à l'école française. Accueil, parcours, relégation et expériences scolaires d'après l'enquête Trajectoires et Origines - Jean-luc Primon, Laure Moguérou, Yaël Brinbaum p. 13-43 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article, basé sur l'exploitation de l'enquête Trajectoires et Origines, propose un regard rétrospectif sur les parcours et l'expérience scolaires des enfants ou adolescents migrants. Il montre que ces derniers sont loin d'avoir été tous pris en charge à leur arrivée en France. Les difficultés scolaires durables rencontrées par les élèves arrivés après l'âge de la scolarité obligatoire sont manifestes et marquées par la fréquence élevée de sorties du système scolaire sans aucun diplôme. La surreprésentation statistique des enfants migrants dans les classes adaptées, non destinées à ce public a priori, mais aux enfants en grande difficulté scolaire et/ou porteurs de handicaps est symptomatique de pratiques plus ou moins délibérées ou conscientes de relégation scolaire de ces élèves, et cela en dépit des principes affichés dans les textes et règlements officiels. Enfin, l'expérience scolaire subjective, plutôt positive des enfants et adolescents migrants, contraste avec leurs parcours laborieux dans l'école française.
    ‪This article, based on the exploitation of the Trajectories and Origins database, offers a retrospective look at the educational paths and experience of migrant children or adolescents. It shows that they are far from having been all supported at their arrival in France. The long-term academic difficulties faced by pupils arriving after the age of compulsory schooling are obvious and marked by the high frequency of school dropouts without any diploma. The statistical overrepresentation of migrant children in adapted classes, not intended for this public in principle, but for children in great difficulty and/or handicapped is symptomatic of more or less deliberate and conscious practices of school relegation, despite the principles posted in the official texts and regulations. Finally, the subjective, rather positive, school experience of migrant children and adolescents contrasts with their laborious career in the French school.‪
  • Enfants et jeunes migrants à l'école de la République : une scolarité sous tension - Maïtena Armagnague-Roucher p. 45-71 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article analyse la mise en œuvre concrète du droit à la scolarisation d'enfants et jeunes primo-migrants en le présentant comme une construction sociale résultant d'une tension entre des politiques migratoires restrictives et des politiques scolaires plus ouvertes et ambitieuses. Ainsi, l'expérience scolaire se construit à partir d'une contradiction entre des logiques républicaines-libérales caractérisant le système éducatif d'une part et le climat de repli et de fermetures des frontières d'autre part. Ceci a pour effet de « brouiller » l'opérationnalisation du droit à la scolarité et de compromettre l'investissement scolaire des acteurs éducatifs, mais aussi des enfants et leurs référents éducatifs. Cette confusion s'illustre par une confrontation entre le temps scolaire et les effets sociaux de l'agenda politique et administratif de l'expérience des enfants et jeunes. Cette situation participe à la production de pratiques éducatives éparses et parfois troublées pour les acteurs éducatifs, les élèves et leurs proches qui ne parviennent pas toujours à cerner les légitimités politiques et philosophiques des orientations institutionnelles scolaires.
    ‪This article analyses the concrete implementation of the right to schooling for children and young migrant people. It is presented as social construction resulting from a tension between restrictive migration policies and more open and ambitious school policies.‪‪ ‪‪Therefore, school experience is built on a contradiction between the republican-liberal logics characterizing the education system on the one hand, and the atmosphere of retrenchment and closure of borders on the other. This results in “clouding” the enforcement of the right to schooling, and compromising the educational involvement of educational stakeholders, and also that of children and their educational referents.‪‪ ‪‪This confusion is illustrated by a confrontation between school time and the social effects of the political and administrative agenda and children and young migrant people's experience.‪‪ ‪‪This situation contributes to producing scattered and sometimes disrupted educational practices for educational stakeholders, pupils and their relatives who do not always manage to identify the political and philosophical legitimacy of institutional school guidelines.‪
  • Le droit à l'éducation à l'épreuve des migrations en France - Marie-Françoise Valette p. 73-92 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le refus d'inscription d'enfants migrants à l'école maternelle, comme celui de scolarisation des mineurs non accompagnés âgés de plus de seize ans, illustre une confusion fréquente entre obligation scolaire et droit à l'éducation. Cette situation peut découler de choix politiques assumés visant principalement les membres de la communauté Rom. Mais on ne peut exclure que, dans certains cas, cette erreur résulte d'une réelle ignorance du droit en vigueur. Dans tous les cas, il s'agit de graves atteintes aux droits de l'Homme. Aucune source juridique ne vient limiter le bénéfice du droit à l'éducation en fonction de l'âge, de la nationalité, ou du statut des parents, lorsque les bénéficiaires sont des enfants. Deux décisions adoptées par le Comité européen des droits sociaux, en 2018, précédées d'un rapport du Défenseur des droits sur l'école, publiée en 2016, nous invitent à une analyse des obligations incombant à l'État français pour assurer l'effectivité du droit à l'éducation.
    ‪The refusal to enrol migrant children in kindergarten, or to school of unaccompanied minors over the age of sixteen, illustrates a frequent confusion between compulsory education and the right to education. This situation may be the result of political choices mainly targeting members of the Roma community, sometimes on purpose. However, it cannot be ruled out that, in some cases, this error results from a real ignorance of the law in force. In all cases, it involves serious human rights violations. No legal source limits the benefit of the right to education according to the age, the nationality, or the status of the parents, when the beneficiaries are children. Two decisions adopted by the European Committee of Social Rights in 2018, preceded by a report by the Rights Defender on School, published in 2016, invite us to analyse the obligations incumbent upon the French State to ensure the effectiveness the right to education.‪
  • L'école, une ressource pour les populations migrantes. Regards croisés de l'institution et des parents d'élèves dans le centre-ville de Marseille - Gwenaëlle Audren, Virginie Baby-Collin, Marguerite Valcin p. 93-118 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article interroge le rôle de l'école élémentaire dans les quartiers populaires où réside une importante population de migrant·e·s primo-arrivant·e·s. Il présente les résultats d'une enquête qualitative menée entre 2015 et 2017 dans le centre-ville populaire de Marseille, qui est un espace d'accueil pour de nombreuses familles migrantes et/ou en situation précaire. À partir d'entretiens réalisés auprès de divers acteurs institutionnels, directeurs·trices d'écoles, parents d'élèves et acteurs associatifs, il interroge le statut de l'école, comme ressource et lieu de ressources, et comme facteur d'ancrage dans la ville. Il envisage la manière dont les professionnel·le·s de l'éducation s'adaptent au public spécifique des primo-arrivant·e·s, entre ajustements et engagements, et dont l'école, dépassant sa stricte fonction éducative, devient un espace de ressources multiples, jouant un rôle de médiation et de lien entre les migrant·e·s et la ville, favorisant l'installation et l'ancrage des familles dans l'espace urbain.
    ‪This paper analyses the role of primary school in working class areas where many recent migrants and newcomers live. It states the findings of a field-research that was conducted between 2015 and 2017 in Marseilles disadvantaged city centre, which hosts many migrant and/or precarious families. Based on semi-structured interviews that were carried out with parents, school directors, institutions and associations, the paper is a reflection on school as a resource and as a reason to settle in for the families. It deals with how education professionals adjust to this peculiar public of newcomers, between adaptation and adjustment. Exceeding its educational function, school becomes a space of multiple resources for both children and parents, playing a role of mediation and linking the migrants to the city, favoring the installation and anchoring of families.‪
  • La zone grise de l'allophonie : « mouvements secondaires » et scolarisation des « UPE2A italiens » de Strasbourg - Simona Tersigni, Lorenzo Navone p. 119-142 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le recours à la catégorisation institutionnelle d'élèves allophones mérite d'être éclairé par l'analyse de la singularité dans la prise en charge de ceux qui bénéficient du dispositif UPE2A (Unité pédagogique pour les élèves allophones arrivants) en provenance d'Italie et d'ascendance nord-africaine. Mené à Strasbourg, notre terrain d'enquête montre qu'après un début de scolarisation en Italie depuis la maternelle, ces jeunes s'établissent en France avec leur famille. Leur allophonie est scolairement jugée peu problématique par l'institution et pourtant sa dimension atténuée d'altérité linguistique, mais aussi sociale et culturelle questionne. Les modalités d'accueil et d'accessibilité de ces élèves aux dispositifs spécialisés et à la classe ordinaire dessinent une bande de contention à l'intérieur d'une zone de relégation qui se justifie par leurs besoins spécifiques en français de scolarisation. Ce cas d'étude spécifique montre que l'école publique crée ses propres frontières à l'intérieur d'une dialectique de captation à l'égard de la relocalisation en cours des frontières européennes. Ces enfants et adolescents arrivant dans le cadre des « mouvements secondaires » prouvent l'autonomie de leur famille face à la crise économique et celle de l'accueil des nouveaux pays d'immigration de l'Europe du Sud. Ils mettent également à l'épreuve l'institution scolaire française, en dévoilant des politiques éducatives d'urgence qui risquent à long terme de réinjecter les effets de leur segmentation au-delà de l'espace scolaire. Enfin, l'« allophonie tempérée » des élèves italo-nord-africains permet de repenser la redéfinition des frontières internes à l'Europe politique. Fonctionnant selon des pratiques irrégulières de suspension temporelle et de fragmentation spatiale, ces frontières exercent un impact sur les sujets dans la production d'une constellation de statuts différents ainsi que dans de multiples processus de classements et ségrégation.
    ‪The institutional category of “‪‪allophone‪‪ [non French-speaking] student” is here questioned by the analysis of a specific case study: namely, students of North African origin arriving from Italy and entering the UPE2A (‪pedagogical unit for allophone incoming students) in Strasbourg. After having been educated in Italy since preschool, such students migrated to France along with their families as a result of a “secondary movement”. Since they are Italian speakers, their allophony is considered as “less problematic” by the school system, and yet the attenuate dimensions of their linguistic, cultural and social otherness is investigated. The students' access to both specific and ordinary classes draws a “containment strip” into a relegation zone, which is justified by their specific needs in learning French. In the context of the ongoing reconfiguration of European borders, this specific case study shows how the public school system creates its own boundaries. These children and teenagers, arriving in the context of “secondary movements” within Europe, show their families' autonomy from the economic and reception crisis hitting Southern European countries. Their presence seems to challenge the French education system: while unveiling emergency education policies, their segmentation risks, in the long run, to extend its effects beyond the school space. The “mitigated allophony” of the Italian/North African students allows to consider the reconfiguration of the internal borders of political Europe. Such boundaries function accordingly to irregular practices of temporal suspension and spatial fragmentation, and thus have an impact on the subjects involved. In practice, these boundaries produce a constellation of different statuses as well as processes of multiple classification and segregation.
  • École et migration en Guyane française : invisibilité des parcours migratoires dans les dossiers scolaires à Maripasoula - Alexandra Vié p. 143-165 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans cet article, nous proposons d'interroger la migration par le prisme de l'école en Guyane française. Puisque l'accès à la scolarité est conditionné par la production de documents administratifs, nous avons choisi de travailler à partir de dossiers scolaires d'enfants et d'adolescents. L'absence d'écriture dans les dossiers, la récurrence des attestations d'hébergement chez un tiers, la pluralité des adresses sont autant d'éléments qui mettent en avant la manière dont les enfants et leurs familles pratiquent le territoire et par conséquent l'école. En confrontant différents récits, nous tenterons de dégager des pistes de réflexion sur la mise en mots des parcours migratoires des enfants et des jeunes migrants, à Maripasoula, ville d'Amazonie, située à la frontière du Brésil et du Suriname.
    ‪In this article, we propose to question the migration by the prism of the school in French Guiana. The access to the education is conditioned by the administrative papers. We have therefore chosen working from the scholastic folders of the children and the adolescents. Illiteracy can be seen with the absence of writing. The attestations of lodging mention frequently several addresses. All of this information explain how the children and their families practice our territory and the school. By the confrontation of this different narration and experiment, we will try to expose some words about the migration experience of the children and the young migrants in Maripasoula, Amazonia town, placed between the Brazil and the Suriname.‪
  • Varia

    • Impact de la migration sur la croissance économique dans les pays de l'OCDE - Leila Ben Ltaief p. 167-193 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article étudie le dynamisme de la migration internationale et ses conséquences sous-jacentes sur le marché du travail et le chômage. Empiriquement, on présente une évaluation de l'impact de ce phénomène sur la croissance économique de vingt-neuf pays de l'OCDE durant la période 2000-2015. Ce travail repose sur un ensemble de données qui permet de distinguer les migrants selon leur niveau d´éducation. Cette structure constitue une caractéristique essentielle qui détermine en grande partie les principaux effets sur la croissance économique. L'outil économétrique est basé sur la méthode des moments généralisés en panel dynamique afin de pouvoir traiter l'endogénéité potentielle des variables de migration. Dans ce cadre, nous identifions un impact positif du capital humain étranger sur la croissance économique des pays d´accueil, à l´exception de celui qui représente les allochtones faiblement instruits.


      ‪This article examines the international dynamics of immigration and its underlying implications on labour market and unemployment. Empirically, we present a reappraisal of the migration impact on economic growth for twenty-nine OECD countries during the period 2000-2015. It is based on a dataset that enables to distinguish migration by education level. This structure is an essential feature that largely determines the main effects on economic growth. The econometric tool is based on the Generalized Method of Moments for dynamic panel, in order to deal with the potential endogeneity of the migration variables. In this framework, we identify a positive impact of the foreign human capital on economic growth of the receiving countries, with the exception of one who represents immigrants weakly educated.‪

    • Des ressources pour une union, une union contre des ressources : mise en couple et conditions de vie chez les immigré·e·s d'Afrique subsaharienne après leur arrivée en France - Mireille Le Guen, Élise Marsicano, Nathalie Bajos p. 195-221 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Lorsqu'ils arrivent en France, généralement à un âge auquel les couples se forment, les immigré·e·s d'Afrique subsaharienne connaissent des conditions de vie particulièrement difficiles. Or, les dynamiques conjugales dépendent des ressources économiques et matérielles détenues par les individus et ce, de façon différente pour les femmes et les hommes. De fait, les hommes pourraient avoir des difficultés à entrer en union après leur arrivée France, alors que les femmes seraient amenées à se mettre rapidement en couple, accédant aux ressources matérielles de leur conjoint et ainsi, échapper à la précarité économique. Cet article détaille les conditions d'entrée en union des immigré·e·s d'Afrique subsaharienne après leur arrivée en France. Nous utilisons les données de l'enquête biographique ANRS-Parcours menée en 2012-2013 en Île-de-France. Nos résultats mettent en évidence le fait que les hommes immigrés d'Afrique subsaharienne entrent moins rapidement en union que leurs homologues de sexe féminin. Chez ces derniers, la mise en couple dépend du fait d'avoir un emploi stable, un logement personnel ou un titre de séjour pérenne. En outre, plus leurs conditions de vie sont favorables, plus ils entrent rapidement en union. Pour les femmes en revanche, la mise en couple ne semble pas dépendre de leurs situations administrative ou professionnelle. Il semblerait même que le fait d'entrer en union puisse leur permettre d'améliorer leurs conditions de vie.
      ‪When arriving in France, at the age at forming a union, sub-Saharan migrants experience highly precarious living conditions. Considering that conjugal dynamics depend on the economic and material resources held by individuals, and in a different way for both sexes, men may have difficulty entering into a union after their arrival in France, while women would be required to quickly couple and access the material resources of their spouse, and thus escape economic instability. This article details the conditions of starting a union by sub-Saharan immigrants after their arrival in France. We use data from the ANRS-Parcours biographical survey conducted in 2012-2013 in Paris area. Men enter less quickly into union than their female counterparts. For sub-Saharan migrant men, pairing seems to be conditioned by having stable employment, personal housing or a permanent residence permit. In addition, the more favorable their living conditions are, the sooner they enter into a union. For women, however, couples do not appear to be dependent on their administrative or professional situation. It would even seem that the fact of entering a union would enable them to improve their living conditions.‪
  • Chronique juridique

  • Notes de lecture