Contenu du sommaire : Faut-il craindre le syndicalisme judiciaire ?

Revue Les cahiers de la justice Mir@bel
Numéro no 2016/3
Titre du numéro Faut-il craindre le syndicalisme judiciaire ?
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Édito

  • Tribune

    • De la nécessité d'encadrer l'activité syndicale des magistrats - Bertrand Mathieu p. 395-403 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Partant du postulat selon lequel la justice est une fonction de l'État, et non un contre-pouvoir, et que la légitimité du juge repose sur son impartialité, deux conséquences en seront tirées. La première peut s'énoncer ainsi : tant le droit du justiciable à un procès équitable que le principe de séparation des pouvoirs, impliquent qu'il soit interdit aux juges, individuellement ou en corps, et donc aux syndicats, de prendre publiquement des positions politiques et de s'immiscer dans la détermination de l'intérêt général qui appartient au pouvoir politique. C'est sur cette base que doit être engagée une réflexion sur la nécessaire réforme du droit syndical dans la magistrature. La seconde conséquence, renvoie à la composition, et indirectement aux compétences, du Conseil supérieur de la magistrature. L'indépendance de la justice ne peut se traduire par une autogestion syndicale du corps. L'extension des compétences de l'organe chargé de garantir l'indépendance de l'autorité judiciaire, doit être précédée d'une réflexion sur cette question. Il n'en reste pas moins que dans un contexte qui conduit le pouvoir politique à se défausser de ses responsabilités sur une justice dépourvue de moyens, le rôle des syndicats dans la défense des intérêts matériels des magistrats, est essentiel.
      Starting from the premise that the justice system is a function of the State, and not a counter-power, and that the legitimacy of judges lies in their impartiality, two conclusions will be drawn. The first can be expressed as follows : both the defendant's right to a fair trial and the principle of separation of powers imply that judges, individually and collectively, and therefore their trade unions, are prohibited from publicly expressing political opinions and getting involved in the determination of what constitutes the public interest, which is the role of politicians. It is on this basis that the need for reform of the trade union rights of the judiciary must be considered. The second conclusion concerns the composition and indirectly the powers of the Conseil Supérieur de la Magistrature (High Council of the Judiciary). The independence of the judiciary cannot take the form of self-management by a trade union. This issue must be given careful consideration before extending the powers of the body responsible for guaranteeing the independence of the judiciary. The fact remains that against a background in which politicians are shirking their responsibilities and passing the buck to a justice system that lacks the necessary resources, the unions' role in defending judges' material interests is essential.
  • Dossier. Faut-il craindre le syndicalisme judiciaire ?

    • Faut-il craindre le syndicalisme judiciaire ? - p. 405-406 accès libre avec résumé
      On résume à tort la naissance du syndicalisme judiciaire à la naissance du syndicat de la magistrature en mai 68. En réalité, cette naissance s'enracine dans notre histoire républicaine. Très tôt, le syndicalisme fut le moyen de donner corps à la société afin de la rendre gouvernable. C'est ainsi que le délit de coalition fut supprimé (1864) et que la IIIe République affirma le principe de la liberté syndicale. Il ne pouvait plus être question de laisser face à face l'État et les individus comme le voulait la culture politique issue de 1789. La crainte des foules et des grèves avec leur inévitable cortège de violences rendait indispensable d'organiser la vie collective. Il fallait redonner aux corps intermédiaires toute leur place afin de favoriser une représentation pacifiée de la société. C'est ainsi que le syndicalisme fut institué comme un contre-pouvoir représentatif face au pouvoir de l'employeur. Il a eu dès lors, selon P. Rosanvallon (La question syndicale, Pluriel, 1998), trois fonctions : représenter la société, ses groupes sociaux et ses métiers ; contribuer à la régulation sociale en participant aux organismes liés à son activité ; organiser la solidarité au sein du groupe représenté. C'est ainsi qu'au sortir de la Seconde guerre mondiale, le syndicalisme judicaire va structurer une profession réduite jusque-là à une administration hiérarchisée et sans représentation.Dans cette période fondatrice, la fonction régulatrice va jouer pleinement. Ce n'est pas un hasard, comme le montre JP Royer, si le premier syndicat de magistrats (Union fédérale des magistrats) est créé en même temps que le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), autorité gouvernante de la profession dont il a organisé les élections. La profession s'organise pour la première fois hors de la sphère du pouvoir exécutif. Il en est de même, plus nettement encore, comme le montre les contributions de ce dossier des Cahiers, dans tous les pays où un tel Conseil supérieur existe. En Italie, la volonté de rupture avec le fascisme s'est poursuivie par la construction d'un modèle professionnel dont le CSM fut le lieu naturel (D. Piana). En Espagne, après une phase de clandestinité sous le régime de Franco, les magistrats se sont organisés pour obtenir, avec la constitution de 1978, un modèle de Conseil supérieur formé exclusivement de juges élus (L. Verzelloni).La représentation du corps judiciaire s'est beaucoup diversifiée avec les fonctions spécialisées. Il n'y a plus d'identité collective homogène de la magistrature mais une pluralité de métiers enchâssés dans un corps unique. De là nait un univers « parasyndical » où se développent les associations ou coordinations aptes à représenter la réalité des activités exercées. Ainsi sont apparues les instances de représentation des chefs de juridiction (conférences des Premiers présidents, par exemple) mais aussi des jeunes magistrats comme l'association des jeunes magistrats (AJM) soucieuses de faire connaître les questions identitaires qu'ils se posent (V. Lepeu et P. Huber) et de nombreuses associations spécialisées selon leur domaine d'activité (associations de magistrats de la jeunesse, des juges de l'application des peines, des juges d'instances...) qui sont, avec les syndicats, les interlocuteurs permanents du parlement et de la chancellerie. Pluralisme que l'on retrouve en Italie (les « correnti ») et en Allemagne, une fois difficilement purgé l'héritage du nazisme, sous la forme d'une « culture de participation » à l'élaboration des projets de loi tant au niveau fédéral que dans les Länder (H.E. Böttcher).Cette segmentation affecte directement la solidarité, troisième fonction du syndicalisme. Il s'agit d'une solidarité de corps liée, dès l'origine, par une formation commune au parquet et au siège via l'École nationale de la magistrature. La défense des intérêts de la profession reste centrale (V. Duval) surtout pour s'opposer à la gestion entrepreneuriale imposée d'en haut. C'est ainsi que l'Union syndicale des magistrats (USM) pèse sur les lois en discussion, résiste aux formes brutales de management et recense les cas de souffrance au travail. Mais la solidarité est plus vaste comme en témoigne la diffusion d'une « culture de résistance critique » dans les pays où l'indépendance de la justice est menacée - jadis en Grèce et récemment en Serbie - grâce au MEDEL, organisation liée au syndicat de la magistrature (SM) (E. Alt).Ce contre-pouvoir syndical bien qu'institué a toujours été dénoncé pour son rôle perturbateur et contestataire. Sa légitimité sociale a été pensée dès l'origine comme rivale de la légitimité politique. Le syndicalisme a grandi dans cette culture critique de la démocratie électorale. Le syndicalisme judicaire aussi d'autant qu'il dut se faire une place dans un État qui ne l'attendait guère. L'avancée récente des juges sur la scène de la démocratie ne pouvait pas ne pas accroître cette tension d'autant qu'elle coïncide avec l'érosion de l'éthique politique incarnant une légitimité concurrente de la sienne.Tension accrue, voire exacerbée, dans nos sociétés où les médias désignent eux-mêmes les acteurs du débat politique. Tout se passe comme si à côté de la scène institutionnelle s'ajoutait une représentation immédiate où le juge s'oppose souvent aux élus. C'est ainsi qu'en Belgique, l'association syndicale n'hésite pas à dénoncer dans ses prises de parole une « mise à sac du pouvoir judiciaire par le monde politique » (M. Cadelli). Comme l'écrit Jean de Maillard, « le syndicalisme judicaire est victime expiatoire d'une défiance ancestrale envers la magistrature réactivée par la crise du politique ». Il est inévitable que le juge se heurte partout en Europe où il est sur le devant de la scène, au reproche de politisation dès lors qu'il s'autorise à lier l'exécutif à des normes dont il s'estime le garant. C'est pourtant, comme le montre ce dossier, en occupant cette place qu'il écrira une page nouvelle de la démocratie.
    • Des magistrats et des avocats s'expriment : l'éclusion syndicale - Jean-Pierre Royer p. 407-416 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le phénomène syndical a son histoire, et sa structuration, au sens d'un regroupement de personnes dans l'intention de défendre leurs intérêts professionnels, remonte, dans le monde de la justice, aux années 1920. Elle s'est développée après la Seconde Guerre mondiale avec le sentiment qu'il était nécessaire d'agir solidairement, non seulement dans un but de protection, mais aussi de conquête de territoires d'expression. C'est la généalogie de cet héritage qui est retracée ici à travers quelques jalons historiques marquants.
      Trade unionism has a history, and its formation - in the sense of the grouping together of workers with the aim of defending professional interests - in the judiciary goes back to the 1920s. It grew after the Second World War, out of a feeling that there was a need to act in solidarity, not only for purposes of protection, but also with a view to winning the right to speak out. It is the lineage of that heritage that is examined here, through the prism of a few noteworthy historical milestones.
    • Le fait syndical dans la magistrature française - Marc Robert p. 417-423 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article publié dans la revue Déviance et société (1978) rappelle qu'en 1968 est né le Syndicat de la Magistrature, issu en partie du phénomène de concentration des jeunes magistrats pendant le temps de leur formation. Il en évoque les points forts : la dimension collective du syndicalisme (en opposition avec la culture hiérarchique), la relation avec les syndicats « frères », la définition d'une « légalité quotidienne » à partir d'un certain humanisme et la reconnaissance juridique du syndicat par le Conseil d'État.
      This article published in the journal Déviance et société (1978) discusses how the Syndicat de la Magistrature (Trade Union of the Judiciary) was founded in 1968, partly as a result of the phenomenon of concentrating young judges together during their training. It deals with the union's strengths : the collective dimension of trade unionism (as opposed to hierarchical culture), relations with " fellow " unions, the defining of the notion of " everyday legality ", based on a certain form of humanism, and the legal recognition of the Union by the Council of State.
    • À propos du texte de Marc Robert - Florence Audier p. 425-429 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La création du Syndicat de la magistrature, en 1968, se situe dans un contexte spécifique : bouleversements de la société qui impactent directement la fonction judicaire, mutations complexes du côté de la magistrature, qui se trouve confrontée à la montée en puissance d'un contentieux de masse ouvrant sur de nouvelles questions sociales et humaines et bousculant son fonctionnement hiérarchique traditionnel. Pourtant, les questions évoquées par Marc Robert dans « Le fait syndical dans la magistrature française » restent largement d'actualité, qu'il s'agisse du rôle de la justice ou du syndicalisme au sein du corps judiciaire.
      The creation of the Syndicat de la Magistrature in 1968 took place against a very specific background : upheaval in French society that was having a direct impact on the judicial system, complex changes to the judiciary, which found itself faced with the rise of powerful mass contention raising new social and human issues and challenging its traditional hierarchical functioning. And yet the issues raised by Marc Robert in "Trade Unionism in the French Judiciary" remain as relevant today as they have ever been, both in terms of the role of the justice system and trade unionism among the judiciary.
    • Histoire et fondement de l'USM - Virginie Duval p. 431-440 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article rappelle l'histoire de l'Union syndicale de magistrats née en 1974 dans le prolongement de l'UFM (Union fédérale des magistrats) née en 1945. Il analyse l'évolution qui a forgé son identité et ses valeurs. Fermement attachée à un positionnement apolitique et aux idéaux démocratiques d'indépendance et d'impartialité, l'USM contribue aussi à la défense des intérêts moraux et matériels de la magistrature.
      This article retraces the history of the Union Syndicale de Magistrats launched in 1974 to replace the UFM (Union Federale des Magistrats) set up in 1945. It examines the developments that have forged its identity and values. Steadfastly committed to an apolitical stance and democratic ideals of independence and impartiality, the USM also works to defend the moral and material interests of the judiciary.
    • Syndicalisme et justice : vieille lune ou idée neuve ? - Jean de Maillard p. 441-455 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Vivement attaqué pour sa politisation, le syndicalisme judiciaire ne correspond guère à l'image que lui donnent ceux qui voudraient le voir disparaître. Mais sera-t-il capable de prendre le tournant qu'imposent les changements de la société ? Ceux-ci ont eu un impact majeur sur le fonctionnement de la justice, avec le déplacement progressif vers le juge des régulations sociales autrefois assumées par l'État. Or la justice n'a ni les moyens, ni les compétences pour assumer ces nouvelles attributions et l'institution judiciaire se heurte aujourd'hui aux limites que lui imposent ses structures et son fonctionnement sclérosés. Le défi du syndicalisme judiciaire, pour lui-même et pour le système judiciaire, est de trouver les réponses à une évolution qui transforme l'État-providence en État de surveillance et substitue au juge judiciaire, dans des domaines de compétence accrus, le juge administratif bénéficiant d'une confiance du politique dont lui-même est privé.
      Regularly attacked for being too political, judiciary trade unionism no longer fits the image preferred by some of those who would like to see its demise. Will it be able to negotiate the change in direction demanded by developments in society at large ? These societal changes have had a major impact on the way the justice system operates, with the role of social regulation that used to be played by the State being gradually transferred to its judges. The problem is that the justice system has neither the resources nor the competencies to take on this new role and is today constrained by the limits imposed on it by its fossilised structures and practices. The challenge facing the trade unions is to find, for themselves and the judicial system, responses to the developments that are turning the welfare state into a surveillance state and replacing the judicial judge, in an increasing number of areas, by the administrative judge, who enjoys a level of trust by politicians that the former does not have.
    • L'Association des jeunes magistrats ou comment construire son indépendance - Vanessa Lepeu, Paul Huber p. 457-464 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'association des Jeunes Magistrats (AJM) a été créée pour répondre à un besoin d'expression collective dans le contexte de la mise en cause des jeunes magistrats au cours de l'affaire dite « d'Outreau ». En complémentarité des actions des syndicats et des associations de professionnels déjà existants, l'AJM a permis aux magistrats sortants de l'ENM de mettre en commun leur dynamisme, leur regard neuf sur l'institution et leur volonté de changer les pratiques professionnelles sans attendre moyens ou réformes. Elle a démontré sa capacité à faire bouger les lignes, à se questionner, tout en apportant de la modernité dans les formes de mobilisation et de communication. Résolument tournée vers la cité, le justiciable et la qualité du service qui lui est rendue, elle participe de la construction constante de l'indépendance des magistrats qui la composent.
      The AJM, an association of young judges, was set up in the aftermath of the famous "Outreau Affair" to give young judges a much-needed collective voice. With a role complementary to those of the existing trade unions and professional associations, the AJM has enabled newly qualified judges leaving the ENM (National School for the Judiciary) to pool their energy and share their fresh vision of the judicial institution and their determination to change professional practices without waiting for resources or reforms to be bestowed from above. It has already demonstrated that it has the ability to push at boundaries, question its own role and inject a dose of modernity into the forms of mobilisation and communication used. Firmly focused on civil society, the people who come into contact with the justice system and the notion of quality of service, it is contributing to the constant construction of the independence of its members.
    • Les organisations de magistrats en Europe : une histoire politique - Éric Alt p. 465-475 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les atteintes à l'indépendance de la justice ont pris une forme insidieuse : sous l'empire d'un nouveau management public, des stratégies d'entreprise sont appliquées à la justice, transformant le juge en maillon d'un système de production. Les organisations de magistrats y opposent une résistance, ancrée dans une culture politique et une pensée critique, confortée par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Cette résistance a aussi contribué à l'émergence d'une nouvelle diplomatie judiciaire, face à l'internationalisation des enjeux et à la mondialisation du droit.
      Interference with the independence of the judiciary has taken an insidious form : in the grip of a new brand of public management, business strategies are being applied to the justice system, turning the judge into a link in a production line. Judges' organisations are resisting this movement, from a standpoint anchored in political culture and critical thinking, backed by the case law of the European Court of Human Rights. This resistance has also contributed to the emergence of a new judicial diplomacy, in the face of the internationalisation of the issues and the globalisation of the law.
    • Arène de conflit ou acteur institutionnel ? Le rôle de l'Association Nationale des Magistrats dans la gouvernance judiciaire italienne - Daniela Piana p. 477-487 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'Association Nationale des Magistrats représente en Italie la presque totalité des magistrats, du siège et du parquet. Après un long parcours qui a progressivement éloigné la magistrature italienne d'un modèle hiérarchique l'ANM est devenue le reflet le plus évidente d'un corps culturellement pluriel, dont les approches et les façons d'interpréter le rôle de magistrat tracent les lignes d'une différentiation souvent conflictuel voir de tension sur certains axes de la politique de gouvernance du judiciaire. Cet article reconstruit d'abord les développements historiques du syndicalisme judiciaire en Italie et en analyse les effets sur les récents instruments adoptés par le Conseil supérieur de la magistrature pour nommer les magistrats chefs de juridiction.
      The National Association represents Magistrates in Italy almost all the magistrates, judges as well as prosecutors. After a long way that has gradually removed the Italian judiciary of a hierarchical model ANM has become the most significant reflection of a culturally plural body. The approaches and ways of interpreting the role of magistrate trace the lines an often confrontational differentiation, turning into several tensions on certain issues of the judicial governance. This article first reconstructs the historical developments of the Unions of judges Italy and then analyzes the effects they have on the recent instruments adopted by the Supreme Judicial Council to appoint the chief judges and the chief prosecutors.
    • Au-delà des voix plurielles. Les nouvelles transformations du syndicalisme judiciaire en Espagne - Luca Verzelloni p. 489-496 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En Espagne, le poids de l'histoire a joué un rôle déterminant sur le processus de démocratisation et sur les orientations institutionnelles du pays. Après la chute de la dictature, la magistrature a pris toute sa part à l'oeuvre de réconciliation nationale, et dans cette phase de transition, la mobilisation autour du groupe Jueces para la démocracia autour de l'Asociation profesional de la magistratura a permis de faire valoir un répertoire de revendications convergentes au plan professionnel, en dépit d'un paysage syndical morcelé.
      In Spain, the country's history has weighed decisively on the process of democratisation and on the country's institutional orientations. After the fall of the dictatorship, the judiciary fully played its role in the process of national reconciliation, and during that transitional phase, the mobilisation centred on the Jueces para la démocracia group and the Asociation profesional de la magistratura enabled the judiciary to put forward a convergent package of professional demands, in spite of the fragmented trade union landscape.
    • Le syndicalisme judiciaire en Allemagne : du monolithisme au pluralisme - Hans-Ernst Böttcher p. 497-508 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Après l'effondrement du régime nazi, et à la faveur de la Loi fondamentale de 1949, l'Allemagne s'est dotée d'un système fédéral qui, depuis lors, a largement modelé son paysage syndical. Au monolithisme qui prévalait dans l'immédiat après-guerre a ainsi succédé la phase de transition des années 1965-1970, marquée par l'émergence de contre-courants, pour aboutir à la situation actuelle d'un pluralisme judiciaire, singulièrement en matière d'organisations professionnelles.
      After the collapse of the Nazi regime, with the Fundamental Law of 1949, Germany adopted a federal system that has largely modelled its trade union landscape ever since. The monolithic situation of the immediate post-war period was succeeded, between 1965 and 1970, by a transitional phase marked by the emergence of counter-movements, eventually leading to the current situation of judicial pluralism, particularly in the area of professional organisations.
    • En Belgique, une action sur deux fronts - Manuela Cadelli p. 509-518 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dès son origine, la Belgique démocratique a voulu tenir en respect le pouvoir exécutif et l'administration dont elle avait subi les abus sous le régime hollandais. Les magistrats n'ont ainsi jamais eu à lutter au sein du jeu institutionnel pour conquérir une indépendance qui leur était acquise de droit. En revanche, les moyens leur ont longtemps fait défaut et le reproche en a régulièrement été adressé au monde politique. C'est dans ce contexte conflictuel, à la fois spécifique et récurrent, que se déploie - et prend sens - l'action de l'Association syndicale des magistrats belges.
      For as long as it has existed, democratic Belgium has sought to keep the executive and the administration in check, after suffering their abuses under Dutch rule. The judiciary have never had to fight for their independence among the country's institutions as that independence is theirs by law. On the other hand, they have long suffered from a shortage of resources and have regularly reproached politicians for this situation. It is against this conflictual background, at once specific and recurrent, that the actions of the Association Syndicale des Magistrats Belges unfold and take on their meaning.
  • Chroniques

    • Le notion d'arbitraire dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme - Julien Portier p. 521-531 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La Cour européenne des droits de l'homme utilise fréquemment l'arbitraire dans la motivation de ses décisions. L'étude de sa jurisprudence permet de préciser les contours de cette notion, aujourd'hui encore ambiguë et floue : illégalité, mauvaise foi, obscurité des processus décisionnels sont des éléments de l'arbitraire qui se manifestent lorsqu'une autorité, affranchie à la fois de toute contrainte et de toute rationalité, jouit temporairement d'une liberté de décision « absolue. » En la forçant à rendre des comptes et à expliciter les fondements juridiques et rationnels de ses décisions, la motivation semble être le moyen le plus sûr de prévenir l'arbitraire.
      The European Court of Human Rights frequently refers to the notion of arbitrariness when explaining the grounds for its rulings. Examining its case law can bring into clearer focus a notion that today remains ambiguous and vague : illegality, bad faith, obscure decision-making processes are all part of the arbitrariness that occurs when an authority free from all constraints and rationality, temporarily enjoys "absolute" freedom in its decision making. Enforcing accountability and obliging such authorities to explain the legal reasoning and rational grounds for their decision seems to be the surest way of avoiding arbitrariness.
    • Le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat de la Magistrature, des « syndicats frères » ? - Jean-Philippe Tonneau p. 535-545 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article s'appuie sur l'idée commune parmi les membres du champ judiciaire et juridique et certains observateurs extérieurs, selon lequel le Syndicat de la Magistrature, fondé en 1968, et le Syndicat des Avocats de France, créé en 1973, seraient des « syndicats frères », pour aller à rebours de cette vision. En effet, si les deux organisations et leurs membres partagent une indéniable communauté de vues, il n'en demeure pas moins que leur histoire, leur position et prise de position divergent à bien des égards. Dans un premier temps, nous revenons sur l'histoire de chacune des deux organisations, puis, dans un deuxième temps, nous analysons les relations entre le SAF et le SM des années 1970 jusqu'à une période très contemporaine (2012).
      This article questions the common idea which considers two professional "Unions", the Syndicat de la Magistrature ("Professional Magistrates Union") founded in 1968 and the "Syndicat des Avocats de France" ("French Lawyers Union") founded in 1973, as "brother unions". Indeed, if both organisations and their members undoubtedly foster a fair range of shared views, yet their history and their positioning follow quite different ways. These differences are pointed here by a separate look at each one's specific history before analyzing the relationship between these "Unions" from the 1970s to the present time (2012).
    • La place de l'autorité judiciaire dans l'antiterrorisme : des juridictions politiques à l'avènement d'une justice d'exception policière et administrative - Vanessa Codaccioni p. 549-557 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article, centré sur l'histoire de la Cour de sûreté de l'État et de l'antiterrorisme, vise à analyser le passage d'une justice d'exception judiciaire à une justice d'exception administrative et policière. Ce faisant, à travers les mutations des logiques répressives contre les ennemis intérieurs et les évolutions des usages étatiques de l'exception, il interroge l'affaiblissement progressif de l'autorité judiciaire dans l'arsenal antiterroriste. En particulier il montre comment l'impératif de prévenir les attentats a modifié, au détriment du pouvoir de contrôle des magistrats, les prérogatives d'autres acteurs devenus centraux comme l'administration ou les services de renseignement.
      This article, which focuses on the history and anti-terrorist role of the State Security Court, is an attempt to analyse the move away from a special justice system based on the judiciary to one based on special administrative and police powers. In doing so, by examining the changes in the logic of repression against the enemies within and in the State's use of special powers, it raises questions about the progressive weakening of the judicial authority in the anti-terrorist armoury. In particular, it shows how the absolute need to prevent terrorist attacks has modified the prerogatives of other actors involved, such as government bodies and the intelligence services, whilst reducing the powers of control exercised by judges.
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  • Quatrième de couverture - p. 579 accès libre