Contenu du sommaire : Extractivisme : logiques d'un système d'accaparement

Revue Ecologie & politique Mir@bel
Numéro no 59, 2019/2
Titre du numéro Extractivisme : logiques d'un système d'accaparement
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Une alimentation digne et saine pour tous ! - Jean-Paul Deléage p. 5-13 accès libre
  • Dossier - Extractivisme : logiques d'un système d'accaparement

    • Extractivisme : lutter contre le déni - Benoit Monange, Fabrice Flipo p. 15-28 accès libre
    • La grande frontière - Anna Bednik p. 29-40 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Comme lors de la conquête de l'Ouest en Amérique, une « grande frontière » fait avancer ses fronts pionniers. Visant la totalité du monde et toutes les sphères de nos vies, ces fronts font disparaître non seulement les espaces habitables mais aussi notre faculté à habiter. Voilà ce qui se joue dans les combats contre l'extractivisme – l'exploitation industrielle de la nature –, comme dans toutes les luttes concrètes livrées pour préserver des « espaces pour être » : en défendant les marges et les interstices que la « frontière » n'a pas encore complètement annexés, en les faisant échapper, même partiellement et de manière éphémère, à ses dispositifs de capture, elles préservent, au bas mot, des possibilités de vie.
      As during the American conquest of the West, a “great frontier” moves forward. Aiming at the whole world and at all the spheres of our lives, this frontier results not only in the loss of the liveable areas but also of our ability to live. This is what's at stake in the fights against extractivism—the industrial exploitation of nature—, as in all the concrete struggles conducted to preserve “spaces for being”: by defending the margins and interstices not yet entirely annexed by the “frontier,” by ensuring that these margins and interstices escape, even partially and temporarily, from these capture systems, they preserve, at the least, possibilities of life.
    • L'extractivisme minier « depuis le Nord » : Exploitations, régulations et oppositions dans le Copper State d'Arizona - Claude Le Gouill, Anne-Lise Boyer p. 41-56 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Généralement analysé depuis le Sud, l'étude de l'extractivisme depuis le Nord, et en particulier depuis un pays historiquement dominant de l'activité minière comme le sont les États-Unis, offre un regard pertinent pour comprendre les dynamiques structurelles du secteur minier. Depuis le début du XXe siècle, l'Arizona est en effet l'une des principales régions productrices de cuivre au niveau mondial. Cet État de l'Ouest américain a vu naître des modes d'organisation de la production particuliers, de nouvelles technologies, et il a été confronté plus tôt qu'ailleurs aux nouvelles normes environnementales. Cet article interroge la façon dont l'analyse d'un modèle mis en place dans un pays du Nord permet de repenser les théories sur l'extractivisme qui ont été formulées, jusqu'à présent, depuis le Sud. En étudiant les similitudes, les différences et les liens entre extractivisme minier sud-américain et nord-américain, il apparaît que l'Arizona peut être considéré comme un véritable lieu d'expérimentation des activités minières.
      While extractivism is usually analyzed in the Global South, to broaden understanding of mining structural dynamics, we propose to study its implementation in a developed country, and especially in the one who dominated the mining industry for a long time: the United States. Indeed, since the beginning of the 20th century, the state of Arizona has been one of the world's leading copper producing regions. This region of the western United States has seen the emergence of particular modes of production, labor organization, new technologies and has been confronted earlier than elsewhere to new environmental standards. This article questions how the analysis of a model set up in a rich and developed country makes it possible to rethink the theories on extractivism that have been formulated so far from the South. By studying the similarities, the differences and the links between South American and North American mining extractivism, it appears that Arizona can be considered as a real place of experimentation for mining activities.
    • Penser l'extractivisme en Amérique latine à partir de l'écosocialisme - Matthieu Le Quang p. 57-71 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'objectif de cet article est de revenir sur les principales caractéristiques du modèle actuel d'extractivisme en Amérique latine à partir d'une vision écosocialiste. Articulant anticapitalisme marxiste et apports de l'écologie politique, cette théorie remet en cause le consumérisme et le productivisme dont la base matérielle est l'exploitation et la consommation de ressources naturelles, c'est-à-dire l'extractivisme. Ce dernier s'insère dans une géopolitique et un ordre international néolibéral qui enferment les pays latino-américains dans une dépendance par rapport aux pays du Nord. Nous revenons enfin sur les effets internes de l'extractivisme dans ces pays, notamment à travers l'analyse de ses principaux acteurs (firmes transnationales, État et populations affectées) et des résistances qu'il suscite.
      This article presents an ecosocialist perspective of extractivism in Latin America. Combining a Marxist anticapitalism and political ecology's insights, ecosocialism incriminates the consumerism and productivism based on the exploitation and consumption of natural resources, namely on extractivism. Extractivism fits in a neoliberal international order imprisoning the Latin American countries in a dependent relationship with the North. This article also considers the internal effects of extractivism in these countries, especially through the analysis of the main actors involved (the transnational corporations, the state and the populations affected) and of the resistances triggered.
    • Gaz de schiste : le cas tunisien - Sabria Barka p. 73-89 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Depuis septembre 2012, le gouvernement tunisien a affiché sa volonté d'explorer et d'exploiter le gaz de schiste. Des milliards de mètres cubes de pétrole et de gaz de schiste se trouveraient dans le sous-sol tunisien. Le discours officiel a, pendant un temps, présenté le gaz de schiste comme un eldorado qui doperait l'économie, en augmentant la croissance, en résorbant significativement le chômage et en réduisant la dépendance énergétique du pays. Mais ce que taisent les officiels, ou ce qu'ils veulent minimiser, ce sont les dégâts environnementaux et le risque sur la santé des populations engendrés par la technique d'extraction du gaz de schiste pourtant mis en évidence par de nombreuses études scientifiques indépendantes américaines. Cet article présente un état des lieux de la question du gaz de schiste en Tunisie et l'examine dans ses dimensions politique, environnementale et socio-économique.
      Since September 2012, the Tunisian government has shown its willingness to explore and exploit shale gas. Billions of cubic meters of oil and shale gas should be found in Tunisian subsoil. The official speech presented shale gas as an El Dorado that would boost the economy, increase growth, significantly reduce unemployment and reduce the country's energy dependence. But what the officials are silent on, or what they want to minimize, is the environmental damage and the health risk caused by the shale gas extraction technique, which have been highlighted by many independent American scientific studies. This article presents an overview of the shale gas issue in Tunisia and examines it in its political, environmental and socio-economic dimensions.
    • Déminer la France - Mathieu Brier, Naïké Desquesnes, Benoit Monange p. 91-106 accès libre
    • Soigner les blessures de la Terre - Valérie Cabanes p. 107-122 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Agrobusiness, industrie minière ou pétrolière, exploitation forestière, toutes ces pratiques industrielles consistent à extraire des ressources du milieu naturel de façon agressive par l'exploitation sans merci de populations humaines, animales et végétales, en usant de méthodes laissant de profondes cicatrices à l'écosystème terrestre. Nous avons laissé faire, aveuglés par notre quête de confort matériel, bernés par des promesses de croissance infinie. Or notre matérialisme atteint ses limites, celles que la Terre nous impose pour que la vie perdure. Pollution massive de tous les écosystèmes, effet de serre, déboisement, appauvrissement des sols, surexploitation de l'eau douce, acidification de l'océan, nous voilà engagés dans une sixième extinction de masse. Il est temps de reconnaître l'écocide en cours, la destruction de notre maison commune, il est vital de reconnaître à la nature son droit à exister, se régénérer et s'épanouir.
      Agribusiness, mining or oil industry, logging, all these industrial practices rely on extracting resources from the environment in an aggressive way by the merciless exploitation of human, animal and vegetable populations, using methods leaving deep scars to the terrestrial ecosystem. Blinded by our quest for material comfort, fooled by promises of infinite growth, we have permited this destruction. But our materialism reaches its limits, the very limits that the Earth imposes on us for life to continue. Massive pollution of all ecosystems, greenhouse effect, deforestation, impoverishment of the soil, over-exploitation of fresh water, acidification of the ocean, we are now engaged in a sixth mass extinction. It is time to recognize the ongoing ecocide, the destruction of our common home, it is vital to recognize nature's right to exist, regenerate and flourish.
  • Variations

  • Sources et fondements

    • Procès en réhabilitation de l'idée de nature. Ébauche : II. Les deux natures - Michel Barrillon p. 143-170 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Que désigne en définitive le mot « nature » ? L'histoire montre qu'il est né sous le signe du mystère, et n'en est jamais sorti sinon pour renvoyer à une réalité protéiforme, « contradictoire ». Le concept est si équivoque et se prête si bien aux dérives idéologiques que certains auteurs préfèrent le condamner purement et simplement, quitte à le remplacer par la figure mythologique non moins nébuleuse de Gaïa. À l'opposé, d'autres étendent son champ de pertinence à la totalité de l'existant, humanité comprise, et renoncent ainsi à l'idée de « séparation ontologique » : la nature cesserait d'être le « grand Autre ». Pour être antagoniques, ces deux positions extrêmes ont pour trait commun de rompre avec la conception moderne opposant nature et culture. Plutôt que de choisir l'une de ces trois options, la voie suggérée ici consiste à reprendre la thèse ancienne de la dualité de la nature – natura naturans et nature naturée – afin de « dépasser » ces différentes contradictions. (La première partie de cet article a été publiée dans Écologie & Politique, n° 57, 2018, p. 153-180.)
      What does the word “nature” ultimately refer to? History shows that it was born under the sign of mystery and that it never came out of it, but to refer to a protean and “contradictory” reality. The concept is so equivocal and give way so well to ideological drifts that some authors prefer to purely and simply condemn it, at the risk of replacing it by the not less nebulous mythological figure of Gaïa. On the other end, others extend its field of relevance to all that exists, including humanity, and thus renounce to the idea of “ontological separation”: nature would cease to be the “Great Other.” Although antagonistic, these two extreme positions have in common to break with the modern conception opposing nature and culture. Instead of chosing one of these three options, the way suggested here consists in taking up the old thesis of the duality of nature—natura naturans and natured nature—in order to “go beyond” these different contradictions. (The first part of this article has been published in Écologie & Politique, n° 57, 2018, p. 153–180.)
  • Notes de lecture