Contenu du sommaire : Les cadres dans l'entreprise et dans le mouvement syndical

Modes de groupements propres aux cadres , particularités du syndicalisme des cadres, liés au développement de la professionnalisation chez eux, tels sont les thèmes que l'auteur aborde à partir d'un matériau d'enquête à la fois américain et français. Certains des rapprochements ainsi possibles contribuent à rendre plus convaincant l'usage fait du terme «professionnalisation » pour caractériser la situation des ingénieurs et cadres industriels français. Néanmoins, il apparaît bien in fine que la situation n'est pas nette : aucune organisation ne se fondant explicitement sur une professionnalisation définie comme telle même si toutes s'y réfèrent au moins implicitement.

De par ses fonctions , le cadre a nécessairement un certain engagement dans la marche de l'entreprise. Cette participation , fonctionnelle ou forcée , ne le satisfait pas toujours, tant s'en faut. L'enquête résumée dans cet article essaie de cerner de plus près quelles sont les formes de participation souhaitées et surtout à quels moments de la carrière les tensions entre insertion de fait et insertion souhaitée sont les plus vives.

Dans un article précédent (Sociologie du travail, II 1967), l'auteur avait exposé les tendances à la professionnalisation (au sens américain du terme) qui se dessinent à l'intérieur du monde des cadres. Dans la conscience vécue , la communauté professionnelle de métier tendrait à supplanter la référence à l'entreprise. Aujourd'hui , précisant l'analyse grâce à l'étude des textes et du fonctionnement d'une organisation volontaire non syndicale, il pose la question de savoir si la professionalisation n'a pas un fort contenu corporatiste. Or si le dépassement de l'horizon entreprise apparaît comme un fait de mouvement, d'élargissement de la socialisation en même temps que de mise en cause d'un monde économique atomisé, la préoccupation corporatiste n'est-elle pas liée profondément à un ordre social qui ne tolère de la professionnalisation que l'aspect groupe de pression ?

La réflexion de l'auteur porte sur les deux tendances contradictoires dans l'évolution de la gestion des cadres. L'une va vers une rationalisation bureaucratique qui fait de la rémunération le résultat d'un calcul effectué selon des normes générales. L'autre , au contraire, retrouve au-delà, ou au dehors de ce moment d'impersonnalité maxima le souci d'une politique personnalisée de l'emploi des cadres dont la rémunération est l'élément essentiel. Un système est-il plus rationnel que l'autre ? La réponse n'est-elle pas que les objectifs recherchés au travers de la fixation des rémunérations sont différents ?

S'étonnera-t-on d'une étude sur la publicité dans cette livraison consacrée aux cadres ? L'ambiguïté de l'offre publicitaire qui se donne toujours à la fois sous l'aspect du don et sous celui du commerce est , selon l'auteur, analogique de plusieurs façons à celle du cadre dont le rapport au pouvoir dans l'entreprise, comme au luxe dans la consommation , reste toujours marqué de précarité et de fausseté au-delà des privilèges de la situation.