Contenu du sommaire : Les travailleurs immigrés

Les migrations intra-européennes à l'heure actuelle sont marquées par leur caractère temporaire. Implicitement, le mouvement migratoire est perçu comme un «chemin circulaire» sur lequel s'engagent les migrants. Ils sont d'abord non qualifiés, au bout d'un certain temps passé dans le pays d'accueil ils acquièrent une qualification. Entre temps, leur pays redresse son économie. Les émigrés, qualifiés cette fois-ci, rentrent et renforcent ce redressement, tandis que d'autres, non qualifiés repartent. Et le chemin reprend. Cette image n'est qu'un masque pour les mécanismes d'utilisation de la main-d'œuvre immigrée. En prenant comme exemple la migration yougoslave actuelle, l'auteur se propose de montrer que les retours des migrants ne sont qu'une illusion. Dans la réalité ils n'existent qu'au niveau des souhaits exprimés par les migrants, qui, plutôt que de rentrer se déplacent ailleurs dans le système de production qui en profite.

L'auteur, professeur à l'Université d'Ankara, reprend l'ensemble des travaux et des enquêtes sur les immigrés turcs, effectués en Allemagne et en Turquie. Exclusivement tournés vers l'accumulation monétaire en vue d'un retour qui, lorsqu'il s'effectue, n'aura pas lieu dans l'industrie, les immigrés turcs se soucient peu d'apprendre la langue du pays d'accueil ou d'acquérir une véritable qualification qui leur serait, dans un avenir souhaité proche, inutile. Parias dans le pays d'accueil, ils ne peuvent en Turquie jouer ce rôle de novateur que leur attribue faussement une conception dénoncée par l'auteur. La solution ne peut être trouvée dans une réforme des esprits : les immigrés agissent au demeurant de façon parfaitement rationnelle, étant donné les perspectives qui leur sont offertes à leur retour. Bilan tragique de l'émigration turque, ce texte est en même temps un plaidoyer en faveur d'une véritable politique de l'émigration, c'est-à-dire d'une politique du développement.

Pour les migrants des départements d'outre-mer l'émigration représente, non seulement une nécessité économique , mais aussi l'occasion de confronter leur image de la Métropole et sa réalité. Les conséquences de cette confrontation entre une image mythique et paternelle, et une réalité proche le plus souvent de celle des travailleurs étrangers, sont diverses et parfois contradictoires, interdisant toute description globale de l'immigrant des D.O.M. S'appuyant sur une enquête auprès d'immigrants Réunionnais, l'auteur tente d'établir une typologie des immigrants et de suivre les cheminements qui les conduisent, à travers une crise d'identité initiale, soit à l'identification totale à la France, soit au contraire à l'affirmation d'une identité nationale spécifique.

Une enquête exploratoire effectuée dans une grande entreprise de construction mécanique, employant une forte proportion d'ouvriers immigrés, confirme des faits déjà connus, mais permet de mettre en doute un certain nombre d'idées reçues relatives à l'attitude des immigrés à l'égard du logement, à la différence de salaires dont ils pâtissent et aux besoins de main-d'œuvre de l'industrie. Elle souligne l'influence, parfois convergente, parfois contradictoire, de facteurs tels que l'importance numérique de l'immigration d'une même nationalité ou sa distance socio-culturelle de la société française.

Le mouvement syndical se trouve aujourd'hui confronté à une situation caractérisée par la tendance simultanée : — à l'accroissement du phénomène de substitution entre nationaux et étrangers dans les branches et les régions industrielles en expansion ; — à l'accroissement des différences socio-culturelles et de l'isolement du migrant. La conjugaison de ces deux phénomènes entraîne une distance de plus en plus grande entre travailleurs français et étrangers, donc entre ces derniers et le mouvement syndical. Cet article se propose de montrer comment les organisations syndicales tentent de faire face à cette nouvelle situation.

Le texte qu'on va lire est celui d'un rapport établi pour le comité directeur du Plan Construction sous la co-présidence de deux de ses membres, MM. Cuisenier et Lisle, tous deux maîtres de recherche au CNRS, le premier directeur du Centre d'ethnologie française (laboratoire associé au CNRS), le deuxième directeur du Centre de recherche et de documentation sur la consommation (CREDOC). Il avait pour objet de dresser un bilan critique préparatoire au lancement de nouvelles recherches sous l'égide du Plan Construction.