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Revue | Revue historique |
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Numéro | no 631, juillet 2004 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Le roi, l'or et le sang des pauvres dans Le livre de l'information des princes, miroir anonyme dédié à Louis X - L. Scordia p. 507 Le genre des « miroirs au prince » a ses détracteurs et ses adeptes. Les uns ne voient dans ces traités de bon gouvernement qu'une liste convenue de vices et de vertus ; les autres considèrent que, au-delà des ressemblances qu'imprime le genre, l'étude des miroirs permet de mesurer les constantes, les inflexions et les évolutions de l'ars gubernandi à la fin du Moyen Âge. Le Livre de l'information des princes était destiné au fils aîné de Philippe IV le Bel, le futur Louis X (1314-1316). En 1379, Charles V en demande une traduction à Jean Golein. Malgré le succès des deux versions (plus de 30 manuscrits), ce texte est inédit. Très préoccupé par la politique financière du prince, l'auteur multiplie les exempla et recourt à l'histoire la plus contemporaine pour convaincre son royal élève de ne pas succomber à l'avarice, mais il l'invite par ailleurs à se constituer un trésor pour la « commune utilite » du royaume.Monarchs' mirrors is a genre criticized by some, praised by others. Some find in these considerations on good government only conventional lists of vices and virtues ; others are of the opinion that beyond the resemblances demanded by the genre, the study of these mirrors gives a mean to evaluate the constant features, the accents and evolutions of the ars gubernandi at the end of the Middle Ages. The Livre de l'information des princes was written for the eldest son of Philip IV the Fourth the Handsome who was to be Louis the Tenth (1314-1316). In 1379, Charles the Fifth orders a translation of it from Jean Golein. Inspite of both versions being successful (more than 30 manuscripts of them are to be found), this text has never been published. Very concerned with the monarch's financial policy, the author gives numerous exempla and makes use of most contemporary history to persuade his royal pupil not to give way to avarice, whilst building up a treasury for the « commune utilite » of the kingdom.
- Un projet méconnu de "décentralisation" au temps de Laverdy (1763-1768) : Les grands Etats d'Aquitaine - M.L. Legay p. 533 Cet article présente le projet de formation des États provinciaux d'Aquitaine conçu par l'archevêque de Toulouse, Loménie de Brienne, et agréé par le ministre Laverdy en 1768. Il insiste sur les circonstances politiques et idéologiques qui ont permis l'adoption de ce projet par les plus hautes instances décisionnelles de l'État. Parmi ces circonstances, l'auteur met en avant le rôle de la fronde parlementaire, mais aussi des noblesses d'États décidées à créer des bureaux exécutifs permanents dans les provinces. L'analyse du contenu du projet révèle la promotion du vote par tête et du doublement des représentants du tiers état dès cette époque, c'est-à-dire dix ans avant la formation des assemblées provinciales de Necker. Ce projet, qui doit être rapproché de la création de l'assemblée du Boulonnais par Laverdy en 1766, permet aussi de mesurer le poids du modèle languedocien dans le réformisme administratif de l'époque.This article considers the 1768 proposal to establish provincial Estates in Aquitaine, a project conceived by Loménie de Brienne, archbishop of Toulouse, and approved by minister Laverdy. The article focuses on the political and ideological conditions that facilitated the project's adoption by the highest decision-making authorities of the State, and highlights the role of the parliamentary fronde, as well as that of the provincial estate nobles who were determined to establish permanent administrative offices in the provinces. Careful analysis of de Brienne's proposal reveals that demands for « one man, one vote » and a doubling of the number of Third Estate representatives existed already at this time, some 10 years before Necker's institution of the provincial assemblies. The archbishop's project, seen in relation to Laverdy's creation of the Boulogne assembly in 1766, also indicates the importance of the Languedocian model in the administrative reform movement of the period.
- Entre Gironde et Montagne. Les positions de la Plaine au sein de la Convention nationale au printemps 1793 - M. Biard p. 555 Au gré des missions de ses membres dans les départements et aux armées, mais aussi en fonction des congés et de diverses absences, la Convention nationale a très souvent été amputée d'une partie importante de son effectif théorique. Mettant au jour un absentéisme politique considérable dans cette Assemblée au printemps 1793, au moment décisif de la lutte entre Girondins et Montagnards, cet article évoque la volonté de plusieurs dizaines de députés de se tenir avec soin à l'écart des affrontements partisans. Une telle position, qui fait souvent naître a posteriori une autre mise à l'écart politique, a été interprétée par l'historiographie comme la marque d'un « centre » composé de modérés aussi peu dignes d'intérêt les uns que les autres. Cet article suggère au contraire que de nouvelles études puissent être ouvertes sur l'existence d'un « centre » au sein de la Convention nationale, afin de lui redonner sa véritable place et d'en cerner toutes les nuances.At the mercy of its members on mission to the departments and the army, as well as leaves and absences of one sort or another, the National Convention was often deprived of an important part of its theoretical manpower. This article brings to light the considerable absenteeism in the Convention during Spring 1793, at the moment when the Girondin-Montagnard struggle reached its decisive moment. The article examines the desire of tens of deputies to stay away from partisan confrontations, a position often made a posteriori by historiography as another political dismissal. Often interpreted as the centrism of moderates unworthy of scholarly interest, this article suggests that new vistas can be opened on the Convention's moderates, and that by restoring its place in the Revolution, some historical loose ends will be tied up.
- Utopie et religion au XIX siècle. L'oeuvre de Jean Reynaud (1806-1863), théologien et saint-simonien - G. Cuchet p. 577 La philosophie religieuse de Jean Reynaud est une des « pensées dérivées » du saint-simonisme. Parmi les jeunes saint-simoniens de 1830, Reynaud est un de ceux qui ont pris le plus au sérieux l'appel final du maître à travailler à l'avènement d'un « nouveau christianisme ». En 1854, il a synthétisé vingt ans de réflexion théologique dans un ouvrage, Terre et Ciel, qui obtient un succès surprenant, défrayant la chronique religieuse pendant plusieurs mois avant d'être condamné formellement par l'Église catholique. Ce débat jette une lumière tardive sur une des utopies de la conscience religieuse du XIXe siècle, en voie d'épuisement dans la décennie 1860 : le projet de dégager une troisième voie « spiritualiste » entre catholicisme et scepticisme qui soit conforme aux exigences sociales, culturelles et sentimentales de la modernité.Jean Reynaud's religious philosophy is one of the « secondary thoughts » of saint-simonianism. Among the young saint-simonians of 1830, Reynaud is one of those who took most seriously the final call of the master to exert the advent of a « new christianism ». In 1854 he synthesized 20 years of theological thought in a book, Earth and Heaven, which achieved a surprising success, monopolizing the religious columns for several months until it was formally reproved by the catholic Church. This debate belatedly highlights one of the XIXth century religious self-consciousness' utopias, undergoing exhaustion in the 1860 decade : the project to draw a « spiritualist » third way between catholicism and scepticism that would be conformable to modernity's social, cultural and sentimental requirements.