Contenu du sommaire : Les débuts du Hirak en Algérie

Revue Maghreb-Machrek Mir@bel
Numéro no 244, 2020/2
Titre du numéro Les débuts du Hirak en Algérie
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  • Février 2019 : les débuts du Hirak en Algérie - Ali Bensaâd, Malika Rahal p. 5-10 accès réservé
  • Soulèvement populaire en Algérie : crise politique et acteurs politiques en crise - Louisa Dris-Ait Hamadouche p. 11-23 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Si le rôle des acteurs sociopolitiques consiste, entre autres, à être à l'avant-garde des changements qui interviennent dans une société, le Hirak algérien s'inscrit, au contraire, dans la tendance des soulèvements contemporains peu connectés aux forces sociales structurées traditionnelles. Quelles en sont les raisons et les conséquences ? Cette faible connexion est, soit le résultat d'un choix réfléchi sur la base de l'existence de plusieurs alternatives, soit la conséquence de l'absence de choix. Dans le premier cas, la crainte de la division, de la récupération-cooptation et de la répression justifie le maintien de l'anonymat. Dans le second cas, le contexte politique précédant le soulèvement impose cet anonymat comme une contrainte dont la centralité grandit au fur et à mesure.
    If the role of sociopolitical actors consists, among other things, in being at the forefront of the changes taking place in a society, the Algerian Hirak is, on the contrary, part of the trend of contemporary uprisings little connected to structured social forces. What are the reasons and consequences? This weak connection is either the result of a thoughtful choice on the basis of the existence of several alternatives, or the consequence of the absence of choice. In the first case, the fear of division, recuperation, co-optation and repression justifies maintaining anonymity. In the second case, the political context preceding the uprising imposes this anonymity as a constraint, the centrality of which grows over time.
  • L'entrée en dissidence dans les espaces de loyauté du régime : une maturation et un prélude à l'avènement du Hirak - Ali Bensaâd p. 25-49 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Avant de se trouver contesté visiblement au cœur de ses espaces de pouvoir par des manifestations massives dans la capitale Alger et toutes les villes importantes du pays à partir du 22 février 2019, le régime algérien avait déjà subi, à bas bruit, une érosion dans ses bases lointaines mais néanmoins vitales. Une érosion qui a progressivement miné, dans ses profondeurs, son édifice autoritaire et altéré ses réseaux clientélaires notamment et particulièrement dans ces espaces-relais et points d'appui qu'il s'est construit dans les profondeurs du pays, dans des régions qui ont été charnières dans la construction territoriale algérienne et qui le sont aujourd'hui dans le maillage de son contrôle autoritaire de l'espace et que le régime a surinvesti pour en faire des espaces d'allégeance. À travers le cas de trois villes (Ouargla, Khenchela et Kherrata) qui, malgré le paradoxe apparent de leur enclavement, occupent, à plusieurs titres, une position charnière dans ce maillage et notamment comme relai avancé du pouvoir dans des régions stratégiques (Kabylie, Aurès et Sahara), l'article étudie les différents processus de fissuration qui ont altéré l'édifice autoritaire algérien et qui ont constitué autant de cheminements souterrains et d'affluents par lesquelles la contestation a fini, par effet-retour, par converger vers le centre du pouvoir, Alger.
    Before being visibly contested in the heart of its spaces of power by massive demonstrations in the capital Algiers and all the major cities of the country from 22 February 2019, the Algerian regime had already suffered a discrete erosion in its distant but nevertheless vital bases. This erosion has gradually undermined, in its depths, its authoritarian structure and altered its clientelist networks. This is particularly the case in these relay spaces and points of support that it had built in the depths of the country, in regions which were pivotal in the Algerian territorial construction and which are still so today in the network of its authoritarian control, and that the regime has overinvested to make them be spaces of allegiance. Through the case of three cities (Ouargla, Khenchela and Kherrata) which, despite the apparent paradox of their isolation, occupy, in several ways, a pivotal position in this network and in particular as an advanced relay of power in strategic regions (Kabylia, Aurès and Sahara), the article studies the different cracking processes which have altered the Algerian authoritarian structure and which have constituted as many underground paths and tributaries through which the protest has finally converged, by return effect, towards the center of power, Algiers.
  • L'Algérie et sa Constitution, l'impossible rendez-vous ? - Rostane Mehdi p. 51-62 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Le mouvement populaire engagé à travers toute l'Algérie en février 2019 ne poursuit, dans ses expressions individuelles ou ses manifestations collectives, qu'un seul but : obtenir du pouvoir qu'il mette fin aux atteintes portées depuis trop longtemps à l'intégrité de tous et de chacun et qu'il cède la place à un État de droit. Cette contribution est à la fois l'occasion d'un retour sur l'histoire constitutionnelle heurtée de l'Algérie et d'une réflexion sur les conditions d'instauration d'un État de droit robuste et durable.
    The popular movement that began throughout Algeria in February 2019 has only one goal in its individual and collective expressions: to obtain from the authorities an end to the attacks that have been carried out for too long on the integrity of each and every one and to make way for the rule of law. This contribution is both an opportunity to look back at Algeria's troubled constitutional history and to reflect on the conditions for the establishment of a robust and sustainable rule of law.
  • Rentes, crise du système politique, émergence du « hirak » : fin de cycles historiques et perspectives - Nadji Safir p. 63-76 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    L'analyse met en évidence le contexte dans lequel le « hirak » de février 2019 a vu le jour et qui était fondamentalement structuré autour des dynamiques de deux logiques systémiques de rente : l'une, endogène, politique, d'origine historique et de nature symbolique et l'autre, exogène, énergétique, d'origine extractive et de nature économique. Et toutes deux à la base de la constitution d'un pacte social rentier régissant les rapports entre Société et État. Or ce pacte, longtemps relativement efficient, va entrer, à partir du milieu de la décennie 2010, dans une spirale de crise conduisant progressivement ses effets à s'épuiser et ce, en raison des conséquences directes et indirectes de divers changements intervenus en Algérie et dans le monde. Et c'est ainsi que ce sont également deux longs cycles de la vie de la société algérienne qui, actuellement, sont en train de s'achever – l'un politique (1945-2020) et le second, socio-économique (1970-2020) – et dont la fin de parcours explique les évolutions en cours dans le pays.
    The analysis highlights the context in which the “hirak” of February 2019 started and which was fundamentally structured around the dynamics of two systemic logics of rent-seeking: one is endogenous, political, of historical origin, and of symbolic nature and the other is exogenous, related to energy resources, of extractive origin, and of an economic nature. Together, they lay the foundation of a social rent-seeking pact governing the relationship between Society and State. However, this pact, for a long time relatively efficient, has entered, from the middle of the 2010's decade, in a crisis spiral, gradually exhausting its effects, due to direct and indirect consequences of various changes that took place in Algeria and around the world. Hence, two long cycles in the life of Algerian society are currently coming to a close – one political (1945-2020) and the second, socio-economic (1970-2020) – and whose ending explains the evolutions underway in the country.
  • L'armée algérienne au défi de la transformation - Jean-François Daguzan p. 77-97 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    L'armée algérienne est consubstantielle à l'État algérien. Historiquement, elle le précède puisque cette dernière s'est constituée pendant la lutte pour l'indépendance puis s'est imposée sur toutes les autres tendances et groupes politiques, l'État à peine constitué. Cette histoire n'est cependant pas monolithique. Cet article évoque l'évolution de ce corps. Du bloc formé autour du Président Boumediene en passant par ses évolutions successives. Pendant la guerre civile, elle gère les destinées de la nation mais l'affaiblissement de sa haute hiérarchie est lentement mais sûrement menée sous les mandats successifs d'Abdelaziz Bouteflika alors qu'elle est considérablement renforcée au plan des moyens jusqu'à en faire, sur le papier, une des plus puissantes armées d'Afrique. Avec la chute de Bouteflika, le Hirak puis l'élection d'un nouveau président, c'est une nouvelle page qui s'écrit. L'armée veut défendre à tous prix la stabilité du pays et de ses institutions mais cet objectif est-il encore tenable alors même la société réclame des changements de fonds et que de nombreuses crises se déroulent à ses frontières ? Au plan théorique cet article interroge la validité des modèles d'analyse traditionnels des relations civilo-militaires.
    The Algerian Armed Forces is inherent to the Algerian State. Historically it preceded the establishing of the State because the Army was created during the independance struggle period. Then, the State just emerged, Army imposed itself upon every political group or tendance. This story is not monolothic. This paper aims to study the evolution of this corps. From the block created around President Boumediene through the following evolutions. During the civil war, the Army managed the destiny of the nation but later the weakness of its high hierarchy was slowly but surely prepared under Bouteflika's distinct mandates. On the other side, the Algerian Armed Forces were strongly reinforced until becoming one of the powerful African Armies. With the collapse of Bouteflika's power, the Hirak and the election of a new president, Army entered in a new period. The corps absolutely wants to preserve the stability of the country and its institutions but is this objective, sustainable when the society claims for profund changes and many crises flourishes along the frontiers? Theoretically speaking, this paper studies the validity of the conceptual models of civil-military relations.