Contenu du sommaire : Le travail partisan sur l'action publique

Revue Gouvernement & action publique Mir@bel
Numéro volume 9, no 4, octobre-décembre 2020
Titre du numéro Le travail partisan sur l'action publique
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Le travail partisan sur l'action publique

    • Comment les partis politiques travaillent-ils l'action publique ? - Rafaël Cos, Anne-Cécile Douillet p. 9-27 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article introductif propose une nouvelle perspective dans l'analyse des relations entre partis politiques et action publique. Il ne s'agit plus seulement d'envisager les propositions d'action publique comme l'enjeu de la compétition inter-partisane ou d'étudier l'effet des partis au pouvoir sur l'orientation des politiques publiques, mais d'examiner de près la façon dont les partis, en tant qu'acteurs collectifs, se saisissent de questions d'action publique. Il convient alors de descendre au niveau des pratiques, des rapports de force internes et du travail par lequel les acteurs partisans se mobilisent pour construire, traduire en dispositifs ou faire circuler des contenus relatifs à l'action publique. La perspective envisagée éclaire notamment les ressorts et les modalités de la « fonction programmatique » des partis, en révélant l'existence de divers espaces partisans de construction de « problèmes » et de « solutions » d'action publique. Elle permet aussi de saisir de façon plus réaliste l'effet des partis sur l'action publique, par l'analyse de la mobilisation de positions partisanes dans les arènes de l'action publique : l'importance des clivages qui traversent les organisations partisanes explique la fragilité, la labilité et la pluralité de ces mobilisations. En pratique, l'étude du travail partisan sur l'action publique éclaire une dimension structurante de l'activité partisane tout en donnant à voir les multiples logiques qui viennent fragiliser l'adéquation entre les programmes des partis et leurs réalisations au pouvoir. En ce sens, cette orientation permet de mettre à distance les deux représentations schématiques du lien entre politics et policies, qui appréhendent ce lien comme étant purement artéfactuel ou, au contraire, comme un enchaînement séquentiel.
      This introductory article argues for a new direction in the analysis of the relationship between political parties and public policies. Beyond the impact of ruling parties on the orientation of public policies and the consideration of policy issues as the driving force of inter-partisan competition, the purpose is to closely examine the way in which parties, as collective actors, take up policy issues. Such a perspective implies looking at practices, internal power relations and the work through which partisan actors construct, diffuse or convert into devices policy proposals. This perspective thus sheds light on the sources and modalities of the “programmatic function” of political parties. It also provides a more realistic grasp of the impact of parties on public policies, by analysing the mobilisation of partisan positions in policy arenas: these proposals then appear uncertain and plural, due to internal competition within parties. In practice, the study of partisan work on public policies sheds light on a structuring dimension of partisan activity while revealing the multiple logics that weaken the adequacy between parties' political programmes and their achievements once in power. The proposed orientation thus pulls away the two schematic representations of the link between politics and policies, which apprehend it as purely artefactual or, on the contrary, as sequential.
    • « Taxer la richesse ! » : Politiques fiscales et travail d'intermédiation au sein des milieux partisans allemands - Martin Baloge p. 29-52 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article, basé sur des entretiens, des observations et l'analyse de documents officiels, étudie la contribution des partis allemands à l'élaboration des politiques publiques fiscales. L'analyse des propositions d'un nouvel impôt sur la fortune par certains partis de gauche entre 2010 et 2017 permet de comprendre pourquoi ces organisations s'apparentent à des espaces d'intermédiation entre élus et acteurs extra-partisans. L'analyse se concentre à la fois sur les propriétés d'élus intervenant dans ces processus d'intermédiation et sur les effets des structures partisanes caractérisées par l'institutionnalisation des intérêts sociaux au sein d'organisations intrapartisanes. Nous constatons que les partis allemands parviennent à se présenter comme des forums politiques où s'élaborent à la fois des dispositifs fiscaux et des prises de position face aux politiques publiques engagées par leurs adversaires.
      This article focuses on how political parties contribute to the elaboration of tax policies. Based on interviews, observations and the analysis of official documents that took place or were released between 2010 and 2017, we aimed at analyzing the new wealth taxes suggested by various left parties. The point of the article is to understand why these organizations can be considered as spaces of intermediation for the elected representatives and extra-partisan actors. The article also pinpoints the social properties of MPs who take action in these processes of intermediation. On another level, we aim at analyzing the impact of parties' structural organizations, which are characterized by the institutionalization of social interests within intra-party organizations. We observe that German parties can be considered as political forums where public policies and political stances are elaborated against their opponents.
    • Où se construit la ligne du parti ? : Pluralité et interpénétration des espaces de définition d'une politique sportive au sein du Parti communiste français - Igor Martinache p. 53-76 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À partir d'une analyse du traitement des enjeux liés au sport au sein du Parti communiste français (PCF) depuis sa création, cet article propose d'interroger les représentations communes qui envisagent la construction doctrinale au sein des organisations partisanes comme un processus centralisé impliquant un nombre réduit de dirigeants et dont le résultat se diffuserait ensuite de manière descendante. Ce cas doublement limite, du fait de la relégation des enjeux sportifs et de la place particulière du PCF dans le champ politique, suggère au contraire qu'un tel travail ne s'élabore pas simplement au sein des commissions dédiées, qui peuvent du reste représenter elles-mêmes des espaces assez ouverts aux influences extérieures, mais aussi et peut-être surtout à travers les politiques publiques mises en œuvre par des exécutifs nationaux ou locaux dont les agents portent les couleurs du parti concerné, en fonction de leurs propres dispositions militantes et de la configuration socio-politique où elles se déploient.
      Based on an analysis of the treatment of sports-related issues within the French Communist Party (PCF) since its creation, this article proposes to question the common representations that envisage the doctrinal construction within partisan organisations as a centralised process involving a reduced number of leaders and whose result would then be disseminated in a top-down manner. This doubly borderline case, given the relegation of sporting issues and the particular place of the PCF in the political field, suggests, on the contrary, that such work is not simply developed within dedicated commissions, which may themselves represent spaces that are fairly open to external influences, but also, and perhaps above all, through public policies implemented by national or local executives whose agents wear the colours of the party concerned, according to their own militant dispositions and the socio-political configuration in which they are deployed.
    • La fabrique des biens programmatiques au parti socialiste : Contribution à une sociologie des entreprises de gouvernement - Rafaël Cos p. 77-100 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La manière dont les partis dits « de gouvernement » anticipent le fait d'avoir à conduire des réformes d'action publique constitue un angle mort de la littérature. En croisant l'exploitation d'archives et de données prosopographiques avec des entretiens conduits auprès de cadres du Parti socialiste et des « experts » ayant collaboré avec celui-ci, cet article explore les dimensions du travail programmatique partisan. En interrogeant la manière dont les politiques publiques s'articulent aux objectifs, contraintes et ressources d'une entreprise de gouvernement, l'article montre d'une part que les politiques publiques existent à la fois comme un horizon légitimateur encastré dans l'ordinaire des pratiques partisanes, et comme une échéance virtuelle orientant la mobilisation des ressources en campagne. Il souligne d'autre part combien ce double ressort se réfracte selon les multiples valeurs d'usage (récolte des suffrages, compétitions intra- puis inter-partisane, mise en jeu de sa crédibilité gestionnaire, fixation de coalitions réformatrices, préparation technique de l'échéance gouvernementale, etc.) dont sont investies les mobilisations programmatiques. C'est à l'intérieur de l'écart pratique entre ces différentes dimensions que les acteurs partisans s'ajustent – en bricolant – à la perspective de gouverner.
      A blind spot in the literature is the way in which the so-called “government parties” anticipate having to carry out policy reforms. By combining the exploitation of archives and prosopographic data with interviews conducted with Socialist Party cadres and “experts” who have collaborated with the party, this article explores the dimensions of partisan programmatic work. By questioning the way in which public policies are articulated with the objectives, constraints and resources of a government enterprise, the article shows, on the one hand, that public policies exist both as a legitimizing horizon embedded in the ordinary of partisan practices and, as a virtual deadline guiding the mobilisation of resources during election campaigns. On the other hand, it underlines the extent to which this dual role is refracted according to the multiple use-values (collection of votes, intra- and then inter-partisan competitions, putting its managerial credibility at stake, setting up reform coalitions, technical preparation of the government deadline, etc.) with which programmatic mobilisations are invested. It is within the practical gap between these different dimensions that the partisan actors adjust - by tinkering - to the prospect of governing.
  • Lectures

    • Comptes rendus - Cyril Benoît, Jean-Baptiste Devaux, Baptiste Schummer, Thibault Boughedada p. 103-113 accès libre