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Numéro | no 123, 2021/1 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Carine Henriot, Valérie Schafer p. 1-2
- Systèmes hydrauliques et structures urbaines en Iran. Un modèle traditionnel d'intégration à l'épreuve de la modernisation - Ayda Alehashemi, Jean-François Coulais p. 3-29 Stimulé par une croissance économique et démographique dont la vigueur n'a pas faibli durant un siècle, l'Iran a engagé à partir de 1920 une politique de modernisation en profondeur de ses réseaux et infrastructures hydrauliques. L'article propose un bilan de cette transition extrêmement rapide d'un système traditionnel et ancestral, hérité de la civilisation millénaire de l'eau en Perse, vers un modèle universel d'adduction. À partir d'études inédites, conduites sur le terrain entre 2015 et 2019, sur un échantillon représentatif des typologies urbaines en Iran (Téhéran, Semnân, Nâeen), les auteurs analysent la diversité des trajectoires de transition et d'hybridation entre les réseaux hydrauliques traditionnels et leurs substituts modernes, les effets socio-économiques et environnementaux produits, et l'évolution des formes urbaines et des structures de gouvernance territoriale de l'eau qui en résultent depuis le début du XXe siècle.L'étude soulève des questions qui interrogent le devenir des relations entre réseaux et territoires au XXIe siècle, en Iran comme dans de nombreux autres pays. Là où l'intégration des systèmes hydrauliques et des structures urbaines traditionnelles permettait une distribution équilibrée des ressources, grâce à un double ou triple réseau d'approvisionnement résilient aux crises hydriques les plus sévères, les provinces les plus fragiles sont de plus en plus dépendantes d'une gestion centralisée qui leur échappe, subissant les pénuries sans recours ni alternative. De ce point de vue, en privilégiant l'efficacité technique, les politiques de modernisation ont aggravé les inégalités socio-spatiales et fragilisé la cohésion entre villes et territoires. Si le cas de l'Iran est si singulier, ce n'est pas seulement pour des raisons environnementales, en particulier l'épuisement de ses aquifères et la perspective de crise hydrique permanente. C'est aussi parce que la rapidité et la brutalité de sa modernisation a entraîné des fractures et dépendances qui ne concernent pas les seuls réseaux hydrauliques, mais un vaste ensemble d'éléments immatériels qui font système avec le réseau et bouleversent son organisation sociale et ses pratiques culturelles de l'eau.Stimulated by strong and steady economic and demographic growth over the previous century, Iran engaged a process of in-depth modernization of its hydraulic networks and infrastructures from the 1920s onwards. The article takes stock of this extremely rapid transition from a traditional and ancestral system, inherited from the water-led civilization of Persia, towards a universal model of water supply. Based on fieldwork carried out between 2015 and 2019 in a sample of cities representative of urban typologies encountered in Iran (Tehran, Semnân, Nâeen), the authors analyze the diversity of transition and hybridization trajectories between traditional hydraulic networks and their modern substitutes, their socio-economic and environmental effects, and the resulting evolution of urban forms and structures of territorial water governance since the beginning of the 20th century.The study raises questions about the future relations between networks and territories in the 21st century common to many countries. While the integration of hydraulic systems and traditional urban structures allowed a balanced distribution of resources due to doubling or tripling of networks producing resilience to the most severe water crises, remote regions are by contrast increasingly dependent on centralized management which they cannot influence, thereby suffering shortages without possible recourse. From this perspective, by favouring technical performance, modernization policies increased socio-spatial inequalities and weakened the cohesion of the country between its cities and arid zones. If the case of Iran is so unique, it is not only for environmental reasons such as ongoing depletion of its aquifers and a prospect of permanent hydric crisis. It is also because the speed and brutality of its modernization have created rifts and dependencies which do not concern the hydraulic networks alone, but also a vast set of intangible elements which form a system with the network and unsettle its social structures and cultural practices associated with water.
- Mesure du potentiel de marche et de l'accessibilité dans les espaces urbains pour les piétons âgés - Florence Huguenin-Richard, Marie-Soleil Cloutier p. 30-53 La marche se distingue des autres modes parce qu'elle induit, pour celui qui la pratique, une immersion complète des individus dans l'environnement (Amar, 2010). Elle est aujourd'hui fortement revalorisée dans les centres urbains en France et plus généralement en Europe et Amérique du Nord, au titre de mode de déplacement doux et non polluant mais également en tant que mode de déplacement actif, bon pour la santé. Pour autant, les besoins des piétons pour circuler en sécurité et confortablement doivent être mieux pris en compte pour que la marche devienne une réelle alternative et ceci quel que soit l'âge des marcheurs. Les besoins spécifiques des plus âgés ne sont malheureusement pas suffisamment reconnus par les pouvoirs publics, l'environnement urbain restant le territoire des jeunes actifs, réservé aux usagers les plus performants. Alors que la pratique de la marche à pied est le révélateur de la qualité de l'environnement urbain, le piéton âgé du fait de sa lenteur et de ses fragilités, n'est pas forcément légitime et perd son droit de cité dans une ville trop souvent dévolue à la vitesse. Il y a là un réel enjeu à relever afin de rendre les villes de demain plus accessibles, agréables à vivre, universelles et accueillantes. Cet article présente un outil d'audit de marchabilité adapté aux piétons âgés. Une cartographie fine et détaillée de l'indicateur mis en place à partir de relevés sur le terrain permet de diagnostiquer les problèmes et d'identifier les besoins pour garantir un bon niveau d'accessibilité. Au final, c'est l'absence de continuité dans les cheminements qui ressort comme élément le plus perturbateur de la mobilité à pied dans le site mis à l'étude.Walking is distinctive to other modes of mobility because it involves a complete immersion of individuals in the environment. It is now highly valued in France, and more generally in Europe and North America, as a “soft” and non-polluting mode of mobility, but also as an “active” and healthy one. However, the specific needs of pedestrians for security and comfort must be better considered in order to promote walking as a real alternative to other forms of urban transport, irrespective of pedestrians' age. Moreover, the needs of older pedestrians are not yet sufficiently recognized by public authorities, partly because urban environments remain the place of active young people or, in short, of the most efficient users. Indeed, older pedestrians, with their inherent slowness and fragility, are not necessarily seen as legitimate and, in a sense, lose their right to the city in a context given over to automotive flow and speed. Given that walking has become a marker of the quality of urban life or urbanity, the challenge to make cities of tomorrow more accessible, more pleasant to live in, and more universal and welcoming, remains on the agenda. This paper presents a walkability audit tool adapted to older pedestrians. Detailed mapping based on field survey indicators makes it possible to pinpoint problems, and to identify interventions needed to ensure a good level of accessibility. In summary, the lack of continuity between paths emerges as one of the most disruptive and hazardous element for elderly pedestrians.
- Que pensent les habitants des territoires peu denses de la mobilité ? Une exploitation textuelle des données du Grand Débat National - Aurore Flipo p. 54-73 Mise en place à la suite du mouvement des Gilets Jaunes au début de l'année 2019, la plateforme du Grand Débat a recueilli 569 000 contributions issues d'un peu plus de 250 000 contributeurs individuels (Bennani, Gandré, Monnery, 2019). Malgré de nombreuses limitations, qui sont abordées en préalable de l'analyse, cette large base de données peut constituer un outil de compréhension complémentaire des perceptions de l'action publique sur les territoires. Dans cet article, nous utilisons les contributions postées en ligne sur le site du Grand Débat pour analyser la manière dont l'objet mobilité est appréhendé dans deux territoires à dominante rurale, à l'aide d'une analyse textuelle. Nous nous intéressons d'abord aux thématiques générales dans lesquelles on trouve un discours sur la mobilité. Nous analysons ensuite la place de la question de la mobilité au sein de la thématique de la transition écologique, qui est celle qui a recueilli le plus de contributions portant sur la mobilité. Enfin, nous nous intéressons aux souhaits exprimés par les contributeurs sur l'accès à divers modes de transport sur leur territoire, avant de discuter des potentialités et des limites de l'outil d'analyse textuelle pour traiter les données de ce type. L'analyse montre un hiatus important entre les discours publics, centrés sur les pratiques et la responsabilité individuelles et l'importance dans le corpus d'un discours mettant en avant la dimension systémique de la transition écologique. Elle confirme également des clivages observés ailleurs au sujet de la voiture électrique.Following the Yellow Vests mobilisation, the French government implemented at the beginning of 2019 an online debate platform (« Grand Débat ») that subsequently received 569,000 contributions from more than 250,000 individual participants. Despite its limitations that I discuss in detail, it can be a complementary tool to approach perceptions of public actions in various territories. In this article, I use the contributions posted on the platform to analyse through textual analysis the ways in which mobility is perceived and apprehended in two predominantly rural provinces. I first explore the general themes in which the subject of mobility has been addressed, before analysing the place of mobility within the topic of ecological transition, where most of the contributions on mobility could be found. Finally, I address the demands expressed by respondents around access to various modes of local transport, before discussing the potentials and limits of textual analysis for processing such data. Analysis shows a wide gap between public discourse focused on individual practices and responsibility on the one hand, and the importance in the database of views promoting more systemic action on ecological transition on the other hand. It also confirms the importance of cleavages that have been observed elsewhere on the issue of the electric car.
- "On n'est pas des robots, Ouvrières et ouvriers de la logistique", Barbier Clément, Cuny Cécile, Gaborieau David, Mohadjer Nathalie, Raimbault Nicolas, Simon Gwendal et Soichet Hortense, Grâne : Créaphis, 2020, 212 pages - Adeline Heitz p. 74-76
- "Attention fragile ! Économie et politique de la messagerie postale en France, XIXe-XXe siècle", Laborie Léonard et Richez Sébastien, Bruxelles : Peter Lang, 2020, 316 pages - Arnaud Passalacqua p. 77-79
- "Repenser la transition énergétique, un défi pour les sciences humaines et sociales", Baggioni Vincent, Burger Céline, Cacciari Joseph et Mangold Marie (dir.), Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 2019, 271 pages - Géraldine Bouchet-Blancou p. 80-82
- "Remaking Berlin. A History of the City through Infrastructure (1920-2020)", Moss Timothy, Cambridge (MA), The MIT Press, 2020, 452 pages - Denis Bocquet p. 83-85