Contenu du sommaire : Retour à Calais
Revue | Plein droit |
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Numéro | no 129, juin 2021 |
Titre du numéro | Retour à Calais |
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Édito
Dossier - Retour à Calais
- L'impuissance des mots dans une Europe qui choisit de tuer - Jean-Pierre Alaux p. 3-6
- Calais ou l'escalade répressive - Maël Galisson p. 7-10 La frontière entre la France et le Royaume-uni est le résultat d'un long processus politique et administratif. Trente-cinq années de négociations et pas moins de vingt et un traités, accords et arrangements entre les deux pays ont été consacrés à la mise en place et au développement de mesures de contrôle et de surveillance toujours plus sophistiquées. Vidéosurveillance, barbelés coupants, drones, caméras thermiques et même déforestation et inondation de certaines zones, autant de techniques destinées à rendre la route migratoire « impraticable ». Pour quel bilan ? Un marché juteux pour les multinationales de l'armement et de la sécurité ; un coût humain considérable ; des passeurs de plus en plus indispensables.
- Reprendre la Manche ou la « crise des traversées » - p. 11-14 Au printemps 2020, les arrivées par small boats (petits bateaux) au Royaume-Uni ont connu une spectaculaire augmentation, devenant le principal moyen de traverser la Manche pour demander l'asile. L'extrême sécurisation autour de Calais – des kilomètres de clôtures, plus de 1 000 policiers anti-émeute et un vaste réseau de surveillance – a rendu plus difficiles les autres moyens de passage clandestin.
- Une frontière hostile et meurtrière - Maël Galisson, Anya Edmond Pettit, Frances Timberlake p. 15-19 Les dépenses de l'Union européenne pour la sécurisation de ses frontières ne cessent d'exploser, et la frontière franco-britannique de tuer. Ces morts, trop souvent anonymes, servent d'argument statistique à une militarisation sans fin de la frontière, qui, en retour, tue plus encore. Les pratiques illégales de la police sont au cœur de ce dispositif. Or les récits des morts, dont celles de Mawda Shamdem et Aleksandra Hazhar, éclairent ces politiques de dissuasion et leurs mécanismes criminels.
- Harceler pour mieux faire disparaître - Nathanaël Caillaux, Patrick Henriot p. 20-23 Les autorités livrent un combat sans merci aux migrant·es à Calais, visant à chasser de la région les personnes exilées loin de leur voie de passage vers le Royaume-Uni. Tous les coups deviennent permis et il reste peu de chose des droits fondamentaux des personnes exilées. La violence et le harcèlement policiers constituent le dernier degré de la stratégie de dissuasion, contraignant l'État à réprimer aussi les citoyen·nes qui veulent alerter sur cette situation.
- Des discriminations systémiques - Clémentine Le Berre, Laure Michelet p. 24-26 Les traitements spécifiques dont sont l'objet les personnes perçues comme migrantes à Calais – mais aussi en d'autres lieux – représentent véritablement et sans aucun doute des discriminations telles que le droit pénal les a définies. Les difficultés rencontrées pour combattre ces violations de la loi commises par les services publics comme par des personnes privées ne permettent pas encore d'organiser une stratégie de défense en l'état actuel des institutions, mais des citoyens recensent et garderont trace des faits.
- Une frontière qui ignore les mineurs - Camille Boittiaux, Antoine Caquot p. 27-30 À la frontière franco-britannique, les réponses apportées pour protéger les mineurs isolés étrangers (MIE) sont insuffisantes, inégales et sous-dimensionnées : leur prise en charge, qui repose beaucoup sur les équipes et la volonté politique du conseil départemental, est très différente suivant qu'ils se trouvent dans le Nord ou le Pas-de-Calais. Dans les deux cas, elle reste inadaptée dans un contexte de violence généralisée à l'égard des exilé·es, pour lesquel·les la fuite et la dissimulation restent les seules stratégies de survie.
- Intervenir en santé mentale dans une zone de non-droit - Lou Einhorn p. 31-34 Comment venir en aide à des personnes exilées, souvent en grande souffrance psychique, bloquées dans un pays dont elles espèrent s'extraire rapidement, dont l'énergie psychique est mobilisée pour la survie et alors que le présent les confronte à des violences policières et des conditions de vie indignes ? C'est l'équation redoutable à laquelle sont confrontées les associations qui viennent en aide aux réfugiés dans le Calaisis. Entretien avec Lou Einhorn, psychologue, qui depuis 2012, plaide et œuvre pour l'accès aux soins de santé mentale des populations en transit.
- « Calais, c'est dur, tout le monde sait ça ! » - , Bonnie Couillet, Hélène Spoladore p. 35-39 Après un périple de plusieurs mois qui lui a fait quitter la Guinée en passant par le Mali, l'Algérie, le Maroc puis l'Espagne, Sékou, Guinéen de 32 ans, arrive à Calais en 2018. En mars 2019, il est un des fondateurs du collectif Appel d'air, créé dans la jungle par les différentes communautés d'exilés, dans un contexte où les violences policières se multiplient, où les exilés, déjà éprouvés par les mauvaises conditions de vie, craignent que la préfecture n'évacue une partie du camp. Le collectif va faire parler de lui lors d'une action d'éclat dans le port de Calais qui va mobiliser plus d'une centaine de personnes migrantes… et entraîner une répression particulièrement violente qui va pousser les exilé·es à s'auto-organiser pour mieux résister.
Hors-thème
- Un Dublin extra-européen dans les Balkans ? - Sophie-Anne Bisiaux, Lorenz Naegeli p. 40-43 Depuis le début des années 2000, le règlement Dublin fait peser sur les pays de l'Union européenne (UE) situés en première ligne sur les principales routes empruntées par les exilé·es la responsabilité de l'enregistrement du premier accueil et de la gestion des demandes d'asile. Dans le cadre de l'externalisation de sa politique migratoire, l'UE irait-elle jusqu'à étendre le mécanisme Dublin dans les Balkans pour tenir à distance celles et ceux qu'elle considère comme « indésirables » ?
- Un Dublin extra-européen dans les Balkans ? - Sophie-Anne Bisiaux, Lorenz Naegeli p. 40-43
Mémoire des luttes
- Avant Calais, Sangatte - p. 45-48 Paru une première fois dans le n° 47-48 de Plein droit sous le titre « Des milliers de fantômes en camp », cet article est tiré du rapport d'une mission menée par cinq organisations au mois d'octobre 2000 auprès des autorités et des associations locales, ainsi que des gestionnaires du « centre d'hébergement et d'accueil d'urgence humanitaire » de Sangatte. Revenir sur les conditions de la fermeture, en 2002, du « camp de Sangatte », qui avait vu passer quelque 70000 personnes en trois ans, nous a paru utile pour souligner l'absurdité d'une politique répétitive de harcèlement des exilé⋅es qui perdure encore près de vingt ans plus tard.
- Avant Calais, Sangatte - p. 45-48
Le focus juridique
- À la frontière, user de tous les moyens pour étouffer les manifestations de solidarité - Claire Rodier p. 49-52