Contenu du sommaire : La protection de l'information dans l'entreprise de communication

Revue Légipresse. Hors-séries Mir@bel
Titre à cette date : Légicom : revue du droit de la communication des entreprises et de la communication publique
Numéro no 49, 2013/1
Titre du numéro La protection de l'information dans l'entreprise de communication
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Introduction - Karine Favro, Emmanuel Py p. 3-6 accès libre
  • I – La protection de l'information détenue par l'entreprise de communication à l'égard de ses concurrents

    • Le Code de la propriété intellectuelle comme fondement de l'appropriation de l'information par l'entreprise de communication ? - Sabine Jouve p. 9-28 accès libre avec résumé
      La notion d'information, entendue au sens large, correspond à une matière première immatérielle plus ou moins travaillée et élaborée, ayant fait l'objet d'un investissement économique plus ou moins important par l'entreprise de communication. Dès lors, la réservation de cette matière première est généralement un enjeu économique pour les entreprises de communication pour lesquelles l'appropriation de cette information doit permettre de préserver la valeur économique, l'exclusivité du message véhiculé. Il s'agit d'attirer l'intérêt du public et de se distinguer des concurrents. Cette étude s'intéresse aux seuls mécanismes juridiques offerts par le CPI pour protéger le message diffusé par l'entreprise de communication, et s'interroge sur l'éventuelle appropriation de l'information liée à l'application des règles de la propriété intellectuelle. Si l'information se présente sous une forme utile au regard des règles posées par le CPI, nombre de mécanismes sont applicables, que cette information se soit manifestée sous la forme d'une œuvre originale, qu'elle soit véhiculée par un programme protégé ou qu'elle soit devenue un signe distinctif de l'entreprise de communication qui en revendique dès lors le monopole. Il est vrai cependant qu'il peut se révéler bien difficile d'opérer une distinction entre la forme particulière, objet de la protection, l'information intrinsèquement contenue dans cette forme, et la libre circulation de laquelle il faut demeurer attaché. La reconnaissance de monopoles d'exploitation et de droits privatifs ne doit cependant pas avoir pour conséquence de paralyser l'information. ■
    • Le statut juridique des informations non appropriées - Nicolas Binctin p. 29-40 accès libre avec résumé
      L'étude du statut juridique des informations non appropriées écarte tous les questionnements liés à l'application du CPI. L'information, définie par son caractère technique, substantiel, identifié et secret, bénéficie d'un régime d'appropriation fondé essentiellement sur les mécanismes de droit commun des biens. Ce sont ces « autres » informations qui seront envisagées dans le cadre de cette étude et qui représentent en pratique la grande majorité des informations. Le statut juridique de l'information non appropriée signifie que l'on dépasse le simple stade du fait pour entrer dans le cadre d'une appréhension juridique de ce dernier. Non appropriable en tant que telle, l'information pourra être contrôlée par celui qui la collecte. Si la collecte est libre et ouverte, l'utilisation de l'information collectée est, en revanche, soumise, pour tout ou partie, à la volonté du collecteur. Ce n'est pas le statut de l'information qui change, c'est le traitement de celle-ci qui évolue. Ce traitement adapté en fonction du stade d'appréhension de l'information est influencé par de nombreux facteurs qui semblent contenir les prémices du statut juridique de l'information non appropriée. Au constat que l'information est un bien pouvant faire l'objet d'une réservation tel que le proposa Catala, il est aujourd'hui possible de dégager des éléments d'un régime juridique pour cette information non appropriée. Ce régime est influencé, d'une part, en raison de la nature même de l'information, d'autre part, au regard du pouvoir de la personne qui collecte l'information. ■
    • Les mécanismes contractuels de protection du savoir-faire - Emmanuel Py p. 41-54 accès libre avec résumé
      La protection du savoir-faire, rendue nécessaire par la valeur de l'information qui le constitue, n'est pas assurée par un droit de propriété intellectuelle. L'information que l'on entend protéger au titre d'un savoir-faire est susceptible de donner un avantage concurrentiel à son détenteur, qui en la maîtrisant assure sa fonction économique. Juridiquement, le savoir-faire n'est pas approprié, soit parce que sa nature s'y oppose, soit parce que son détenteur ne le souhaite pas alors que l'appropriation serait possible. En revanche, il n'est pas exclusif de toute réservation car sa divulgation lui ferait perdre son utilité et sa valeur. Cette réservation est assurée, en dehors de toute propriété, par des mécanismes de responsabilité civile venant réparer l'acquisition, la mise en œuvre ou la divulgation frauduleuses du savoir-faire par une personne autre que le détenteur légitime. L'absence de droit de propriété fragilise cependant le besoin de discrétion que seul le recours à la technique contractuelle permet de préserver. Le détenteur du savoir-faire doit s'interroger sur les mécanismes contractuels susceptibles de conduire à la protection, directe ou indirecte, de l'information. Afin de garantir la validité de ces mécanismes de protection, le détenteur devra s'attacher au respect de certaines libertés. ■
    • La proposition de loi Carayon : la reconnaissance légale du secret des affaires - Jérôme Lasserre Capdeville p. 55-63 accès libre avec résumé
      L'Assemblée nationale a adopté en première lecture, le 23 janvier 2012, une proposition de loi visant à sanctionner la violation du secret des affaires, plus connue sous le nom de « proposition de loi Carayon ». Que prévoit-elle concrètement ? Principalement la reconnaissance légale du secret des affaires et de la répression de sa violation. Cette proposition précise en effet les informations protégées par le secret des affaires, ce qui ne relève pas aujourd'hui du droit positif. Elle prévoit un délit de violation de ce même secret appréhendé à l'heure actuelle dans le cadre d'incriminations plus générales utilisées parfois au mépris de leurs éléments constitutifs. Les évolutions proposées sont-elles alors à l'abri de toutes controverses ? Selon l'auteur, une réponse négative s'impose, car des incertitudes persistent au regard des personnes susceptibles d'être condamnées pour violation du secret des affaires, et de l'acte matériel du délit, c'est-à-dire la révélation. En l'état, le délit de violation du secret des affaires n'est pas dépourvu de conséquences sur le travail d'investigation des journalistes et peut constituer un « paravent » facilitant la commission d'actes frauduleux par les entreprises et leurs dirigeants. L'auteur démontre cependant point par point que les critiques sont moins nombreuses que celles qui ont pu être formulées jusqu'ici par la doctrine. Il propose in fine une rédaction plus précise du texte à la faveur de son adoption. ■
    • La préservation du secret des affaires dans le cadre du contentieux brevet : une mission impossible ? - Renaud Fulconis, Grégoire Desrousseaux p. 65-77 accès libre avec résumé
      L'action en contrefaçon de brevet représente une arme importante à la disposition des acteurs économiques dans le cadre de leurs rapports commerciaux et concurrentiels. Cependant, cette action est parfois dangereuse à manier. Lorsqu'elle est mise en œuvre sans précaution, elle peut porter atteinte au secret des affaires des parties au litige alors qu'il est nécessaire de donner au titulaire de droits des moyens efficaces d'établir la matérialité et l'étendue de la contrefaçon. Or, aucune disposition générale ne garantit le respect du secret des affaires lors du contentieux brevet. Dès lors la confidentialité ne peut être préservée qu'au cas par cas par des professionnels irréprochables, et dans l'urgence de la situation. Ensuite, les mesures d'expertise propres à préserver les éléments confidentiels, bien qu'indispensables dans certains cas, sont loin d'être des solutions idéales. Enfin, lorsque survient une violation injustifiée du secret des affaires à l'occasion d'une action en contrefaçon, il n'existe pas de sanction satisfaisante, la notion d'abus de procédure étant appliquée de façon restrictive par les tribunaux, et l'obtention de dommages et intérêts subordonnée à la démonstration d'un préjudice qu'il est souvent très difficile de quantifier précisément. Le juste milieu entre l'efficacité de l'action en contrefaçon et la préservation du secret des affaires est donc difficile à trouver. Il convient peut-être de combiner la saisie-contrefaçon à la française et le club de confidentialité à l'anglo-saxonne ! ■
    • La liberté de l'information médicale - Yves Poirmeur, Jean-Paul Markus p. 79-98 accès libre avec résumé
      Les scandales sanitaires des dernières décennies ont montré combien la circulation des informations indispensables à la préservation et l'amélioration de la santé humaine est entravée, au détriment de la liberté d'information, et du patient. L'information médicale est un produit complexe dont la qualité dépend d'abord des informateurs qui communiquent ou produisent cette information, puis des journalistes qui recoupent les informations et les vérifient afin de les rendre objectives. Ce n'est pas suffisant. L'information doit également avoir un intérêt médiatique qui s'apprécie à travers l'intérêt du public, mais aussi à travers les risques que sa publication fait courir à l'entreprise médiatique et au journaliste. La médiatisation d'une information médicale est largement conditionnée par les stratégies d'un ensemble d'acteurs diversifiés, qui pour des raisons économiques, sanitaires, sociales, politiques ou encore scientifiques, ont intérêt ou non à les produire et à les mettre en circulation. Une série de filtres successifs peut neutraliser la circulation de l'information. L'information finit tôt ou tard par émerger du fait du relâchement des différents filtres mais aussi, en fonction de la diversité des sources, des conflits académiques, et aussi des « lanceurs d'alertes » aux statuts très variés. En dépit des dispositifs juridiques et déontologiques de protection destinés à assurer une certaine autonomie de l'information contre les logiques de communication, celles-ci menacent de façon toujours plus irrésistible de transformer l'information d'intérêt général en simple communication. Circule alors une information dépouillée de tous ses attributs. ■
  • II – La protection de la réputation de l'entreprise de communication

    • La protection de la réputation des entreprises de communication - Christophe Bigot p. 101-106 accès libre avec résumé
      L'entreprise de communication peut par définition faire l'objet de critiques portant sur son comportement ou sur ses produits et services. Par-delà, intervenant par essence dans le champ de l'opinion publique, cette particularité peut conduire les organes de presse, plus que les autres acteurs de la vie sociale, à être l'objet de mises en cause. L'explosion des réseaux sociaux et plus globalement le développement de l'Internet ont facilité les mises en cause et paradoxalement ont accentué la nécessité pour les entreprises de communication de soigner leur e-réputation. Tout comportement n'est cependant pas condamnable dès lors qu'il ne s'agit pas d'anéantir le droit de critique. C'est la raison pour laquelle cette étude est dédiée aux problématiques de qualification et aux particularités des contentieux engagés par les entreprises de communication et leurs collaborateurs sur le terrain de la loi du 29 juillet 1881. Juridiquement, il n'existe pas de particularité attachée aux activités de communication et les moyens mis à la disposition de ces entreprises sont généraux dès lors qu'ils sont utilisables sans distinction, par l'ensemble des opérateurs économiques. Cela étant, ces entreprises ont une activité spécifique à destination du public visant l'intérêt général, et sont par nature largement exposées à la critique. Dès lors les entreprises de communication bénéficient d'une protection réduite. ■
    • La protection de la réputation de l'entreprise de communication : le dénigrement des produits et services - Aurélie Brégou p. 107-115 accès libre avec résumé
      La réputation de l'entreprise, c'est l'opinion, bonne ou mauvaise, du public envers cette entreprise. De tout temps, l'entreprise a fait l'objet d'atteintes par le truchement des différents moyens de communication. La critique des médias par les médias eux-mêmes, les journalistes, salariés, syndicats, politiques, personnes de la société civile, concurrents, simples « usagers » des médias, répond à une réalité très concrète que le droit va devoir appréhender. À travers la critique de l'information elle-même, c'est l'entreprise de communication qui va être atteinte dans sa réputation. L'information est en effet un actif stratégique pour l'entreprise de communication, et chacun peut désormais s'exprimer librement sur les produits et services de l'entreprise, mais également sur l'entreprise. L'entreprise se doit de réagir. Le droit donne des armes pour protéger sa réputation. Parmi ces armes, figure notamment la responsabilité civile de droit commun. Mais quelle est la place exacte de la responsabilité civile en matière d'abus de la liberté d'expression et comment se distingue-t-elle de la diffamation ? Et si les conditions sont réunies pour pouvoir mettre en cause la responsabilité civile de droit commun, quel est le degré de la faute exigée ? Il ne faut pas oublier que la frontière entre le dénigrement et la simple expression d'un droit de critique est ténue. Il appartient au juge de la définir. ■
  • III – La protection des données et créations des salariés

    • Subordination et création : qui ou quoi protéger ? L'exemple du droit d'auteur des journalistes - Frédéric Gras p. 119-128 accès libre avec résumé
      L'article L. 111-1 du CPI prescrit le principe d'un droit de propriété incorporelle reconnu à l'auteur, personne physique, d'une œuvre de l'esprit qui n'est pas remis en cause par l'existence d'un contrat. Ce principe s'est trouvé progressivement assorti de régimes de cession spécifiques à chaque secteur professionnel, illustrant les effets des lobbys. Tel fut le cas pour les journalistes. À la logique personnaliste s'est superposée la logique de l'entreprise. Autrement dit, il a été question de concilier le lien de subordination ou le pouvoir hiérarchique avec le personnalisme des droits de propriété littéraire et artistique. Dans ce questionnement, les dispositifs législatifs anciens en la matière avaient déjà privilégié la gestion du collectif sur l'individuel. Visant à sécuriser les cessions de droits de propriété intellectuelle au bénéfice des entreprises de presse, la loi du 12 juin 2009 dite Loi HADOPI est venue modifier le Code de la propriété intellectuelle et le Code du travail en organisant la dévolution des droits, selon un système prôné par le Conseil d'État et sans s'attacher à la notion d'œuvre collective qui a été proprement délaissée au profit de la logique du droit social. De nouveau modifié par la loi du 17 mai 2011, il y a donc désormais, en propriété intellectuelle des journalistes, un avant et un après HADOPI. Ceci ressort clairement de l'arrêt du 16 novembre 2012 rendu par la Cour d'appel de Paris dans l'affaire Davodeau & SNJ c. Dépêche du Midi. ■
    • La protection des données des salariés : que reste-t-il de l'arrêt Nikon ? - Marguerite Kocher p. 129-140 accès libre avec résumé
      Dans son arrêt Nikon, la Cour de cassation a affirmé le droit du salarié au respect de l'intimité de sa vie privée, et en particulier le secret des correspondances, même au temps et au lieu de travail. Ainsi, « l'employeur ne peut prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l'ordinateur ». À l'ère du numérique, cette jurisprudence, quelque peu rigide pour certains commentateurs, a fait l'objet d'évolutions jurisprudentielles qui conduisent à s'interroger sur le sort réservé aux principes ainsi dégagés. L'accès de l'employeur aux courriels du salarié n'est plus proscrit et la protection du secret des correspondances connaît des différences de degrés, selon que les courriels sont échangés au temps et au lieu du travail ou non. La protection de la vie privée du salarié pose également la question de la protection du contenu des correspondances et de l'utilisation qui en est faite par l'employeur. De quelle façon ce dernier peut-il s'en prévaloir sans porter atteinte à la vie privée du salarié ? Pour répondre à cette question, encore faut-il s'entendre sur la notion de correspondance privée. Le caractère privé de la correspondance électronique ne relève pas de l'évidence. Dès lors il convient de réfléchir sur la portée de la protection de la vie privée du salarié au regard du droit de la preuve. ■