Contenu du sommaire : L'Écologie, le Capitalisme et la COP : Le Bon, la Brute et le Truand
Revue | EcoRev' : revue critique d'écologie politique |
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Numéro | no 43, 2016 |
Titre du numéro | L'Écologie, le Capitalisme et la COP : Le Bon, la Brute et le Truand |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Édito - p. 2-3
- Les trois écologies - Félix Guattari p. 5-7 Félix Guattari montre ici que face au marché mondial et aux complexes militaro-industriels, seule une articulation éthico-politique – qu'il nomme « l'écosophie » – entre les dimensions de la subjectivité humaine, des rapports sociaux et de l'environnement, peut permettre, à l'opposé d'une perspective technocratique, de faire face aux déséquilibres écologiques menaçants la planète Terre et la vie sur sa surface.
- L'écologie comme mouvement culturel - Françoise Gollain p. 8-9
Dossier
- De la subjectivité politique dans l'écologie d'André Gorz - Alice Sternberg p. 10-20 Le « monde vécu », celui de la vie et de la culture quotidienne, devient un concept politique dès lors que des collectifs d'individus conquièrent leur autonomie en inventant et pratiquant de nouveaux modes de relations sociales, de production, de travail, d'échanges, etc. Ce « vivre autrement » est en soi une subversion par rapport au système en place, qui laisse place à l'expression de toutes les aspirations profondes. Alice Sternberg l'analyse comme un basculement vers une subjectivité politique, seule capable de porter authenticité et radicalité, et ouvre au lecteur de nouveaux sujets d'interrogation.
- Le dépassement a déjà commencé : les modes de vie populaires au secours de la planète - Paul Ariès p. 21-32 Paul Ariès croise – comme à son habitude avec beaucoup de verve – socialisme et écologie. Il s'interroge sur le titre du dernier article d'André Gorz « La sortie du capitalisme a déjà commencé », peut-être sans prendre la juste mesure de ce qui s'invente et se vit aujourd'hui dans les marges de l'économie de marché. Néanmoins, il affirme de manière vivifiante que les gens de peu sont plus écolos que les autres, tout en déconstruisant les discours qui les enferment habituellement dans leurs contradictions et leur aliénation. Mais il est vrai, comme l'auteur le souligne, que si ce sont les milieux populaires qui ont le plus à gagner d'une sortie du capitalisme – transition écologique inséparable de toute justice sociale – beaucoup d'autres n'ont probablement pas intérêt à laisser se révéler les potentialités écologiques de ces « salauds de pauvres » !
- Écologie et coûts de production capitalistes : huis clos - Immanuel Wallerstein, Olivier Petitjean p. 33-47 Économiste, sociologue et historien américain, Immanuel Wallerstein développe une réflexion sur le « capitalisme » compris comme système historique, structuré d'emblée au niveau mondial, liant indissociablement aspects économiques, politiques, idéologiques et culturels (d'où l'emploi d'expressions plus précises comme celles de « capitalisme historique », « économie-monde » ou « système-monde capitaliste »). Dans cette conférence datant de 1997, il se penche sur la signification de la question écologique par rapport à l'histoire et à l'évolution actuelle de l'économie-monde capitaliste, notamment quant à la manière dont elle s'articule avec la question du salariat et celle des rapports Nord/Sud. Il souligne combien cette question, contrairement aux discours entendus à l'occasion des COP passées (et certainement de celles à venir !), s'avère insoluble dans le cadre du système-monde actuel. Déjà publiée dans notre numéro 11, il y a plus de douze ans, dans une traduction alors inédite en français, cette conférence trouve à nouveau sa place dans ce dossier, tant elle éclaire le contexte historique dans lequel nous devons désormais penser et agir.
- L'Emploi et classes moyennes : la fin des échappatoires - Randall Collins p. 48-51
- Le mode de production « entre pairs » comme alternative au mode capitaliste - Michel Bauwens p. 52-60 « Changer le système, pas le climat » est le slogan de la société civile qui espère un accord lors de la COP21 de Paris. Nous ne pouvons pas sauver le climat sans abandonner notre système productiviste et ce point n'est pas à l'ordre du jour de la négociation. Michel Bauwens esquisse ce que pourrait être ce nouveau mode de production alternatif.
- Affrontements politiques au sein de l'écosystème numérique - Hervé Le Crosnier p. 61-71 Éloges et critiques des nouvelles technologies ne lésinent généralement pas sur les discours emphatiques qui éloignent des questionnements les plus pertinents. Loin de ces dérives idéologiques, Hervé Le Crosnier appelle à une vigilance politique extrême quant aux enjeux du numérique. Car, si le réseau Internet a donné naissance aux communs numériques, il est également devenu un nouveau lieu de lutte politique, entre intérêts privés et publics, entre différentes classes et modèles de société. S'il est important de dénoncer les « misères du présent », il s'agit aussi de mettre en avant la « richesse du possible ».
- L'urgence d'une capture du CO2 massive - Jean Zin, Marc Robert p. 72-83 Notre ami Jean Zin défend dans ce texte une géo-ingénierie du climat consistant à capter le CO2 de notre atmosphère de façon à en diminuer la concentration et ainsi refroidir la température. Ce serait selon lui une politique d'urgence à mener, la seule capable à court terme de répondre au défi climatique que l'absence de politique concertée au niveau international ne fait qu'aggraver. Concluant son long plaidoyer, il qualifie « d'extrémisme écologiste » une attitude qui consisterait à critiquer et refuser ce captage du dioxyde de carbone. Pourtant, aucun scientifique ni aucun industriel ne prétend actuellement que cette possibilité de capter le CO2 pourrait être à court ou à moyen terme un moyen efficace pour lutter contre l'accumulation massive de CO2 dans notre atmosphère. Les raisons en sont nombreuses (cf. le N.B. en fin d'article). Dès lors, comment croire qu'une technologie non maîtrisée, se déployant dans des conditions économiques durablement défavorables, et représentant potentiellement moins de 1 % des émissions globale de CO2 puisse être une option viable à court terme pour stabiliser le climat ? Il nous semble plutôt que nous n'échapperons pas à notre destin collectif, loin des prédictions de miracles faciles tout autant que factices, il nous faudra plutôt réduire nos émissions de carbone, développer un monde basé sur les renouvelables, une économie bas carbone et une énergie pour tous à l'aide de technologies robustes et appropriables par tout un chacun. Y arriver prendra du temps, et les changements climatiques auront des effets durables, affectant tous les êtres humains à la surface du globe ; il faudra s'y adapter, en payer le prix économique, social et politique – très loin de l'agenda politique de la COP21...
- Planète : la véritable guerre des civilisations a commencé - Christophe Bonneuil p. 84-89 Dans cet entretien, donné à l'origine à un hebdomadaire français – qui n'en a publié qu'une version tronquée sans son accord – Christophe Bonneuil revient sur la façon dont les discussions sont engagées pour la COP21. Le constat n'est pas encourageant car les premiers échanges tablent sur une inflexion des émissions de gaz à effet de serre vers 2030. Or, selon les scientifiques du GIEC, la température terrestre a toutes chances d'augmenter d'environ 3˚C à la fin du siècle si cet infléchissement n'a pas lieu d'ici 2020, quand – au-delà de 1,5˚C de hausse – existe un fort risque d'« emballement » aux conséquences imprévisibles. Alors que dès aujourd'hui le changement climatique bouleverse des millions de vies de la Louisiane aux Philippines, un tel scénario nous projetterait vers un autre monde, avec des centaines de millions de migrants environnementaux (l'ONU anticipe 150 millions de réfugiés climatiques en 2050), une géopolitique plus brutale et une vie moins civilisée. Dans cette version de l'entretien plus développée et révisée par lui-même en juillet dernier, Christophe Bonneuil évoque les dégâts environnementaux d'un libre-échange dogmatique ; articule la question écologique et la question de l'échange écologique inégal inhérente à la dynamique du capitalisme ; et fait dialoguer les enjeux climatiques et écologiques contemporains avec la pensée d'auteurs comme B. Latour, P. Descola, E. Viveiros de Castro, F. Braudel ou encore I. Wallerstein.
- `ibLaudato si'. `/ibUne Encyclique anti-systémique - Michael Löwy, Marie-Rosaire Dessendier p. 90-95 En écosocialiste convaincu, Michael Löwy nous présente une analyse profane de la toute première encyclique entièrement rédigée par le pape François, Laudato si' : La sauvegarde de la maison commune. Si pour Michael Lôwy, cette dernière est faible en terme de pistes et préconisations politiques – même si son rôle n'est pas de proposer directement un programme de changement social – elle apporte néanmoins, en remettant en cause radicalement l'actuel mode de production et en associant de manière inséparable la question sociale à la protection de l'environnement, une analyse anti-systémique pertinente pour celles et ceux qui réfutent un monde grandement dominé par l'utilitarisme des actions individuelles.
- La révélation écologique du catholicisme romain - Stéphane Lavignotte p. 96-103 Compte tenu de la prétention affichée de la COP21 de s'adresser à la population mondiale, ÉcoRev' a choisi de faire une large place à l'analyse de l'encyclique du pape François, Laudato si' : La sauvegarde de la maison commune. Faisant directement suite à celle de Michael Löwy, l'analyse de Stéphane Lavignotte, militant écologiste de longue date et par ailleurs pasteur protestant, vient la compléter et l'approfondir comme en écho. Le texte papal, par son écho planétaire (un public de plus d'un milliard d'individus), par sa radicalité politique et sociale et par son humanisme constitue à n'en pas douter un texte important de ce début de 21ème siècle, rongé par des crises systémiques et un épuisement des imaginaires politiques pour penser un autre développement et des sociétés plus justes et plus humaines. Autant de raisons, même si nous ne nous reconnaissons pas dans une foi catholique qui n'oublie malheureusement pas son archaïsme vis-à-vis des femmes et de la liberté sexuelle, pour donner sa place à une réflexion profondément écologique.
- Sauver la planète sans changer nos pratiques sociales économiques et politiques ? - Benjamin Dessus p. 104-115 Le rendez-vous mondial de la COP 21 permettra aux différentes organisations de promouvoir leur scenario préféré pour lutter contre le changement climatique. États et institutions mondiales se pencheront alors sur des solutions se réclamant d'une « croissance verte » censée pouvoir allier croissance et réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Benjamin Dessus montre ici à quel point leurs hypothèses sont absurdes : il faudrait une expansion improbable de technologies inconnues et dangereuses comme la captation de carbone ou l'énergie nucléaire – délaissée à juste titre par presque tous les pays du monde. Pourtant, des solutions pour un avenir moins énergivore existent. Promouvoir les initiatives locales et véritablement participatives serait un premier pas vers une réflexion citoyenne généralisée – que la taille du défi nous impose désormais.
- Comment « Habiter le monde » aujourd'hui ? : Autour des ouvrages de Naomie Klein, "Tout peut changer" et de Manuel Castells, "Communication et pouvoir" - Patrick Dieuaide p. 116-122 La question centrale que pose l'Ecologie Politique est celle de l'habitat ou dans une variante moins radicale celle du mode de vie. Comment habiter le monde dans lequel nous vivons, travaillons, produisons, consommons ? Comment l'occuper, s'en occuper ? En partant de la lecture de l'ouvrage récents de Naomie Klein, Patrick Dieuaide éclaire celle-ci d'une autre lecture, celle du dernier livre traduit en français de Manuel Castells. Ce faisant il propose aux mouvements écologistes de réfléchir aux manières les plus pertinentes de mettre en œuvre les luttes pour une relocalisation de la politique et d'ouvrir ainsi la voie au Commun, pour une organisation matérielle et démocratique du temps et de la vie partagée.
- Une explication anticapitaliste de la crise - Françoise Gollain p. 123-124
- Tout et son contraire, le capitalisme en plein désarroi - Emmanuel Dessendier, Anita Rozenholc p. 125-132
- De la subjectivité politique dans l'écologie d'André Gorz - Alice Sternberg p. 10-20
Kit militant
- DIONY COOP une coopérative alimentaire à Saint-Denis - Jean-Claude Richard p. 133-139 Notre société comporte de nombreux mécanismes de contrôle qui freinent libre participation, responsabilité individuelle et engagement civique. La Coopérative alimentaire DIONY COOP explore différentes manières d'éviter certains de ces mécanismes en créeant un espace autogéré sans bureaucratie ni enjeux de pouvoirs. Jean-Claude Richard, l'un des initiateur du projet, explicite le fonctionnement de cette structure, ses valeurs et compromis.
- DIONY COOP une coopérative alimentaire à Saint-Denis - Jean-Claude Richard p. 133-139
Utopie(s) 2050
- 9 juillet 2065, les 20 ans de l'Autogestion Planétaire : L'utopie de Jean-Noël Sarrail - Jean-Noël Sarrail p. 140-148 Professeur de musique et d'astronomie à l'Université de Toulouse, Jean-Noël Sarrail est également l'auteur d'un petit essai autoédité en 2014, Activez-vous ! Pour une Autogestion Planétaire. Dans le cadre de notre rubrique, il a bien voulut se prêter en reprenant les grandes lignes de son essai.
- 9 juillet 2065, les 20 ans de l'Autogestion Planétaire : L'utopie de Jean-Noël Sarrail - Jean-Noël Sarrail p. 140-148
- Lectures - p. 149-154