Contenu du sommaire : Variantes formelles de l'interrogation
Revue | Langue française |
---|---|
Numéro | no 212, décembre 2021 |
Titre du numéro | Variantes formelles de l'interrogation |
Texte intégral en ligne | Accès réservé |
- Éditorial - Jacques Bres, Céline Vaguer p. 5-7
- Variantes formelles de l'interrogation. Présentation - Pierre Larrivée, Alexander Guryev p. 9-24
- L'inversion du sujet clitique en français oral : ultime apanage des interrogatives ? - Elisabeth Stark, Larissa Binder p. 25-40 Cette contribution montre que l'inversion des sujets clitiques, quoique très rare en français oral, persiste à un niveau stable. Fondée sur l'examen de 12 corpus de français oral représentant un total de 3.65 millions de mots, l'analyse établit que cette persistance se manifeste dans toutes les configurations syntaxiques (surtout dans les constructions interrogatives mais aussi dans les incises ou après certains adverbes initiaux), et ce, dans les contextes à ‹distance communicative› comme dans ceux relevant de l'‹immédiat communicatif›. Ce résultat contredit les analyses des sujets clitiques du français contemporain français comme simples marques d'accord. Il va à l'encontre des descriptions diglossiques du français contemporain qui attribuent à l'inversion des sujets clitiques un caractère exclusivement standard, voire formel.Starting from an empirical analysis of 12 corpora of oral French (3.65 millions token), we show that subject clitic inversion, while exceedingly rare in spoken French, still persists at a low, but stable level. It is found in all relevant syntactic configurations (e.g. interrogative constructions, parenthetic verba dicendi, after certain initial adverbs), in contexts of “communicative distance” as well as “communicative proximity”. This finding represents also a severe challenge to analyses of subject clitics as mere agreement markers. It goes against diglossic approaches to contemporary French that assume an exclusively standard or formal character of subject clitic inversion.
- L'intonation des interrogatives par maintien de l'ordre SV - Janina Reinhardt p. 41-56 Cette étude porte sur l'intonation des interrogatives sans inversion du sujet dans un corpus de onze livres audio. Le but est de déterminer les régularités et les variations du mouvement final de la fréquence fondamentale de l'interrogation dans le discours direct qui ne comprennent ni inversion du sujet ni la locution est-ce que. Nous montrons que les interrogations sans mot interrogatif ont une forte tendance à être prononcées avec une mélodie montante. En revanche, les structures avec mot interrogatif sont beaucoup moins prévisibles. Même si la position du mot qu- et la fonction pragmatique semblent avoir une influence, ces facteurs ne peuvent prédire les réalisations intonatives de manière fiable.This study deals with the intonation of interrogatives in a corpus of eleven audio books. It aims at identifying the regularities and variations in the final movement of the fundamental frequency of questions in direct speech that do not include subject-verb inversion nor the interrogative particle est-ce que. It is shown that questions without an interrogative word have a strong tendency to be pronounced with a rising melody. In contrast, structures with wh-words are much less predictable. Although the position of the interrogative word and the pragmatic function seem to have an influence, these factors cannot reliably predict intonational patterns.
- Étude comparative des particules interrogatives en picard et dans deux variétés de français parlées au Canada - Julie Auger, Anne-José Villeneuve p. 57-74 Cet article étudie ti et tu en picard, en français québécois et en français acadien. Nous examinons les données de l'Atlas linguistique de France et d'autres variétés gallo-romanes pour situer les données contemporaines dans un contexte historique. Notre analyse des données contemporaines révèle que, dans les trois variétés, ti/tu est employé dans les questions totales, défavorisé avec les sujets de deuxième personne et que l'effet de la négation varie d'une variété à l'autre.This article examines interrogative ti and tu in Picard, Québec French and Acadian French. To shed light on their development, we consider data from the Atlas linguistique de France and other Gallo-Roman varieties. Our analysis of contemporary data reveals that, in all three varieties, ti/tu is used only in total questions and it is disfavored in negative questions and with second person subjects and that the effect of negation varies across varieties.
- Routines discursives comme contextes d'émergence de l'interrogative partielle in situ en diachronie - Alexander Guryev, Pierre Larrivée p. 75-90 Cette étude s'intéresse au rôle des routines discursives dans le parcours diachronique de l'interrogative partielle in situ. On examine les emplois de deux routines, issus de la base de données frantext. La première routine, initialement d'ordre macro-syntaxique, fonctionne pragmatiquement comme la question ‹retardée› qui introduit, dans un premier temps, un objet-de-discours lexicalement sous-spécifié et laisse attendre, dans un second temps, sa détermination. Le fonctionnement pragmatique de la seconde routine s'appuie sur la question à valeur d'information explicitement ancienne : le mot qu- ayant le statut d'un complément interne a pour instruction de spécifier les traits d'un objet-de-discours validé antérieurement dans le discours. Les deux routines, qui se montrent propices aux emplois de qu- postposé ou in situ en diachronie, ont favorisé l'émergence d'une structure interrogative in situ en français.This study examines the role of discursive schemes in the emergence of wh- in situ interrogatives in French. It examines the uses of two discursive schemes, coming from the frantext database. The first scheme is a macro-syntactic one and functions pragmatically as a “delayed” question: The wh- word, which acts as an external complement, first introduces an underspecified discourse object that is then determined. The pragmatic functioning of the second scheme is based on a question with an explicitly old information value: The wh- word, which has the status of an internal complement, requests specification on the previously validated discourse object. It is argued that the two schemes, which prove to be conducive to the use of postposed wh- or in situ interrogatives in diachrony, favored the emergence of an in situ interrogative structure in French.
- La structure alternative en français : un type interrogatif à part entière ? - Ruggero Druetta p. 91-105 Cet article vise à montrer l'originalité de l'interrogative alternative à partir de ses particularités distributionnelles et prosodiques ainsi que des caractéristiques syntaxiques du morphème de disjonction. Le contraste avec les propriétés des constructions corrélatives et celles de la disjonction interrogative dans d'autres langues conduit à une nouvelle analyse de la construction alternative en tant que superstructure, dont l'article présente aussi les conséquences sémantico-pragmatiques.This paper deals with the distributional and prosodic properties of alternative question. It focuses on the syntactic characteristics of the disjunction morpheme. The comparison with the properties of correlative constructions and of interrogative disjunction in other languages brings a new analysis of the alternative structure as a superstructure. The semantic and pragmatic consequences of the analysis are discussed.
- Les interrogatives averbales dans la presse, stratégies discursives récurrentes ? - Florence Lefeuvre p. 107-122 Cet article a pour objectif d'étudier, dans le discours de la presse, des interrogatives averbales qui se distinguent par leur apport dans l'élaboration du discours. Trois sortes d'interrogatives ont été analysées : les interrogatives à deux termes qui mettent en question une assertion concernant une entité du discours précédent ; les interrogatives prédicatives à un terme avec un fonctionnement résomptif qui permettent de s'interroger sur le discours antérieur et, plus rarement, d'introduire le discours postérieur ; les interrogatives thématiques qui ne correspondent pas à une mise en question d'une assertion mais qui orientent le discours sur le nouveau thème introduit. Cette étude s'appuie sur un corpus du journal Le Monde et des exemples relevés manuellement dans l'hebdomadaire L'Obs.The aim of this paper is to study, in the discourse of the press, the interrogative clauses which are distinguished by their contribution in the development of the discourse. Three kinds of interrogative clauses were analyzed: Two-term interrogative clauses which question an assertion concerning an entity from the previous discourse; the one-term predicative interrogative clauses with a resumptive functioning which allow us to question the previous speech and more rarely to introduce the later speech; interrogative themes which do not correspond to a questioning of an assertion but which orient the discourse on the new theme introduced. This study is based on a corpus from Le Monde and examples collected manually from the weekly L'Obs.
- Le contexte linguistique des questions rhétoriques conflictuelles et la variation entre "pourquoi" et "qu'est-ce que" - Laurie Dekhissi, Aidan Coveney p. 123-137 Dans les questions rhétoriques conflictuelles, pourquoi est en concurrence avec l'emploi non argumental de qu'est-ce que. Adoptant une approche quantitative, nous examinons cette concurrence dans un corpus de films représentant le vernaculaire multiculturel de Paris. Après avoir identifié 176 occurrences des variantes, nous analysons certains éléments du contexte linguistique susceptibles d'influer sur le choix de variante. Nous trouvons que le sujet (pronominal) ne semble pas avoir d'effet sur la variation mais qu'une proposition courte et un verbe vernaculaire semblent favoriser l'usage de qu'est-ce que.In conflictual rhetorical questions, pourquoi alternates with the non-argumental use of qu'est-ce que. Adopting a quantitative approach, we study this variation in a corpus of films representing the multicultural vernacular of Paris. After identifying 176 tokens of the variants, we analyse certain aspects of the linguistic context that may influence the choice of variant. We find that the subject (pronoun) does not seem to have an effect on the variation, but that a short clause and a vernacular verb seem to favour the use of qu'est-ce que.