Contenu du sommaire : Des journaux pour toutes

Revue Cahiers Sens public Mir@bel
Numéro no 30, 2021/1
Titre du numéro Des journaux pour toutes
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  • Introduction - Magali Guaresi, Maria Grazia Scrimieri p. 7-16 accès réservé
  • Séverine et Marguerite Durand, La Naissance d'un journal expérimental : "La Fronde" - Cécile Torrubia Besnard p. 17-35 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    La Fronde voit le jour en 1897, alors que le scandale de l'affaire Dreyfus anime les passions en France. Ce journal atypique à bien des égards, est la concrétisation d'une rencontre entre deux femmes exceptionnelles : Maria Pognon et Marguerite Durand, lors de l'un des nombreux congrès féministes de cette fin de siècle. Cette rencontre déterminante pousse Marguerite Durand à se tourner vers le troisième membre de cette idée inédite : Séverine. Forte d'une expérience acquise aux côtés de Jules Vallès, déjà reconnue dans un milieu largement mené par les hommes, elle s'investira dans ce projet de femmes, créé, rédigé, et publié, uniquement par celles que l'on nommera, entre autres, les frondeuses. Lieu sans pareil, d'expression, de revendications, et surtout de tendance féministe, il permettra à toutes d'être entendues. Dans un monde où la parole de la femme est méprisée, sexe condamné à un statut d'éternel adolescent, on peut se demander comment ce projet a pu voir le jour, qui sont ces fameuses frondeuses, ou encore, quelles sont leurs revendications. Nous nous intéresserons donc au contexte de la naissance de ce journal, à ses créatrices et collaboratrices, mais aussi à sa réception par ses homologues masculins.
    La Fronde was born in 1897, while Dreyfus scandal animates passions in France. This atypical newspaper in many ways, is the pinnacle of a meeting between tow exceptionals women: Maria Pognon and Marguerite Durand, during one of the many feminist congresses of the end of that century. This determining meeting convinced Marguerite Durand to turn to the third member of that novel idea: Séverine. Strong to her experience with Jules Vallès, already known in an environment widely led by men, she got involved in this women project, created, written, and published, only by those who will be named, among others, les frondeuses. This place hold no comparaison, in terms of expression, demands, feminist trends, and gave every woman a voice to be heard. In a world where women speech is undermined as a gender condamned to an eternal teenager status, we can barely imagine how this project came to life. We will take interest in the context of the newspaper birth, his creators and collaborators, and also to his reception by his men counterparts.
  • La presse féminine et la deuxième vague du féminisme en France : Luttes et débats autour de la revue "Des femmes en mouvements" (1977-1979) - María Isabel Menéndez Menéndez, Coline Charbin p. 37-59 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Ce texte rassemble la pensée politique et le contexte historique de la revue féministe Des femmes en mouvements, liée au Mouvement de Libération des Femmes (MLF) dans les années 1970. Les pages de la revue étaient un lieu de rencontre pour les militantes et les activistes, et elles ont rendu compte des conditions politiques et sociales des femmes partout dans le monde. La publication, dans laquelle des noms tels que Hélène Cixous, Kate Millett ou Lidia Falcón ont été réunis, a nourri le débat sur les droits et les luttes des femmes et a créé un espace où exposer les préoccupations artistiques et politiques des femmes de l'époque.
    This text brings together the political thought and historical context of the feminist journal Femmes en mouvement, linked to the Women's Liberation Movement (MLF) in the 1970s. The pages of the journal were a meeting place for activists and militants and reported on the political and social conditions of women around the world. The publication, in which names such as Hélène Cixous, Kate Millett or Lidia Falcón were gathered, fed the debate on women's rights and struggles and created a space to expose the artistic and political concerns of women of the time.
  • Sorcières : Analyse textométrique et littéraire d'un projet éditorial de femmes - Magali Guaresi, Maria Grazia Scrimieri p. 61-94 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    L'article explore la revue française Sorcières (1975-1982) dans une double perspective, à la fois textometrique et littéraire. Dans une première partie, « L'architecture thématique de la revue Sorcières », nous nous proposons de décrire le projet éditorial, littéraire et politique de Sorcières par une analyse assistée par ordinateur des thèmes de la revue : dans cette méthode, les proximités entre les mots sont observées de façon à élaborer des classes de vocabulaire, qui suggèrent les thématiques principales de la revue. Dans une deuxième partie « Le numéro 1 : de l'alimentation aliénante à la nourriture libératrice » nous voulons nous pencher plus précisément sur le numéro 1 de la collection, considéré comme un manifeste pour l'expression et la création féminines et consacré à la nourriture. Par l'analyse littéraire et critiques des textes des contributrices, l'image de la nourriture, dans ce premier dossier, n'apparaît jamais comme un élément de contrainte pour les femmes mais se révèle être à la fois moyen de connaissance et un lien avec leurs corps.
    The article explores the French review Sorcières (1975-1982) from a double perspective, both textometric and literary. In the first part, “The thematic architecture of the review Sorcières”, we propose to describe the editorial, literary and political project of Sorcières through a computer-assisted analysis of the review's themes: in this method, the proximities between words are observed in order to elaborate vocabulary classes, composed of words with co-occurring profiles, which suggest the main themes of the review. In a second part “Number 1: from alienating food to liberating food” we want to look more closely at number 1 of the collection, which is considered a manifesto for female expression and creation and it is dedicated to food. Through literary and critical analysis of the texts of the contributors, the image of food in this first dossier never appears as an element of constraint for women, but as a means of knowledge and as a link with their bodies.
  • Journalistes et revues féministes anarchistes en Italie au début du XXe siècle - Laura Fournier-Finocchiaro p. 95-126 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Après un bref aperçu de la participation des femmes écrivaines à la presse anarchiste en Italie au début du XXe siècle, l'article examine les grandes idées développées dans les premières revues féminines anarchistes publiés en Italie, La Donna libertaria (1912-1913) et L'Alba libertaria (1915). Outre à inciter les femmes à participer à la lutte anticapitaliste et antimilitariste, les revues féminines anarchistes montrent une certaine ouverture aux problèmes des femmes, en formulant notamment des prises de position originales sur la maternité et le contrôle des naissances par la contraception. Les revues accusent en même temps les compagnons anarchistes d'avoir négligé l'élément féminin au sein du mouvement et entendent lutter contre l'antiféminisme de tous bords.
    After a brief overview of the participation of female writers in the anarchist press in Italy at the beginning of the twentieth century, the article examines the main ideas developed in the first anarchist women's periodicals published in Italy, La Donna libertaria (1912-1913) and L'Alba libertaria (1915). In addition to encouraging women to take part in the anti-capitalist and anti-militarist struggle, anarchist women's periodicals showed some openness to women's issues, in particular by formulating original positions on motherhood and birth control through contraception. At the same time, the periodicals accuse the anarchist companions of having neglected the female element within the movement and intend to fight against antifeminism of all kinds.
  • Pratiques d'évitement des contraintes de genre : Parcours de femmes au sein de la revue "il manifesto" (1969-1971) - Carmela Lettieri p. 127-159 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Le texte explore la place des femmes au sein de la revue il manifesto (1969-1971). Une double perspective, à la fois biographique et thématique, permet tout d'abord de retracer les parcours comparés des intellectuelles qui ont contribué à un phénomène de féminisation de cette revue. En répertoriant ensuite les textes signés par les femmes de la rédaction, les dynamiques de spécialisation et le traitement spécifique de chaque thème – dont la question des femmes, toujours située à l'intérieur d'une réflexion politique bien plus large – sont mis au jour. Ces journalistes / intellectuelles participent à une véritable reconfiguration des règles de l'assignation de genre dans les médias et lèguent aux générations suivantes, à travers le quotidien créé en 1971, non seulement un dispositif d'écriture mais aussi un dispositif d'action.
    The text explores the place of women within the journal il manifesto (1969-1971). A twofold perspective, both biographical and thematic, first of all allows us to retrace the comparative paths of the intellectuals who contributed to the feminization of this journal. Then, by listing the texts signed by the women editors, the dynamics of specialization and the specific treatment of each theme, including the question of women, always situated within a much broader political reflection, are brought to light. These journalists / intellectuals are indeed participating in a real reconfiguration of the rules of gender assignment in the media and bequeathing to the following generations, through the daily newspaper created in 1971, not only a writing device but also a device for action.
  • Les deux visages de la subversion : Le cas de la presse féminine dans la Deuxième République espagnole - María de los Ángeles Gutiérrez Romero, Javier Herrero p. 161-196 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Les études de la presse féminine espagnole ont laissé dans l'ombre les revues publiées pendant la Deuxième République espagnole, à peine mentionnées dans les manuels d'histoire de la presse jusque très récemment. Pourtant, ces revues fournissent des informations précieuses, non seulement comme sources documentaires sur la vie quotidienne, mais en tant que véhicules de messages subversifs. Sur ce plan, elles iront jusqu'à couvrir des actualités d'une grande importance, telles que la montée du nazisme et arrivent même à contourner la censure pour donner la parole à des personnalités d'un antirépublicanisme militant. L'un de leurs thèmes privilégié sera l'arrivée du prototype de « femme moderne » qui suscite de nombreux débats sur la transgression esthétique et comportementale des femmes. De là, on en vient facilement à aborder d'autres sujets comme la famille, la patrie ou la religion, dont la représentation parmi les publications n'est en rien unanime : on y entrevoit un vif débat entre tradition et modernité.
    Within the study of the Spanish women's press, the magazines published during the Second Republic, until recently, have gone relatively unnoticed since they are rarely included in press history manuals. However, these magazines provide extraordinary information not only as documentary sources of daily life but as vehicles for subversive messages. In this sense, they even cover important news such as the rise of Nazism or they circumvent censorship to give voice to personalities with a belligerent anti-republicanism. One of the main themes will be the arrival of the “modern woman” prototype, which concentrates numerous debates around the aesthetic and behavioral transgression of women, which, in turn, becomes a representation of other topics such as family, nation or religion and whose perception in the articles is never absolute, but hinted at in the intense dialectic between tradition and modernity.
  • Femmes, éducation et politique : Les revues espagnoles dans la période de l'entre-deux-guerres - Sofía Rodríguez Serrador, Coline Charbin p. 197-224 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    À partir des années vingt, les femmes espagnoles ont participé de façon de plus en plus active dans la sphère publique du fait d'un processus d'acquisition d'un niveau culturel plus élevé et de changements dans la mentalité de la société, passant à revendiquer une série de droits politiques et sociaux : accès à l'éducation, au vote, au divorce… Lors de ces premières décennies, les espaces culturels clairement féminins qui ont été créés ont favorisé ces débats et ont consolidé des liens de sororité, comme la Residencia de Señoritas ou le Lyceum Club. À leur tour, ces femmes ont aidé à consolider des nouveaux modèles de genre alternatifs voire même opposés au rôle féminin traditionnel. Cependant, les « femmes modernes » ont rencontré des forts noyaux de résistance, non seulement parmi les éléments les plus conservateurs de la société, mais aussi parmi les intellectuels. Dans cet article nous étudierons la façon dont les revues féministes / féminines ont abordé ces changements et la reconnaissance des droits de la femme.
    Starting from the twenties, Spanish women participated more and more actively in the public sphere due to a process of acquiring a higher cultural level and changes in society's mentality, claiming a series of political and social rights: access to education, voting, divorce… In these first decades, the clearly feminine cultural spaces that were created favored these debates and consolidated sisterhood links, such as the Residencia de Señoritas or the Lyceum Club. In turn, these women helped consolidate new gender models that were alternative or even opposed to the traditional female role. However, the “modern women” met strong opposition, not only among the most conservative components of the society, but also among intellectuals. In this article we will study how feminist / women's magazines have addressed these changes and the recognition of women's rights.
  • Écrire pour reconquérir son corps : Le discours de l'intime dans la revue espagnole "Vindicación Feminista" - Victoria Garrido y Saez p. 225-259 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Fondée par Lidia Falcón et Carmen Alcalde en 1976, Vindicación Feminista est la revue phare du féminisme espagnol de deuxième vague. Dans un pays qui sort tout juste de trente-six ans de dictature national-catholique, le magazine détonne. Moderne et irrévérencieux, il aborde sans scrupule ni tabou des thèmes comme l'homosexualité, la diversité du plaisir féminin ou la prostitution. Il s'engage également dans les grandes batailles féministes de l'époque : dépénalisation de l'adultère et de la contraception, accès au divorce, avortement libre, etc., car l'un des objectifs de Vindicación est la reconquête du corps féminin, indûment accaparé par la dictature franquiste.Pour le magazine, il est impératif que les femmes redeviennent maîtresses de leur corps mais aussi des mots pour le dire. En effet, dans les années 1970, le monde politique et médiatique est essentiellement dominé par les hommes. Ainsi, c'est à travers la voix de l'autre que les femmes appréhendent leurs chairs. Les journalistes de Vindicación s'arment donc de leur plume afin de se réapproprier cette intimité confisquée.L'article se propose d'étudier le discours du corps et de l'intime dans Vindicación entre 1976 et 1982, période de parution du mensuel. L'objectif est de comprendre comment l'écriture a pu servir d'arme pour récupérer le contrôle, non seulement sur le corps des femmes, mais aussi sur les mots pour le définir. Il s'agira pour cela d'examiner les thèmes choisis, l'angle abordé, le style d'écriture, le degré de proximité avec la lectrice et le profil des autrices. En quoi cette revue collective, dont la diffusion a été si confidentielle durant sa courte existence, est-elle devenue la référence du féminisme espagnol de deuxième vague le plus avant-gardiste ? L'article tâchera de montrer que Vindicación révolutionne le discours sur les femmes en déconstruisant les codes de représentation, en libérant les corps et en créant un espace d'expression solidaire.
    Created by Lidia Falcón and Carmen Alcalde in 1976, Vindicación Feminista is the flagship magazine of the second wave of Spanish feminism. After thirty-six years of social-catholic dictatorship, the periodical sticks out. It's modern, irreverent and, without any misgivings nor taboos, broaches topics such as homosexuality, the diversity of female sexual pleasures and prostitution. It also campaigns for the main feminist battles of the time: the decriminalisation of adultery and contraception, access to divorce, free abortion, etc., because, one of the purposes of the Vindicación is the recovery of the female body.According to the periodical, it's imperative for women not only to become the mistresses of their own bodies again but also to master the words to tell them. In fact, in the 1970s, the political and media worlds were largely dominated by men. That's why women can only body through someone else's voice. The journalists of Vindicación armed themselves with their quills to reclaim this confiscated privacy.The article offers to study the speech of the private and of the body in Vindicación from 1976 to 1982, the period during which the monthly magazine was published. The goal is to understand how writing was able to recover the control over the female body and the words used to define it. It will investigate the topics that were addressed, the angles chosen, the writing styles, the closeness levels with the female readers and the author's profiles. How did this community magazine with its restricted publication throughout its short lifespan become the most avant-garde magazine in the Spanish second-wave feminism? The article will demonstrate that Vindicación revolutionized the way we speak about women by deconstructing the representation codes, freeing their bodies, and creating a space of united expression.