Contenu du sommaire : Les catégories de normes constitutionnelles

Revue Titre VII Mir@bel
Numéro no 8, avril 2022
Titre du numéro Les catégories de normes constitutionnelles
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier : Les catégories de normes constitutionnelles

    • Constitution ou norme constitutionnelle ? - Olivier Cayla p. 1-10 accès libre avec résumé
      Qu'est-ce qu'une norme constitutionnelle ? On ne peut pas manquer d'apercevoir, par le truchement d'une analyse « pragmatique » de l'opération interprétative à laquelle le Conseil constitutionnel s'est livré, à l'occasion de sa lecture du texte du préambule et de celui de la loi de 1901 dans sa fameuse décision de 1971, que la norme constitutionnelle n'entretient strictement aucun rapport avec le texte de la Constitution — ni même avec quelque texte que ce soit, d'ailleurs. Car la norme constitutionnelle, qui est une catégorie de signification illocutoire, est par définition même une signification extratextuelle, ressortissant à la sphère du pragmatique et non du sémantique. C'est dire si la normativité constitutionnelle, qu'on appelle aussi la constitutionnalité, n'a rigoureusement rien à voir avec la Constitution, si toutefois on entend, par ce terme, désigner le texte constitutionnel. Cette observation peut (doit ?) conduire à réapprécier certains concepts-clé du droit constitutionnel, dont, en particulier, celui de « pouvoir constituant », qui ne saurait guère apparaître comme étant l'auteur de la Constitution, mais plutôt comme simple acteur de l'écriture de son texte, participant, à stricte égalité avec les acteurs de sa lecture, à l'actualisation médiate et indéfiniment différée d'une constitutionnalité jamais achevée. De ce point de vue, le rôle du juge en général et du juge constitutionnel en particulier, doit s'apprécier dans des termes « herméneutiques » fort différents de ceux qu'envisagent, dans leur affrontement étroitement binaire, autant les zélotes d'un droit constitutionnel purement jurisprudentiel que les tenants d'un droit constitutionnel comme jus politicum.
    • La genèse du bloc de constitutionnalité - Charlotte Denizeau-Lahaye p. 11-19 accès libre avec résumé
      Aucune expression doctrinale n'a connu, en droit constitutionnel français, autant de succès que l'expression « bloc de constitutionnalité ». Depuis près de cinquante ans et sans jamais être utilisée par le Conseil constitutionnel, elle s'est imposée, comme une formule évidente, rassurante et commode pour désigner, sous un mot pratique et imagé, l'ensemble des normes utilisées par le Conseil pour effectuer son contrôle de constitutionnalité. Réfléchir à la genèse du bloc invite à se pencher sur la naissance de l'expression, sur le choix du mot « bloc », dont les vertus fédératrices et pédagogiques ne compensent pas pleinement son inaptitude à rendre compte de l'hétérogénéité et des failles de l'édifice. Au-delà de cette question sémantique, il importe de comprendre pourquoi au début des années 1970, le Conseil constitutionnel a ressenti la nécessité urgente pour la France de se doter de son propre catalogue de droits et libertés fondamentaux, qui allait désormais être opposé au législateur.
    • La catégorie des droits et libertés que la Constitution garantit doit-elle désormais être considérée comme stabilisée ? - Louis Boré p. 20-26 accès libre avec résumé
      Si les droits et libertés constitutionnelles existent depuis que la France a une constitution, c'est le nouvel article 61-1 de la Constitution du 4 octobre 1958, issu de la révision du 23 juillet 2008, qui les a constitués en catégorie juridique autonome soumise à un régime spécifique puisqu'eux seuls peuvent fonder une question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil constitutionnel a donc dû délimiter les frontières de cette notion juridique, tout en continuant à enrichir son contenu.
    • Y a-t-il encore place pour la découverte de nouveaux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ? - Charles-Édouard Sénac p. 27-34 accès libre avec résumé
      Plus de cinquante ans après son apparition en contentieux constitutionnel, la catégorie des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) a de prime abord un avenir incertain. Réduits au nombre de huit par une jurisprudence constitutionnelle qui, de surcroît, n'en a pas « découvert » depuis plus de dix ans, les PFRLR sont-ils en voie de disparition ? Nous ne le pensons pas. D'abord, rien, tant du point de vue théorique que jurisprudentiel, ne permet d'exclure la reconnaissance de nouveaux principes par le Conseil constitutionnel. Ensuite, la stratégie des parties aux procès constitutionnels montre que cette catégorie de normes constitutionnelles conserve, encore aujourd'hui, une certaine attractivité.
    • La prise en compte dans le contrôle de constitutionnalité des lois des garanties légales des exigences constitutionnelles - Marine Haulbert p. 35-43 accès libre avec résumé
      La prise en compte des « garanties légales des exigences constitutionnelles » par le Conseil constitutionnel n'est pas spécifique à certaines catégories de normes issues du bloc de constitutionnalité. Les droits procéduraux semblent néanmoins être leur terrain de prédilection, permettant au juge de renforcer – dans une certaine mesure – le contrôle qu'il exerce sur la loi. L'effectivité de l'ensemble des droits et libertés n'en est pourtant pas favorisée, cette exigence étant nettement amoindrie en matière de droits substantiels.
    • Utilité et limites des objectifs de valeur constitutionnelle sur le plan contentieux - Gérald Sutter p. 44-53 accès libre avec résumé
      L'utilité contentieuse des objectifs de valeur constitutionnelle (OVC) est avérée : ils permettent non seulement au juge constitutionnel d'admettre certaines atteintes à des principes constitutionnels, mais aussi, plus rarement, de sanctionner le législateur en cas de méconnaissance d'un tel objectif. La principale limite des OVC, inhérente à cette catégorie particulière de normes, demeure l'impossibilité pour les justiciables de s'en prévaloir devant le juge. Toutefois, la spécificité de l'usage contentieux de l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi pourrait justifier de l'élever au rang de principe constitutionnel à part entière.
    • La portée constitutionnelle des dispositions de la Charte de l'environnement - Meryem Deffairi p. 54-63 accès libre avec résumé
      La Charte de l'environnement érige un ensemble de droits, devoirs et principes environnementaux au rang de normes de valeur constitutionnelle, mais pour autant il n'en ressort pas une « catégorie » de normes. En effet, en l'état actuel de la jurisprudence, la portée des dispositions de la Charte n'est pas uniforme. Leur applicabilité n'est pas pleinement reconnue par les juges et le contrôle opéré sur leur fondement est hésitant. L'essor d'une lecture finaliste du texte par le Conseil constitutionnel devrait permettre aux juges, non seulement, de rendre aux différentes dispositions de la Charte leur socle commun, mais aussi et surtout d'étendre le contrôle opéré sur les potentielles atteintes du législateur aux droits, devoirs et principes environnementaux.
    • Les normes de concrétisation des exigences constitutionnelles - Mathilde Heitzmann-Patin p. 64-70 accès libre avec résumé
      Le juge constitutionnel élabore, dans les motifs de ses décisions, des normes de concrétisation des normes de référence du contrôle de constitutionnalité. Ces normes de concrétisation précisent les normes de référence et en donnent un mode d'emploi, parfois adressé au juge lui-même, parfois adressé au législateur. Depuis deux ans, le Conseil reconnaît leur existence en en faisant parfois mention expresse dans les commentaires publiés sur ses décisions. L'étude des normes de concrétisation des exigences constitutionnelles permet de mettre en avant leur utilité dans le cadre du contrôle de constitutionnalité des lois, mais aussi d'envisager leur développement dans la jurisprudence constitutionnelle.
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