Contenu du sommaire : Au cœur du modèle chinois
Revue | Futuribles |
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Numéro | no 452, janvier-février 2023 |
Titre du numéro | Au cœur du modèle chinois |
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- Le désordre mondial - Hugues de Jouvenel p. 3-4
- Le modèle économique chinois : Entre lois du marché et dirigisme étatique - François Chimits p. 5-25 Fin octobre 2022, le 20e Congrès du parti communiste chinois a reconduit pour cinq ans le président (omnipotent) Xi Jinping à la tête de son pays. Dans le même temps, le conflit russo-ukrainien s'est installé dans la durée, avec des conséquences majeures à l'échelle mondiale, plaçant de nombreux pays dans une situation économique très incertaine. Dans ce contexte, il nous semble bienvenu de reprendre, dans ces colonnes, l'analyse de François Chimits publiée cet automne par Futuribles International, qui propose de faire le point sur l'économie chinoise et ses perspectives à l'horizon d'une dizaine d'années. Comment s'est installé et fonctionne ce modèle de développement atypique, alliant ouverture économique et autoritarisme politique ? Peut-il se maintenir durablement ? Quelles conditions économiques a-t-il instaurées pour les entreprises à la fois intérieures et étrangères, et quels scénarios peut-on envisager pour le modèle économique chinois dans l'économie internationale ? Telles sont certaines des questions abordées par l'auteur dans cet article. S.D.In late October 2022, the 20th Congress of the Chinese Communist Party appointed (omnipotent) President Xi Jin-ping leader of his country for a further five years. At the same time, the Russo-Ukrainian war has become a long-term conflict with major consequences globally, consigning many countries to a situation of great economic uncertainty. In this context, it seems useful to return, in these pages, to the analysis by François Chimits published this autumn by Futuribles International, which takes stock of the Chinese economy and its prospects over the next decade. How did this atypical development model come into being and how does it function, combining as it does economic openness and political authoritarianism? Can it be sustained? What economic conditions has it established for domestic and foreign companies, and what scenarios might be envisaged for the Chinese economic model in the international economy? These are some of the questions broached by Chimits in this article.
- Chine / États-Unis : éviter le conflit : À propos du livre de Kevin Rudd, The Avoidable War - Justine Fernandez p. 27-36 À peine un mois après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, actant le retour de la guerre en Europe et le durcissement des relations internationales, l'ancien Premier ministre australien Kevin Rudd publiait un ouvrage consacré à la relation tendue entre les deux géants mondiaux que sont la Chine et les États-Unis. Intitulé The Avoidable War, « la guerre qui peut être évitée », cet ouvrage trouve un écho tout particulier dans le nouveau contexte que l'on connaît. La Russie, dirigée par un autocrate à l'ego surdimensionné et mû par des ambitions nationalistes que l'on pensait d'un autre temps, a repris les armes pour imposer sa vision de l'ordre régional. Pourrait-elle inciter cet autre autocrate qu'est le président chinois Xi Jinping, dont le pouvoir absolu a été consacré cet automne par sa reconduction à la tête du parti communiste qui dirige le pays, à affirmer ses prétentions internationales de manière plus offensive ? Comment éviter que les tensions entre Pékin et Washington (portant sur des enjeux tant économiques que géopolitiques via Taiwan notamment) ne dégénèrent en un conflit ouvert aux conséquences désastreuses pour le monde entier ? Cette question est au cœur de ce dernier ouvrage de Kevin Rudd, dont Justine Fernandez présente ici les grandes lignes et les différents scénarios d'évolution de la relation Chine / États-Unis dessinés par l'auteur. S.D.Barely a month after the invasion of Ukraine by Russia, formally returning war to European soil and severely straining international relations, the former Australian Prime Minister Kevin Rudd published a book on the tense relationship between the two global giants China and the USA. That work, The Avoidable War, has found special resonance in the new context we face today. Russia, led by an autocrat with an over-inflated ego and driven by nationalistic ambitions thought to belong to another age, has resorted to arms to impose its vision of regional order. Might it incite that other autocrat, the Chinese president Xi Jinping, whose absolute power was confirmed this autumn by his reappointment to the head of the governing Communist party, to assert his international claims more offensively? How can we avoid tensions between Beijing and Washington (over both economic and geopolitical issues, largely via Taiwan) degenerating into overt conflict with disastrous consequences for the whole world? This question is at the heart of Kevin Rudd's latest book, which Justine Fernandez presents here in its broad outlines, alongside the various scenarios for the development of Chinese-US relations that Rudd sketches in the book.
- Hommage à André-Yves Portnoff - Hugues de Jouvenel p. 37-46 Notre collègue et ami André-Yves Portnoff nous a quittés le 9 octobre 2022, à l'âge de 81 ans, des suites d'un cancer. Toute l'équipe de Futuribles et notre comité de rédaction se joignent à l'hommage que lui rend ici Hugues de Jouvenel, témoignant de la richesse intellectuelle d'André-Yves, de ses apports essentiels aux réflexions sur le management et les valeurs des entreprises, et de son combat inaltérable contre toutes les formes d'extrémisme dont il constatait le retour à travers le monde. S.D.Our colleague and friend André-Yves Portnoff passed away from cancer on 9 October 2022 at the age of 81. Our editorial board and the entire team at Futuribles wish to be associated with the tribute that Hugues de Jouvenel pays to him here. It speaks of André-Yves's intellectual gifts, his essential contributions on business management and corporate values and his staunchness in the fight against all forms of extremism, which he lately saw making a return throughout the world.
- Que faire des déchets radioactifs ? : Anticiper l'avenir à 1 000 ans - Julie de Brux, Patrice Geoffron, Pierre-Benoît Joly, Reza Lahidji, Jacques Percebois, Émile Quinet p. 47-62 Que faire des déchets radioactifs dont la durée d'activité se compte en milliers d'années ? La transmutation n'étant pas encore maîtrisée, restent deux options : soit prévoir un entreposage de longue durée qui, sauf catastrophe, aura un coût régulier important, soit les stocker en « lieu sûr », à 500 mètres de profondeur (projet Cigéo), ce qui implique un investissement majeur. Le choix nécessite de procéder à une évaluation socio-économique (ESE) des avantages et inconvénients de ces solutions à l'horizon de plusieurs milliers d'années, un horizon temporel particulièrement long au regard des travaux de prospective habituels.Julie de Brux, Patrice Geoffron, Pierre-Benoit Joly, Reza Lahidji, Jacques Percebois et Émile Quinet, qui ont contribué à cette ESE, exposent ici comment l'évaluation a pu être faite, en prenant en considération non seulement les perspectives économiques à très long terme, mais aussi la pérennité des institutions publiques et, plus généralement, de la société. De manière certes un peu caricaturale, deux scénarios sont esquissés, dits scénarios OK ou KO, mais encore faut-il calculer les coûts et bénéfices des deux options dans chaque cas de figure (dont la probabilité est grossièrement estimée) en utilisant un taux d'actualisation dont les auteurs expliquent le mode de calcul. L'étude ainsi menée montre que le projet d'enfouissement (projet Cigéo) est « avec un taux d'actualisation tout à fait raisonnable, le plus profitable du point de vue de la collectivité dès lors que l'on assigne au scénario KO une probabilité de réalisation d'au moins 15 % ». Un tel exercice est assurément périlleux et la méthode osée. Quelqu'un a-t-il une autre solution ? H.J.What is to be done with nuclear waste that remains radioactive for thousands of years? Since we have not yet learned how to perform transmutation, two options remain: either planning for long-term storage which, barring a catastrophe, will have a substantial regular cost, or storing the waste ‘in a safe location' 500 metres below ground (the Cigéo Project), which involves major investment. The decision requires a Socio-Economic Assessment (SEA) of the advantages and disadvantages of each of these solutions against a time horizon of several thousand years — particularly long by comparison with normal foresight work.Julie de Brux, Patrice Geoffron, Pierre-Benoit Joly, Reza Lahidji, Jacques Percebois and Émile Quinet, who contributed to this SEA, set out here how the assessment was made, taking account not only of very long-term economic perspectives but also the durability of public institutions and, more generally, of society. In an admittedly somewhat caricatural manner, two scenarios are sketched out here, called the OK and KO scenarios, though the costs and benefits of the two options have to be calculated in each case (the probability of each is roughly estimated), employing figures adjusted by a formula which the joint authors explain. Carried out in this way, the study shows that the plan to bury waste (the Cigéo Project) is, “when applying an entirely reasonable discount rate, the most advantageous from the general public's standpoint, as soon as one assigns a probability of at least 15% to the KO scenario becoming reality”. Such an exercise is undoubtedly hazardous and the method is a daring one. Does anyone have another solution?
- La population du monde : tendances et perspectives - Alain Parant p. 63-85 Le mardi 15 novembre 2022, la population mondiale a dépassé le seuil des huit milliards d'habitants selon les Nations unies. Sa croissance s'opère à un rythme soutenu depuis plusieurs décennies : un milliard de personnes de plus en 12 ans, probablement autant à venir dans les 15 prochaines années. Ceci résulte principalement de l'augmentation de la durée de vie, elle-même liée aux progrès réalisés en termes de santé, hygiène, alimentation… Mais dans un monde aux ressources limitées et confronté aux défis du changement climatique, une telle croissance fait débat : pourrons-nous subvenir aux besoins de tant de Terriens ? Cette tendance va-t-elle se poursuivre durablement au même rythme ?La parution cet été 2022 des dernières estimations et perspectives de population des Nations unies, pour le monde et par grandes régions, permet d'éclairer ce débat. Alain Parant les a analysées pour Futuribles et en présente les principaux enseignements. Après avoir rappelé les tendances de fond depuis 1950 (croissance continue mais à rythme ralenti, facteurs de cette croissance, vieillissement et dynamiques régionales), il présente les schémas d'évolution retenus par les Nations unies en termes de fécondité, mortalité et migration internationale. Il souligne aussi que le spectre des possibles reste très ouvert puisque le pic démographique mondial oscille, selon les variantes retenues, entre 8,4 milliards (atteint dès 2054) et 14,8 milliards (atteint en 2100), avec des dynamiques régionales très différentes (l'Asie et l'Afrique tirant la croissance, à l'inverse de l'Europe et l'Amérique du Nord). Enfin, Alain Parant confronte ces perspectives à quelques travaux alternatifs qui ont fait le « buzz » ces dernières années (certains allant jusqu'à annoncer un déclin à compter de 2050 portant la population mondiale à 4 milliards en 2100), soulignant au passage l'importance de la qualité des indicateurs pris en compte dans ce type d'exercice. S.D.According to the United Nations, on Tuesday 15 November 2022 the world population passed the eight billion mark. It has been growing at a steady rate for several decades, with an increase of one billion in 12 years and as many again to come in the next 15 years. This is largely the outcome of improved life expectancy, which is itself linked to advances in health, hygiene and food. But, in a world of limited resources facing all the challenges of climate change, such growth raises questions: can we meet the needs of so many inhabitants of Earth? And will this trend continue at the same rate on a sustained basis?The publication this summer (2022) of the latest UN population estimates and prospects, both worldwide and regional, enables us to shed some light on the debate. Alain Parant has analysed these for Futuribles and outlines the main lessons here. After recalling the underlying trends since 1950 (continuous growth but at a slower rate; the factors of that growth; ageing; and regional dynamics), he outlines the patterns of development arrived at by the United Nations in respect of fertility, mortality and international migration. He also stresses that the spectrum of possible development remains very wide, since, depending on the variants selected, the global demographic peak veers between 8.4 billion (reached as early as 2054) and 14.8 billion (reached in 2100), with very different regional dynamics (Asia and Africa driving growth, in contrast to Europe and North America). Lastly, Parant compares these perspectives with some alternative studies that have hit the headlines in recent years (some of which go so far as to predict a decline from 2050 onwards, reducing the global population to 4 billion in 2100). In passing, he also underscores the importance of the quality of the indicators factored into this type of exercise.
Tribune
- Enquête INSEE sur le « sentiment de discrimination » : précautions d'usage - Michèle Tribalat p. 87-92 L'INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) a publié l'été dernier un numéro d'INSEE Première décryptant les résultats de la deuxième enquête Trajectoires et origines menée en 2019-2020, 11 ans après le premier volet, et donc consacré à l'évolution de « l'expérience autodéclarée des discriminations » en France. La démographe Michèle Tribalat revient sur cette publication, soulignant les approximations et raccourcis qui y figurent, qui tendent à assimiler l'expression d'un sentiment de discrimination à la réalité de faits discriminatoires. Elle précise ici les précautions d'usage qui s'imposent vis-à-vis des résultats de l'enquête tels que présentés par l'INSEE. S.D.Last summer, INSEE, the French national statistics office, published an issue of INSEE Première interpreting the findings of the second ‘Trajectories and Origins' survey conducted in 2019-20, 11 years after the first exercise, and hence focused on how the ‘self-declared experience of discrimination' has changed over time in France. Demographer Michèle Tribalat examines this publication, highlighting the approximations and shortcuts in its methods, including a tendency to equate perception of discrimination with the reality of discriminatory acts. She indicates the necessary precautions to be taken with regard to using the survey's findings in the way that INSEE presents them.
- Enquête INSEE sur le « sentiment de discrimination » : précautions d'usage - Michèle Tribalat p. 87-92
Chronique européenne
- L'Europe face au poison du révisionnisme - Jean-François Drevet p. 93-99 L'invasion de l'Ukraine par la Russie et les tentatives d'annexions territoriales qui l'accompagnent confirment, comme l'avait indiqué l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014, le retour d'un nationalisme offensif en Europe, contestant des frontières établies au fil de l'Histoire. Cette situation place l'Europe dans une position particulièrement compliquée car si la construction européenne et l'élargissement progressif de l'Union ont permis de garantir une relative stabilité géopolitique sur le Vieux Continent, certains différends territoriaux larvés persistent et pourraient trouver matière à resurgir dans le contexte actuel. La façon dont la communauté internationale et l'Union européenne, en particulier, vont réagir pourrait se révéler déterminante quant à l'évolution de certaines revendications contestant les frontières établies. Jean-François Drevet propose, dans sa chronique, un tour d'horizon des risques inhérents au « poison du révisionnisme ». Il souligne combien certains arrangements de l'Union avec les circonstances (par exemple à Chypre, dans les Balkans ou dans le Caucase), pas toujours cohérents avec les valeurs démocratiques qu'elle prône, pourraient finir par poser problème et nécessiter des clarifications. Car de l'attitude qui sera adoptée par l'Union sur ces sujets sensibles et — on le constate — potentiellement explosifs, dépendra la progression — ou non — des velléités révisionnistes. S.D.The invasion of Ukraine by Russia and the attempts at territorial annexation that go with it, confirm — as the annexation of Crimea by Moscow had done in 2014 — the resurgence of an aggressive nationalism in Europe, contesting borders established over the course of History. This situation puts Europe in a particularly complicated position, since, though European construction and the progressive expansion of the EU have enabled relative geopolitical stability to be maintained on the Old Continent, some latent territorial disputes persist and could find a way to re-emerge in the current context. The way the international community — and the EU, in particular — reacts may turn out to be crucial in the way some claims disputing established frontiers play out. In his European Chronicle, Jean-François Drevet provides a conspectus of the dangers inherent in the ‘poison of border revisionism'. He stresses the degree to which some of the EU's compromise arrangements (for example, in Cyprus, the Balkans or the Caucasus), which are not always consonant with the democratic values it advocates, might end up posing problems and requiring clarification, since the progress — or otherwise — of revisionist sentiments could well depend on the attitude adopted by the EU towards these sensitive and, as we have seen, potentially explosive issues.
- L'Europe face au poison du révisionnisme - Jean-François Drevet p. 93-99
Actualités prospectives
- Idées & faits porteurs d'avenir - p. 101-111
Lu, vu, entendu
- Analyses critiques & comptes rendus - p. 113-124