Contenu du sommaire : Transition « verte » et métaux « critiques »

Les énergies renouvelables et les technologies des batteries sont considérées comme l'avenir du secteur énergétique et la clé pour une économie décarbonée et durable. Cependant, cette transition met en péril la stabilité des pays riches en minerais et creuse les inégalités mondiales.

En l'état, la transition énergétique en cours bénéficie d'abord aux grandes sociétés minières. L'explosion de la demande en métaux les pousse vers de nouvelles extractions, au détriment des populations locales et des milieux naturels. Pour contrer la critique, elles s'affichent comme les actrices clés d'une croissance décarbonée à laquelle pays du Nord et puissances émergentes appellent, pour lutter contre le changement climatique.

Gourmande en métaux critiques et en énergies renouvelables, la transition amorcée en Europe annonce un nouveau boom des matières premières en Amérique latine. Boom qui, sous une étiquette « verte », va renforcer la position subordonnée du continent dans la division internationale du travail. À moins que gouvernements et mouvements progressistes réussissent à poser les jalons d'une transition sociale et écologique plus équitable et plus durable.

La découverte récente d'un gisement de lithium dans l'État du Sonora pourrait faire du Mexique l'un des principaux producteurs de cette ressource. Elle a déclenché un débat intense sur les formes de contrôle public de son exploitation et les conditions techniques et financières de la constitution d'une chaîne de production « nationale ». Ses profonds impacts environnementaux et sociaux n'ont en revanche pas reçu l'attention qu'ils exigent.

Tirée par la compétition interimpériale pour les ressources de la transition « verte », l'exploitation du lithium est en pleine croissance en Amérique latine. L'Argentine se distingue néanmoins de la Bolivie, du Chili et du Mexique par l'absence de politique stratégique dans ce secteur, dont l'exploitation est laissée à la discrétion des multinationales, au détriment du développement national, des communautés locales et de l'environnement.

Dans le Sud, les milieux naturels, les modes de vie et l'existence même des populations sont menacés pour répondre aux besoins de la transition énergétique des pays du Nord. Riche en « terres rares », Madagascar illustre bien cette dynamique. Pérennisant une dépendance de nature coloniale, leur exploitation risque d'entraîner des conséquences irrémédiables pour les écosystèmes locaux et les droits des communautés.

La lutte contre le changement climatique a entraîné une accélération massive de l'utilisation des énergies renouvelables. Les grands projets « écologiques » menés en Afrique du Nord privent toutefois les populations locales de leurs terres et de leurs ressources, perpétuant des pratiques néocoloniales de dépossession et d'exploitation.

Dans l'Est du Congo, le commerce des minerais constitue un moyen de subsistance pour les populations locales, mais aussi une source de financement pour les groupes armés. Face à ce dilemme, les entreprises ont été progressivement soumises à des obligations de vigilance, visant des chaînes d'approvisionnement responsables. Mais l'efficacité de cet outil se révèle faible dans ce pays, pour imposer le respect des droits humains et environnementaux.

Par le coup d'État de 2021, la junte militaire birmane, en lien avec la bourgeoisie locale et les investisseurs étrangers, a cherché à réaffermir son pouvoir et son contrôle sur les ressources naturelles. L'État Kachin, où se concentre l'extraction de jade, est particulièrement exposé à la pression extractiviste. La situation actuelle est le fruit d'une stratégie délibérée pour accaparer les terres et disposer d'une main-d'oeuvre bon marché.