Dans son arrêt du 15 novembre 2021, la Cour constitutionnelle congolaise, juridiction pénale pour juger le président de la République et le Premier ministre (PM), a jugé qu'un ancien PM, suspecté d'infractions commises dans l'exercice de ses anciennes fonctions, ne bénéficie plus d'un privilège de juridiction devant elle. Elle a en conséquence décliné sa compétence. Sa motivation repose essentiellement sur les raisons qui justifient pareil privilège pour le PM en fonction et qui, selon elle, manquent à l'endroit d'un ancien PM. La Cour s'écarte ainsi de l'approche des juridictions de l'ordre judiciaire, pour qui pareil privilège doit être maintenu dès lors qu'il s'agit d'un acte de la fonction même lorsque l'auteur ne l'exerce plus. Cette différence d'approches entre la Cour constitutionnelle et les juridictions de l'ordre judiciaire ouvre la voie à une tour de Babel judiciaire susceptible de conduire à un conflit négatif de compétence et à une impunité des crimes dont serait suspecté un ancien PM lorsqu'il était en fonction. Le présent article se propose de dégager les principaux enseignements de cet arrêt ; et, pour articuler les deux approches, il propose une clé de sortie permettant de ne pas sombrer dans un conflit négatif de compétence.
In its judgment of 15 november 2021, the Congolese Constitutional Court, vested with the criminal jurisdiction to try the President of the Republic and the Prime Minister (PM), ruled that a former PM, suspected of offences committed in the exercise of his former function, does not benefit from a privilege of jurisdiction before it. Its reasoning is based primarily on the reasons that justify such privilege for the incumbent PM and which, according to the Court, are lacking in respect of a former PM. The Court's approach thus departs from that of the Congolese Court of cassation, which considers that such a privilege must be maintained for an offense committed when the author was in office even if, in the meantime, he/she has left it. This difference of approach paves the way for a judicial Tower of Babel that could lead to a negative conflict of jurisdiction and to an impunity for crimes allegedly committed by a former PM when he was in office. The purpose of this article is to draw out the main lessons of the judgment of the Constitutional Court; and, in order to articulate the two approaches, it proposes a way out of avoiding such a negative conflict of jurisdiction.