Contenu du sommaire : Études migratoires : la démarche de recherche en questions
Revue |
Migrations société ![]() |
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Numéro | vol. 36, no 197, juillet-septembre 2024 |
Titre du numéro | Études migratoires : la démarche de recherche en questions |
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Éditorial
- Le « macrono-lepénisme » au pouvoir ? : L'obsession migratoire de Michel Barnier - Vincent Geisser p. 5-14
- Le « macrono-lepénisme » au pouvoir ? : L'obsession migratoire de Michel Barnier - Vincent Geisser p. 5-14
Dossier. Études migratoires : la démarche de recherche en questions
- Réflexivité et engagement : faire de la recherche sur les migrations aujourd'hui - Florence Boyer, Giulia Breda, Stéphanie Lima, Adelina Miranda p. 17-27 Ce dossier thématique se propose d'analyser la manière dont les chercheurs mobilisent concrètement la posture réflexive. Celle-ci consiste à examiner les conséquences de l'engagement du chercheur sur les méthodes de collecte des données (observations, entretiens, etc.) ; ce faisant, elle questionne les implications possibles du positionnement politique des acteurs de la recherche sur l'objectivité du travail académique. La recherche scientifique étant influencée par la demande de divers acteurs institutionnels, laquelle n'est pas sans incidence sur le choix des objets et des approches de recherche (par exemple, recherche-action en collaboration avec des associations, partenariats avec des médias, recherche-création avec des artistes, formes d'écritures alternatives, etc.), adopter une posture réflexive permet d'étudier les contextes de production des savoirs sur les migrations. Les contributions présentées dans le présent dossier mettent en perspective ces différentes facettes à partir de recherches sur les dynamiques migratoires internationales contemporaines. Elles questionnent les postures épistémologiques et méthodologiques à l'aune de contextes et de situations de recherche de plus en plus contraints, étant donné les obstacles pratiques et théoriques auxquels se confronte aujourd'hui le travail de recherche sur les mouvements migratoires à l'échelle mondiale.
- Enquêter sur les exilés dans un contexte de criminalisation des migrations à Tijuana - María Dolores París Pombo p. 29-42 En raison des politiques de blocage et de refoulement des migrants et des demandeurs d'asile mises en œuvre par les États-Unis à la frontière nord du Mexique, cette région est devenue particulièrement intéressante pour l'étude des processus migratoires. Néanmoins, il n'est pas aisé d'y conduire une recherche de terrain, et notamment à Tijuana en raison, entre autres, de l'insécurité ambiante et de la grande précarité qui règne dans les campements et dans la plupart des refuges pour migrants. Face à cette contrainte, les différentes équipes de recherche présentes sur le terrain se concentrent sur les centres d'accueil les plus anciens et les plus institutionnalisés qui constituent des endroits relativement sûrs. Cependant, ces lieux sont souvent saturés par la présence d'un grand nombre de chercheurs, d'étudiants et de journalistes, dont plusieurs mènent un travail de terrain par sous-traitance, recueillant des données pour des universités ou des centres de recherche généralement situés aux États-Unis. Le présent article s'interroge sur les stratégies d'accès au terrain mises en œuvre par les chercheurs ainsi que sur les formes de collaboration que ces derniers développent avec les centres d'accueil et les associations de défense des droits des migrants. Ces stratégies garantissent une restitution des résultats des travaux auprès des migrants tout en évitant les risques liés à la violence aux frontières et à la (sur)médiatisation de la question migratoire.
- Dire l'enfermement : une enquête dans les zones d'attente aéroportuaires en France - Judith Marcou* p. 43-57 Afin de réaliser une enquête qualitative sur les zones d'attente en France, ces lieux d'enfermement aux frontières destinés aux personnes étrangères, j'ai effectué mon terrain de recherche en tant que bénévole au sein d'une association militante, l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (anafé), qui assure notamment une assistance juridique aux personnes enfermées dans ces espaces. Cet article vise à apporter des éclairages sur les caractéristiques d'une recherche « militante » menée à partir d'une position politiquement située, une recherche au cœur de divers rapports de force constitutifs d'un « espace de lutte » propre aux zones d'attente. Dans ce contexte, le lien qui se crée entre les chercheurs et les personnes maintenues en zone d'attente ne relève pas d'une relation d'enquête ordinaire, mais plutôt d'une relation d'assistance, dans le cadre de permanences juridiques, avec tous les rapports de pouvoir que celle-ci peut engendrer. Questionner la violence, sa reproduction et sa circulation au sein de cette relation, permettra de réfléchir à certains enjeux propres à la recherche « militante » en contexte frontalier.
- Lien entre migration et développement : la fabrique orientée des « savoirs experts » : Le cas d'un programme conjoint PNUD/OIM - Giulia Breda p. 59-74 Cet article se focalise sur les interactions entre fonctionnaires onusiens et les chercheurs. Dans le cadre de l'internationalisation de la gouvernance des migrations, les organisations internationales légitiment leur place dans les négociations multilatérales grâce au rôle clé de leur expertise technique, présentée comme neutre et apolitique, et à leur place de médiateurs désintéressés dans les débats multilatéraux. Je me concentre en particulier sur le Programme des nations unies pour le développement (PNUD) et de la production de son expertise sur la bonne manière d'organiser des politiques publiques au niveau local, en établissant un lien entre migration et développement. À travers une observation participante de six mois effectuée en 2015 dans le cadre du programme Initiative conjointe pour la migration et le développement (ICMD), j'analyse différents types de collaboration entre fonctionnaires onusiens et chercheurs. Cet article montre comment les injonctions et les objectifs politiques de l'agence onusienne empêchent un travail scientifique de production de connaissances et politisent cette dernière.
- Réflexions autour de l'« humanitarisation » des politiques et des études migratoires : le cas de l'Italie - Simone Di Cecco p. 75-92 Dans le domaine de la gouvernance des migrations, on assiste en Italie à une forme de substitution idéologique du paradigme utilitariste au profit du paradigme sécuritaire et de celui sous-tendu par la notion de « gouvernement humanitaire ». L'« humanitarisation » des politiques migratoires — qui renvoie au processus par lequel les enjeux migratoires sont abordés principalement sous l'angle humanitaire, c'est-à-dire en se concentrant sur la protection des droits fondamentaux et sur les besoins immédiats des immigrés récemment arrivés — implique un puissant mouvement de dépolitisation de la question migratoire, en ce sens que plusieurs de ses dimensions fondamentales sont reléguées au second plan. Dans cet article, je montrerai tout d'abord que la logique humanitaire et ses acteurs jouent aujourd'hui un rôle central au sein des dispositifs gouvernementaux de gestion des migrations et qu'ils contribuent à leur dépolitisation. Ensuite, j'étudierai la manière dont le prisme humanitaire s'impose au sein d'une partie de la littérature scientifique italienne. Enfin, je présenterai les principaux effets politiques de ce phénomène d'« humanitarisation » et de dépolitisation de la question migratoire : essentialisation des catégories de migrants, occultation du racisme, disparition progressive de la thématique du travail des migrants comme enjeu politique, et invisibilisation des luttes des personnes immigrées.
- Épistémologie de la recherche sur les migrations dans un contexte de violence - Yerko Castro Neira* p. 93-104 Mes recherches de terrain, et en particulier à la frontière nord du Mexique, constituent le point de départ de cette réflexion théorique. Elle porte sur les implications méthodologiques, ethnographiques et scientifiques d'une recherche menée auprès de migrants confrontés à de multiples situations de violence. À partir de ces éléments, l'article analyse la manière dont la recherche ethnographique est affectée. Pour ce faire, il propose de questionner les exigences positivistes de la science et sa demande de neutralité et d'objectivité. En mobilisant des perspectives féministes et décoloniales, le travail s'appuie sur la démarche de recherche collaborative et activiste comme un moyen pour construire et développer d'autres formes d'objectivité et de travail scientifique.
- La bénévole, l'ethnographe et la femme noire : réfléchir sur les postures d'enquête : Une démarche réflexive et intersectionnelle - Émeline Zougbédé p. 105-115 Cet article traite de la démarche réflexive concernant une enquête menée pendant dix ans auprès de travailleurs sans papiers originaires de la vallée du fleuve Sénégal installés en région parisienne. Il montre comment les postures d'enquête adoptées sur le terrain ont participé à la construction de l'objet de recherche et comment elles ont contribué au développement d'un positionnement de recherche. Cette analyse a posteriori du terrain de recherche prend aussi le parti de conduire « une étude de l'étude », c'est-à-dire de proposer un autre niveau d'analyse critique, qui entremêle davantage les approches théorique et méthodologique de l'intersectionnalité.
- Bibliographie sélective - p. 117-119
- Réflexivité et engagement : faire de la recherche sur les migrations aujourd'hui - Florence Boyer, Giulia Breda, Stéphanie Lima, Adelina Miranda p. 17-27
Varia. Les exilés face à la Covid-19 aux frontières françaises. Une gestion « maîtrisée » du risque épidémique ?
- Les exilés face à la Covid-19 aux frontières françaises : Une gestion « maîtrisée » du risque épidémique ? - Chloé Tisserand, Yvanna Araujo p. 123-139 Cet article présente les résultats de travaux menés aux frontières franco-espagnole et franco-britannique sur la prise en charge des personnes exilées face à la Covid-19. Les données statistiques officielles indiquent qu'aucun décès lié à la pandémie de Covid-19 n'a été enregistré dans ces espaces frontaliers, tandis que les tests de dépistage réalisés ont fait état d'une faible prévalence. Ces résultats entrent en contradiction avec ceux des principales enquêtes conduites en France pendant la crise sanitaire puisqu'elles ont démontré l'existence d'une forte corrélation entre le risque d'être infecté par la Covid-19 et la précarité sociale, qui touche notamment les patients immigrés et étrangers. Cet article s'intéresse à la gestion du risque épidémique aux frontières françaises afin de comprendre les ressorts de cette situation a priori paradoxale.
- Les exilés face à la Covid-19 aux frontières françaises : Une gestion « maîtrisée » du risque épidémique ? - Chloé Tisserand, Yvanna Araujo p. 123-139
Note de lecture
Nouveautés documentaires du CIEMI
- Nouveautés documentaires du CIEMI - p. 145
- Nouveautés documentaires du CIEMI - p. 145
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- Écrire dans notre revue - p. 147-149
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