Contenu du sommaire : Travailler au péril de sa santé
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Numéro | no 141, juin 2024 |
Titre du numéro | Travailler au péril de sa santé |
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Édito
Dossier. Travailler au péril de sa santé
- Travailleurs et travailleuses de première ligne - Nathalie Ferré, Violaine Carrère p. 3-5
- Santé au travail : ce que l'on sait et ce qui est ignoré - Émilie Counil, Anne Gosselin p. 6-9 Les statistiques l'attestent : les personnes étrangères sont surreprésentées dans les secteurs où les conditions de travail sont réputées dégradées et pénibles. Cette ségrégation professionnelle les expose davantage aux discriminations et au déclassement dont les effets sur la santé sont, bien souvent, passés sous silence. Qu'ils soient minorés par les personnes concernées ou ignorés par les travaux de recherche, les enjeux propres aux risques professionnels et à la santé au travail des étrangers constituent, en effet, un objet d'étude qu'il reste à défricher tant subsistent de nombreux angles morts.
- Mineurs étrangers, apprentis de tous les risques - Anne Marchand p. 10-13 Qu'en est-il de la prévention en matière de santé au travail auprès des jeunes en apprentissage ? Une enquête auprès de salariés formés aux métiers de la carrosserie révèle la diversité des risques professionnels auxquels ils sont quotidiennement exposés, en contradiction des règles du code du travail. Mais face à cette mise en danger, méconnue et sous-estimée, leur marge de manœuvre est restreinte, a fortiori pour les apprentis étrangers puisqu'entre aussi en jeu, outre l'expérience de discriminations, l'obtention d'un diplôme et d'un droit de séjour.
- Corps cassés : le regard d'un médecin du travail - , Pascaline Chappart p. 14-17 La Docteure X suit près de 2500 salarié·es du secteur du nettoyage, mais aussi de l'hôtellerie. Elle observe, quotidiennement, les conséquences dramatiques, tant médicales que sociales, de l'externalisation du travail dans ces domaines d'activité. D'année en année, les cadences infernales brisent un peu plus les corps de ces travailleuses et travailleurs. Et, comme elle l'observait en aparté, on ne les nomme pas « les invisibles » par hasard.
- Mourir au travail - Matthieu Lépine p. 18-21 Réduite à une donnée statistique au sein d'un rapport institutionnel, ou à un fait divers ponctuellement relayé par la presse, la mort au travail est invisibilisée. Documenter et informer sur les personnes décédées, ce n'est pas uniquement leur donner un nom, c'est aussi révéler les conséquences mortifères de l'évolution des conditions de travail, en particulier dans les secteurs structurés par des logiques de sous-traitance en cascade, tels que le bâtiment, la propreté et la livraison. Les personnes étrangères y sont surreprésentées.
- Droits sociaux déniés : le triste retour au bled des Marocains retraités - Anouk Smolski Brun p. 22-25 Ils sont repartis au Maroc après des années de pénible labeur en tant que saisonniers agricoles en France. Selon la convention bilatérale de Sécurité sociale, ils devraient, à ce titre, bénéficier des droits sociaux pour lesquels ils ont cotisé. En pratique, tout semble concourir à les en priver. Ce déni massif des droits sociaux suscite la colère et l'indignation parmi les fonctionnaires marocains et la société civile, tandis qu'en France, les autorités jouent la carte de l'indifférence.
- La santé sacrifiée des chauffeurs Uber - Sophie Bernard p. 26-29 Ils ont vu, dans leur reconversion en chauffeurs Uber, une opportunité d'ascension sociale, une façon d'échapper à la ségrégation professionnelle qui les relègue dans des secteurs d'activité précaires et pénibles. Mais les méthodes de travail instituées par cette plateforme ont rapidement douché leurs espoirs : diminution de la rémunération, intensification des rythmes de travail, usure physique accélérée. Pris au piège de ce « capitalisme de plateforme », ils s'épuisent tandis qu'Uber sait pouvoir compter sur une armée de réserve, parmi les populations racisées.
- Le coup de chaleur d'E.M. : sociologie d'une mort agricole annoncée - Emmanuelle Hellio, Hélène Servel p. 30-33 Alors qu'il travaillait chez un exploitant agricole en Provence, Elio Maldonado est mort suite à un coup de chaleur. Resté impuni, son décès est la conséquence structurelle d'un système de production qui bafoue résolument les droit des travailleurs et considère les ouvriers détachés comme autant d'immigrés jetables. Le procès de l'entreprise de travail temporaire Terra Fecundis a, en partie, rendu visibles ces pratiques qui mettent en péril la santé et la vie des travailleurs.
- Accident du travail et recours au droit : les sans-papiers face à un mur - Karine Crochet, Didier Maille p. 34-38 Face au système d'exploitation de la main-d'œuvre ouvrière dépourvue de titre de séjour, la défense individuelle des droits montre ses nombreuses limites. La variété et la complexité des procédures découragent généralement d'obtenir justice. De l'accès aux soins post-accident à la mise en cause des donneurs d'ordre, voici un aide-mémoire des actions à engager, réalisé à partir d'un exemple pris dans le champ emblématique du bâtiment et travaux publics (BTP).
- « Le patron savait… » - , Pascaline Chappart, Lola Isidro p. 39-43 Samba, un jeune malien accidenté du travail, démonte tous les mécanismes qui ont préparé le drame : la condition de sans-papiers qui l'expose à la domination et à la dépendance, le comportement – associant racisme, paternalisme et exploitation – que le patron s'autorise à l'égard de son ouvrier, l'esquive par l'employeur de ses responsabilités après l'accident, qui dépouille la victime de ses droits sociaux comme de son projet de vie, les difficultés à obtenir reconnaissance, et l'impossible réparation. Ce récit témoigne d'un impératif besoin de justice.
- Travailleurs et travailleuses de première ligne - Nathalie Ferré, Violaine Carrère p. 3-5
Hors-thème
- En France, tri et prise en charge des exilés venus d'Ukraine - Amélie Lemoine p. 44-47 L'accueil réservé aux personnes fuyant la guerre en Ukraine a été mis au cœur des débats politiques à l'échelle de l'Union européenne. Sous couvert de volontarisme positif, l'activation de la directive « Protection temporaire » semblait permettre la mise en place d'un dispositif inédit, plus favorable que celui proposé aux personnes originaires de Syrie. Pour autant, l'observation du traitement réservé aux exilé·es en provenance d'Ukraine par les autorités à Marseille nuance la représentation d'une politique d'accueil « à bras ouvert » et laisse entrevoir la reproduction des logiques de tri des étrangers.
- En France, tri et prise en charge des exilés venus d'Ukraine - Amélie Lemoine p. 44-47
Mémoire des luttes
- La lutte oubliée des travailleuses immigrées de l'Insa de Lyon en 1979 - Lison Doré p. 48-52 En 1979, à l'Institut national des sciences appliquées (Insa) de Lyon, une quarantaine de femmes de ménage immigrées, employées par une agence de sous-traitance, mènent une grève illimitée. Cette mobilisation, point de rencontre de plusieurs forces militantes, dialogue avec les protestations contre les débats législatifs en cours (loi Bonnet) et visibilise les oppressions combattues par des femmes immigrées, travailleuses en lutte trop longtemps tombées dans l'oubli.
- La lutte oubliée des travailleuses immigrées de l'Insa de Lyon en 1979 - Lison Doré p. 48-52
Focus juridique
- Salariées enceintes démunies d'autorisation de travail : la protection refusée - Cyril Wolmark p. 53-56
- Salariées enceintes démunies d'autorisation de travail : la protection refusée - Cyril Wolmark p. 53-56