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Revue | Revue française d'économie |
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Numéro | vol. 16, no. 2, 2001 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- La réforme du Conseil de l'Union européenne à partir de la théorie des jeux - Frédéric Bobay p. 3-61 La réforme des droits de vote au Conseil de l'Union européenne prévue par le traité de Nice est analysée à partir de la théorie des jeux coopératifs, en utilisant l'indice de Banz-haf, lequel permet de mesurer les pouvoirs relatifs des Etats-membres. Il en ressort que les repondérations adoptées permettent un rééquilibrage effectif de ces pouvoirs, conformément à l'objectif de la CIG. Ainsi, l'influence des plus grands Etats- membres est-elle accrue dans une proportion qui compense nettement les effets des élargissements à de nombreux petits Etats dont le pouvoir est sur-représenté. Contrairement à l'intuition, l'ajout de deux nouveaux critères dans le système de prise de décision du Conseil, celui de la majorité simple des Etats et celui d'un seuil de population, est sans effet sur les pouvoirs respectifs des Etats- membres dans l'Europe élargie. On démontre que, dans l'UE-27, lorsque la majorité qualifiée au titre des droits de vote pondérés est réalisée, les deux autres critères sont déjà remplis dans presque la totalité des jeux de coalitions possibles, ce qui rend ces nouveaux critères inopérants. Enfin, la conceptualisation des négociations comme un jeu global entre tous les Etats au sein duquel s'est structuré un sous-jeu entre les seuls grands Etats- membres présente un fort pouvoir explicatif du contenu des accords de Nice. Il en ressort que la demande de l'Espagne d'une parité avec les quatre grands Etats et les démarches de l'Allemagne en vue d'une rupture de parité ont été des facteurs centraux des nouvelles dispositions et tout particulièrement du seuil élevé de majorité qualifiée et de l'ajout des deux nouveaux critères. Au total, compte tenu de l'ineffectivité de ces nouveaux critères dans l'UE élargie, le nouvel équilibre européen de Nice consiste principalement en l'émergence de l'Espagne et la Pologne comme deux États dont la capacité d'influence est très proche des quatre plus grands, lesquels restent entre eux essentiellement en parité.The new voting rights system of the EU Council embodied in the Nice Treaty is analyzed from a cooperative game theory approach using the Banzhaf index as a way to measure the member States' relative powers. The main finding is that, for an enlarged EU to 27 members, the new voting rights system provides a significant shift of power distribution among member States, as intended at the IGC. The scale of the increase of the influence of large member States fully compensates the effect of EU enlargement to many small States with collective over-sized power. Contrary to intuition, the addition of two new criteria in the decision-making system, a simple majority of member States and a population threshold, has no effect on the power distribution among member States in an enlarged EU. For EU-27, we show that when cumulated weighted votes reach qualified majority, the two other criteria are already respected in almost all cases, thus depriving them of any relevance. Finally, interpreting the IGC negotiations as a global game among all member States within which a sub- game is played only among the large States provides an effective explai- nation of the specifics of the Nice agreement. The main finding is that Spain's request to reach parity with the four large member States and Germany's undertakings to break parity with them have been the main driving force for the changes, especially, the higher qualified majority threshold and the addition of the two new voting criteria. Taking into account the lack of effectiveness of these new criteria, the overall new power balance resulting from the Nice Treaty is mainly characterized by the emergence of two States, Spain and Poland, with an influence very close to that of the four largest members, among which remains the prevailing parity.
- Commentaire de l'article de F. Bobay - Gabrielle Démange p. 63-72
- Crise du développement et impasse des négociations commerciales multilatérales - François Benaroya, Jean-Pierre Cling p. 73-117 L'incapacité des pays membres de l'Organisation mondiale du commerce à lancer un nouveau cycle de négociations multilatérales, trouve en partie sa source dans la résurgence du conflit Nord-Sud dans le domaine commercial. Les pays en développement se plaignent à la fois du manque de prise en compte de leurs intérêts dans le cadre multilatéral, et du caractère de plus en plus contraignant à leur égard du fonctionnement de l'ОМС, dont les pays industrialisés souhaitent élargir le champ à de nouveaux sujets. Ce conflit se nourrit également de la remise en cause du consensus de Washington. Malgré cette remise en cause, le rôle de l'ouverture commerciale comme facteur potentiel de croissance économique demeure largement accepté. Les enjeux en matière de commerce et de développement des nouvelles régulations internationales sont principalement de trois ordres : rendre le fonctionnement de l'ОМС plus favorable aux intérêts des pays en développement ; améliorer la cohérence de son action avec celle des autres organisations internationales ; enfin, tirer les conséquences de l'hétérogénéité croissante des pays en développement.The members of the World Trade Organization are currently unable to launch a new round of multilateral trade negotiations. This arises partly from the resurgence of the North-South conflict on trade issues. Developing countries complain about the WTO neglecting their interests and being increasingly demanding on them ; they also oppose negotiating on new subjects. The end of the « Washington consensus » is another cause of conflict. Nonetheless, the role of trade liberalization as potential engine of growth is still widely accepted. Defining new international regulations to promote trade and development raises three main challenges : to make WTO more development-friendly ; to improve its coherence with other international organizations ; lastly, to take into account the increasing heterogeneity of developing countries.
- Le double dividende. Les approches théoriques - Mireille Chiroleu-Assouline p. 119-147 La notion de double dividende se réfère au cas où l'instauration d'une taxe environnementale, à recettes budgétaires inchangées pour l'Etat, fait apparaître à la fois un bénéfice environnemental et un bénéfice de nature économique. Les premières études théoriques, en équilibre général, réfutaient cette hypothèse de double dividende et montraient qu'au contraire, les taxes environnementales exacerbent, plutôt qu'elles n'allègent, les distorsions fiscales préexistantes. Cependant, le rôle essentiel joué dans ces résultats par l'élasticité non compensée de l'offre de travail au pouvoir d'achat du salaire met l'accent sur les hypothèses fondamentales de ces études, à savoir la concurrence pure et parfaite et l'équilibre sur le marché du travail. Les imperfections de concurrence ainsi que l'existence de chômage involontaire rendent plus probable l'occurrence d'un double dividende au sens fort, de même que la prise en compte du rôle de la qualité de l'environnement dans les comportements des ménages ou dans la structure productive.One speaks about double dividend when the revenue neutral substitution of environmental taxes for other taxes leads to both an environmental benefit and an economic one. The first theoretical studies of this question, in a general equilibrium framework, argue that there is no secondary benefit in the sense of a reduction in tax distorsions. However, there are cases in which positive welfare gains can be obtained : when the environmental tax reform involves a tax shirting from labor to other factors or when there are feedbacks effects from environmental quality to the economic system. When studying this issue under the assumptions of imperfect competition and non clearing labour market, the occurrence of a double dividend becomes more likely.
- Marché international du carbone et double dividende : antinomie ou synergie - Frédéric Ghersi, Jean-Charles Hourcade, Philippe Quirion p. 149-177 Le propos de cet article est de vérifier dans quelle mesure l'existence d'un marché international de permis d'émission de gaz à effet de serre (GES) influe-t'elle sur les possibilités nationales de double dividende (environnemental et économique) par transfert de charge fiscale de l'emploi vers les émissions de GES. Les combinaisons proposées de systèmes nationaux de permis et de taxes - étudiées à l'aide d'un modèle d'équilibre général calculable IMA- CLIM appliqué à l'économie française — sont mises au point en tenant particulièrement compte de l'économie politique de la discussion, soit de leur acceptabilité et de leur crédibilité dans un cadre réel. On montre en définitive qu'un scénario combinant une taxe-carbone appliquée à l'ensemble de l'économie hors industries grandes consommatrices d'énergie, et l'accès à un marché international du carbone pour ces dernières, est à même de conserver l'essentiel du double dividende d'une taxe sur le carbone sans exemptions, tout en étant politiquement plus acceptable.This paper aims at determining how a national double dividend through a shift of the tax burden from employment to greenhouse gases emissions is compatible with an international carbon market. The proposed combinations of national taxes and tradable permits are assessed by IMACLIM, a computable general equilibrium model applied to the French economy. They are specifically divised with a view to encompass the political economics behind the discussion, that is to ensure their credibility and acceptability in the real world. A scenario combining a general carbon tax with exemption for the energy-intensive industries, and an emission quota for the latter, with access to an international carbon market, appears to maintain much of the double dividend obtained by a general tax without exemption, with an improved political feasability.
- L'occurrence d'une crise financière dans un modèle de troisième génération - Delphine Lahet p. 179-206 Cet article a pour objet d'élaborer un modèle de crise financière afin de préciser le déclenchement de la crise asiatique. On se place donc dans le cadre des modèles de la troisième génération qui expliquent cette crise en tenant compte de la panique financière, des défaillances bancaires et du risque moral. C'est sur la base d'un modèle de première génération et d'un travail intergénération que nous tentons de définir l'occurrence d'une crise de plusieurs façons. Tout d'abord, nous montrons que le déclenchement d'une crise financière peut être caractérisé par un processus d'équilibres multiples i.e. le passage d'un équilibre de non crise à un équilibre de crise. Puis, nous mettrons en valeur les variables fondamentales, tel le crédit bancaire, dont la dégradation précipite l'occurrence de la crise. Enfin, nous établissons que la prise en compte du risque moral dans notre modélisation accélère le déclenchement de la crise et que le processus d'équilibres multiples reste valable dans cette configuration.This article deals with a financial crisis third generation model that explains the Asian crisis. It focuses on financial panic, banking deficiencies and moral hazard. In a first generation model framework and a cross-generational framewok, we try to define the occurrence of a crisis in different ways. First, we show that a crisis is triggered by a jump between equilibria, from a no crisis equilibrium to a crisis one. Then, we highlight the underlying fundamentals - like bank credit - that may precipitate the occurrence of a crisis. In a last point, we show that taking into account moral hazard may hasten the crisis and it doesn't call into question the jump between equilibria as the triggering of a crisis.
- Résumés - p. 207-211