Contenu du sommaire : Numéro spécial : Les nouveaux horizons de l'école autrichienne d'économie
Revue | Revue française d'économie |
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Numéro | Vol. XXII, no 4, avril 2008 |
Titre du numéro | Numéro spécial : Les nouveaux horizons de l'école autrichienne d'économie |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les curieux destins d'une hétérodoxie : la tradition économique autrichienne - Thierry Aimar p. 3
- Les fondations comportementales de l'analyse économique autrichienne - Randall G. Holcombe p. 19 L'économie expérimentale et comportementale présente de nouveaux défis pour l'analyse néo-classique du comportement individuel basée sur le fait que les individus prennent des décisions au sein d'un ensemble de fonctions d'utilité aux caractéristiques bien définies. Les résultats provenant des analyses comportementales et expérimentales ont montré qu'il est fréquent que le comportement individuel dévie systématiquement des axiomes néoclassiques de la maximisation de l'utilité. L'analyse autrichienne est, elle aussi, fondée sur des axiomes de maximisation d'utilité, bien que les hypothèses sur lesquelles reposent le comportement de maximisation d'utilité soient très affaiblies dans la théorie autrichienne. Par conséquent, les fondations comportementales de cette théorie sont plus solides et sont moins sujettes aux challenges créés par les résultats empiriques des études comportementales et expérimentales. Les conclusions de politique économique déduites par la théorie néo-classique sont souvent trop exigeantes car elles reposent sur des fondements comportementaux remis en question par les analyses comportementales et expérimentales et sont fréquemment trompeuses puisque la théorie néo-classique du bien-être est menée en termes de statique comparative. Pour des questions de politique économique, l'approche autrichienne offre des propositions plus pertinentes, du fait de ses fondations comportementales plus réalistes.The Behavioral Foundations of Austrian Economics. Behavioral and experimental economics present challenges to the neoclassical theory of individual behavior, which is based on individuals making choices within the framework of utility functions that are assumed to have certain well-defined characteristics. Results in behavioral and experimental economics have shown that it is common for individual behavior to systematically deviate from the neoclassical axioms of utility maximization. Austrian economics is also based on axiomatic theories of utility maximization, but the assumptions underlying utilitymaximizing behavior are much weaker in the Austrian approach. As a result, they have more solid behavioral foundations, and are less subject to challenge by the empirical findings of behavioral and experimental economics. Neoclassical policy conclusions are often overly-strong because of its behavioral foundations which are challenged by behavioral and experimental economics, and are often misleading because of the comparative static nature of neoclassical welfare economics. For purposes of policy analysis, the Austrian approach provides better insights because of its more realistic behavioral foundations.
- Expérimentations par la pensée, analyses contre-factuelles et comparatives - Paul Dragos Aligica et Anthony J. Evans p. 45 Cet article porte sur le problème des expérimentations par la pensée dans la théorie autrichienne et prend comme point de départ l'argument de Lawrence Moss sur la division entre les économistes autrichiens de l'ancienne génération - pour lesquels les expérimentations par la pensée étaient centrales -et ceux de la nouvelle génération qui, d'après Moss, ont « abandonné » de telles méthodes. Cet article se propose à la fois de combler ce prétendu fossé et de contribuer au développement de la méthodologie autrichienne. Nous défendons l'idée selon laquelle ce qui pourrait être perçu comme un « abandon » soutient plutôt qu'exclut le rôle des expérimentations par la pensée dans le paradigme autrichien. L'article identifie une famille complète de stratégies de recherche d'analyses comparatives et contre-factuelles ouvertes aux autrichiens qui reposent toutes sur de solides bases épistémologiques et méthodologiques. Le modèle d'analyse comparative et contre-factuelle associe les histoires conjecturales, les ordres spontanés et l'étude empirique de l'analyse autrichienne contemporaine à la tradition classique des travaux plus anciens. Par conséquent, la récente évolution du courant autrichien ne doit pas être perçue comme une aberration mais comme un développement délibéré, naturel et digne d'intérêt.Thought Experiments, Counter Facturals and Comparative Analysis. This article discusses the problem of "thought experiments" in Austrian economics and takes as a starting point Lawrence Moss' argument on the divide between the older Austrian economists - for whom thought experiments were crucial - and the new generation that, in Moss' view, has "abandoned" such methods. The article is an attempt not only to bridge this alleged divide but also to contribute to the development of the Austrian methodology. It is argued that what may be perceived as "abandonment" bolsters rather than precludes the role of thought experiments in the Austrian paradigm. The article identifies an entire family of comparative and counterfactual analysis research strategies available to the Austrians, all enjoying a solid epistemological and methodological grounding. The "comparative-counterfactual analytics" pattern threads together the conjectural histories, spontaneous orders and empirical case studies of the contemporary Austrians, with the classic tradition of older works. Consequently the recent evolution of Austrian scholarship should not be seen as an aberration or abandonment, but as a deliberate, natural and commendable development.
- La théorie autrichienne du cycle économique : un test économétrique - Francis Bismans et Christelle Mougeot p. 73 Le modèle standard de la théorie autrichienne est celui du mal-investissement. La création monétaire du système bancaire conduit à une baisse artificielle du taux d'intérêt de marché sous le taux naturel, entraînant l'économie sur le sentier d'une expansion non soutenable car non financée par l'épargne disponible. Ce mal-investissement se traduit par un sur-investissement dans les industries de biens de production au détriment des industries de biens de consommation. La crise est alors inévitable quand les entrepreneurs prennent conscience de la non-correspondance entre leurs plans de production et les désirs des consommateurs. Cette séquence est testée empiriquement dans cet article à travers une question : les chocs de politique monétaire perçus à travers les variations de structure des taux d'intérêt, des prix relatifs et des dépenses sont-ils suffisants pour expliquer les fluctuations conjoncturelles de l'activité économique globale ? Notre modèle économétrique de données de panels à effets fixes, construit à partir des observations trimestrielles issues de quatre pays (Allemagne, Etats-Unis, France et Royaume-Uni) entre 1980 et 2006, tend ainsi à confirmer empiriquement les hypothèses autrichiennes d'un cycle impulsé par un choc monétaire et se propageant par la distorsion des prix relatifs.Empirical Evidence on the Austrian Business Cycles Theory. The Austrian approach to business cycles has seldom examined in econometrical terms. This paper first reviews the essentials of that approach and the recent application of the Austrian business cycle theory in the economics literature. Quarterly data for Germany, USA, England and France, 1980 : 1 through 2006 : 1, are used to explore business cycle facts and relations between terms structure of interest rates relative prices, composition of aggregate expenditure and income. Results are consistent with the hypothesis of the Austrian Business Cycle Theory caused by a monetary shock and propagated by relative price changes.
- L'analyse économique des normes sociales : une réévaluation de l'héritage hayekien - Agnès Festré et Pierre Garrouste p. 103 Dans cet article nous montrons, dans un premier temps, que la référence à la notion de sélection de groupe n'est pas incohérente avec les autres éléments de la pensée hayékienne. Nous développons ensuite l'idée que les travaux récents en matière d'émergence et d'évolution des normes sociales valident, mais en partie seulement, les thèses hayékiennes en la matière. Enfin, nous mettons en évidence les lacunes de l'analyse de Hayek et proposons des moyens d'y remédier.The Economics of Social Norms : a New look at Hayek's Legacy. In this paper we first show that the notion of group selection is coherent with the other parts of Hayek's writings. Second we develop the idea that recent works in terms of the emergence and evolution of social norms corroborate in part Hayek's theses in this domain. Finally we put to the fore some drawbacks in Hayek's approach and propose means to solve them.
- La lecture des penseurs libéraux français par Carl Menger - Gilles Campagnolo p. 139 Carl Menger, le fondateur de l'« école autrichienne d'économie politique », outre qu'il a affronté l'« école historique allemande » et critiqué l'« école classique britannique », a lu les économistes français, en particulier libéraux. Sa relation subodorée à la pensée de Jean-Baptiste Say a d'ailleurs été commentée dans la tradition autrichienne -mais le plus souvent sur une base intuitive. Il est donc indispensable d'apporter des éléments substantiels et précis pour l'évaluer en toute certitude. Dans quelle mesure Menger a-t-il lu et apprécié les libéraux français ? Le présent article répond à partir d'un travail de première main sur les fonds d'archives Menger des universités Hitotsubashi (Japon, où est conservée sa bibliothèque privée) et Duke (Etats-Unis, archives recueillies par son fils). Menger a lu les auteurs français, c'est un fait - et pas seulement Say, mais encore (ce qui est moins connu) le comte Pellegrino Rossi, Michel Chevalier et Frédéric Bastiat. Il utilisa ainsi le manuel rédigé par Rossi (successeur de Say à la chaire d'économie politique du Collège de France) pour réviser ses propres Grundsätze der Volkswirtschaftslehre [ 1871], en vue de donner une deuxième édition qu'il ne mena pas à terme. Les annotations que l'ouvrage contient sont inédites, le matériau présenté ici est donc neuf. Ce rôle du manuel de Rossi n'a d'égal dans le « work-in-progress » du Viennois que celui, démontré par l'historien de l'utilité marginale Emil Kauder en 1960, du manuel de Karl Heinrich Rau, le « brouillon » pour ses Grundsätze. Et le fonds d'archives japonais offre bien plus : il permet l'état des lieux établi ici preuves à l'appui, raisonné et commenté, de la lecture des libéraux français par Menger. Cette recherche est pré-publiée dans la Revue française d'économie avec l'accord de la Review of Austrian Economics pour laquelle elle fut rédigée d'abord en anglais. Audelà de l'école autrichienne, c'est un pan de la pensée du 19ème siècle en Europe qui s'y trouve en jeu.Origins of Menger's Thought in French Liberal Economists. Carl Menger, who became regarded as the founder of the Austrian School, neither only confronted German members of the Historical School, nor only criticized British Classical Political Economy. He also read the French Liberal economists. The link between Say and Menger has already been commented upon at times, but always on a mostly intuitive basis. And it still seems necessary to give substantial proof of its true extent, as well as to document it with proper archival work - that is done in the present article, that brings to light first-hand material and information, mainly from the Menger Collection located in Japan. Besides the case of Say, Menger's reading of French authors in favor of freetrade (Count Pellegrino Rossi, Michel Chevalier, Frédéric Bastiat) is less known, even from most historians of Austrian economic thought. For instance, Rossi (who succeeded Say at the chair of Political economy at the Collège de France) had written a handbook of economics that Menger used much for the revision of his own Grundsätze der Volkswirtschaftslehre of 1871 (the role of Karl Heinrich Rau's handbook before publishing his masterwork is better known, as it was demonstrated by historian of utility Emil Kauder - we shall demonstrate here that Rossi's book was as much significant). About Chevalier and Bastiat, the present essay also intends to present reasonably balanced judgments about Menger's reading, always based on first-hand material - besides the Menger Collection at Hitotsubashi in Japan, the Perkins Library at Duke University is also used, as it is a treasure in Mengerian studies too. Such developments in historical studies of economic thought are of interest, not only to Mengerian and Austrian scholars, but to all those interested in the history of economic thought and of 19th century European scholarship. Besides the case of Say, Menger's reading of French authors in favor of freetrade (Count Pellegrino Rossi, Michel Chevalier, Frédéric Bastiat) is less known, even from most historians of Austrian economic thought. For instance, Rossi (who succeeded Say at the chair of Political economy at the Collège de France) had written a handbook of economics that Menger used much for the revision of his own Grundsätze der Volkswirtschaftslehre of 1871 (the role of Karl Heinrich Rau's handbook before publishing his masterwork is better known, as it was demonstrated by historian of utility Emil Kauder -we shall demonstrate here that Rossi's book was as much significant). About Chevalier and Bastiat, the present essay also intends to present reasonably balanced judgments about Menger's reading, always based on first-hand material -besides the Menger Collection at Hitotsubashi in Japan, the Perkins Library at Duke University is also used, as it is a treasure in Mengerian studies too. Such developments in historical studies of economic thought are of interest, not only to Mengerian and Austrian scholars, but to all those interested in the history of economic thought and of 19th century European scholarship.