Contenu du sommaire : Gentrification, discours et politique
Revue | Sociétés contemporaines |
---|---|
Numéro | no 63, 2006 |
Titre du numéro | Gentrification, discours et politique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction. Gentrification : discours et politiques urbaines (France, Royaume-Uni, Canada) - p. 5-13
- Le new labour et le discours de la « Renaissance urbaine » au Royaume-Uni. Vers une revitalisation durable ou une gentrification accélérée des centres-villes Britanniques ? - Colomb Claire p. 15-37 Cette contribution propose une lecture critique du discours du gouvernement travailliste sur la « Renaissance Urbaine » (Urban Renaissance) depuis 1997. Ce discours, bien que marquant un véritable regain d'intérêt politique pour les métropoles britanniques, est critiqué par un certain nombre de chercheurs pour ses effets ambigus sur les populations urbaines – notamment en termes de gentrification. Dans le cadre de l'agenda urbain du New Labour, la gentrification est-elle un objectif assumé de politique publique, un effet pervers non anticipé ou un processus mal compris ? L'article ébauche une analyse critique du discours de la « Renaissance Urbaine », de son idéologie sous-jacente et de la vision de la ville et de l'urbanité qu'il propose dans le but d'apporter des éléments de réponse à cette question, sur la base d'une lecture critique des documents officiels formant le cadre de référence discursif des politiques urbaines du gouvernement travailliste. Cette contribution s'appuie sur les travaux les plus récents de chercheurs britanniques sur les processus de gentrification et les politiques urbaines en Grande-Bretagne, travaux encore peu diffusés en France.New Labour and the “Urban Renaissance” agenda in the United-Kingdom. Pathway to sustainable reurbanisation or high-speed gentrification of British cities? This contribution aims to critically analyse the “Urban Renaissance” agenda championed by the New Labour government in the UK since 1997. Although the ‘Urban Renaissance' discourse signals a new political interest in the inner city, it has been criticised by academics for its ambiguous impacts on urban communities, in particular in terms of gentrification. Is gentrification a policy objective, an unplanned sideeffect or a badly understood process in the Urban Renaissance agenda? In order to address this question, this article offers a critical reflection on the “Urban Renaissance” agenda in terms of its content, its underpinning ideology and vision of urban space. The paper is based on a critical reading of the official documents forming the discursive framework of the “Urban Renaissance” agenda. It draws from recent academic research on gentrification processes and urban policies in the UK – a body of literature which has scarcely been disseminated in France to date.
- Les atouts des quartiers en voie de gentrification : du discours municipal à celui des acheteurs.Le cas de Montréal - Rose Damaris p. 39-61 Le réinvestissement des quartiers anciens autrefois populaires par les nouvelles couches moyennes ne peut plus être vu uniquement comme le produit de décisions individuelles. Cette dynamique est souvent stimulée par l'État, par le secteur immobilier et par les regroupements de commerçants. Ceci est d'autant plus vrai lorsque les politiques publiques favorisent la construction neuve au centre et lorsqu'ils font la promotion des quartiers en misant sur les styles de vie qu'ils proposent aux acheteurs potentiels. Nous examinons ici deux questions, à l'aide d'une enquête auprès d'acheteurs de copropriétés neuves au centre de Montréal (Québec, Canada). Comment ces acheteurs se situent-ils par rapport à un aspect du style de vie au centre mis en avant dans la promotion des quartiers et interprété dans la littérature scientifique comme un indicateur de la quête à la « distinction », soit l'accès à l'alimentation fine dans des petits commerces spécialisés ? Et dans un contexte de discours publics passablement partagés au sujet de la gentrification, quel est l'éventail des positions adoptées par nos interviewés en tant qu'acteurs de la gentrification, notamment dans un contexte de mixité sociale provoquée par des projets d'insertion plutôt que par un processus d'évolution graduelle du parc ancien ?The qualities of gentrifying neighbourhoods – discursive practices of municipalities and purchasers: the case of Montréal. The gentrification of inner-city neighbourhoods can no longer be seen simply as the result of the accumulation of individual decisions by “new middle class” households. It is often stimulated by the State, by the real estate industry and by merchants' associations. This is even more the case when urban policies encourage new residential construction in the inner city and when they use “lifestyle” or “niche” marketing to reach out to potential buyers. This paper explores two questions, drawing on data obtained in a survey of buyers of new condominiums in inner city Montréal (Quebec, Canada). How do the respondents see themselves in relation to one of the key themes used in the marketing of these neighbourhoods – access to “fine food” in specialty stores, a feature interpreted in the scholarly literature as an indicator of the search for distinction? And in a context where gentrification remains controversial, what is the range of viewpoints held by the interviewees as to their role in the gentrification process – especially given that new construction tends to create a sudden increase in social mix, as opposed to the gradual change that occurs with gentrification of the existing housing stock?
- En attendant la gentrification : discours et politiques a la Goutte d'Or (1982-2000) - Bacqué Marie-Hélène p. 63-83 À partir du cas de la Goutte d'Or à Paris, cet article montre la part des discours publics dans les processus de gentrification. Ces discours entrent en interaction avec les dynamiques privées, immobilières et commerciales et les stratégies des habitants. Après vingt ans d'interventions publiques, on constate que l'opération de gentrification est incomplète. Mais le discours public suscite les attentes des gentrifieurs qui se confrontent à la diversité sociale et ethnique et à la première génération de couches moyennes, pionnières dans le quartier. Alors que celles-ci souhaitent développer une régulation interne du quartier, les premiers en appellent, dans la perspective d'une « conquête », à un « retour de l'État de droit ».Waiting for gentrification: discourses and policies in Goutte d'Or (1982-2000). Looking at the Goutte d'Or neighbourhood in Paris, this article shows how public discourses interfere with gentrification processes through their influence on real estate, private and market dynamics as well as on strategies of inhabitants. After twenty years of public interventions, the process of gentrification seems incomplete. Public discourses encourage expectations of new gentrifiers who are confronted with both social and ethnic diversity and the first wave of middle class newcomers in the district. Whereas the latter wish to maintain local balance through negociated regulations, new gentrifiers are looking for further conquests and ask for “law and order”.
- Le travail dénié et les jeux olympiques : entre passions et intérêts - Fleuriel Sébastien p. 85-103 En France, les performances accomplies par les athlètes aux Jeux Olympiques veulent avant tout célébrer la contribution des bénévoles et des volontaires qui, au quotidien, oeuvrent depuis leur base pour le développement d'un sport dit vertueux. Mais le caractère enthousiaste de ce travail de célébration tend à masquer la contribution d'un ensemble de travailleurs (kinésithérapeutes, médecins, journalistes...) également impliqués dans la performance. Une observation in situ dans le cadre des jeux d'Athènes 2004 cherche à montrer comment les jeux d'intérêts propres à deux catégories de travailleurs (agents de sécurité et journalistes) parviennent à s'exprimer dans un cadre où le tout bénévolat s'impose comme valeur cardinale.Denied work at the Olympic games: between passions and interests. `/titreb In France, athletes performances during the Olympics Games celebrate the contribution of all the volunteers who, on a daily basis, work for the development of sport which one hopes to be virtuous. But the enthusiastic character of this celebration hides the contributions of many groups of workers (physiotherapists, doctors, journalists...) also involved in the performances. From an observation of the Olympic Games of Athens 2004, the paper shows how specific interests of two categories of workers (security agents and journalists) are expressed in a context where the voluntary character work is praised as a cardinal value.
- L'hébergement d'urgence à Paris ou l'accueil en souffrance - Bruneteaux Patrick p. 105-125 La problématique des SDF est le plus souvent abordée à partir de trois types d'analyses. Les premières insistent sur les productions de la pauvreté, les secondent se penchent sur la gestion de la pauvreté, les dernières se préoccupent des modes de survie à la rue. Cet article se situe davantage dans le second axe en privilégiant une microsociologie d'un dispositif « d'aide sociale » aux sans-logis : les centres d'hébergement d'urgence. À ce jour, une étude fine des modes de fonctionnement de ces centres demeure encore rare et très partielle. Il s'agit de soutenir l'idée que « l'aide » sociale d'urgence doit être interrogée quant à ses prétentions à fournir le minimum vital aux sous-prolétaires à la rue. L'« urgence », l'« humanitaire », la « mise à l'abri » instituent en fait une précarité institutionnelle aménagée, autrement dit une inclusion périphérique qui inscrit les surnuméraires dans le nouveau circuit, interminable et précaire, des services d'urgence. Tant par les mécanismes de sélection que par les effets d'agrégation induits par le rassemblement de personnes en survie, très fragilisées ou prédatrices, les CHU compliquent plus qu'ils ne résolvent la question sociale des personnes à la rue.Emergency shelters in Paris, reception and suffering. The issue of Homeless people is generally dealt with through the analysis of politics (social welfare, social rights) or of social processes (exclusion, disaffiliation, social inequalities). However, what is really being done in concrete social work in favour of homeless people in emergency shelters has not been extensively investigated. We know very little about how homeless people are being taken care of. The purpose of this article is to criticize the ideology supporting the policy for this kind of emergency centers, and to show that the services delivered only worsen the misery of this specific underclass.