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Après un bref arrêt sur l'émergence des gender studies comme nouveau domaine de production de savoirs relavant tant de la démocratisation des pays ex-communistes que de l'internationalisation de leurs espaces académiques, nous reconstituons, sur la base d'une revue de travaux produits et diffusés depuis le début des années 1990, les principaux axes des débats transatlantiques centrés sur la possibilité d'affirmation du féminisme en Europe de l'Est. Le thème du « malentendu Est-Ouest » a pendant longtemps dominé ces échanges qui débouchent, à travers la revendication d'une spécificité des sociétés est-européennes ancrée dans l'expérience des régimes socialistes, sur la réévaluation critique de certains concepts consacrés par la réflexion féministe classique. Se rapprochant d'autres féminismes « dissidents » (postcolonial ou noir américain), les intellectuelles est-européennes mettent aussi en question l'ethnocentrisme de la production scientifique occidentale, voire l'« orientalisation » de l'Europe de l'Est. Les évolutions récentes des débats montrent, à la place du décollage théorique escompté, une tendance au nivellement de la critique par son assimilation dans le mainstream, la discipline elle-même restant marquée par son parrainage occidental.

Ce n'est que dans les années récentes que le travail de Judith Butler a été largement connu en France. Dans le contexte germanophone par contre, elle a été considérée comme une théoricienne majeure depuis la publication de Trouble dans le genre au début des années 1990. Ses interventions ont remis en question et partiellement transformé certaines prémisses de la théorie féministe et des études de genre.L'article décrit les conflits et controverses qui ont marqué la réception initiale du travail de Judith Butler. Il reconstruit les différentes questions qui en étaient les enjeux à l'époque : différences entre générations, questions méthodologiques, et luttes sur les thèmes centraux de la recherche féministe. L'article donne ainsi une présentation extensive des débats féministes dans le monde universitaire germanophone au cours des vingt dernières années. Il décrit ensuite trois courants de débat qui se sont développés après et en relation avec le tournant déconstructiviste du début des années 1990 : études queer, féminisme post-colonial et critique féministe du néo-libéralisme.

Cet article s'intéresse à l'histoire mouvementée du projet de norme « service à l'usager », élaboré sous l'égide de l'Association Française de Normalisation. Cette norme vise à décrire et à évaluer la qualité des prestations fournies aux usagers par les gestionnaires des services d'eau et d'assainissement. L'article montre que le projet s'est structuré autour d'un n ud de tension opposant les objectifs des entreprises ­ qui souhaitaient transformer l'usager en client ­ et les prérogatives des élus locaux ­ qui considéraient ce client-centrisme comme une atteinte au principe de libre administration des communes et à leur fonction traditionnelle de relais de la population. Pour dénouer le conflit, l'AFNOR a identifié une figure de compromis : le client-partenaire.

Cet article, basé sur une enquête quantitative et qualitative, explore la manière dont les chrétiens homosexuels en France gèrent ces dimensions identitaires. Le parcours de ceux qui quittent une église traditionnelle pour une église dite inclusive ressemble à celui d'une conversion. Leurs témoignages illustrent les différentes étapes de ce parcours : le chaos, la rupture et la remise en sens. Comme dans toute conversion, ils doivent se dégager de leur affiliation initiale, ici il s'agit le plus souvent de l'allégeance à l'Église catholique, perçue comme la seule institution légitime. Tous les chrétiens homosexuels ne sont pas prêts à cette désaffiliation, nombre d'entre eux continuent de fréquenter des églises traditionnelles, ce qui explique le petit nombre d'églises inclusives en France. Les enquêtés de cette étude appliquent des stratégies identitaires semblables à celles décrites par les chercheurs britanniques ou nord-américains qui se sont penchés sur ce type de population, mais avec des aspects spécifiques à la France.

Ce texte concerne le travail indépendant en milieu rural, et notamment le rapport au travail chez les artisans du bâtiment, maçons et charpentiers, dans les Hautes-Corbières (Aude), un territoire qui semble en pleine mutation. De fait, on voit arriver et se développer dans certains cantons de nouvelles populations plus riches, plus cultivées, des pratiques culturelles, des phénomènes de patrimonialisation, d'esthétisation, de même qu'une très forte inflation immobilière, autant d'indices d'un processus que l'on serait tenté d'identifier à une « gentrification rurale ». Cette nouvelle configuration vient requalifier les pratiques et les représentations coutumières et locales dans de nombreux domaines, et notamment chez les artisans maçons ou charpentiers auprès de qui l'auteur a entrepris une enquête de terrain à l'été 2007.Après avoir procédé à un cadrage théorique, en particulier concernant la notion de « gentrification rurale », ce texte expose les résultats de l'enquête : à la croisée des problématiques de la qualification du territoire et de l'identité au travail, l'ethnographie menée depuis plusieurs mois parmi les artisans s'attache aux façons de dire et de faire, aux modes d'interaction aussi bien qu'aux types de dispositions engagés dans l'activité professionnelle, ces différents niveaux d'analyse permettant de définir de manière inductive trois « profils » typiques.

Les travaux de sciences sociales font de plus en plus souvent l'objet d'évaluations a priori de leur conformité à des normes éthiques par des instances fonctionnant dans le référentiel de la recherche biomédicale. Si cette pratique n'existe pas dans le contexte français, il est vraisemblable que les choses changent à court terme avec l'harmonisation des procédures scientifiques, notamment au niveau européen. Une enquête conduite sur les soins aux malades dans un grand hôpital d'un township sud-africain permet d'explorer deux questions : les difficultés de mise en  oeuvre du consentement éclairé, tel que prescrit par le comité médical d'éthique ; les problèmes rencontrés dans la détermination de la responsabilité des chercheurs, telle qu'affirmée par le code éthique de la profession anthropologique. Finalement, plutôt que de s'en remettre à la formalisation des comités ou à la normalisation par les codes, cette expérience invite à considérer l'éthique comme un processus de construction au cours duquel les chercheurs explicitent les questions, en explorent les enjeux et en négocient les réponses.