Contenu du sommaire : L'Opposition
Revue | Pouvoirs |
---|---|
Numéro | no 108, 2004/1 |
Titre du numéro | L'Opposition |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Opposition et démocratie - Sadoun Marc p. 5-21 Trois points, que l'on ne peut dissocier, sont ici abordés : l'organisation du droit des minorités, la régulation de la discussion, la conception libérale du principe de vérité. La forme toute particulière que prend la question de la vérité dans ces régimes tient à la place centrale qu'ils laissent à l'échange et à la confrontation des opinions qui, elle-même, ne peut se concevoir sans reconnaissance du droit de tout individu et de tout groupe à prendre part à la compétition électorale et à défendre ses positions entre deux élections. Le libéralisme n'échappe certes pas à la recherche de l'unité, mais il fait de celle-ci le produit de la rencontre et de la confrontation des opinions ; il place le consensus au terme du débat et, par ce trait, il se distingue radicalement des régimes qui ordonnent le temps du politique sur le seul principe de l'Un.Three intertwined points are discussed in this article : the organization of the rights of minorities, the regulation of discussion, and the liberal conception of the principle of truth. The very peculiar form taken by the question of truth in liberal regimes flows from the central place they give to the exchange and confrontation of opinions, itself being unconceivable without the right of every individual and of every group to take part to the electoral contest and to defend their positions between two elections. Admittedly, liberalism does not eschew the search for unity, but it sees it as the result of the meeting and confrontation of opinions ; it places consensus at the end of the debate and, thereby, distinguishes itself radically from political regimes based exclusively on the principle of Unity.
- Les oppositions - Jan Pascal p. 23-43 L'opposition ne se définit pas facilement. On dénombre plusieurs sortes et formes d'opposition selon la nature et le fonctionnement des régimes politiques. De leur étude, il est toutefois possible de définir l'opposition comme une position reconnue d'un groupe dans un régime politique en compétition pour l'accession légale au pouvoir et son exercice pacifique.It is not easy to define the opposition. There are different sorts and forms of opposition according to the nature and the functioning of political regimes. From a study of these regimes, it is, however, possible to define the opposition as the protected position, within a political regime, of a group that competes to gain power legally and exercise it peacefully.
- L'opposition, ou le procès symbolique du pouvoir - Pimentel Carlos-Miguel p. 45-61 L'opposition est bien plus qu'une simple minorité numérique : l'hypothèse défendue ici est qu'elle s'est construite par une transposition du modèle historique de la responsabilité pénale des ministres, la majorité parlementaire assumant le rôle de la défense, et l'opposition celui de l'accusation. On pourrait parler, à cet égard, d'une structure accusatoire du débat public anglais, qui donne tout son sens au phénomène de l'opposition. La symbolique pénale de l'opposition n'a pas qu'une importance historique : la figure du procès a en effet permis à l'opposition de trouver une place légitime, de développer le conflit politique tout en dégageant un consensus fondamental sur le régime. Faute d'un tel consensus, l'opposition n'a pas pu se développer pleinement (comme dans les régimes de concordance), ou n'a été que partiellement reconnue par le droit (comme dans l'exemple français).The opposition is much more than a simple numerical minority. The hypothesis developed here is that it has construed itself through a transposition of the historical model of the penal responsibility of ministers : the parliamentary majority plays the role of the defense, and the opposition that of the accusation. One could speak, in this regard, of an accusatory structure of the English public debate which gives its full meaning to the phenomenon of the opposition. The importance of the penal symbolism of the opposition is not just historical : the image of the trial has indeed made it possible for the opposition to find a legitimate place, to fuel political conflict while fostering a fundamental consensus about the regime. Without such a consensus, the opposition has not been able to develop itself fully (in concordance regimes) or has been legally recognized only partially (as in the French example).
- LE CHEF DE L'OPPOSITION - Surel Yves p. 63-80 La notion de chef de l'opposition reste peu étudiée par les travaux de science politique, alors même que la personnalisation et la médiatisation de la vie politique ont incontestablement conduit à une valorisation de ce rôle. Ce paradoxe s'explique sans doute par la prudence des sciences sociales dans le traitement des acteurs individuels, mais également par la difficulté à définir précisément les contours de ce rôle politique (peu reconnu par les mécanismes institutionnels classiques) et à identifier les dépositaires de cette fonction. Cet article se propose dès lors de mobiliser trois séries de variables d'analyse pour étudier le chef de l'opposition : les déterminants institutionnels classiques, notamment la forme du régime ; les logiques de fonctionnement des systèmes de partis, déterminées pour partie par les modes de scrutin ; les éléments « personnels » associés au charisme supposé des chefs de l'opposition et à leur maîtrise des médias. En appliquant ces variables aux systèmes politiques allemand, américain, britannique, français et italien, on constate que cette fonction de chef de l'opposition est peu codifiée, rarement monopolisée et de plus en plus dépendante des « caractéristiques » personnelles associées aux acteurs politiques concernés.The notion of a leader of the opposition has been seldom studied by political scientists although the personalization of political life and increasing media attention have undoubtedly contributed to enhancing this function. Such a paradox may be explained by the prudence shown by social scientists toward individual actors, but also by the difficult task of defining precisely the contour of this function (which is little recognized by classical institutional mechanisms) and of identifying those who perform it. This article proposes to mobilize three series of analytical variables in order to study the leader of the opposition : the classical institutional determinants, notably the form of the regime ; the operational logics of the party systems, partly determined by the types of ballot ; the “personal” elements associated with the alleged charisma of the opposition leaders and their mastery of the media. By applying these variables to the German, American, British, French and Italian political systems, one realizes that the function of leader of the opposition is not clearly codified, rarely monopolized and increasingly dependent on the personal “characteristics” associated with the political actors involved.
- Quand la deuxième chambre s'oppose - Lauvaux Philippe p. 81-99 La force d'opposition de la deuxième chambre dépend de plusieurs variables, comme l'étendue de ses pouvoirs et sa légitimité démocratique, mais dont la principale est sans doute liée à l'effectivité du principe fédéral. À cet égard, le Bundesrat allemand paraît être le modèle le plus efficace, mais peut-être parce que son style d'opposition n'est pas celui d'une assemblée parlementaire.The opposition potential of the second chamber depends on several variables among which the extent of its power and its democratic legitimacy, the main one being, however, linked to the reality of the federal principle. In this regard, the German Bundesrat seems to be the most efficient model, but it might be due to the fact that its style of opposition is not that of a parliamentary assembly.
- Les droits de l'opposition en France penser une opposition présidentielle - Ponthoreau Marie-Claire p. 101-114 Sans revenir sur la sempiternelle question de la nature du régime, il faut cependant admettre que la fonction présidentielle constitue un obstacle à l'amélioration de la position constitutionnelle de l'opposition à moins que le chef de l'État n'y soit favorable. Cet article vise d'abord à approfondir l'idée d'une « opposition présidentielle », c'est-à-dire d'une opposition au président, à un moment où le système partisan se recompose et où la fonction présidentielle s'affirme à nouveau. Même si cette idée n'est qu'une hypothèse qui est loin de se vérifier, elle permet de mesurer l'abîme qui nous sépare d'une véritable revalorisation du Parlement comme lieu où l'opposition bénéficierait de droits exercés indépendamment du bon vouloir de la majorité.Without returning once more to the never-ending discussion about the nature of the regime, it is nevertheless necessary to acknowledge that the presidential function represents an obstacle to the improvement of the constitutional status of the opposition unless the Head of State approves it. This article intends to discuss the notion of a “presidential opposition”, i.e. an opposition to the president at a time when the partisan system is recomposing itself and the presidential office is reasserting its power. Even if this idea is only an as yet unverified hypothesis, it allows us to measure the huge gap that separates us from a real revalorization of parliament as the place where the opposition would benefit from rights it could exercise independently from the good will of the majority.
- Oppositions et vocation à gouverner : vers une autre classification - Bousquet François-Charles p. 115-124 Actuellement dépassée, la traditionnelle distinction entre opposition qui a vocation à gouverner et opposition qui n'a pas vocation à gouverner a laissé place à une triple typologie : partis de gouvernement, formations de complément et opposition sociale. Si des rapprochements ponctuels peuvent advenir entre ces trois catégories, elles se distinguent nettement, aussi bien par leurs objectifs que par leurs moyens d'expression et d'action. Le devenir de l'opposition sociale reste cependant suspendu à sa capacité à se structurer et à dépasser son caractère conjoncturel.The traditional distinction between the opposition that is called to govern and the opposition that is not is now obsolete and has been replaced by a triple typology : parties of government, complementary forces and social opposition. Although occasional connections may occur between those three categories, they remain clearly distinct by their objectives as well as by their means of expression and action. However, the future of the social opposition is linked to its ability to structure itself and overcome its circumstantial nature.
- L'État et l'opposition affrontement polémique ou face à face « républicain »? - MASSOT Jean p. 125-135 Pour être impartial, l'État, face à l'opposition, doit-il ignorer les appartenances politiques ou en tenir compte de façon équilibrée ? La réponse varie selon la nature des décisions en cause. Trois exemples sont ici analysés : le protocole et les usages républicains, les nominations de hauts fonctionnaires et la représentation parlementaire dans des organismes extraparlementaires.In order to remain impartial toward the opposition should the state ignore partisan identities or take them into account in a balanced manner ? The answer varies according to the nature of the decisions involved. Three examples are analyzed : the Republican protocol and customs, the appointment of higher civil servants, and the parliamentary representation in extra-parliamentary organizations.
- L'opposition dans les assemblées locales - Portelli Hugues p. 137-143 Depuis les lois de décentralisation qui ont surtout renforcé les pouvoirs des exécutifs locaux, les pouvoirs de l'opposition n'ont guère progressé, les collectivités territoriales restant des institutions administratives : ces pouvoirs restent symboliques. C'est surtout dans le domaine du statut des élus et de leur droit à l'information que leur situation s'est améliorée, notamment en matière financière.Since the decentralization laws, which have reinforced above all the power of local executives, the powers of the opposition have not increased. As the local authorities remain administrative institutions, these powers are essentially symbolic. The situation has improved only with regards to the status of the elected officials and their right to be informed, in particular about financial matters.
- Le bonheur de l'opposition - Carcassonne Guy p. 145-155 Le député de la majorité est voué à un rôle suffisamment exigeant et ingrat pour que la satisfaction de la victoire collective s'évanouisse rapidement au profit de la servitude et de la frustration individuelles. Elles sont d'autant plus pénibles que le député de l'opposition lui inflige le spectacle de son propre bonheur, détaché de toute contrainte, de tout souci de responsabilité, qui gagne à la défaite de son camp plus qu'une consolation, un véritable épanouissement.Majority MPs are called upon to play such an exacting role that the exhilaration of collective victory rapidly vanishes to be replaced by individual servitude and frustrations. These are all the more painful that opposition MPs, free from all constraints and responsibilities, inflict on them the image of their own happiness, having found in the defeat of their camp not just comfort, but a real occasion to bloom.
Chroniques
- Repères étrangers. (1er juillet - 30 septembre 2003) - Astié Pierre, Breillat Dominique, Hiscock-Lageot Céline p. 159-163
- Chronique constitutionnelle française. (1er juillet - 30 septembre 2003) - Avril Pierre, Gicquel Jean p. 165-197