Contenu du sommaire : Spécial : L'invention politique de l'environnement

Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire
Numéro no 113, janvier-mars 2012
Titre du numéro Spécial : L'invention politique de l'environnement
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Articles

    • Pour une histoire politique de l'environnement au 20e siècle - Stéphane Frioux, Vincent Lemire p. 3-12 accès libre
    • Repères chronologiques - p. 13-14 accès libre
    • Mobiliser pour l'environnement en Europe et aux États-Unis : Un état des lieux à l'aube du 20e siècle - Charles-François Mathis p. 15-27 accès libre avec résumé
      Quel est l'apport du 19e siècle en termes de mobilisation environnementale ? Il met d'abord en place un discours sur la nature, qui en révèle la valeur, détecte les dangers qui la menacent, et définit finalement les rapports complexes que l'humanité entretient avec elle (conservation/préservation, réformisme/utopisme). C'est également au cours de ce siècle qu'émergent des acteurs « environnementaux » et des procédures de légitimation de leurs discours ou actions. Enfin, s'y définissent des pratiques de mobilisation, par le recours à l'opinion publique, aux associations ou à la puissance publique. À l'orée du 20e siècle, une rhétorique, des acteurs et des modes d'action sont donc en place pour permettre l'essor des mobilisations environnementales à venir.
    • Les nazis et la « nature » : Protection ou prédation ? - Johann Chapoutot p. 29-39 accès libre avec résumé
      On crédite les nazis d'avoir su légiférer pour protéger la nature : le lien qu'ils établissaient entre le sang et le sol, le culte romantique de la nature et l'hygiénisme raciste qu'ils défendaient les auraient prédisposé à mettre en pratique une sensibilité écologiste précoce parmi les États contemporains. Un examen de la législation écologique nazie montre que les projets de loi dataient de la république de Weimar, et qu'ils ne furent guère appliqués : marais, forêts et montagnes furent soumis aux impératifs de la politique de production et de défense nazie. Un examen plus attentif du sort dévolu à ces zones protégées fait apparaître qu'elles furent, à l'instar des autres territoires et des hommes qui l'occupaient, totalement réifiées, et considérées comme des fonds d'énergie et de matière mobilisables pour l'effort de guerre du Troisième Reich.
    • La politique environnementale de Vichy - Chris Pearson, Bruno Poncharal p. 41-50 accès libre avec résumé
      Cet article examine l'histoire environnementale de la France de Vichy. Il constate que le régime de Vichy a traité l'environnement de façon contradictoire. S'efforçant de refaire la France en accord avec son projet politique réactionnaire et afin d'exploiter au maximum les ressources naturelles, le régime a mobilisé la forêt, la montagne et les champs. En même temps, il a déclenché une « guerre contre la friche », essayant de mettre en culture tout le territoire français, mais cette politique a échoué. De plus, et en accord avec la recherche historique selon laquelle le régime de Vichy n'était pas une parenthèse de l'histoire française, cet article montre que sa politique environnementale n'était pas exceptionnelle. Enfin, sa politique vis-à-vis de l'environnement rappelle celles d'autres gouvernements pendant la Seconde Guerre mondiale.
    • Le premier ministère de l'Environnement (1971-1974) : L'invention d'un possible - Robert Poujade, Stéphane Frioux p. 51-54 accès libre
    • « N'abîmons pas la France ! » : L'environnement à la télévision dans les années 1970 - Christian Delporte p. 55-66 accès libre avec résumé
      La question environnementale surgit à la télévision avec l'émotion que suscite la catastrophe du Torrey Canyon (1967) et s'y installe avec l'émission qui lui est dédiée, « La France défigurée » (1971-1978). Selon cette émission, fidèle à la politique gouvernementale, la préservation de l'environnement rejoint d'abord la défense du paysage français, maltraité par les urbanistes et pollueurs de tout poil. Si elle refuse de globaliser la question environnementale, si sa vision rassurante se démarque de l'alarmisme des écologistes, « La France défigurée » a le mérite de familiariser les téléspectateurs avec le thème de la protection de la nature. Imposant son regard et ses thématiques, elle contribue alors à marginaliser le discours et l'action des écologistes, même après la candidature Dumont à l'élection présidentielle (1974). Nourrissant l'idée selon laquelle l'environnement est l'affaire de tous, la télévision des années 1970 nie le bien-fondé de l'écologie politique et l'utilité même d'un mouvement écologiste.
    • Le greenrush : Essai d'interprétation de la « bulle verte » au Royaume-Uni dans les années 1980 - Jean-François Mouhot, James McKay, Matthew Hilton p. 67-81 accès libre avec résumé
      À la fin des années 1980, le mouvement écologiste au Royaume-Uni connut une période exceptionnellement faste : croissance vertigineuse du nombre d'adhérents et des revenus des associations (Greenpeace, Friends of the Earth ou WWF), score exceptionnel du Green Party aux élections européennes, omniprésence des questions environnementales dans les médias ou dans le monde politique. Cette « bulle verte » éclata cependant rapidement et fut suivie d'une période de vaches maigres pour les questions d'environnement. Nous montrons en quoi ce phénomène, contrairement à ce qui a été écrit auparavant, ne fut pas limité au Royaume-Uni, mais toucha l'ensemble de l'Europe (y compris de l'Est) et les États-Unis. Nous analysons les différents facteurs ayant contribué à cette bulle et à son implosion ultérieure, comme l'arrivée de la question du changement climatique sur la scène internationale ou encore la professionnalisation croissante des organisations de défense de l'environnement.
    • L'affaire de la Vanoise et son analyste : Le document, le bouquetin et le parc national - Florian Charvolin p. 82-93 accès libre avec résumé
      L'« affaire de la Vanoise », comme on l'appelle traditionnellement dans les témoignages oraux et dans l'historiographie de la protection de la nature des années 1960, est à la fois un enjeu mémoriel pour les écologistes et une archive pour l'historien, après avoir été un champ de lutte constitutif d'une des premières confrontations contemporaines d'envergure entre le public et les aménageurs en France. Elle met en scène, à propos du parc national de la Vanoise, les premières tentatives de dérogation à la loi sur les parcs nationaux, les intérêts de promoteurs privés de stations touristiques, la politique locale des collectivités territoriales et la fédération des protecteurs de la nature dans un réseau. L'article étudie cette émergence d'une « forme » historique particulière, en s'inspirant de la sociologie des problèmes publics, et de celle des contenus scientifiques.
    • De la plainte légale à la subversion environnementale : L'aménagement des rivières dans l'Espagne franquiste (Aragon, 1945-1979) - Pablo Corral Broto p. 95-105 accès libre avec résumé
      Dans l'Espagne franquiste, la politique hydraulique du modèle productiviste n'obtint pas un consensus total. Cet article, portant sur une approche régionale, afin de considérer les différentes échelles du conflit et d'assurer l'exploitation d'un maximum de sources, analyse comment le caractère conflictuel de l'environnement a contribué à un changement politique, par quelles stratégies collectives il a été produit et comment elles l'ont justifié. L'action collective et son discours vis-à-vis de la pollution industrielle et des grands travaux hydrauliques ont progressivement mis en évidence l'incapacité de cette dictature à mener une gestion équitable de la ressource en eau. L'étude historique nous permet de comprendre la transformation de l'action environnementale institutionnelle en action politique d'une plus grande envergure sociale, horizontale et démocratique, à partir d'une interrogation des sources par le biais des conceptions politiques modernes de publicité des débats, d'égalité et de citoyenneté.
    • L'expertise d'État, creuset de l'environnement en URSS - Marie-Hélène Mandrillon p. 107-116 accès libre avec résumé
      En URSS, c'est de l'intérieur du fonctionnement du système communiste qu'ont été données les premières alertes concernant l'impact de l'industrialisation sur les ressources naturelles. Ces alertes sont intervenues dès les années 1950, lancées par des planificateurs et des scientifiques fortement impliqués dans les programmes de développement économique. Ces experts se sont constitués en réseau, leurs idées se sont diffusées, mais leur influence est restée limitée jusqu'à la rupture politique initiée par Mikhaïl Gorbatchev. L'article montre que ces origines bureaucratiques continuent à marquer l'héritage environnemental de l'espace postsoviétique en dépit de la brève parenthèse de l'ouverture gorbatchévienne à la fois sur la société et sur le monde.
    • L'européanisation de la politique environnementale dans les années 1970 - Jan-Henrik Meyer, Bruno Poncharal p. 117-126 accès libre avec résumé
      L'article analyse l'émergence d'une politique environnementale de la Communauté européenne dans les années 1970 en termes d'européanisation de l'environnement. En s'appuyant sur la littérature produite relative à l'européanisation, elle peut être conçue de trois façons différentes : un processus compris comme l'établissement d'institutions et de politiques à l'échelle de la CEE, l'impact de la CEE sur un État membre et une européanisation sociale, conçue comme un processus d'établissement d'une coopération transnationale entre des acteurs sociaux à travers la CEE. L'article démêle l'écheveau du processus d'européanisation de l'environnement en mettant l'accent sur sa préséance dans le contexte du Conseil de l'Europe et sur la reprise d'idées politiques et de principes circulant à un échelon international. En outre, il s'intéresse à l'émergence rapide d'une européanisation sociétale, notamment dans l'anticipation de l'impact de l'Europe sur la législation d'un État membre.
    • De la nature à la biosphère : L'invention politique de l'environnement global, 1945-1972 - Yannick Mahrane, Marianna Fenzi, Céline Pessis, Christophe Bonneuil p. 127-141 accès libre avec résumé
      Comment, entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et la conférence de Stockholm sur l'environnement humain en 1972, l'environnement a-t-il accédé au rang de problème global et de catégorie d'action politique internationale ? Cet article analyse le contexte géopolitique et les formes d'alerte et d'expertise scientifique qui façonnèrent l'émergence et les évolutions de la catégorie d'« environnement global ». Tandis que la catégorie de « nature » décline, il retrace, à travers la guerre froide et les décolonisations, l'affirmation des questions de conservation internationale des ressources, des « bases biologiques de la productivité » planétaire, puis des pollutions et de « la biosphère », et analyse leur intégration dans une conception écosystémique de la planète et leur inscription dans l'agenda politique international.
    • Le tournant environnemental de la société industrielle au prisme d'une histoire des débordements et de leurs conflits - Michel Letté p. 142-154 accès libre avec résumé
      Catastrophes et pollutions massives ont-elles favorisé le tournant environnemental de la société industrielle au 20e siècle ? L'opposition croissante des publics confrontés aux débordements de l'industrie suggère en tout cas une nette évolution des sensibilités. Partant de cas récents, cet article invite à explorer plusieurs registres du conflit environnemental provoqué par ces débordements durant plus de deux siècles d'industrialisation. Leur histoire porte sur la nature des transactions dont l'enjeu est la délimitation des territoires et de leurs fonctions. Elle s'attache aux négociations entre parties prenantes pour qualifier ce qui déborde, oppose leurs intérêts contradictoires, et propose de redéfinir le problème environnemental lui-même. Elle commande finalement une histoire des dispositifs de régulation des conflits environnementaux par la mise en perspective sur le temps long des débordements industriels.
    • La politique de l'environnement industriel en France (1960-1990) : Pouvoirs publics et patronat face à une diversification des enjeux et des acteurs - Daniel Boullet p. 155-168 accès libre avec résumé
      L'action de l'État, le poids de l'opinion, d'influences extérieures, de nécessités concrètes, ont amené l'industrie française à se préoccuper d'environnement. Mais la pesanteur de certaines constantes, au sein des pouvoirs publics ou du patronat, ont encadré ces changements, en atténuant les exigences. Une politique pragmatique naît dans les années 1960, fonde des outils (surtout institutionnels) et un mode de relation avec les entreprises. La préférence libérale y compose avec un dirigisme mesuré. Un ministère, vite actif, est créé au cours des années 1970. La législation est renouvelée et élargie dans un esprit libéral. Une concertation systématique parvient, jusqu'à un certain point, à entraîner des industriels témoins d'une montée générale de sujets peu soumis à la conjoncture. Les années 1980, marquées par de graves accidents et l'essor de la législation européenne voient l'environnement de plus en plus intégré à la gestion des entreprises. Niveau réel d'application des textes, maîtrise ou transparence de l'information deviennent des enjeux majeurs.
    • L'invention syndicale de l'environnement dans la France des années 1960 - Renaud Bécot p. 169-178 accès libre avec résumé
      Le mouvement syndical français a longtemps été présenté comme indifférent aux enjeux environnementaux. Or, dès l'après-guerre, les archives syndicales attestent d'une préoccupation, qui se manifeste au travers de sujets aussi divers que la gestion des « ressources naturelles », la santé au travail ou l'aménagement urbain. Ces préoccupations diffuses se précisent au cours des décennies 1950 et 1960, lorsque les syndicalistes sont confrontés à différentes situations de dégradation de l'environnement, notamment en contexte colonial. Les confédérations approfondissent alors leurs projets de planification économique, en intégrant progressivement les enjeux environnementaux. Dans le même temps, des actions syndicales de lutte contre les pollutions se déroulent sur les lieux de vie et de travail des salariés. Ancrée dans ce contexte, une réflexion sur la notion de cadre de vie émerge peu à peu. Cette notion devient la contrepartie syndicale de « l'invention technocratique de l'environnement ».
    • Écologie et politique dans les années 1970 : Les Amis de la Terre en France - Alexis Vrignon p. 179-190 accès libre avec résumé
      Fondés en 1970, les Amis de la Terre-France sont l'un des principaux acteurs de l'écologie politique dans les années 1970. Participation aux élections et contestation antinucléaire sont deux facettes d'une même réflexion sur le rôle des citoyens et de la société civile dans la résolution des problèmes environnementaux. Si les Amis de la Terre remettent en cause la définition de l'environnement promue par les pouvoirs publics, ils peinent à mettre en place une organisation capable de mener à bien leur projet. Les groupes locaux se concertent difficilement, cependant qu'aucune procédure ne permet un contrôle efficace des animateurs nationaux, situation qui alimente suspicion et tensions. Au début des années 1980, l'association adopte des statuts plus habituels et une définition de l'environnement analogue à celle des pouvoirs publics ; ces décisions marquent la fin des ambitions des années 68 pour une organisation qui devient alors une ONG environnementale.
    • L'extrême gauche française et l'écologie : Une rencontre difficile (1968-1978) - Philippe Buton p. 191-203 accès libre avec résumé
      Lors de la décennie qui a suivi Mai 68, l'attitude des organisations de l'extrême gauche française envers l'écologie permet de distinguer trois groupes. En premier lieu, ceux qui s'ouvrent précocement à la préoccupation écologiste. Ces pionniers sont le parti socialiste unifié, la sensibilité maoïste dite spontanéiste (Vive la Révolution et la Gauche prolétarienne), et un petit groupe trotskyste (l'Alliance marxiste révolutionnaire). À ce premier groupe s'oppose le deuxième, celui des suivistes, essentiellement composé des principales organisations trotskystes (Ligue communiste, Lutte ouvrière) et anarchistes. Le troisième groupe, celui des réfractaires, rassemble la quasi-totalité des maoïstes et quelques organisations trotskystes (Organisation communiste internationaliste) ou anarchistes (Guerre de classes). Le croisement de trois paramètres permet de comprendre cette typologie : le rapport à la notion de modernité, la relation au marxisme et la notion d'optimisme révolutionnaire.
    • La France, une « société vert clair » ? : Enjeu - Retour sur The Light Green Society : Ecology and Technological Modernity in France, 1960-2000 - Geneviève Massard-Guilbaud p. 205-210 accès libre
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