Contenu du sommaire : Ecrire l'histoire de la ville à l'époque moderne

Revue Histoire urbaine Mir@bel
Numéro no 28, août 2010
Titre du numéro Ecrire l'histoire de la ville à l'époque moderne
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Des villes de papier : écrire l'histoire de la ville dans l'Europe moderne - Clarisse Coulomb p. 5-16 accès libre
  • Chroniques urbaines et livres de famille

    • Les villes allemandes du XVe au XVIe siècle : Comparaison entre Augsbourg et Hambourg - Gregor Rohmann p. 17-43 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Si, du XVe au XVIIe siècle, une multitude de chroniques urbaines et de livres de familles (familienbücher) furent écrites dans l'Allemagne du Sud, cette tradition était bien moins vivace en Allemagne du Nord. Les chercheurs ont tenté d'expliquer cela par les structures économiques différentes entre les centres du capitalisme naissant, comme Nuremberg ou Augsbourg, et les villes de la Ligue hanséatique, formées par le commerce maritime. Une comparaison fine entre Augsbourg et Hambourg révèle des différences plus profondes : alors que la métropole souabe avait adopté la structure familiale agnatique et patrilinéaire, celle du lignage, les dignitaires marchands de Hambourg (Kaufmannshonoratioren) maintenaient la filiation cognatique et bilatérale, celle de la parentèle, comme matrice sociale dominante. Ce caractère cognatique de la structure de parenté influe sur l'écriture domestique de trois manières : premièrement, il empêche le développement d'une identité généalogique ancrée dans le temps long ; deuxièmement, les structures de parentèles sont variables et donc difficilement transcriptibles sur les registres ; troisièmement, ils freinent la transmission des écrits des générations précédentes. Ainsi, les registres historiques et généalogiques sont un phénomène étroitement lié à des structures spécifiques de parenté. Lorsqu'au XVIe siècle, les élites hambourgeoises commencèrent à écrire l'histoire de leur famille, cela indiquait, et en même temps renforçait, le processus d'adoption du nouveau modèle du « lignage ».
      Town Chronicles and civic « House Books » in German Towns (XVth-XVIIth centuries) : comparison between Augsbourg and Hamburg From Southern Germany in the 15th to 17th centuries we know a multitude of town chronicles and civic house books (Familienbücher), while from the North there is a rather infrequent tradition. Scholars have tried to explain this referring to differences in the structures of economic life between the centres of early capitalism like Nuremberg and Augsburg and the cities of the hanseatic league, shaped by maritime trade. By closely compairing Augsburg and Hamburg, one can come to deeper insights : while the Swabian metropolis adopted agnatic and patrilinear kinship structures (lineage), the merchant dignitaries (Kaufmannshonoratioren) of Hamburg maintained cognatic and bilateral networking as socially dominant matrix (‘‘kindred''). Such cognatic kinship structures constrain household writing in several ways. First they don't tend to develop concepts of long-time genealogical identity. Second they are highly variable and thus not apt to being fixed for record. Third they hamper the transmission of writings from earlier generations. Thus, historical and genealogical record is a phenomenon closely linked to specific kinship structures. When in the 16th century Hamburgian elites commenced historical writing concerning their own families, this indicated and at the same time fostered the process of adaptation to the newly appraised model of « lineage ».
    • Les Annales manuscrites de la ville de Toulouse : Une mémoire urbaine monumentale - Marie Perny p. 45-64 accès libre
    • Réseaux savants et choix documentaires de l'histoire locale française Écrire l'histoire de Bourges dans la seconde moitié du XVIIe siècle - Hilary J. Bernstein p. 65-84 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      A partir de l'exemple de l'Histoire de Berry de Gaspard Thaumas de la Thaumassière (1689), dont l'histoire de la ville de Bourges forme la majeure partie, cet article démontre qu'écrire l'histoire urbaine au XVIIe siècle était une entreprise hautement politique. Ne pouvant accéder aux archives publiques, mais déterminés à écrire des histoires appuyées sur des sources, les auteurs devaient tisser une série de liens sociaux, professionnels et amicaux afin de s'en voir confier. Thaumas de la Thaumassière appartenait à ces élites urbaines intéressées par les études historiques et réussit, à partir de la capitale de la province, à étendre ses réseaux au Berry, et du Berry à Paris. La forme de cette recherche influence le contenu de ces histoires urbaines. Ainsi, pour l'épisode des guerres de religion et de la Fronde, l'auteur compose soigneusement son ouvrage de telle sorte que, semblant complet et objectif, il évite de blâmer les élites urbaines déloyales à la couronne.
      Writing the history of Bourges in the second half of the XVIIth century Using the example of Gaspard Thaumas de la Thaumassière's Histoire de Berry (1689), this article demonstrates that writing urban history in seventeenth-century France was a profoundly « political » enterprise. Without access to public archives but determined to write histories based on documentary sources, authors had to rely on a series of social, professional, and amicable ties to gain access to sources. In Bourges, Thaumas de la Thaumassière belonged to such a group of urban elites interested in historical studies and was able to make use of sociable networks extending from the provincial capital throughout the province of Berry and from Berry to Paris for his work. The form that research took also influenced the contents of urban histories. In the cases of the Wars of Religion and the Fronde in Bourges, in particular, Thaumas de la Thaumassière carefully edited his work so that, while seeming complete and objective, it nevertheless refrained from casting blame on urban elites for the city's disloyalty to the French crown.
    • « The private and uninteresting history of a single town ? » : Les histoires des villes provinciales dans l'Angleterre du XVIIIe siècle - Rosemary H. Sweet p. 85-103 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article répertorie les différents types d'écrits historiques que l'on peut trouver dans les villes du dix-huitième siècle et analyse leur impact tant auprès des lettrés de l'époque, que des historiens actuels, spécialistes d'histoire urbaine. En raison d'un développement rapide des villes de provinces au dix-huitième siècle, l'histoire urbaine devint un genre reconnu et bien établi ; cependant ses racines remontent à une période bien antérieure. Garder une trace écrite des faits urbains a permis de légitimer la gouvernance municipale et ce, depuis le Moyen Âge. De fait, les chroniques urbaines représentent un enjeu crucial de ce type d'histoire. D'autres sources y ont également joué un rôle : les relevés topographiques, les études des antiquités ou les guides pour les voyageurs, toutes formes de documents historiques à prendre en compte dans l'étude de cette évolution. La plupart de ces écrits présente une société qui se police et devient plus prospère, offrant ainsi un point de vue intéressant et nouveau sur le rôle de l'histoire et de sa place dans la construction de l'identité urbaine, ainsi que sur la réponse des villes de province face à une urbanisation rapide et constante au dix-huitième siècle.
      « The private and uninteresting history of a single town ? » : the varied forms of history writing in eighteenth-century English towns This article surveys the various forms of history writing to be found in eighteenth-century towns and evaluates their significance both for contemporaries and for modern historians of eighteenth-century urban culture. With the rapid growth of provincial urban centres in this period, the urban history became a widely recognised and well established genre : its roots go back much earlier however. Record keeping and civic memory had underpinned the legitimacy of urban government since the middle ages and the urban chronicle represented a crucial element of most urban histories. But other influences were also at work : the topographical survey, the antiquarian study, and the guidebook for travellers and strangers. Most urban histories imparted a view of society that was increasingly polite, improving and prosperous, offering a valuable insight both into the role of history and place in the construction of urban identities and into the provincial response to the rapid urbanisation of the eighteenth century.
    • « Les marbres le diront à la postérité » : Claude-François Ménestrier et l'écriture du pouvoir au XVIIe siècle - Anne Béroujon p. 105-122 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, le consulat de la ville de Lyon, développant une politique d'apparat, s'inscrit et se réinscrit sur les bâtiments de prestige de la cité, à l'intérieur des églises, sur les places et au coin des rues. Ce discours épigraphique de la municipalité a la particularité d'être relayé par un ouvrage paru en 1669, L'éloge historique de la ville de Lyon, sous la plume de Claude-François Ménestrier. La recension des écritures d'apparat qu'entreprend le jésuite est l'occasion de réinterroger les liens qui se nouent entre « pouvoir de l'écriture » et « pouvoir sur l'écriture », selon les termes de l'historien italien Armando Petrucci, et d'approcher sous un angle politique la « ville écrite ».
      Claude-François Ménestrier and the writing practice of power In the second half of the 17th century, by deploying a policy of glory, the Lyon consulate appears even more important on the city walls (on public buildings, into the churches, in several squares, in the streets). The municipality's epigraph offensive is accompanied by a publishing offensive. Here, Father Claude-François Ménestrier plays a key role : in a book of imposing thickness and format, which appeared in 1669, entitled l'Eloge historique de la ville de Lyon, he lists all consular inscriptions. This contribution tries to analyse the links beetween the writer and a political authority.
    • L'historien de la ville et l'espace public - Clarisse Coulomb p. 123-145 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les histoires des villes connurent une fortune croissante en France au cours de la période moderne, les réécritures, rééditions, abrégés se multipliant au XVIIIe siècle. Il ne s'agit pas ici d'étudier le contenu de ces histoires, mais les textes qui les encadrent, dédicaces et préfaces. Comment se situe l'historien de la ville dans l'espace public ? L'étude d'un corpus constitué d'une centaine de textes publiés du XVIIe siècle à la fin du XVIIIe siècle permet d'observer un basculement : si, au début de la période, l'historien se confond avec son objet, s'effaçant derrière les édiles commanditaires et la communauté savante locale, on assiste à une progressive affirmation de l'auteur, écrivant désormais contre les autorités locales politiques ou savantes et en appelant au jugement du public. Ce glissement reflète la dissolution des « petites patries » dans un espace national, mais aussi la réactivité du monde culturel urbain face aux mutations du champ littéraire et sa participation aux débats nationaux non seulement intellectuels, mais aussi politiques.
      The Urban Historian and the public sphere Urban histories were on the rise in France throughout the early modern period, with new versions, re-editions, and abridgments multiplying in the eighteenth century. The focus here is not on the content of these histories, but on the dedications and prefaces that supported them. How did urban historians situate themselves within the public sphere ? Studying a collected body of roughly one hundred texts published from the seventeenth century up to the end of the eighteenth century reveals a shift : If, at the beginning of the period, historians were indistinguishable from their subject, retiring behind their municipal sponsors or the local erudite community, they progressively asserted an active authorship, now writing against the local public or learned establishment and appealing to public opinion. This evolution reflects not only the dissolution of particular enclaves within the national realm but also the reaction of the urban cultural world to changes in the literary sphere, as well as its participation in national debates that were not only literary, but political in scope.
    • Les ouvriers dans la ville Nantes au XVIIIe siècle - Samuel Guicheteau p. 147-166 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Au XVIIIe siècle, Nantes est une grande ville industrielle et de nombreux ouvriers y travaillent. L'industrie est d'ailleurs omniprésente dans la ville. Sans faire disparaître ses caractéristiques traditionnelles, le développement économique transforme la présence industrielle et ouvrière dans la cité. L'identité sociale et culturelle des ouvriers se manifeste à travers plusieurs pratiques urbaines, tant au centre de la ville que sur ses marges. L'enracinement de cette identité contribue à la pérennité de ces pratiques.
      The Workers in the Town : Nantes in the XVIIth century During most of the 18th century, Nantes is a great industrial town with a high working-class population and an ubiquitous industry. Economic development alters the industrial as well as the workers' presence in the city while preserving its traditional features. The workers' social and cultural identity appears through various urban practices in the centre of the town as well as on its outskirts. This deeply-rooted identity plays an important part in ensuring the continued existence of these practices.
  • Lectures