Contenu du sommaire : Villes de villégiature

Revue Histoire urbaine Mir@bel
Numéro no 41, décembre 2014
Titre du numéro Villes de villégiature
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier

    • Villégiature et histoire urbaine - Dominique Hervier p. 5-9 accès libre
    • À l'origine des contradictions sur la villégiature : Les villas de l'aristocratie romaine (Ier siècle avant J.-C. / Ier siècle après J.-C.) - Xavier Lafon p. 11-22 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En prenant en compte les seules villas aristocratiques et leurs aspects résidentiels, il s'agit de montrer à travers la documentation littéraire l'ambigüité de ces constructions et des séjours qu”elles autorisent. Le désir d'éloignement de la ville et de ses contraintes, dans un cadre agréable, ne signifie pas pour autant une véritable retraite, un repli sur soi, ne serait-ce qu'en raison de la concentration des ces résidences sur un nombre limité de sites et d'un calendrier limité dans l'année. Le principal moyen de contourner les obstacles qui font de la villégiature une exception par rapport à l'activité principale, la politique, est de choisir une localisation proche de Rome. Seuls quelques empereurs choisissent de s'établir durablement loin de Rome mais ils sont très mal considérés des milieux aristocratiques. Tout cela exige l'existence de transports efficaces et plus largement une circulation rapide de l'information.
      By focusing solely on aristocratic villas and their residential aspects, our goal is to use literary documentation to show the ambiguity of these constructions and the holiday stays that they made possible. The desire to escape to a pleasant setting away from the city and its constraints did not necessarily mean a genuine retreat into isolation, if only because these residences were concentrated in a limited number of sites and accessible for limited periods of the year. To get around the obstacles that made a holiday resort an exception to the main activity (politics), one solution was to choose a location close to Rome. Only a few emperors chose to live away from Rome for an extended period, but those emperors were considered very poorly by the aristocracy. This entire phenomenon required efficient transportation and, more broadly, rapid circulation of information.
    • Deauville (1859-1875), une histoire d'entreprise - Nicolas Stoskopf p. 23-44 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Bien informés du contexte local, le docteur Olliffe et Armand Donon, respectivement médecin et banquier du duc de Morny, acquièrent en 1859-1860 200 ha de marais en déshérence face à Trouville. L'objectif est de construire une ville nouvelle articulée autour de trois pôles qui portent le sceau de Morny : le casino en bord de mer, l'hippodrome au débouché du pays d'Auge et un bassin à flot proche de la gare, reliée à Paris. Les villas luxueuses construites sur la Terrasse et la qualité de leurs propriétaires contribuent à la création d'une image de marque, celle d'une villégiature élégante, un « Bade marin, un Brighton français ». Les promoteurs attendent que cette image soit reconnue et diffusée par la presse pour créer en 1863-1864 des sociétés immobilières et une banque locale. Mais l'exploitation est contrariée par la mort de Morny en 1865, la guerre et la chute de l'Empire en 1870 , le recul du rivage en 1874-1875. La ville reste inachevée. Paradoxalement, la spéculation tourne au fiasco, mais le plan d'urbanisme, la liaison ferroviaire avec Paris, la construction d'un hippodrome et le standing des villas sont des éléments déterminants sur le long terme pour l'avenir de la station.
      In 1859-1860, Doctor Olliffe and Armand Donon (the Duke of Morny's doctor and banker, respectively), being well informed about the local context, acquired 200 hectares of undeveloped marshland bordering Trouville, Normandy. Their objective was to build a new town organised around three landmarks bearing the Morny coat of arms: the casino on the seafront, the hippodrome serving the Pays d'Auge region, and the harbour basin near the railway station, with a railway line to Paris. The luxury villas built on the Terrasse and their distinguished owners helped create the brand image of an elegant resort town, a “Baden on the seaside, a French Brighton”. The developers waited until this image was acknowledged and publicised by the press before founding property companies and a local bank in 1863-1864. But the operations were thwarted by Morny's death in 1865, the Franco-Prussian War and fall of the Second Empire in 1870, and shore erosion in 1874-1875. The town was left unfinished. Paradoxically, the speculation turned into a fiasco, but the town planning, the railway link to Paris, the construction of a hippodrome and the luxurious villas became decisive factors for the long-term future of the resort town.
    • Urbanisation de la Côte Fleurie : Principes, organisation et développement (1830-1914) - Didier Hébert p. 45-61 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Prépondérante dans l'histoire de la villégiature balnéaire, La Côte Fleurie en Normandie comprend encore une densité remarquable d'édifices et de villes nés au XIXe siècle d'un engouement inédit et précoce pour les bains de mer. Là vont apparaître des villes nouvelles dédiées presque exclusivement aux loisirs balnéaires, créées de façon empirique à partir de villages de pêcheurs, ou entièrement planifiées sur des territoires vierges, inventant un urbanisme novateur et des mécanismes élaborés d'appropriation foncière. Les plus prestigieuses stations fondées ex-nihilo durant le Second Empire sont organisées comme des villes-jardins tournées vers la mer, selon des normes urbaines originales. Elles s'inspirent de l'urbanisme classique français, très ordonné, ou au contraire du modèle plus irrégulier et pittoresque issu du jardin à l'anglaise, cadre paysager déjà expérimenté aux abords de Paris. Au début du XXe siècle, tandis que ces stations-phares poursuivent leur essor, l'éclosion de sites plus modestes basés sur une vie simple proche de la nature traduit un retour aux sources de la villégiature balnéaire
      The Côte Fleurie in Normandy, which holds a preponderant place in the history of seaside resorts, still holds a remarkable number of buildings and towns created in the 19th century thanks to a novel and early enthusiasm for sea bathing. New towns appeared along the coast, dedicated almost exclusively to seaside leisure activities, created almost empirically from fishing villages or entirely planned on virgin land, inventing a new urbanism and complex land acquisition mechanisms. The most prestigious resorts created ex nihilo during the Second Empire were arranged like garden cities turned towards the sea, applying unique urban standards. They were inspired either by very orderly classic French urbanism, or by the more irregular and picturesque model of the English garden, a landscaping technique already tested in the area around Paris. In the early 20th century, while these major seaside resorts continued to boom, the creation of more modest sites based on simple country living reflected a return to the origins of seaside resorts.
    • Villégiature et formation des banlieues résidentielles : Paris au XIXe siècle - Isabelle Rabault-Mazières p. 63-82 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Parti du constat de la coïncidence entre géographie de la villégiature au XIXe siècle et géographie actuelle de la banlieue résidentielle, l'article s'interroge sur le rôle joué par la villégiature bourgeoise dans la formation des banlieues résidentielles de Paris. Après avoir mis en évidence l'impact des maisons de campagne dans le parc immobilier mais aussi la fragilité de ces espaces résidentiels, l'étude de deux lotissements de villégiature et le suivi de leurs « usagers » dans les matrices mobilières permettent d'analyser concrètement le rôle contrasté joué par la villégiature dans le processus de peuplement.
      This paper began with the observation that the geography of 19th century resort towns coincides with the current geography of residential suburbs. It questions the role played by bourgeois resort towns in the forming of residential suburbs of Paris. We highlight the impact of country homes on the housing stock, as well as the fragility of these residential areas. Then, we study two resort developments and track their “users” in the matrices mobilières that enable us to analyse in concrete terms the contrasted role played by resort towns in the settlement process.
    • Villes d'eaux, villes de loisirs : L'exemple des stations thermales françaises de la fin du XIXe siècle aux années trente - Carole Carribon p. 83-103 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le tourisme thermal connaît un grand essor en France à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. Les loisirs, entendus comme temps et espaces de délassement et de distractions, font partie intégrante de la villégiature thermale. Dès lors, il est légitime de s'interroger sur leur inscription dans l'espace urbain, et les possibles interactions entre la vocation médicale et touristique des stations hydrominérales et leur équipement en lieux et infrastructures dédiés aux loisirs. Ces derniers, destinés à une clientèle saisonnière, peuvent de prime abord sembler disproportionnés au regard de la population permanente des « villes » d'eaux, lesquelles sont majoritairement, hors-saison, des bourgs de taille modeste, exception faite de quelques stations importantes qui constituent à la fois le fleuron et la vitrine du thermalisme français. Durant la saison estivale, entre 300 000 et 500 000 visiteurs annuels – « baigneurs », accompagnateurs et touristes – affluent dans les stations hydrominérales. Des loisirs leur sont proposés autour de lieux-clefs : le parc thermal, espace de détente et de sociabilité au sein d'une nature recomposée et maîtrisée, les équipements sportifs, en plein essor au début du XXe siècle, et surtout le casino et la pléiade d'activités qu'il offre à toute heure du jour... et de la nuit. Lieu emblématique des « villes d'eaux », il concentre les contradictions inhérentes aux stations thermales en tant que lieux de villégiature de santé soumis à des impératifs de modernité et de sociabilité, et aspirant à incarner un modèle d'urbanité.
      Spa tourism was booming in France beginning in the second half of the 19th century. Leisure, which we define as time and places for relaxation and entertainment, is an integral part of hot spring resorts. Therefore, we can legitimately investigate how they fit into the urban space, along with the possible interactions between the medical and tourism purposes of spa resorts and the leisure-related infrastructure they were equipped with. This infrastructure, intended for a seasonal clientele, may seem disproportionate compared to the year-round population of “spa towns”, which were generally modest-sized towns in the offseason, apart from a few major resort towns that were both the jewel and the showcase of the French spa sector. During the summer season, between 300,000 and 500,000 visitors a year – those “taking the waters”, as well as their travel companions and other tourists – flocked to spa resort towns. Leisure activities were offered based on a few main sites: the spa park, an area for relaxation and socialisation in a reconstituted and controlled natural setting; sports facilities, which grew more popular in the early 20th century; and especially the casino and the myriad activities that it offered at any time of the day... or night. An emblematic place of “spa towns”, the casino reflected the inherent contradictions of spa resorts as health resort areas subject to the imperatives of modernity and sociability, and aspiring to embody a model of urban (and urbane) living.
    • Des villas pivotantes aux solariums tournants - Cécile Raynal, Thierry Lefebvre p. 105-120 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'idée de faire tourner des habitations « hygiéniques » et des galeries de cure sanatoriale pour suivre le mouvement apparent du soleil, fait son chemin au début du XXe siècle. Ces innovations, forcément dispendieuses, parviennent parfois à s'imposer dans un contexte économique contraignant. L'article s'intéresse tout particulièrement à trois initiatives qui connaîtront des destins différents : la « Villa Tournesol » du Dr Pellegrin, le « Palais magique » des architectes Lécuyer et Jubault, et les « Solariums tournants » du Dr Saidman. Ces derniers, désormais bien documentés par les historiens, constituent certainement une des plus grandes réussites de cette architecture non conventionnelle.
      The idea of rotating “hygienic” living areas and the galleries of sanatoriums to follow the movement of the sun drew much interest in the early 20th century. These innovations, always very costly, were sometimes implemented in straitened economic times. This article focuses mainly on three initiatives that knew different fates: Dr Pellegrin's “Villa Tournesol”, architects Lécuyer and Jubault and their “Magical Palace”, and Dr Saidman's rotating solariums. The rotating solariums, which are now quite well documented by historians, certainly represent one of the greatest success stories for this form of unconventional architecture.
    • Du projet utopique à la réalité : La création d'Héliopolis Première commune naturiste de France (1930-1939) - Sylvain Villaret p. 121-136 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      C'est en 1931 que les docteurs G. et A. Durville entreprennent de fonder sur l'île du Levant la première commune naturiste de France : Héliopolis. Au-delà du symbole, il s'agit aussi d'offrir au plus grand nombre un lieu propice à la pratique du naturisme durant les vacances estivales. Dépassant le rêve d'une cité utopique, les frères Durville concrétisent pour partie leurs ambitions. En retraçant, la genèse et le premier essor d'Héliopolis, notre propos est de montrer que c'est en « jouant » la carte du tourisme et des loisirs qu'ils s'efforcent d'aménager de façon pérenne une cité qui non seulement satisfasse à l'idéologie naturiste, mais obtienne également la reconnaissance des autorités publiques. Reste que si l'objectif de fonder une micro-société naturiste se révèle rapidement un échec. Héliopolis s'affirme comme une cité de loisirs emblématique et annonce, in fine, l'avènement d'un naturisme de masse de plus en plus hédoniste.
      In 1931 , Drs G. and A. Durville decided to found the first naturist town in France: Héliopolis, on the Île du Levant. Apart from the symbolism, the goal was also to offer the general public a place suitable for practising naturism during summer holidays. Going beyond the dream of a utopia, the Durville brothers were able to achieve their ambitions partially. By retracing the genesis and initial success of Héliopolis, our aim is to show that, by “playing” the tourism and leisure card, the Durvilles endeavoured to develop a lasting city that not only satisfied naturist ideology, but was also recognised by the public authorities. While the objective of founding a naturist “micro-society” rapidly proved to be a failure, Héliopolis became known as an emblematic leisure city and ultimately foreshadowed the rise of naturism on a broader scale and in an increasingly hedonistic form.
  • Chantiers de la recherche

  • Études

    • « Le repaire et la bergerie des brebis du Seigneur au milieu de la France » : Le paysage urbain à Orléans au temps des guerres de Religion - Jérémie Foa p. 147-168 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Parce qu'elle est à la fois la capitale du protestantisme (1562-1568) et le front pionnier de la reconquête catholique (1568-1572), Orléans expérimente successivement tous les cas de figure de la biconfessionalité urbaine : domination protestante (avril 1562-mars 1563 et septembre 1567-mars 1568) puis domination catholique (à partir de mars 1568) ; coexistence pacifique (mars 1563-septembre 1567), puis affrontements violents (1568-1572), qui culminent avec le massacre de la Saint-Barthélemy. Se joue à Orléans, en accéléré et avec une intensité inédite, ce qu'on observe dans le royaume de France sur le temps long des guerres de Religion : le passage de l'espoir d'une Réforme à la française à la dépossession huguenote. Cet article ambitionne d'interroger la défaite des réformés à travers les questions d'espace, en faisant du paysage urbain non simplement le cadre, mais bien un acteur décisif du conflit confessionnel et de la déprise protestante.
      As both the capital of Protestantism (1562-1568) and the first front of the Catholic reconquest (1568-1572), Orléans experienced, one after the other, all the forms of biconfessional life in the city: Protestant domination (April 1562-March 1563 and September 1567-March 1568), then Catholic domination (from March 1568); peaceful coexistence (March 1563-September 1567), then violent confrontation (1568-1572), culminating in the St Bartholomew's Day massacre. The events seen throughout the kingdom of France over the long period of the Wars of Religion were played out in Orléans in an accelerated and unparalleled form: the transition from the hopes for a French Reformation to the dispossession of the Huguenots. This paper aims to investigate the failure of reforms by examining the issues of space, making the urban landscape not just a setting, but also a decisive player in religious conflict and the Protestant defeat.
  • Lectures