Contenu du sommaire : La rose et Les Verts

Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Numéro no159, juillet-septembre 2023
Titre du numéro La rose et Les Verts
Texte intégral en ligne Accès réservé
  • Articles

    • Chantiers pour une histoire environnementale des années Mitterrand - Renaud Bécot, Christophe Bonneuil p. 3-28 accès réservé
    • La convergence impossible ? : Le gouvernement Rocard et les écologistes - Pierre-Emmanuel Guigo p. 29-44 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le gouvernement Michel Rocard, avec notamment comme ministre de l'Environnement Brice Lalonde, a marqué une volonté de rapprochement entre le PS et Les Verts. Mais l'aspect essentiellement technocratique des mesures portées par le gouvernement ne parviennent pas à convaincre Les Verts qui refusent toute entente et critiquent avec virulence l'action du gouvernement et notamment celle de Brice Lalonde. En dépit d'une action importante à l'échelle nationale (pots catalytiques, renforcement du ministère, création de l'ADEME, protection de la Loire, etc.) et internationale (conférence de La Haye sur la protection de la planète, protection de l'Antarctique), celle-ci ne permettra pas un rapprochement avec le principal mouvement d'écologie politique jusqu'à ce que le grave échec politique de la gauche aux élections législatives de 1993 rebatte les cartes.
      The Michel Rocard government, notably with Brice Lalonde as Minister of the Environment, demonstrated a desire for closer relations between the French Socialist Party and The Greens. But the essentially technocratic aspect of the government's measures failed to convince The Greens, who rejected any agreement and virulently criticized the government's actions, particularly those undertaken by Brice Lalonde. Despite significant movement at the national level (regarding catalytic converters, strengthening the ministry, the creation of ADEME (the French Environment and Energy Management Agency), the protection of the Loire, etc.) and at the international level (The Hague Climate Change Conference, the protection of Antarctica), this convergence with the main political ecology movement would not occur until the serious political failure of the Left in the 1993 legislative elections changed the playing field.
    • La défense de la nature et le champ du pouvoir : Le droit de l'environnement et les premières années Mitterrand (1981-1986) - Jean Bérard p. 45-59 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'article étudie les politiques environnementales mises en place dans les premières années de l'alternance de 1981 à travers l'évolution du droit de l'environnement, au double sens du droit positif, inscrit dans un ensemble de normes et de jurisprudences, et de sa mise en discussion dans la doctrine juridique. Il montre la manière dont les juristes spécialisés poursuivent la structuration d'un espace d'avant-garde dans le champ juridique et la formulation d'une doctrine sur ce que devraient être les normes de protection de la nature. Leurs espoirs de réforme sont déçus et ils s'affrontent à la pression mise sur les normes environnementales au nom de la croissance et de la compétitivité, de manière accrue après le tournant de la rigueur.
      This article investigates the environmental policies implemented in the early years of the Mitterrand socialist government (1981-1986) through the evolution of environmental law, examined from the two-fold perspective of positive law, enshrined in a body of legal texts and case law, and its examination in legal doctrine. It shows how specialized legal experts attempted to structure an avant-garde space in the legal field and to elaborate a doctrine on what laws for nature protection should look like. Their hopes for reform were dashed, however, and they were forced to contend with the pressure put on environmental laws in the name of growth and competitiveness, even more so after the emergence of austerity measures.
    • La centrale nucléaire du Carnet : Un projet contesté des années Mitterrand (1981-1997) - Anaël Marrec p. 61-77 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le projet de centrale nucléaire de Basse-Loire, formulé par EDF en 1974 et abandonné en 1997, est singulier en France par son étendue temporelle. Il constitue un lieu privilégié pour observer les transformations des mobilisations antinucléaires sous la présidence de François Mitterrand. Contesté au Pellerin par les élus socialistes locaux, il est suspendu en 1981 puis transféré 15 kilomètres en aval, au Carnet. Il est alors progressivement défendu par le PS au niveau départemental, mais aussi constamment contesté. Son histoire montre le positionnement fluctuant des élus nationaux et locaux et des militants PS, ainsi que leurs relations avec les mobilisations antinucléaires. Elle témoigne aussi des transformations de l'industrie nucléaire française, du programme d'équipement des années 1970-1980 au redéploiement autour de l'EPR (European Pressurized Reactor) à la fin du siècle.
      The Loire estuary nuclear power plant project, elaborated by EDF (the French national electrical company) in 1974 and abandoned in 1997, stands out in France for its temporal scope. It is therefore an ideal vantage point from which to observe the changes in anti-nuclear mobilization that occurred during François Mitterrand's presidency. Initially contested in Le Pellerin by local Parti Socialiste (Socialist Party) officials, the project was suspended in 1981 and moved 15 kilometers downstream to Le Carnet. It was then slowly defended by the same Socialist officials at the regional level, but also constantly attacked. Its history shows the fluctuating positions of national and local officials, and Socialist activists, as well as their relationship to anti-nuclear movements. It also bears witness to transformations in the French nuclear industry, from the equipment program in the 1970s-1980s to the reallocation of resources to support the EPR (European Pressurized Reactor) at the end of the century.
    • Genèse et abandon d'une politique climatique : France, 1988-1992 - Christophe Bonneuil p. 79-95 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'enjeu climatique, qui s'affirme à l'agenda mondial dans les années 1980, suscite en France une politique ambitieuse impulsée à partir de 1988 par le ministre de l'Environnement Brice Lalonde et le Premier ministre Michel Rocard. Les années 1988-1991 connaissent un réel volontarisme dans l'action publique pour préserver le climat : initiatives diplomatiques, objectifs chiffrés de réduction des émissions, promotion de l'écotaxe sur le carbone et l'énergie comme nouvel instrument politique, etc. Toutefois, les entreprises pétrolières françaises Elf et Total (aujourd'hui regroupées dans TotalEnergies) répondent à ces initiatives par une diplomatie concurrente dans les arènes internationales et européennes et par un important travail de fabrique du doute et de lobbying. 1991-1992 marque déjà l'abandon des principales ambitions climatiques arbitrées en 1989-1990. Cette genèse, cette contestation et cet abandon de la première politique française face au réchauffement climatique sont éclairées en croisant archives publiques, privées et entretiens.
      The issue of climate change, which became a global agenda item in the 1980s, gave rise to an ambitious policy in France from 1988 onwards, spearheaded by Environment Minister Brice Lalonde and Prime Minister Michel Rocard. Between 1988-1991, the country saw real momentum in support for public actions to safeguard the climate (diplomatic initiatives, quantified emission reduction targets and the promotion of an eco-tax on carbon and energy as a new policy instrument). However, the French oil companies Elf and Total (now grouped together as TotalEnergies) responded to these initiatives with competing diplomacy in international and European arenas and major efforts to sow doubt and engage in lobbying. By 1991-1992, the main climate ambitions agreed in 1989-1990 had already been abandoned. The emergence, contestation, and demise of France's first climate policy are elucidated by combining public and private archive material and interviews.
    • « L'angoisse d'un pays devant la mort des forêts » : La controverse politico-environnementale des pluies acides durant les premières années Mitterrand - Alexandre Lauverjat p. 97-110 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cette contribution revient sur l'éclosion de la controverse politique, scientifique et environnementale du dépérissement des forêts attribué aux pluies acides à l'aube des années 1980. L'article insiste tout d'abord sur les conditions d'apparition de la polémique en remontant à sa source, avec une analyse détaillée des discours outre-Rhin concernant le Waldsterben, c'est-à-dire l'hypothèse d'une mort des forêts en lien avec la pollution transfrontalière acide. L'auteur met ensuite en parallèle les réactions engendrées par le dépérissement des forêts côté français et allemand et s'intéresse aux ramifications de cette controverse au sein de l'administration du premier septennat de François Mitterrand en se concentrant sur les divergences d'opinion sur fond de compétition institutionnelle. Ces différends à bas bruit contrastent avec le conflit ouvert entre le secrétariat d'État aux Forêts et les syndicats de l'Office national des forêts (ONF), les deux administrations ne parvenant pas à se mettre d'accord sur le diagnostic à poser ni sur les solutions à proposer. Enfin, l'article montre comment le président Mitterrand cherche à dépasser ces clivages en proposant l'organisation d'une conférence internationale dédiée à la sauvegarde et protection des forêts, dite SILVA. Cette démonstration de force diplomatique constitue le point d'orgue de la publicisation des pluies acides dans les années 1980, avant un reflux face à l'émergence d'autres menaces environnementales.
      This paper examines the emergence of the political, scientific, and environmental controversy surrounding forest dieback attributed to acid rain at the start of the 1980s. This article first looks at the conditions surrounding the birth of this controversy, tracing it back to its source, with a detailed analysis of the discourse across the Rhine concerning Waldsterben (forest dieback), or the hypothesis that the forests were dying as a result of cross-border acid pollution. The article then draws parallels between the reactions to forest dieback on the French and German sides and explores the ramifications of this controversy within the administration during François Mitterrand's first seven years in office, focusing on the differences of opinion against a backdrop of institutional competition. These low-profile differences contrast with the open conflict that reupted between the Secretary of State for Forests and the unions of the National Forestry Office (Office nationale des forêts), as the two administrations were unable to agree on the diagnosis to be made or the solutions to be adopted. Finally, the article shows how President Mitterrand sought to overcome these divisions by proposing an international conference dedicated to safeguarding and protecting forests, known as the SILVA conference. This diplomatic show of strength was the high point of the publicity surrounding acid rain in the 1980s, before a decline in the face of the emergence of other environmental threats.
    • La santé des fonctionnaires sous les années Mitterrand : Lutte pour la création d'un CHS au sein d'un bâtiment amianté - Renaud Bécot, Clémentine Comer, Gabrielle Lecomte-Ménahès, Anne Marchand, Pierre Rouxel p. 111-126 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Par le croisement de différentes sources (des archives syndicales et ministérielles et des entretiens menés avec d'ancien·nes agent·es du bâtiment administratif du Tripode, à Nantes), cet article contribue à une histoire sociale des fonctionnaires, encore peu renseignée sous l'angle des atteintes à leur santé. Les enjeux relatifs à la mise en place des comités d'hygiène et de sécurité (CHS) dans la fonction publique y sont discutés dans le contexte particulier des projets de « modernisation » des administrations publiques au cours des années Mitterrand, tout en éclairant la mise à l'agenda du risque amiante auxquels sont exposé·es des fonctionnaires.
      By cross-referencing various sources (trade union and ministerial archives, and interviews with former employees of the Tripode administrative building in Nantes), this article contributes to a social history of civil servants, an area which is still poorly documented from the point of view of health threats. The issues involved in setting up Hygiene and Safety Committees in the public administration are discussed in the specific context of the “modernization” of civil service during the Mitterrand years, while also shedding light on the asbestos risk to which civil servants were exposed.
    • Décoloniser les montagnes ? Genèse de la loi Montagne (9 janvier 1985) : Entre exploitation, protection et démocratie directe - Steve Hagimont p. 127-142 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article revient sur le processus d'élaboration de la loi Montagne pour essayer de comprendre comment, après des années 1970 ponctuées de fortes mobilisations environnementales et les ambitions écologiques affichées par les socialistes, la loi finalement votée a pu faire primer les questions de développement sur celles de protection. Une partie de la réponse vient de la place prise par la rhétorique anticolonialiste assimilant, à partir d'un récit historique simpliste, la montagne à un territoire colonisé par la France urbaine et par ses lubies écologistes. Si la loi intègre certains des mots d'ordre des mobilisations sociales et écologistes des années 1970, les discussions avec les élus, les administrations et le monde socio-professionnel entre 1982 et 1985 vident peu à peu les mots de leur substance et entérinent une opposition arbitraire entre une écologie « citadine » et les intérêts des « montagnards ».
      This article looks back at the process by which the loi Montagne (the French Mountain Act) was drafted, to understand how, after the strong environmental protests and the ecological ambitions declared by the Socialists during the 1970s, the law that was finally passed prioritized development issues over protection. Part of the answer lies in the anti-colonialist rhetoric that, based on a simplistic historical narrative, equated the mountains with a territory colonized by urban France and its faddish environmentalist concerns. Although the law incorporated some of the buzzwords of the social and environmental movements of the 1970s, the discussions with elected representatives, administrations, and the socio-professional world between 1982 and 1985 gradually sapped the words of their substance and confirmed an arbitrary opposition between the ecology of “city-dwellers” and the interests of “mountain dwellers.”
  • Source

    • Délivrée, vérifiée, confisquée : La carte du Komsomol de Staline à Khrouchtchev - Yoanna Chesnot p. 143-160 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      En partant d'une approche inédite de la matérialité de la carte du Komsomol, l'article s'intéresse aux multiples dimensions d'un objet politique de 1930 à 1964. Il explore tout d'abord les modalités de sa mise en circulation, de sa fabrication à sa délivrance. Il s'attache ensuite aux ressorts qui font de la carte un instrument de contrôle de la jeunesse sous Staline puis de surveillance sous Khrouchtchev. Enfin, l'article se penche sur l'évolution de la valeur symbolique de la carte d'une période à l'autre, en traversant la Seconde Guerre mondiale. Ce faisant, il permet d'observer comment la carte devient tour à tour un objet totem, fétiche, puis trivial à la faveur d'une politique de la jeunesse toujours plus inclusive. Accompagnant les mutations politiques, l'objet qui était la marque d'un communisme militant se transforme en agent de la soviétisation et du conformisme pour des générations de jeunes Soviétiques.
      Focusing on the materiality of the Komsomol membership card, this article explores the many dimensions of this political object from 1930 to 1964. First, it explains how the card was put into circulation, from manufacture to issue. The article then analyzes how the card became an instrument of youth control under Stalin and then of surveillance under Khrushchev. Finally, the article explores how the symbolic value of the card changed from one period to the next, as it survived the transition through the Second World War. The card became a totem, a fetishized object and then a trivial one in the wake of an increasingly inclusive youth policy. As the political situation changed, an object that had been the hallmark of militant communism was transformed into an agent of sovietization and conformity for generations of young Soviets.
  • Enjeu

    • Les relations entre recherche historique et enseignement universitaire de l'histoire : Enjeux pédagogiques et historiographiques - Sylvain Doussot, Nadine Fink p. 161-173 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      En quoi les compétences et les expériences de recherche d'un historien peuvent-elles soutenir ses choix pédagogiques, lorsqu'il s'agit d'enseigner les savoirs produits et les pratiques qui sous-tendent leur production ? Cette question est traitée selon une approche didactique par le biais de la notion de configuration historiographique qui modélise la pratique de recherche historique en articulant les questions, les sources et les schémas d'analyse. Elle permet de saisir les rapports entre les connaissances des étudiants et les savoirs visés par l'enseignant, et entre les modalités différentes de manipulation de ces trois composantes par les étudiants et les historiens. L'analyse est illustrée par le cas d'un cours en deuxième année de licence.
      How can a historian's research skills and experiences support his or her pedagogical choices when it comes to teaching the knowledge produced and the practices that underlie its production? This question is addressed from a didactic perspective through the notion of historiographical configuration, which models the practice of historical research by connecting questions, sources, and patterns of analysis. It allows us to grasp the relationships between students' knowledge and the knowledge intended for dissemination by the teacher, as well as between the different ways in which these three components are handled by students and historians. This analysis is illustrated by the case study of a second-year undergraduate course.
  • Rubriques