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Titre Violence et luttes religieuses dans la Confédération polono-lithuanienne (fin XVIe - milieu du XVIIe siècle) : l'exemple de la confrontation entre uniates et orthodoxes
Auteur TATARENKO LAURENT
Mir@bel Revue Revue historique
Numéro no 648, octobre 2008
Page 857-890
Résumé À l'époque des Réformes, la Pologne-Lithuanie fut fréquemment décrite comme le royaume de la « tolérance » – loué ou dénoncé par les contemporains eux-mêmes – sur les marges d'une Europe déchirée par les luttes confessionnelles. Cette image fait oublier que la Confédération ne fut pas totalement exempte de conflits sanglants, avant même les crises des années 1640-1660. Parmi les divers assauts portés contre la pratique de la coexistence religieuse à partir de la fin du XVIe siècle, l'exemple de la communauté ruthène de rite grec permet de saisir certains processus responsables d'une telle transformation. Marqués par l'expérience de l'Union de Brest (1595) – tentative locale de rapprochement institutionnel entre les christianismes grec et latin –, les Ruthènes succombèrent peu à peu aux fissures internes, issues du refus ou de l'acceptation de la communion avec Rome, qui débouchèrent sur des épisodes violents. Hommes d'Église et laïcs s'engagèrent dans un jeu complexe, destiné à défendre la légitimité exclusive de leur choix d'obédience. Toutefois le clergé fut désigné comme le premier responsable de la division et devint la cible privilégiée des tensions. Dans les années 1610, l'évolution du contexte sociopolitique et le rôle pris par les cosaques dans le camp orthodoxe firent basculer les rapports de force et laissèrent davantage de place à l'affrontement direct. Les atteintes à la vie des clercs révélaient ainsi la construction progressive d'un imaginaire de l'ennemi et du « traître » dans la foi, devenu le miroir des craintes eschatologiques des fidèles. Cette intrusion de la violence dans le débat religieux sut produire un langage symbolique, exprimé dans les actions spontanées des assaillants et évoqué à plusieurs reprises dans les écrits des protagonistes du conflit. Elle servit également à faire apparaître et à creuser davantage le fossé confessionnel entre uniates et orthodoxes, là où les pratiques cultuelles préservaient encore l'illusion d'unité.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais At the age of religious Reformations, Polish-Lithuanian space was frequently described as kingdom of « tolerance » – praised or condemned by contemporaries themselves – on borders of Europe tormented by confessional struggles. Such picture misses the idea that the Commonwealth was not absolutely free from bloody conflicts, even before crises of 1640-1660 decades. Among various assaults against the experience of religious coexistence since the end of the 16th Century, the example of Greek rite Ruthenian communities allows to overtake some processes responsible for such transformation. Affected by the Union of Brest (1595) – a local attempt of institutional rapprochement between Greek and Latin christianities – Ruthenians acceded to some internal cracks, generated by refusal or reception of the communion with Rome, which led to various cruel incidents. Ecclesiastics and laymen entered a complex game to defend exclusive legitimacy of their choice of obedience. Nevertheless, the clergy was appointed as the first responsible for division and became the main target of troubles. From the 1610th, evolutions of sociopolitical context and the role taken by cossacks in orthodox camp changed the force ratio and gave more places to direct collisions. Thus, attempts on clergymen lives revealed gradual construction of a shaped consciousness of the enemy and « traitor » in faith, serving as a mirror of eschatological fears of believers. This intrusion of violence into religious disputes managed to use a symbolical language, apparently expressed in spontaneous actions of assailants and repeatedly mentioned in various writings of conflict protagonists. It also promoted showing up and deepening of a religious ditch, between Uniates and Orthodox Churches, where cult practice was still insuring an illusion of unity.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=RHIS_084_0857