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Titre La planification comme processus d'apprentissage. Le cas soviétique
Auteur Aleksander Smolar
Mir@bel Revue Revue d'études comparatives Est-Ouest
Numéro Vol. 9, 3, 1978
Rubrique / Thématique
Articles
Page 63-111
Résumé On peut considérer les plans comme une sorte d'expérimentation basée sur les hypothèses fournies par les prévisions. Dans cette optique le processus de planification peut être vu comme un processus d'apprentissage, où les différents acteurs économiques arrivent à mieux connaître leurs propres préférences, les méthodes de planification, les contraintes économiques, les possibilités d'actions, etc. Si l'on analyse la planification soviétique dans cette perspective on constate une certaine anomalie : d'un plan quinquennal à l'autre, on peut observer le même type de changement dans l'exécution des plans par rapport aux projets initiaux. D'une manière générale, la non-exécution permanente du plan de l'efficacité de l'utilisation des ressources, tant matérielles qu'humaines, entraîne d'une part l'exécution ou même le dépassement du plan du côté de l'input et d'autre part, la non-exécution quasi permanente des plans de consommation ? individuelle et collective ? de ceux du salaire réel, de la construction des logements, etc. On peut chercher l'origine de ce phénomène dans les objectifs particuliers des plans soviétiques (mobilisation des agents économiques) et dans le pouvoir « négatif » des exécutants des plans, pouvoir basé sur le contrôle de l'information. Cette interprétation traditionnelle ne nous paraît pas satisfaisante. A notre avis, le phénomène de l'incapacité d'apprentissage du planificateur soviétique peut être expliqué par le fait que l'allocation des ressources retenue dans le plan signifie en même temps l'allocation des avantages et du mécontentement sociaux. Cet aspect politique de la planification peut expliquer l'absence de véritables choix dans les plans à moyen terme (on prévoit toujours la diminution de tous les inputs et l'augmentation de tous les outputs). Cette fuite devant les décisions qui se traduit par une planification toujours trop optimiste constitue un moyen de gestion des conflits. Les véritables choix économiques se font au cours de l'exécution des plans. Le champ de manœuvre du planificateur est alors considérablement limité ; ses décisions sont imposées en quelque sorte par les circonstances. La hiérarchie des priorités que l'on peut déduire à partir des résultats obtenus est l'effet tant des processus spontanés mis en marche par l'incohérence du plan que des choix conscients du planificateur faits au cours de l'exécution du plan. Cette hiérarchie est toujours très différente de celle qu'on peut déduire des déclarations officielles et des plans initiaux.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais Economie Planning as a Process of Apprenticeship: the Soviet Case. Economic plans can be considered as experiments based on hypotheses founded on previsions. In this light economic planning procedures appear as a learning process by which the different actors on the economic scene can become familiar, their own preferences, planning methods, economic constraints, the possibility of action, etc. If Soviet economic planning is analysed from this viewpoint a certain inco- herency appears: from one five year plan to the next the same type of changes in the plans, as compared to the initial projects, may be observed. In general the chronic non fulfilment of the plan designed for the efficient use of resources (both human and material) induces fulfilment or over-fulfilment of the plan in terms of input as well as the chronic failure to execute the plans for individual and collective consumption, to increase earning power or the number of lodgings etc. The origin of this can be sought within the special targets of Soviet planning (the mobilization of the economic agents) and in the "negative" force of the power behind the plan, power based on the control of information. This traditional interpretation does not appear to be conclusive. In our opinion the incapacity of the soviet planner to master his apprenticeship can be attributed to the fact that the allocation of the resources specified in the plan also signifies an allocation of advantages and social miscontent. This political aspect of planning could explain the absence of real choices in the middle-term plans (previsions always indicate the decrease of all inputs and the increase of all outputs). This running away from decisions which materializes in setting an overly optimistic plan is a way to arbitrate conflicts. The real economic choices are made in the course of the execution of the plans. The planners freedom of movement is considerably limited at this phase and its decisions are imposed, so to speak, by circumstances. The hierarchy of priorities which can be deduced from the results obtained is as much the effect of spontaneous processes, set in action by the incoherency of the plan as of the conscient choices of the planner made in the course of executing the plan. This hierarchy is always very different from that which can be deduced from official statements and initial plans.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_1978_num_9_3_2181