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Titre Devenir Français : pourquoi certains jeunes étrangers y renoncent ?
Auteur Salvatore Palidda, Maurizio Catani
Mir@bel Revue Revue Européenne des Migrations Internationales
Numéro Vol. 5, no 2, 1989
Rubrique / Thématique
Articles
Page 89-106
Résumé En France, le Code de la nationalité stipule l'attribution de celle-ci parmi d'autres formes d'acquisition, par le droit du sol. Ce cadre législatif permet de mettre en lumière des contradictions importantes dans le « sentiment d'appartenance » des enfants d'immigrés. Alors que la plupart d'entre eux se soumettent à cette règle de droit parce qu'ils n'envisagent pas une « migration à rebours », ceux qui choisissent la nationalité des parents certes pour des raisons d'opportunité mais aussi pour des raisons de fidélité, sont confrontés à la nécessité institutionnelle d'expliciter une double appartenance que l'autre catégorie, bien plus nombreuse, vit uniquement dans la sphère du privé. L'enquête effectuée sur un échantillon représentatif de renonçants (Italiens, Portugais, Espagnols, Marocains) montre que même dans le cas des Espagnols, les plus attachés à leur choix de nationalité, près des deux tiers ne pensent pas quitter la société française où ils ont été socialisés et où ils envisagent de se marier et de travailler. Il en découle une séparation entre choix d'appartenance nationale et adhésion à la société de résidence : situation qui rentre en contraste avec l'allégeance exclusive que suppose, aujourd'hui, la nationalité. Mais, en même temps, 59 % des jeunes renonçants se disent désireux d'avoir la double nationalité. Celle-ci leur apparaît, au plan du travail, comme une possibilité de jouer sur deux appartenances selon les circonstances et, au plan psychologique et social, comme une façon de résoudre les tensions produites par le choix univoque qu'ils ont dû effectuer. Comme les non-renonçants aussi souhaitent la double nationalité, une interprétation anthropologique déduit de cet ensemble de faits que les représentations étatiques de l'allégeance exclusive ont vécu. Désormais, au plan des représentations et des idées, la valeur englobante est l'accomplissement du sujet qui, en principe sinon en pratique, subordonne l'Etat-nation au devenir de l'Individu.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais French law provides that nationality may be acquired by birth, among other methods. Taking the legislative framework into account points at dramatic contradictions in the way children of migrant parents feel they « belong ». While most of them yield to that legal rule because they cannot think of « migrating back », those who, out of opportunism, but also out of truthfulness, choose the nationality of their parents, are compelled by institutions to make their double belonging clear, while the other, much more numerous, category just lives it privately. A survey made on a representative sample of young Italians, Portuguese, Spaniards and Moroccans who renounced becoming French, shows that even in the case of Spaniards — the keenest about their national choice — almost two-thirds do not consider leaving France, where they were socialized, and where they think they will marry and work. That result emphasizes a split between choosing a nationality and keeping in harmony with the society one lives in, a situation which contrasts with an exdusively national feeling which the idea of nationality is supposed to express. But 59 % of the young people who renounce also say that they would like to have both nationalities. To them, it appears as an opportunity to take advantage of, in the field of employment, and as a way to deal psychologically and socially with tensions produced by the univocal choice which they were compelled to make. Since those who do not renounce also wish to enjoy both nationalities, one is entitled to conclude from all these findings, and using an anthropological interpretation, that the statist image of exclusively national citizens is out of date. In the field of ideas and images, the all-embracing value has now become individual accomplishment which, in principle if not in practice, subordinates the nation-state to individuals and their future.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1989_num_5_2_1020