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Titre La présence française dans la culture malgache
Auteur Chantal Crenn
Mir@bel Revue Revue Européenne des Migrations Internationales
Numéro Vol. 11, no 3, 1995
Rubrique / Thématique
Articles
Page 167-192
Résumé 50 000 Malgaches, venus essentiellement des Hauts-Plateaux, vivent en France formant ce que l'on a pu appeler une migration silencieuse. Est-ce à dire qu'ils sont assimilés ? C'est à travers l'histoire des relations franco-malgaches que l'on pourra répondre à cette question et faire apparaître la nature spécifique de l'émigration malgache en France. Du fait de la colonisation, les relations des malgaches à la France se sont établies sur un schéma d'attirance-répulsion. Les Mérinas, élite, cultivée, sont fascinés par la culture française, mais, anciens dominants de l'île, ils supportent mal la situation de soumission que leur impose la colonisation. Critique de l'ancienne puissance et participation à des mouvements nationalistes cohabitent avec le choix de la France pour études et comme terre de repli. Les raisons qui poussent les Malgaches vers la France tiennent essentiellement à leur tradition culturelle qui exige des études poussées et au domaine social et économique. Raisons qui perdurent de l'époque coloniale au gouvernement de Zafy en passant par le régime de Ratsiraka. L'arrivée en France débute presque toujours par une déception, une crise identitaire dues au choc entre la France "héritée" et "rêvée" et la réalité. N'étant pas reconnus d'emblée comme des pairs par la société française, les Malgaches sont offensés d'avoir à prouver leur valeur. De plus, la perte de leur prestige et d'une certaine aisance économique fait qu 'ils se sentent déclassés. Ils vivent alors la France comme un monde hostile et sont tentés par un repli sur leur propre communauté. Mais une fois passé le choc de la découverte de leur position d'étrangers, les Malgaches reprennent leur mouvement vers la société d'accueil afin de reprendre leur ascension personnelle et de mieux bénéficier de la culture environnante. Le groupe est mis en sourdine, les cercles amicaux se diversifient, certaines valeurs considérées comme typiquement malgaches sont mises à distance sans toutefois renier la personnalité ethnique et l'attachement à la culture malgache. C'est une intégration sans déculturation. Faire des études et venir en France apparaissent donc comme deux éléments de l'identité malgache fortement enracinés dans leur histoire et liés à leur avenir comme moyen de conserver (ou retrouver) un statut social et économique en rapport avec celui des anciens.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais 50 000 Malagasies, most of them from Imerina (the central part of Madagascar) are now living in France, and constitute what has been called a silent migration. But does that mean that they are assimilated? It is through the history of French-Malagasy relations that we can answer that question, and show the specific character of Malagasy emigration to France. Because of their colonial history there is an attraction / repulsion relationship between Malagasies and France. The Merinas, as a sophisticated elite, are captivated by French culture, but as the former rulers of the island they have great difficulty in accepting colonial domination. Criticism of the former power and participation in nationalist movements cohabit with the choice of France as a place to study or retire. The attraction exerted by France on Malagasies is either economic and social or else lies in their cultural traditions, which place great value on higher education. These reasons survived from colonial times through the Ratsiraka regime and the Zafy government. For a Malagasy, arrival in France usually brings disillusionment and an identity crisis, both caused by the gap between their inherited dreams of France and the cold reality. Not being at once recognized as peers by French society, Malagasies find it offensive to be obliged to prove their value. This loss of prestige and of part of their economic welfare makes them feel declassé. So they live in France as in a rather hostile world and are tempted to withdraw into their own community. But once the shock of discovery of their position as strangers is absorbed, Malagasies continue in their movement towards the host society in order to achieve personal success and to maximise the benefit they can receive from French culture. The group is devalued, they acquire different friends, and some of the typically Malagasy values are kept at a distance. However they do not repudiate their ethnic personality or the attachment to Malagasy culture. It is an integration without loss of culture. Coming to France and acquiring an education can be seen as distinct elements of the Malagasy identity, strongly rooted in their history and linked to their future as ways of preserving -or rediscovering- a social and economic status in relation to that of their forebears.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1995_num_11_3_1483