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Titre Au-delà des États-nations : des sociétés de migrants
Auteur Alain Tarrius, Marie-Antoinette Hily, Jacqueline Costa-Lascoux
Mir@bel Revue Revue Européenne des Migrations Internationales
Numéro Vol. 17, no 2, 2001 Débats contemporains
Rubrique / Thématique
Débats contemporains
Page 37-61
Résumé La forme territoriale historique de l'État-nation, entièrement maillée par les grandes institutions politiques, économiques et sociales, est renégociée par des collectifs de migrants désignés comme « ethniques » ; ceux-ci développent, à distance des codes, lois et réglementations des échanges économiques internationaux, des initiatives commerciales collectives de grande ampleur. Les solidarités fortes qui précèdent et permettent ces déploiements inversent les problématiques de la mondialisation et suggèrent l'existence d'un autre processus de globalisation où les liens sociaux forts ne sont pas seconds, « encastrés » dans les continuités et complémentarités redevables en premier lieu de compétences techniques. Ces initiatives économiques collectives, assorties de gestations de territoires autres transversaux aux États-nations, ont engendré des rapports sociaux nouveaux qui présentent la singularité d'effacer les hiérarchies des préséances sédentaires locales, fondatrices des légitimités identitaires, au bénéfice des savoir-circuler, des multi-appartenances. Des territoires originaux apparaissent donc, dessinant les contours fluides, mobiles, de sociétés de migrants structurées, affirmant un pouvoir de plus en plus évident du nomade sur le sédentaire, dans nos vieilles sociétés de la fixité, de l'enracinement au lieu. Ainsi émergent des confins troubles en Europe, à partir de ses alentours : là, normes et lois sont négociées, contournées, dans les incertitudes accompagnant l'inadaptation des États-nations à gérer leurs sociétés, entre espaces mondiaux, espace européen - Schengen -, et espaces régionaux. L'article, prenant à témoin des recherches menées par l'auteur depuis 1995, de Marseille au Maghreb, par les voies terrestres d'Espagne, décrit les caractéristiques de ces nouvelles formations sociales, l'originalité des statuts et des hiérarchies qu'elles engendrent, la nature des réseaux, ouverts ou mafieux, qui les parcourent, les effets civilisationnels des accords de parole, mais encore les exploitations sordides qu'elles hébergent et les frontières nouvelles qu'elles instituent.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais "Ethnic" collectives of migrants renegotiate the territorial and historical form of the Nation-state, which is integrally linked by big political, economic, and social institutions. They develop - far from the codes, laws and rules that govern international economic exchanges - large-scale collective commercial initiatives. The strong solidarities that direct and permit these expansions transform the globalization debate and suggest the existence of another process of globalization where strong social ties are not of secondary importance or "inserted" into the continuities and complementarities indebted in the first place to technical competences. These collective economic initiatives, permitted by the birth of unique transversal territories in contrast to Nation-states, have engendered new social relationships that present the singularity of erasing hierarchies of local sedentary privileges (which are responsible for enforcing the legitimacy of members' identities), to the benefit of those who know how to « go with the flow » - those who have multiple organizational memberships. Original territories, therefore, appear to be drawing fluid, mobile contours around structured societies of migrants, affirming power that is more and more evident to the nomad about those who are sedentary, that our old societies engender fixity and rooted-ness in relationship to place. Subsequently, nebulous confines emerge in Europe within its environs : there, norms and laws are negotiated and bypassed with the incertitude that accompanies the inadaptability of Nation-states to manage their societies between global spaces, European-Schengen spaces, and regional spaces. The article, describing the author's research since 1995 from Marseille to the Maghreb by Spanish land routes, relates the characteristics of these new social formations, the originality of the statutes and hierarchies that they engender, the nature of networks (open and mafiosi) that define them, the civilizational effects of verbal agreements, but also the sordid exploitations that they foster and the new borders that they produce.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_2001_num_17_2_1778