Contenu de l'article

Titre Élections, légitimité politique et stabilité dans les Balkans : le lien manquant
Auteur Nadège Ragaru
Mir@bel Revue Revue d'études comparatives Est-Ouest
Numéro vol 34, no 1, mars 2003
Page 83
Résumé Depuis plus d'une décennie, la communauté internationale semble avoir placé ses espoirs de stabilisation politique en Europe du Sud-Est dans l'organisation, sous supervision internationale, de scrutins électoraux. Au fil des années, ces consultations électorales mobilisent cependant un nombre décroissant d'électeurs. Maints arguments ont été avancés pour expliquer les taux d'abstention élevés, les désillusions devant des réformes au coût social élevé, les pratiques clientélaires des élites partisanes, voire la trop grande fréquence des appels à l'arbitrage populaire. Par-delà ces constats, nul n'a, semble-t-il, songé à interroger l'un des principaux postulats des politiques d'aide à la démocratisation à l'Est, à savoir l'assimilation du vote à une « potion » démocratique censée lier les citoyens à leurs élus dans l'acte même de la délégation d'autorité et, partant, favoriser l'adhésion populaire à la démocratie. Il y a pourtant bien crise du vote, aujourd'hui, dans sa capacité à conférer aux élites politiques mandat et légitimité. Partiellement disqualifiés, dans les régions sous administration internationale, par une externalisation de la décision vers les responsables de la communauté internationale, les gouvernants sont également fragilisés par leur incapacité, en période d'austérité macroéconomique, à proposer à leur électorat des projets politiques porteurs de dividendes sociaux. Les années 1990 ont donc vu les alternances se multiplier sans que les électeurs aient le sentiment de disposer d'alternatives. Dès lors, le miracle de la conversion, par l'élection, des préférences individuelles en choix collectifs favorisant l'allégeance aux systèmes établis n'opère plus. La réitération des procédures électorales, simple traitement comportemental, ne suffira pas à résoudre le problème.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais For more than a decade now, the international community seems to have placed its hopes for political stabilization in Southeastern Europe in organizing, under international supervision, elections. Over the years, voter turnout has declined. Among the many arguments used to explain this trend are : disillusionment with reforms that bear a high social cost, the patronage practices of party elites and, even, the frequency of elections. No one seems to have thought of questioning one of the major postulates underlying policies for democratizing Eastern Europe. This postulate likens voting to a democratic "potion" that links citizens to elected officials via a delegation of authority and thus generates support for democracy. Given this voting crisis however, questions arise about whether elections confer legitimacy on political elites and entitle them to hold office. Partly disqualified in areas under international administration, since decision-making is externalized toward leaders from the international community, elected officials are also fragile owing to their inability, during a period of macroeconomic austerity, to propose to voters political programs with social dividends. During the 1990s, parties have alternated more often in power, but voters still do not feel that they have any alternative. Hence, the miracle of elections converting individual preferences into collective choices that generate allegiance to established systems no longer works. The repetition of elections, a mere behavioral treatment, cannot suffice to settle this problem.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne https://www.persee.fr/doc/receo_0338-0599_2003_num_34_1_1597