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Titre À l'assaut des théories du développement : regards francophones sur les succès asiatiques
Auteur Philippe Régnier
Mir@bel Revue L'Homme et la société
Numéro no 165-166, 3e et 4e trimestre 2007 Requêtes identitaires
Page 189-204
Résumé Le décollage des pays d'Asie orientale à partir des années 1960-1970 a ébranlé le concept de Tiers-Monde. Il a aussi remis en cause la perception du sous-développement à l'heure des décolonisations et des indépendances, et au fur et à mesure que le phénomène asiatique s'est étendu jusqu'à nos jours, à une échelle inégalée dans l'histoire de l'humanité. Ce phénomène a été analysé essentiellement par des organisations internationales comme la Banque Mondiale ou l'OCDE, par des chercheurs anglo-saxons, et quelques japonais rarement traduits. La contribution francophone n'est pas restée totalement en marge de cette production scientifique internationale, mais sa reconnaissance des « miracles » asiatiques comme interpellations des théories du développement a été discrète et tardive. Elle s'est orientée autour de quelques auteurs dans une analyse fortement concentrée sur le concept de l'État-développeur et sur une réfutation de la seule prédominance des forces du libre marché. Cette contribution n'a guère trouvé de second souffle à la faveur de la crise financière asiatique de 1997-1998. Alors que s'ouvrait un grand débat international sur les crises possibles de la mondialisation, elle est restée presque muette sur les vertus et les limites des stratégies de « rattrapage » adoptées par les États-développeurs asiatiques durant les « Trente glorieuses » (1960-1990) et sur leurs capacités à redéfinir leurs modes de mobilisation des ressources nationales et de redistribution des fruits d'une croissance graduellement retrouvée à partir de l'an 2000.Si l'obsolescence du concept de Tiers-Monde semble se confirmer définitivement au seuil du XXIe siècle avec la montée en puissance de la Chine et de l'Inde, voire d'autres économies émergentes, une question majeure se pose aussi bien en termes de rétrospective que de prospective de l'histoire du développement. La nouvelle trajectoire des deux géants chinois et indien épousera-t-elle le paradigme d'une industrialisation déjà tracée par l'Occident et le Japon depuis le XIXe siècle, reproduite par les nouveaux pays industrialisés d'Asie orientale à la fin du XXe siècle, ou bien forge-t-elle dès à présent les prémices de nouveaux concepts susceptibles de reconfigurer la mondialisation ?
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais « Revisiting Theories Development : Some Francophone Views on East Asia's Success »The industrial take-off of the East Asian countries, as from the years 1960-1970, shook the concept of « Third World ». This development phenomenon has extended and gained such a scale of global significance, that was hardly seen before in human history. The rise of East Asia has been studied and analysed primarily by international organisations like the World Bank or OECD, by Anglo-Saxon scholars, and also by a number of Japanese scholars, which was rarely been translated. The French-speaking contributions have remained marginalised in terms of international scientific production. Their interpretations of the so-called Asian miracles, questioning development theories, have been discrete and rather late. A small group of francophone authors have focused their attention on the concept of « development states », and have refuted explanatory models based only on the supposed virtues of the free market. This contribution hardly found a second breath in the context of the Asian financial crisis of 1997-1998. Whereas a great international debate opened on the possible crises derived from globalisation, it remained almost deaf, both to the potentials of catch-up strategies adopted by the East Asian development states until the 1990s, and to their capacities for defining post-Asian crisis modes of mobilising domestic resources and of sharing growth wealth from 2000 onward. If the obsolescence of the concept of the « Third World » seems to be confirmed with the early 21st century rise of China and India, it could also contribute to a possible paradigm shift in development history. One can question whether the recent growth trajectory of China and India will illustrate or not the concept of industrial catching-up traced by Japan since the late 19th century, and then reproduced by the newly industrialising East Asian economies during the post-1945 era. If not, the different contributions of emerging economies like China and India in terms of reshaping globalisation could lead to the making of new development concepts.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=LHS_165_0189