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Titre La notion d'intérêt de l'enfant en droit : vecteur de coopération ou d'interférence ?
Auteur Catherine Kratz, Michael King
Mir@bel Revue Droit et société
Numéro no 22, septembre 1992 Transformations de l'État et changements juridiques : l'exemple de l'Amérique Latine.
Rubrique / Thématique
Etudes
Page 607-638
Résumé Le développement majeur des sciences « psy », d'une part, et l'augmentation concomitante des désordres familiaux, en particulier du nombre de divorces, d'autre part, ont favorisé l'émergence, au travers de la notion d'intérêt de l'enfant, d'une relation entre droit et sciences « psy ». Selon une approche classique, cette relation se traduit par la réalisation d'une pratique interdisciplinaire et d'une coopération entre juges et intervenants « psy ». Or, l'analyse de cette même relation par application de la théorie autopoiétique exposée tout d'abord par Niklas Luhmann puis, plus récemment, par Gunther Teubner, démontre l'incompatibilité des deux systèmes du droit et des sciences « psy » : leurs objectifs, leurs fonctions sociales et leurs procédures de validation de la vérité diffèrent. Aussi n'est-il pas surprenant d'observer que la participation des intervenants « psy », lors des procédures d'attribution de la garde ou d'un droit de visite aux parents en instance de divorce ou divorcés, a pour corollaire la distorsion du savoir et de la pratique « psy », en conformité avec les procédures du système juridique. Dans le droit, les sciences « psy » sont reconstruites en communications juridiques et leur validité se trouve donc établie par application des procédures propres à ce système ; elles deviennent, ainsi, « psychologie-en-droit » et « psychiatrie-en-droit », c'est-à-dire des discours asservis. Loin d'élaborer de nouveaux modes de résolution des conflits dans le sens d'une meilleure protection de l'intérêt de l'enfant, cette association entre le juge et l'intervenant « psy » débouche sur le phénomène d'interférence : l'asservissement par le droit du savoir et de la pratique « psy ». Cependant, par ce processus le droit donne l'impression d'être plus à même de résoudre les conflits interpersonnels dans l'intérêt bien compris de l'enfant, alors qu'en réalité, il ne fait que réduire la complexité de ces situations selon son propre code légal/illégal.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais The Notion of Child's best Interests. A Vehicle for Cooperation or Interference We have in this article applied autopoietic theory as expounded originally by Niklas Luhmann and more recently by Gunther Teubner to the relationship between the cognitive Systems of law and child welfare as it unfolds in the French process of decision-making concerning the future of children whose parents are divorcing. Whereas most approaches to this subject, by both lawyers and social scientists tend to see the relationship between law and child welfare (« psy » sciences) as a progression towards increasing cooperation and interdisciplinary activities between professionals, autopoietic theory emphasises the incompatibilite of two Systems with différent objectives, different social fonctions and different ways of validating reality. The authors argue that increasing « psychologism » in those courts specialising decisions concerning child custody and parental visits has obliged child welfare or « psy » experts to adapt their knowledge and procedures to the demands of tne legal System. The inevitable result is the reconstruction of this knowledge as legal communication the validity of which is tested according to legal procedures. Thus child welfare sciences become « child-welfare-within- law », an enslaved discourse. Far from creating new forms of dispute resolution and child protection this process is likely to result in the progressive interference with and « enslavement » of « psy » knowledge by the law. At the same time the legal System is able to create the impression that it is able to resolve complex interpersonal conflicts and promote children's welfare, whereas all it can do is to reconstruct thèse complex problems as relatively simple issues of legality and illegality.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dreso_0769-3362_1992_num_22_1_1190