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Titre Jeux poétiques et matérialité : le cas du Caimán Barbudo à Cuba
Auteur Amina Damerdji
Mir@bel Revue Tracés
Numéro no 28, 2015/1 Matières à jouer
Rubrique / Thématique
Articles
Page 45-59
Résumé Cet article s'intéresse à la production d'un groupe de jeunes poètes facétieux réunis autour d'une revue, El Caimán Barbudo (Le Caïman barbu), fondée en 1966 à La Havane. Leur attitude et leurs textes révèlent un positionnement idéologique original : tout en proclamant un engagement révolutionnaire pur, enthousiaste et authentique, ils mettent en avant leur amour du jeu, de la légèreté et donc leur refus de la gravité, de la solennité et du sérieux. Face à la tonalité extrêmement sérieuse des discours d'un régime qui rappelle sans cesse la grandeur de la révolution et l'immensité des tâches à accomplir, ce ludisme peut sembler paradoxal. La notion de matérialisme, définie non pas dans un sens philosophique rigoureux mais comme une attention particulière (voire exclusive) accordée aux choses du monde physique et sensible, pourrait permettre de résoudre ce paradoxe. En effet, s'inscrivant dans la lignée des poètes qui les précèdent, les caïmans manient une forme de prosaïsme en accord avec le matérialisme athée du régime. Toutefois, la distance humoristique qu'ils y associent par leurs jeux poétiques ajoute une portée subversive à leurs écrits.
Résumé anglais The object of this article is the writings of a group of young facetious poets gathered around a journal funded in 1966 in Havana, El Caimán Barbudo (The Bearded Caiman). Their attitude and texts show an original ideological position: while claiming a pure, enthusiastic and genuine revolutionary commitment, they highlight their love for play, casualness and their rejection of gravity, solemnity and seriousness. In front of the extremely serious tone of the discourses of a regime which keeps on reminding the grandeur of the Revolution and the magnitude of the task to accomplish, this playfulness may seem paradoxical. The notion of materialism, defined as a particular – even exclusive – attention given to things of the physical world, might help solve this paradox. Indeed, while being in line with the poets who precede them, the caimans use a kind of mundanity in line with the atheistic materialism of the regime. Nevertheless, the humoristic distance they associate with this mundanity by their poetic games adds a subversive significance to their writings.
Article en ligne http://traces.revues.org/6166